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En 2012, cependant, il reste encore en Afrique un seul pays endémique, le Nigéria, et trois autres classés « pays à circulation rétablie »: l'Angola, le Tchad et la République Démocratique du Congo (RDC). Certains autres pays avaient eu des épidémies de poliomyélite en 2011 suite à l'importation du poliovirus principalement depuis le Nigeria. La plupart de ces pays appartiennent à la ceinture de l'importation du poliovirus sauvage, « wild poliovirus importation belt », s’étendant de l'Afrique de l'ouest, l'Afrique centrale jusqu’à la corne de l'Afrique . Le Congo-Brazzaville, voisine de la RDC, a eu une épidémie de poliomyélite en 2010-2011 où les jeunes adultes ont été les plus touchés .
De 2000 à 20055, la RDC n'avait rapporté aucun cas de poliovirus sauvage. L'importation de poliovirus sauvage en RDC a débuté en 2006 où 13 cas avaient été notifiés liés à une souche importée de l′Angola . Entre 2007 et 2009, 49 cas ont été rapportés. Les années 2010 et 2011 ont connu des flambées avec 1100 cas et 93 cas rapportés respectivement. La province de Kinshasa a été la plus touchée en 2011 .
Kidd S et collaborateurs avaient montré le lien entre la présence dans le ménage d'un adulte ayant voyagé en dehors de la province et le risque de paralysie flasque aigue (PFA) à poliovirus sauvage (PVS) . La situation de la ville de Kinshasa, voisine de l′Angola et du Congo-Brazzaville (géographiquement et économiquement) et point de convergence des provinces du pays dont certaines ont été frappées d’épidémie en 2010 (Bandundu et Kasaï occidental), peut avoir contribué à l’éclosion de l’épidémie de 2011 [4, 6–7].
Les données relatives à l′investigation et la riposte à l′épidémie de poliomyélite qui a sévi à Kinshasa de décembre 2010 à juin 2011 et les données de surveillance sur une année (décembre 2010 à novembre 2011 de manière à couvrir toutes les activités de riposte organisées) ont été analysée rétrospectivement.
Dans le cadre de la surveillance de routine, les cas de PFA sont notifiés par les relais communautaires dans le cadre de la surveillance à base communautaire ou par les points focaux de surveillance au sein des structures sanitaires ainsi que par les tradi-praticiens et les églises appelée « maison de guérison ». La recherche active est dévolue aux cadres des zones de santé, des districts sanitaires et de la Division Provinciale de la Santé (4e bureau chargé de la lutte contre la maladie et coordination provinciale du PEV). Ils assurent également le monitoring de la surveillance de routine. Les partenaires (OMS et UNICEF) viennent en appui à l'ensemble du processus et prennent part également à la surveillance active des PFA pour détecter des cas omis lors de la surveillance de routine.
La PFA est une maladie à notification immédiate. Tous les cas détectés font l'objet d'une investigation par les équipes des zones de santé, et sont par la suite validés par l’équipe de la Division Provinciale de la Santé et l'OMS. L'investigation est faite au moyen d'une d′une fiche d′investigation permettant de recueillir les informations relatives à l′identification du sujet, les données sociodémographiques, les manifestations cliniques, l′historique de la maladie (la date de début de la paralysie, la présence de la fièvre, la progression de la paralysie dans les 4 jours, l'asymétrie de la paralysie), le statut vaccinal et le moment de prélèvement d’échantillons, le suivi après 60 jours pour les cas inadéquats (cas prélevés après 14 jours suivant le début de la paralysie, cas avec intervalle de prélèvement des deux échantillons > 48h, quantité insuffisantes, échantillon arrivé en mauvaise condition au laboratoire).
Pour tous les cas de PFA notifiés, un prélèvement de 2 échantillons à un intervalle de 24 à 48 heures est réalisé et envoyé au laboratoire national de recherche biologique (INRB) dans une boîte isotherme contenant des accumulateurs de froid pour analyse, l'isolement du virus et le séquençage. Idéalement, les échantillons doivent être prélevés dans les 14 jours suivant le début de la paralysie.
Les données recueillies sur les formulaires d'investigation sont encodés dans une base des données sur Excel. Les analyses ont porté sur les cas de PFA et les cas de poliovirus sauvage (PVS) confirmé qui ont été notifiés depuis décembre 2010 jusqu'au mois de juin 2011. Le profil sociodémographique, vaccinal et clinique des cas de PFA a été décrit et le lien avec le PVS recherché à l'aide du test du chi carré au seuil de signification de 5%. Lorsque les conditions d'application du test de chi carré n’étaient pas satisfaites, le test exact de Fisher était utilisé.
La performance du système de surveillance des PFA a été évaluée à l'aide d'une série d'indicateurs standards retenu par l'OMS comme indicateur de performance de la surveillance des PFA, notamment:le taux annualisé de PFA non poliomyélitique dans la population des enfants de moins de 15 ans (normes OMS/AFRO : 2 cas pour 100 000 habitant);le pourcentage des selles adéquates c′est-à-dire prélevés dans les 14 jours suivant le début de la paralysie (norme = 80%), proportion de cas avec 2 échantillons prélevés dans un intervalle de 24 à 48 heures et pourcentage d’échantillons arrivant au laboratoire dans de bonnes conditions (bonne température, pas de suintement, fiches correctement remplies);la proportion de 2 échantillons de selles prélevés dans les 14 jours suivant le début de la paralysie;la proportion de cas de PFA investigués dans les 48h suivant la notification;
le pourcentage des selles adéquates c′est-à-dire prélevés dans les 14 jours suivant le début de la paralysie (norme = 80%), proportion de cas avec 2 échantillons prélevés dans un intervalle de 24 à 48 heures et pourcentage d’échantillons arrivant au laboratoire dans de bonnes conditions (bonne température, pas de suintement, fiches correctement remplies);
Afin de contrôler cette épidémie, il avait été organisé une série des campagnes de vaccination de toute la population en 4 passages à 1 mois d′intervalle et 4 passages chez les moins de 5 ans dans toutes les zones de santé. Les couvertures réalisées à chaque passage ont été calculées sur base des données recueillies sur les fiches de pointage par les vaccinateurs et centralisées par les zones de santé et rapporté sur la population totale estimée en fonction des projections faites partant du dernier recensement des populations en RDC.
Pour contribuer à l'amélioration de la qualité des campagnes mises en œuvre, une évaluation indépendante (monitorage indépendant) est réalisée pour chaque passage par des personnes extérieures au système de santé. Les données ayant fait l'objet des analyses sont:la proportion d'aires de vaccination ayant fait l'objet du monitorage,le nombre de personnes cible vus par les moniteurs,la proportion de personnes cible non vaccinées parmi les personnes cible vus dans les ménages,la proportion de personnes cible non vaccinés parmi les personnes cible vus hors ménages.
De décembre 2010 à décembre 2011, 298 cas de PFA ont été notifiés et 34 cas de PVS de décembre 2010 à mai 2011. Le Tableau 1 présente la répartition des cas de PFA selon les groupes d’âge, le sexe, le district sanitaire et les principales manifestations cliniques observées. Il y avait près de la moitié des cas de PFA (47%) et près de 60% de PVS parmi les sujets âgés de 15 ans et plus. Outres les sujets de moins de 5 ans (20,6%), les tranches d’âges les plus affectées par le PVS étaient comprises entre 10 et 29 ans (70,7%). Le sexe ratio était de 1,7 en défaveur du sexe masculin. Il y avait significativement plus de cas de PVS dans le district sanitaire de Ndjili et de Lukunga.
Les principales manifestations cliniques relevées étaient une paralysie flasque aigue accompagné ou précédé de fièvre. La paralysie était asymétrique chez 3 patients sur 10. Les membres inférieurs étaient le plus fréquemment touchés (88,8% pour le membre inférieur droit et 88,1% pour le pour le membre inférieur gauche) que les membres supérieurs (15,6% pour le membre supérieur droit et 14,9% et pour le membre supérieur gauche). Il y avait significativement plus d'atteinte de plus d'un membre à la fois chez les cas de PFA du au PVS.
Les cas de PFA investigués étaient classifiés en cas de PVS et cas de PFA non poliomyélitiques, eux même catégorisés en cas poliomyélite compatibles, et cas « rejetés », c'est-à-dire définitivement classifiés comme cas de PFA non poliomyélitiques. La Figure 1 présente un diagramme de flux décrivant le processus d'investigation des cas de PFA notifiés de décembre 2010 à décembre 2011 et leur classification.
Les cas de PFA notifiés pendant cette période (298 cas) ont fait l'objet de prélèvement d’échantillons de selles qui a permis d'identifier 33 cas de PVS. Les 265 autres cas de PFA catégorisés « cas de PFA non poliomyélitique » ont été ensuite discriminés en « cas avec échantillons adéquats » (218 cas) ou « cas avec échantillons inadéquats » (53 cas). Les cas avec échantillons adéquats étaient directement « rejetés ». Après un suivi de 60 à 90 jours par l’équipe cadre de la zone de santé, les cas avec échantillons inadéquats étaient classés en 4 catégories : les cas sans paralysie résiduelle (10 cas) qui étaient « rejetés », les cas avec paralysie résiduelle (28 cas), les décédés (10 cas) et les perdus de vue (5 cas). Les trois dernières catégories (paralysies résiduelles, décédés et perdus de vue) ont fait l'objet d'analyses approfondies par le Comité National d'Experts de la Poliomyélite (CNEP). Les résultats de cette analyse permettaient de classifier certains cas comme « rejetés » (27 cas) et d'autres comme « cas poliomyélite compatibles » (16 cas). Les « cas poliomyélite compatibles » sont des cas qui auraient pu éventuellement être des cas de PVS si les échantillons de selles avaient été adéquats.
En 2010, un cas de poliovirus avait été isolé dans 1 zone de santé et 33 cas en 2011 dans 14 zones de santé. La répartition des cas de PFA et de PVS notifiés mensuellement est présentée dans la Figure 2 ainsi que les différentes campagnes de riposte et les couvertures vaccinales réalisées par rapport à la population cible.
Le 1er cas de PVS de type 1 est apparu au mois de décembre 2010 et le nombre de cas a augmenté progressivement pour atteindre le pic de 14 cas au mois de mars 2011. A partir de ce mois 4 campagnes de vaccination contre la poliomyélite ont été organisée mensuellement dans toute la ville ciblant toute la population avec des couvertures vaccinales variant de 113 à 117%. Ces campagnes ont été relayées par 4 autres qui avaient pour cible les enfants de 0 à 59 mois. Les couvertures vaccinales obtenues variaient de 105 à 118%. Après le 3e passage de la campagne de vaccination ciblant toute la communauté, on a plus enregistré de nouveau cas de PVS. Le vaccin monovalent a été utilisé pour toutes les campagnes, sauf pour celle du mois de mais pour laquelle le vaccin bivalent 1 et 3 a été utilisé.
Pendant et après les campagnes de vaccination se déroulaient, un monitorage indépendant était organisé par l'OMS dans les aires de vaccination pour déterminer l'effectivité de la vaccination de toutes les personnes cibles et les éventuelles cas de non vaccination ainsi que leurs causes. La proportion des personnes non vaccinées dans les ménages a varié de 4 à 13% et en hors ménages de 7à 20% (Tableau 2).
La performance des indicateurs de surveillance des cas de PFA étaient globalement bon pour la province de Kinshasa (Tableau 3). Néanmoins, on peut noter que seul 1 quart des zones de santé satisfaisaient au critère de performance de détection des cas de PFA retenu par la RDC en fonction des performances locales atteintes les années précédentes (≥ 5 cas pour 100 000 enfants 80 des cas investigués dans les 48h suivant la notification). 6 zones de santé sur 10 avait >80% des cas ayant fait l'objet de 2 prélèvement d’échantillons dans les 14 jours suivant le début de la paralysie. Et un peu plus de la moitié des zones de santé avaient une proportion de selles adéquates >80%.
Après 6 années d'interruption de la circulation de PVS (2000 à 2005), la RDC est, depuis 2006 un pays à circulation rétablie qui connait des flambées épidémiques dans certaines de ses provinces. La dernière épidémie ayant sévi dans la capitale congolaise a connu 34 cas de PFA à PVS sur une période de 6 mois allant de décembre 2010 à mai 2011 avec un pic au mois de mars. Elle a concerné, en majorité, les sujets de 15 ans et plus avec un sexe ratio en défaveur du sexe masculin et n'a pas montré de lien significatif avec le statut vaccinal. Cette observation relative au statut vaccinal a néanmoins la faiblesse d’être basée principalement sur les déclarations, en particulier pour les sujets adultes (8). Une enquête sérologique menée en Italie a montré que la proportion des sujets séropositifs au PVS de type décroit avec l’âge. Une étude basée sur une évaluation sérologique du niveau d'immunité des sujets aurait été plus fiable [9, 10].
La proportion de sujets susceptibles relevés (41,6% de sujets avec moins de 4 doses de VPO), sans compter les sujets à statut vaccinal inconnu (23,1%), montrent que le terrain était favorable à l’éclosion d'une épidémie. Kidds et collaborateurs avaient effectivement montré, en Angola, que le risque de PFA à PVS était significativement moindre pour les sujets avec au moins 4 doses de vaccin antipolio .Les résultats obtenus par l'enquête MICS 2010 en RDC, qui indiquait une proportion d'enfants de 12 à 23 mois ayant reçu la 4e dose de vaccin antipolio (Polio3) du calendrier vaccinal de routine à seulement 68,3%, étayent cette observation d'un nombre important de sujet susceptibles dans la ville de Kinshasa .
Par ailleurs, la situation de proximité géographique et économique de Kinshasa par rapport au Congo Brazza et à l'Angola, ainsi que son rôle comme point de convergence administratif, politique et économique des provinces, dont certaines ont été frappées d’épidémie en 2010 (Bandundu et Kasaï occidental), peut avoir contribué à l’éclosion de l’épidémie de 2011 [4, 6, 7].
Le rôle des adultes non vaccinés comme agents de transmission a été évoqué notamment avec les épidémies du Congo Brazza et de la Namibie où le nombre de sujets adultes atteints était prédominant [8, 12]. En Angola, une étude cas-témoins a même relevé le rôle de la présence, dans les ménages des enfants atteints, d'adultes ayant fait un déplacement en dehors de la province . Ces observations ont conduit certains chercheurs à suggérer des campagnes de vaccination périodiques ciblant les adultes . A Kinshasa, outre les sujets de moins de 5 ans qui représentaient 20,6%, 70,7% des sujets touchés par la PFA à PVS avaient un âge compris entre 10 et 29 ans. Dans de contrainte de ressources limitées, des activités vaccinales périodiques ciblant les sujets de moins de 30 ans, à défaut de la population générale, pourraient contribuer à interrompre rapidement la chaîne de transmission.
Les zones de santé du district sanitaire de Ndjili et de Lukunga ont été les plus touchés. Dans ces deux districts sanitaires les zones concernées étaient toutes contigües, Kimbanseke, Kingasani, Biyela, Kikimi, Ndjili, Masina 1 pour le district sanitaire de Ndjili et Kintambo, Binza Météo, Selembao pour le district sanitaire de Lukunga, indiquant en réalité deux foyers caractérisés par une forte promiscuité et un environnement insalubre. Ceci rejoint les observations faites au Congo Brazza par Le Menach et collaborateurs ainsi que celles relevées pour l’épidémie de la Namibie en 2006 [4, 12, 13].
La riposte n'est intervenue que 3 mois après le déclenchement de l’épidémie, mais elle a été vigoureuse avec 4 passages ciblant toute la population qui a permis de juguler l’épidémie dès le 3e passage. Les campagnes se sont poursuivies chez les sujets de moins de 5 ans afin de réaliser au moins 4 passages après le dernier cas notifié selon les recommandations de l'OMS . Les deux dernières organisées en novembre et décembre visaient à optimiser une zone tampon à forte couverture vaccinale entre le Bas Congo où sévissait encore une épidémie et la ville de Kinshasa.
Le retard dans la mise en ‘uvre de la riposte était dû principalement au manque de financement et l'attente de la mobilisation des ressources au niveau régional et international. En effet, le manque de financement constitue un grand risque pour le processus de l’éradication de la poliomyélite dans plusieurs pays .
Cependant, il faut prendre avec réserve les fortes couvertures > 100% affichées par les zones de santé. Elles peuvent traduire, certes, une difficulté de maîtrise du dénominateur, mais elles cachent probablement des sujets non atteints dont la proportion relevée au cours de la campagne par les moniteurs indépendant pouvait atteindre les 20%. Sur base des données issues de contrôles monitorages indépendant, les CDC estiment que le bilan de la vaccination en RDC est moyen en raison du fait, notamment que 5 des 11 provinces n'avaient pas réussi à ramener la proportion d'enfants non atteints à moins de 10% . Les raisons pour les quelles ces enfants sont manqués étaient opérationnelles et sociales. Et parmi les raisons sociales, le taux de refus en début d'année 2011 était à 16%, avec des pics allant jusqu’à près 20% dans le Bas Congo et à près de 30% à Kinshasa, constituant le taux de refus le plus élevé au monde .
La discordance entre les taux de couverture vaccinale annoncés lors de la riposte (>100%) et le pourcentage relativement élevé d′enfant non vaccinés réellement observé par les moniteurs (Tableau 2) soulève le point crucial de la maîtrise de la population cible, à la fois sur le plan quantitatif (validité des recensements de population) et sur le plan de la répartition dans l′espace de la population et des mouvements de cette population. Le recensement scientifique de la population en préparation (la dernière remonte à 1984) et la mise en place d'un service fiable de gestion des flux de déplacements des populations dans les administrations communales et territoriales pourraient offrir une base fiable de planification et de suivi et évaluation des interventions en RDC .
Malgré un bilan de surveillance qualifié de globalement de médiocre pour le pays avec une proportion importante d’échantillons de selles inadéquats , Kinshasa présentait une surveillance performante et des investigations promptes. Les faiblesses notées en RDC étaient attribuées essentiellement à la partie Est du pays dont on connait les contraintes liées à la situation sécuritaire et à la faiblesse induite au niveau du système de santé .
A Kinshasa, les faiblesses relevées concernaient surtout les indicateurs tels que la proportion des selles adéquates et la proportion des selles prélevées dans les 14 jours. Ceci traduit essentiellement un retard dans la notification des cas. Il convient de relever que, le contexte épidémique avait permis le renforcement de la surveillance communautaire dans certaines zones de santé. Cela pourrait expliquer l'accroissement de la notification des cas de PFA dont le début de paralysie remontait à plus de 14 jours et tirer la performance des indicateurs vers le bas.
Cet épisode de flambée épidémique interpelle tous les acteurs de la lutte contre la poliomyélite en RDC à redoubler d'effort dans la surveillance des PFA pour identifier à temps tout cas de PVS et riposter promptement de manière à progresser rapidement vers l’éradication. Les performances actuelles de la surveillance des PFA dans la ville de Kinshasa sont encourageantes. Mais il reste des efforts à fournir, notamment dans l'amélioration de la surveillance à base communautaire, afin d'amener l'ensemble des zones de santé au seuil de performance souhaité afin d'optimiser leurs capacités de détection des cas et leur réactivité pour une investigation prompte et de qualité. La prédominance des adultes parmi les cas notifiés traduit une susceptibilité importante dans cette tranche de la population généralement non concernée par les campagnes de vaccination. Des activités de vaccination supplémentaires ciblant cette catégorie de la population pourraient contribuer à interrompre plus rapidement la chaîne de transmission. En contexte de limitation des ressources, des campagnes ciblant la tranche d’âge de 0 à 30 ans pourraient couvrir plus de 90% des sujets les plus susceptibles.
Le carcinome colloïde du sein, appelé aussi mucineux ou gélatineux, est une forme histologique rare de cancer qui représente 1 à 6% de l'ensemble des cancers du sein . Il est caractérisé par la production de mucus extracellulaire . Histologiquement. On distingue 2 types de carcinome colloïde: le carcinome colloïde pur dans lequel on ne trouve pas de composante de carcinome canalaire infiltrant et le carcinome colloïde mixte qui associe des foyers de carcinome canalaire infiltrant à côté de la composante colloïde , cette distinction est capitale du fait de sa valeur pronostique. Le profil évolutif du carcinome colloïde du sein est très variable selon qu'il s'agit d'une forme pure ou mixte . A travers une observation rare de carcinome colloïde survenant chez un homme, notre objectif est de préciser les particularités anatomiques, immunohistochimiques et évolutives du carcinome colloïde du sein.
Patient de 60 ans, sans ATCDs pathologiques notables, admis pour prise en charge d'un nodule du sein droit évoluant depuis 2 ans et chez qui l'examen clinique objective un nodule de 2/2 cm, rétroareolaire droit classé cliniquement T4bN1MO. La mammographie trouve une opacité rétroaréolaire droite de forme arrondie bien limitée de contours irréguliers, flous, avec fines spicules, hétérogènes sans foyer de microcalcifications. Cette opacité est classée ACR 4 (Figure 1, Figure 2). Le complément échographique objective une lésion rétro-aréolaire droite mal limitée de contours spiculés, hypoéchogène hétérogène mesurant 20mm de grand axe associé à des adénopathies axillaires droites suspectes également.
La microbiopsie du nodule est en faveur d'un carcinome colloïde muqueux associé à une petite composante canalaire classique de grade I de SBR (2MSBR, pas vu d'emboles vasculaires). Un bilan d'extension fait d'une radiographie thoracique et d'une échographie hépatique, est sans particularité. Un haschteid modifié a été réalisé, dont le résultat histologique est en faveur d'un carcinome mucineux avec une composante de carcinome canalaire infiltrant, de grade I de SBR, 2MSBR, mesurant 3,4 cm à noter l'absence de carcinome in situ (Figure 3). Le curage ganglionnaire a ramené 37 ganglions dont 28 sont métastatiques avec emboles vasculaires et rupture capsulaire. La tumeur est classée p T2N3Mo. L'étude des récepteurs ‘strogènique montre un marquage de 100%, l'étude des récepteurs progestéroniques montre un marquage de 90% alors que l'HER2 est négatif et le Ki 67 est à 30%. Une chimiothérapie a été démarrée et on prévoit une radiothérapie et une hormonothérapie.
Le cancer du sein chez l'homme est une maladie rare. Sa prévalence est d'un pour 100000 individus et il représente moins de 1% des cancers du sein et moins de 1% de l'ensemble des néoplasies masculines . L'incidence de cette pathologie semble relativement stable en Europe , mais Giordano et al montrent une augmentation de 26% entre 1973 et 1998 aux Etats Unis . L'âge moyen lors du diagnostic varie entre 63 et 71 ans ce qui correspond à cinq ans de plus par rapport à l'âge de découverte du cancer du sein chez la femme avec des extrêmes allant de 5 à 93 ans [3, 4]. Sa distribution est unimodale. Dans notre série l'âge dépasse 50 ans avec des extrêmes de 56 et 79 ans.
La plus grande série publiée de sujets masculins compile dix cas sur une période de 29 ans auxquels on peut ajouter les cas de Jundt et Papotti . Le carcinome colloïde est une variante histologique particulière de carcinome mammaire, décrite la première fois en 1826 par Geschickter . La forme pure représente 0,8 à 1,5% de l'ensemble des carcinomes invasifs du sein et 33 à 95% de l'ensemble des carcinomes colloïdes du sein . Ce faible taux serait dû à une méconnaissance du type mixte et à son inclusion probable dans le type canalaire infiltrant . La forme pure du carcinome colloïde survient à un âge moyen allant de 49 à 67 ans . Elle est plus tardive que la forme mixte .
Le mode de révélation le plus fréquent est un nodule mammaire palpable (plus de 80% des cas), comme c'est le cas de notre patient [2, 4, 8], habituellement dans le quadrant supéro-externe [6, 8–10]. La bilatéralité est rarement décrite dans la littérature [8, 11] alors que certains cas de carcinome multifocal ont été rapportés dans la littérature . La taille moyenne tumorale rapportée est de 1,5 cm avec des extrêmes allant de 0,3 à 19 cm [1, 7], la taille tumorale dans notre cas est de 2 cm. La majorité des tumeurs (96%) étaient de stade T1 ou T2 selon la classification TNM . Les adénopathies palpables sont plus fréquentes dans le carcinome colloïde mixte PAR% dans la forme pure . Notre patient a consulté pour une tumeur classée T4b N1.
L'aspect mammographique le plus évocateur est celui d'une opacité dense, circonscrite ou polylobé, à contours finement irréguliers ou réguliers [1, 12]. L'image type est dite en « balle de coton » en rapport avec le refoulement tumoral du tissu avoisinant sans véritable envahissement ; cependant le caractère rassurant de l'imagerie contrastant avec l'âge avancé des patientes devrait faire craindre la malignité. Le carcinome colloïde mixte apparait sous forme de masse de contours irréguliers avec des limites mal définies, voire spéculées avec le tissu glandulaire [8, 13, 14]. Le nombre de spicules est inversement proportionnel à la quantité du mucus [8, 14, 15].
Les microcalcifications sont rares et sont généralement liées à la présence d'un carcinome in situ associé et apparaissent uniquement au niveau de la composante canalaire [1, 6]. La mammographie peut être normale dans 5 à 15% des cas . Dans notre cas, la mammographie a mis en évidence des microcalcifications éparses et à l'étude histologique on note la présence d'une composante de carcinome canalaire.
L'échographie et la mammographie peuvent ainsi être d'une aide précieuse dans le diagnostic différentiel entre carcinome colloïde pur et mixte . L'aspect échographique diffère selon le type de carcinome colloïde; le pur se traduit par une lésion lobulée, iso- ou hypoéchogène homogène de contours bien circonscrits, difficiles à différencier du tissu graisseux environnant, bien limitée avec renforcement postérieur, ce dernier étant expliqué par la quantité importante d'eau au sein de la tumeur et la transmission des ultrasons à travers le mucus. Le type mixte prend l'aspect d'une masse hypoéchgène hétérogène avec atténuation acoustique postérieure, ce qui reflète la nature infiltrative de la tumeur .
Il faut penser également au carcinome colloïde du sein à l'échographie devant une image complexe (liquide et solide) avec renforcement postérieure chez une patiente âgée [6, 17]. L'imagerie par résonance magnétique est de grand intérêt pour distinguer un carcinome colloïde pur d'un fibroadénome . Macroscopiquement, on retrouve une masse tumorale, bien limitée, crépitant à la palpation, à surface gélatineuse, filant à la coupe. La consistance est molle, de couleur grisâtre ou gris jaune . Histologiquement, on retrouve des ilots de cellules épithéliales régulières avec des lacs extensifs de mucus extracellulaires, séparés par des cloisons fibreuses grêles , les cellules tumorales sont petites avec un noyau sombre au sein duquel est visible un petit nucléole . La distinction entre les types pur et mixte est capitale du fait de son impact pronostique:Le carcinome colloïde pur est caractérisé par la présence d'un tissu tumoral complètement entouré de mucus extracellulaire abondant, sans composante canalaire infiltrante. Ce tissu ne dépasse pas 10% du volume tumoral global . La transition entre le mucus et le tissu conjonctif avoisinant est brusque; le mucus abondant joue le rôle de barrière mécanique, ce qui atténue l'invasion cellulaire et confère à ce type un caractère moins agressif par rapport au type mixtela transition entre mucus extracellulaire et tissu carcinomateux adjacent est progressive, les deux territoires se chevauchant par endroits.Les carcinomes colloïdes purs du sein sont dans la majorité des cas des carcinomes de bas grade (selon le score de SBR); l'association du carcinome colloïde pur à un carcinome intracanalaire a été rapportée dans 17% des cas .
Le carcinome colloïde pur est caractérisé par la présence d'un tissu tumoral complètement entouré de mucus extracellulaire abondant, sans composante canalaire infiltrante. Ce tissu ne dépasse pas 10% du volume tumoral global . La transition entre le mucus et le tissu conjonctif avoisinant est brusque; le mucus abondant joue le rôle de barrière mécanique, ce qui atténue l'invasion cellulaire et confère à ce type un caractère moins agressif par rapport au type mixte
Il est admis que les carcinomes colloïdes exposent moins à l'envahissement ganglionnaire que les autres types histologiques . La fréquence des métastases ganglionnaires augmente en fonction de la taille tumorale . Celle du carcinome mucineux pur est de l'ordre de 2 à 14% et de 45 à 64% dans les formes mixtes [8, 15]. Certains auteurs considèrent que la présence de métastases ganglionnaire est fortement liée à la présence d'une composante carcinomateuse non mucineuse associée qui pourrait être ignorée par un mauvais échantillonnage lors de l'examen macroscopique .
Certains auteurs suggèrent dans leur étude que le curage ganglionnaire axillaire ne devrait plus être systématique dans le carcinome mucineux pur du sein . Mais d'autres ont démontré qu'un âge jeune était parmi les facteurs souvent associés à la présence d'adénopathie axillaires . De ce fait, la technique du ganglion sentinelle serait néanmoins utile afin de détecter les patientes présentant des métastases ganglionnaires et de mieux adapter le traitement adjuvant . Le curage ganglionnaire de notre patient a ramené 28 ganglions métastatiques sur 37 ganglions avec emboles vasculaires et rupture capsulaires.
La prise en charge thérapeutique repose sur la chirurgie avec ou sans, chimiothérapie et hormonothérapie adjuvante. Un traitement chirurgical conservateur (tumorectomie) est préconisé pour les T1 et T2 suivie de radiothérapie. L'irradiation partielle et accélérée du sein est actuellement la plus recommandée après une chirurgie conservatrice. Une radiothérapie exclusive peut être tentée dans les formes inopérables pour des raisons locales ou générales . Poortmans a rapporté une réduction du risque de récidive locorégionale de 70% des patients traités par irradiation indépendamment de l'âge, des caractéristiques de la tumeur et de l'administration systémique de traitement. Ces constatations pourraient permettre de nuancer l'attitude thérapeutique chirurgicale systématique adoptée en général vis-à-vis des carcinomes colloïdes du sein. En clinique, il existe un effet complémentaire de la radiothérapie et du tamoxifène en situation adjuvante dans les cancers du sein opérés .
La chimiothérapie à base de doxorubicine combinée au paclitaxel semble avoir une bonne réponse dans les formes localement avancées de carcinome colloïde du sein [1, 9]. L'hormonothérapie est indiquée à chaque fois que les récepteurs hormonaux sont positifs [6, 8, 16].
La survie du carcinome colloïde est nettement supérieure aux autres types de cancers mammaires, notamment dans sa forme pure [6, 8, 15]. La survie à dix ans passe de 91% dans la forme pure à 46% dans la forme mixte La survenue de métastases dans les carcinomes colloïdes purs est tardive . L'envahissement ganglionnaire est le principal marqueur pronostique du carcinome colloïde du sein [6, 8]. Le risque relatif de rechute et de décès en cas d'envahissement ganglionnaire est de 2,69 [6, 8]. Le nombre élevé de ganglions envahis, ainsi que la rupture capsulaire sont des facteurs pronostiques péjoratifs. La quantité du mucus, la cellularité, la taille tumorale et la composante intracanailre sont des facteurs à impact pronostique incertain [8, 14, 15]. Il est certain que le pronostic des carcinomes colloïdes du sein est favorable, en particulier dans sa forme pure. Cependant, des rechutes tardives aussi bien locorégionales qu'à distance peuvent survenir, d'où l'intérêt d'une surveillance à long terme .
Une masse d'allure bénigne en imagerie n'est pas toujours rassurante, surtout si elle survient chez une femme de plus de 60 ans. Puisqu'elle peut révéler un carcinome colloïde. La distinction entre la variante, pure et mixte qui est importante car l'attitude thérapeutique et l'incidence pronostique en dépendent. Le pronostic de la forme mixte qui rejoint celui des carcinomes canalaires infiltrants est moins bon que celui de la forme pure. Au total, il faut toujours évoquer un carcinome colloïde du sein à la mammographie devant une opacité circonscrite ou microlobulée chez une femme âgée; les limites bien circonscrites orientent à priori vers le type pur, alors que les marges mal définies orientent plus vers le type mixte[6, 17].
La bléomycine, initialement extraite du champignon Streptomycesverticillus C'est un antibiotique antitumoral . Il a, à faible concentration, un effet cytostatique en inhibant les mitoses et, à forte concentration, il bloque l'incorporation de thymidine dans l'ADN. De la sorte, le médicament arrête la phase S du cycle cellulaire et il provoque le clivage de l'ADN [2, 3]. Elle est indiquée dans le traitement de cancers variés : carcinomes cutanés épidermoïdes, lymphomes malins, tumeurs germinales. Plus accessoirement, elle est utilisée comme traitement topique des cicatrices chéloïdes et des verrues plantaires . Elle peut être responsable d'effets secondaires variables en particulier la toxicité cutanée et pulmonaire expliquée par l'absence dans ces deux tissus d'hydrolase, capable d'inactiver la bléomycine, entraînant ainsi une importante concentration du médicament dans ces deux organes [5, 6]. Certains effets secondaires cutanés sont plus exceptionnels, comme l'illustre ces observations.
Observation 1: J.B âgée de 35 ans sans ATCDS pathologiques notables suivie pour choriocarcinome pour lequel elle a été mise sous polychimiothérapie a base de Bléomycine, Etoposide et cysplastine. Elle a présenté après trois cures une éruption érythémateuse non prurigineuse du dos. L'examen clinique objectivait des macules pigmentées linéaires flagellée au niveau de l'abdomen et du dos surmontées de fines squames Figure 1. Le diagnostic d'érythème flagellé secondaire à la Bléomycine a été retenu. La patiente est décédée 2 jours après, et ceci, suite à l'évolution de sa maladie.
Observation 2: M.C âgée de 38 ans sans ATCDS pathologiques suivie pour LMNH pour lequel elle a été mise sous polychimiothérapie à base d'Adriamycine, Bléomycine, Vinblastine, Dacarbazine. Elle a présenté après six mois de traitement un érythème flagellé du dos et de l'abdomen, avec une mélanonychie diffuse, et une pigmentation gingivale.
Après son administration, la bléomycine est rapidement inactivée dans la plupart des tissus par une hydrolase. Les poumons et la peau sont dépourvus de cette enzyme, ce qui explique qu'ils soient le site électif d'expression de la toxicité de cette substance . Les effets secondaires cutanés sont variés. Certains, comme l'alopécie, sont communs à beaucoup de chimiothérapie. D'autres sont bien plus caractéristiques de la bléomycine. C'est le cas de l'hyperpigmentation, prédominant au niveau des zones de pression et des ongles, des plaques sclérodermiformes, des nécroses digitales compliquant un syndrome de Raynaud, de l'hidradénite neutrophilique eccrine ou encore de l'érythème flagellé . Ce dernier est spécifique de la bléomycine, bien qu'il puisse également compliquer un traitement par péplomycine (un dérivé de la bléomycine) . L'érythème flagellé et la pigmentation linéaire sont décrits pour la première fois par Moulin en 1970 . Ces réactions sont spécifiques du traitement par la bléomycine [10, 11] et indiquent une susceptibilité individuelle, elle surviennent indépendamment de la dose, de la voie d'administration. Le délai moyen entre l'administration du traitement et le début de l'éruption varie de quelques heures à six mois . Le diagnostic reste clinique. Les lésions prédominent au niveau du tronc et des parties proximales des membres [11, 12]. Nos patientes avaient présenté un érythème linéaire flagellé au niveau du dos et l'abdomen juste après la 3ème cure pour la première patiente et le 6ème mois de traitement pour la deuxième. ce qui est conforme aux données de la littérature. L'aspect histologique typique inclue une hyperkératose, une parakératose, un infiltrat dermique lymphohistocytaire, des mélanophages dans les capillaires dermiques et des vésiculopustules, parfois il s'agit d'une vasculite lymphocytaire . L'étiopathogénie est incertaine, toutes les hypothèses se sont basées sur les aspects histologiques ou ultrastructuraux trouvés. Certains auteurs ont évoqué un mécanisme traumatique par le grattage suite à un prurit intense, postinflammatoire ou une vasodilatation responsable d'une concentration accrue de la bléomycine au niveau de la peau qui atteint directement les kératinocytes. D'autres auteurs, suggèrent que l'hyperpigmentation est de nature post-inflammatoire suite à une incontinence pigmentaire en rapport avec les lésions épidermiques (une accentuation localisée de la mélanogénèse a été objectivée par l'étude ultrastructurale) [2, 14]. Ces auteurs supposent que la bléomycine ralenti le cycle kératinocytaire avec un blocage relatif des mélanocytes à la phase de synthèse de pigment . Enfin Lindae et Nikoloff suggèrent que l'absence de l'hydrolase dans la peau entraîne une accumulation de la bléomycine qui, par un effet direct sur les kératinocytes, provoque l'infiltrat inflammatoire dermique. L'évolution est marquée par une résolution spontanée des lésions à l'arrêt du traitement parfois au prix d'une pigmentation linéaire cicatricielle, comme chez nos patientes, ou une sclérose résiduelle .
L'érythème flagellé est considéré comme complication spécifique de la bléomycine qui peut survenir indépendamment de la dose ou du mode d'administration, cela justifie une surveillance attentive des patients recevant une chimiothérapie à base de bléomycine.
Le cancer colorectal, par sa fréquence et sa gravité, représente un sérieux problème de santé publique dans le monde. Il occupe la 3ème place par son incidence, six cent quatre-vingt-quatorze mille décès par cancer colorectal sont enregistrés chaque année dans le monde . Au Maroc, ce type de cancer occupe la 3ème place chez l’homme et la 4ème place chez la femme selon le dernier registre des cancers de la région du grand Casablanca . Sa gravité est liée essentiellement au retard diagnostic. Sur le plan pronostic, la survie est liée au stade. Après traitement locorégional, un malade sur deux développe des métastases. Quatre-vingt à quatre-vingt-dix pour cent de ces patients décèdent de leurs métastases. L’objectif de l’étude est de déterminer dans notre contexte marocain, les facteurs de risque du cancer colorectal, notamment le lien de cause à effet avec le type d’alimentation. Le but ultime est de pouvoir élaborer des recommandations en matière de prévention des risques afin de mettre en œuvre une politique de prévention primaire.
Il s’agit d’une étude descriptive menée au centre Mohammed VI pour le traitement des cancers de Casablanca. Nous avons inclus tous les cas de cancer colorectal de manière consécutive nouvellement diagnostiqué et confirmé par un examen histologique durant une période de 12 mois allant du 1er janvier au 31 décembre 2015, et des témoins indemnes de toute maladie cancéreuse (patients parmi les admis au Centre des Consultations de Dermatologie et d’Ophtalmologie de CHU Ibn Rochd Casablanca). Après accord du comité d’éthique local et consentement éclairé signé par le patient et le témoin après avoir reçu l’information nécessaire à sa prise de décision. Les patients et les témoins ont été appariés selon l’âge et le sexe. Le recueil des données s’est fait de manière prospective à partir des dossiers de patients et au moyen d’un questionnaire standardisé englobant plusieurs informations : données sociodémographiques, antécédents personnels et familiaux de cancer, mode de vie, tabagisme, données cliniques et anatomopathologiques (localisation du cancer, histologie, classification TNM, stade et grade de différenciation…), hygiène de vie et habitudes alimentaires. Ce dernier volet qui regroupe la nature, la fréquence, la diversité et la quantité des aliments consommés est adapté au contexte marocain en se basant sur l’étude European Prospective Investigation into Cancer and Nutrition (Epic).
Dans l’étude, sont inclus: 1) tous les patients présentant un cancer du côlon ou rectum avéré, confirmé par l´histologie; 2) patients n´ayant pas des troubles cognitifs. Les critères d’exclusion étaient: 1) tumeur non confirmée par l´histologie; 2) patients ayant des troubles cognitifs. La saisie des données a été réalisée par Microsoft office Excel (2016) et la gestion et l’analyse statistique des données épidémiologiques ont été faites à l’aide du logiciel R. L’étude association en croisant les variables entre les différents groupes a été évaluée par le test de Chi2. Le seuil de significativité retenu est p < 0,05.
Antécédents familiaux de cancer colorectaux et d´autres types de cancer: en se basant sur les données du questionnaire, les antécédents familiaux de cancer colorectal ont été retrouvés chez 7% des patients. Les antécédents familiaux d’autres types de cancer ont été notés chez 16% des patients contre seulement 7% des témoins (Tableau 2). Concernant les antécédents familiaux de cancers rentrant dans le spectre du syndrome de Lynch, les cancers du sein, des poumons, du foie, de l’estomac, du pancréas et de l’ovaire étaient présents chez 42%,15%, 12%, 12%, 4% et 4%, respectivement.
Activité physique: dans notre étude, la pratique d’une activité sportive de moyenne intensité ou de forte intensité était plus faible chez les patients, avec 3% des cas vs 12% des témoins (P = 0,01) et 6% des cas vs 29% des témoins (P = 0,0001), respectivement. Paradoxalement, le métier où prédomine le travail physique de forte intensité est corrélé à un risque plus élevé de cancer colorectal, ce métier est retrouvé chez 41% des patients contre 25% des témoins (p = 0,01).
La consommation de boissons (café, thé et soda): la consommation moyenne de café était plus faible chez les patients que chez les témoins (1,15 vs 3,30). Cependant, pour les autres boissons (soda, alcool et thé) la consommation est plus élevée chez les malades par rapport aux témoins avec 1,28 vs 0,53, 1,69 vs 1,00 et 18,99 vs 16,18, respectivement. Il existe ainsi une association significative entre la consommation de ces boissons et la survenue du CCR (Tableau 3).
La consommation de viandes rouges: la consommation moyenne de viandes rouges était plus élevée chez les patients que chez les témoins (4,24 vs 3,26; p = 0,009, Tableau 3). La consommation de viandes rouges montre une corrélation positive avec la survenue du cancer colorectal (CCR).
La consommation de légumes: la consommation moyenne de légumes crus était de 0,18 chez les patients et 0,72 chez les témoins. Pour les légumes cuits, elle était de 4,83 chez les patients et de 6,27 chez les témoins. Il existe une association significative entre la consommation faible des légumes et la survenue de la maladie.
Le cancer colorectal touchait, chez notre population d’étude, le côlon dans 52% des cas et le rectum dans 48%. Le cancer colique a été retrouvé principalement sur le colon sigmoïde chez 33% de nos patients. D’après les résultats anatomo-pathologiques présentés, nous avons noté une prédominance de l’adénocarcinome lieberkühnien (82%) par rapport aux autres types de cancers (carcinomes mucineux et SAI), dont 60% sont de type moyennement différencié. Les emboles vasculaires étaient retrouvées dans 28% des cas et les engainements péri-nerveux dans 14% des cas (Tableau 4). L’examen anatomopathologique a permis de déterminer le stade de la tumeur selon la classification TNM (UICC 2010). Quarante pour cent de la population étudiée avait un cancer colorectal au stade III. Le stade IV a été retrouvé chez 36% des patients avec des métastases intéressant principalement le foie et les poumons. Le CCR se présentait essentiellement sous forme ulcéro-bourgeonnante dans 62% des cas. Seize pour cent des patients avaient des polypes associés à la tumeur (Tableau 5).
Notre étude cas-témoin a mis en relief plusieurs aspects reliant les quatre grands types de facteurs de risque à savoir: héréditaires, hormonaux, nutritionnels et environnementaux. Dans notre série, le faible niveau socio-économique lié au niveau d’instruction bas (50% sont des analphabètes) sont des facteurs favorisants le cancer colorectal dans la population étudiée. L’âge moyen de nos patients atteints de cancer colorectal est de 56,65±14,64 ans. Ce résultat est comparable à celui notifié (53,5 ans) dans le registre des cancers de Rabat et également celui relevé en 2014 (54 ans) par El Housse et al. mais très en deçà de celui (70,2 ans) noté dans une série française . La répartition du cancer colorectal selon le sexe montre un sex-ratio équilibré, avec une légère prédominance masculine. Cette prédominance masculine a été notée auparavant dans une étude nationale du CHU Hassan II de Fès .
Par ailleurs, une association entre diabète et cancer colorectal a clairement été démontrée. Dans notre étude, nous avons observé chez les patients diabétiques une augmentation de survenue de CCR. Nos résultats sont comparables à beaucoup de recherches qui ont focalisé l’attention sur la relation entre diabète et CCR. En effet, neuf études de cohorte et 6 études cas-témoin ont expliqué ce risque par l’hyperinsulinémie mais également par un temps de transit intestinal plus long entraînant un plus grand temps d’exposition aux agents potentiellement cancérigènes pour la muqueuse intestinale . La présence d’antécédents familiaux de cancer colorectal est un facteur de risque important d’apparition du cancer colorectal. Dans notre série, 7% des patients avaient au moins un antécédent familial de cancer colorectal. Ce chiffre concorde avec ceux retrouvés dans la littérature. Une méta-analyse incluant 59 études a estimé que le risque relatif de développer un CCR en cas d’antécédent familial au premier degré est de 2,24. Ce risque passait à 3,97 si deux antécédents familiaux au premier degré existaient .
D’un autre côté, il est avéré que l’aspirine confère une protection contre le CCR. Une analyse de cohorte de 662 hommes et 424 femmes inscrits dans le Cancer Prevention Study (CPS) aux États-Unis a montré que l’utilisation d´aspirine au moins 16 fois par mois a été associée avec un risque réduit de 40% de la mortalité par cancer du côlon sur une période de 5 ans . Cet effet protecteur de l’aspirine est visible dans nos résultats. Cependant d’autres études de cohorte et cas-témoins ont observé une association inverse entre l’utilisation d’aspirine et le risque de CCR .
En outre, il a été estimé que 12% des CCR sont imputables au tabagisme. Sa consommation favorise une apparition précoce de CCR et engendre des mutations au niveau de l’ADN de la muqueuse digestive . Nos résultats sont en faveur d’une association entre tabagisme et cancer colorectal et concordent avec les trois méta-analyses ayant constaté que les fumeurs actuels présentent un risque accru de cancer colorectal que les non-fumeurs .
Par ailleurs, nos résultats dévoilent que l’alcool est un facteur favorisant le cancer colorectal chez nos patients. Le principal métabolite de l’alcool dans le colon, l’acétaldéhyde a récemment été classé par l’OMS comme carcinogène du groupe 1. Les études épidémiologiques ont généralement rapporté des associations positives entre le cancer colorectal et l’alcool . Une méta-analyse réalisée à partir de 8 cohortes nord-américaines et européennes a montré qu’au-delà de 45 g d’alcool/j, le risque relatif de cancer colorectal était de 1,41 (IC = 1,16-1,72) . L’analyse de l’indice de masse corporelle a permis de retrouver un surpoids chez 53% des patients contre 26% des témoins et une obésité chez 14% des patients VS 6% des témoins. Le surpoids et l’obésité ont déjà été associés de façon convaincante avec le risque de cancer colorectal En effet, l’excès calorique et la sédentarité pourraient agir comme facteurs promoteurs de la cancérogénèse par le biais de l’hyperinsulinisme et/ou de résistance à l’insuline. L’insuline aurait un rôle stimulant sur les récepteurs à l’insulin-like growth-factors (IGF1) des cellules coliques en phase d’initiation .
Le cancer colorectal représente le cancer sur lequel il existe le plus d’évidence sur l’effet bénéfique de l’activité physique. Dans notre étude, la pratique d’activité sportive était plus faible chez les patients que les témoins, elle semble être corrélée à une diminution du risque de cancer colorectal. Ce résultat est en accord avec une récente étude cohorte européenne qui a porté sur 347 hommes et 237 femmes . Les effets bénéfiques de l’activité physique ont été démontrés essentiellement sur la diminution de l’insulinorésistance et sur la prise de poids (et donc de masse grasse). Un mécanisme à effet local a été également proposé pour expliquer les effets protecteurs de la pratique d’une activité physique régulière sur la survenue de ce cancer, et l’augmentation de la motilité intestinale. En effet, l’activité physique induit une réduction du temps de transit gastro-intestinal et donc une diminution de l’opportunité pour les cancérigènes d’être en contact avec la muqueuse colique .
Par ailleurs, l’alimentation contribue grandement à l’augmentation du taux d’incidence du cancer colorectal dans le monde. On estime qu’elle pourrait expliquer jusqu’à 80% des différences d’incidence de cancer observées entre les pays . Le principal volet de cette étude concerne l’exploration du statut nutritionnel dans l’étiologie du cancer colorectal. Une attention particulière est orientée vers la consommation de viandes rouges qui est significativement élevée chez nos patients comparée aux témoins. Ces résultats sont concordants avec plusieurs études épidémiologiques ayant investigué le rôle éventuel de la consommation de viande dans la survenue de cancer colorectal. L’étude de cohorte européenne EPIC montre que les cas de cancers colorectaux présentant une mutation du gène Apc provenaient des personnes consommant le plus de viandes rouges et de charcuteries . Les agents pro-cancer de la viande rouge pourraient être également l’excès de fer héminique, les mutagènes induits par la cuisson ou l’excès de graisses. A ces agents, qui sont aussi présents dans les charcuteries, s’ajoute le nitrite utilisé comme additif. Quant à La viande blanche qui ne contient que peu de fer héminique, elle n’est pas associée à la cancérogenèse colorectale contrairement à la viande rouge . Il est aussi à noter que, d’après notre étude et selon l’étude européenne EPIC, il semble également que le poisson soit un facteur protecteur, la consommation de poisson était inversement et significativement associée au risque de cancer colorectal. Il n’y a pas de mécanisme formellement démontré pour expliquer l’effet protecteur du poisson. Des études chez les animaux et in vitro indiquent que les acides gras à chaîne longue caractéristiques de l’huile de poisson pourraient inhiber la cancérogenèse . Sans compter que le poisson est une des rares sources alimentaires de vitamine D, une vitamine connue pour réduire le risque de cancer colorectal.
Beaucoup de recherches ont focalisé l’attention sur la consommation des légumes. La méta-analyse des données des études de cohorte a montré une diminution de risque de CCR de 10% pour une consommation de l0g/jour . Dans notre étude, les patients sont moins consommateurs de légumes que les témoins. Nos résultats suggèrent un effet protecteur des légumes crus en rapport avec leur richesse en fibres. Murphy et al. ont montré qu’un régime riche en fibres est inversement associé au risque de CCR et pourrait jouer un rôle préventif contre cette pathologie . Ces fibres seraient protectrices en accélérant le transit digestif, en diluant le contenu colique et en diminuant ainsi le temps de contact des produits mutagènes avec la muqueuse colique. De plus, les résultats de notre étude montrent une association significative entre la consommation des fruits et la réduction du risque du CCR. Nos résultats concordent avec plusieurs études qui sont en faveur d’un effet protecteur des fruits. Plusieurs composants des fruits peuvent expliquer cet effet protecteur, ils sont riches en vitamines antioxydantes, en fibres, en flavonoïdes et caroténoïdes.
En revanche, dans notre étude, les patients sont moins consommateurs de café que les témoins. Ce résultat est en accord avec une étude menée par Rashmi et al. ayant mis la lumière sur un effet favorable du café sur le risque de cancer colorectal. Les auteurs ont suggéré une réduction de 39% du risque de cancer colorectal, pour les gros consommateurs de café, soit 6 tasses par jour ou plus . Sur le plan histologique, il ressort de l’analyse des données anatomopathologiques des patients que l’adénocarcinome Lieberkühnien est le type le plus fréquent (82%), touchant avec prédilection le côlon dans 52% des cas et le rectum dans 48%. Le cancer colique a été retrouvé principalement sur le colon sigmoïde chez 33% de nos patients. Ce résultat est comparable à ceux relevés à Rabat , à Marrakech , ainsi qu’à Casablanca . Néanmoins, la répartition topographique du cancer du côlon dans notre série est différente de celle retrouvée dans une population française, avec 49,4% de localisation droite suivie du côlon sigmoïde . En outre, il a été constaté depuis les années 80, un glissement progressif des cancers du côlon gauche et du rectum au profit du côlon droit en Europe et aux États-Unis d’Amérique. La localisation sur le côlon proximal tend à devenir plus fréquente que la localisation sur le côlon distal lorsque le niveau de développement socioéconomique d’un pays s’élève .
Au Maroc, l’incidence du cancer colorectal est à l’heure actuelle en augmentation. Nous assistons à une véritable transition épidémiologique avec des changements dans le style de vie, le passage d’une alimentation à base de céréales et de légumineuses à une alimentation riche en viandes, et une consommation de plus en plus fréquente des « fast-food » et des produits industrialisés. Ces transformations dans notre mode vie font craindre une augmentation de l’incidence des cancers colorectaux dans notre pays. Ainsi et à la lumière de nos résultats, des recommandations peuvent être suggérées dans le cadre de la prévention primaire. Il est possible d'éviter le cancer colorectal d’une part en adoptant une hygiène de vie appropriée avec une alimentation saine diversifiée et équilibrée (peu de viande rouge, de charcuterie et de grillades, mais plutôt du poisson, des céréales complètes, des fruits et des légumes), la pratique régulière d'exercice physique, l’arrêt du tabac et de l’alcool et d’autre part en évitant la consommation excessive d'aliments transformés, surchargés de sucres et de gras. Des études plus ciblées doivent être conduites pour établir l’association entre ces facteurs de risque et la survenue du cancer colorectal chez la population marocaine.
Le cancer colorectal, par sa fréquence et sa gravité, représente un sérieux problème de santé publique dans le monde. Au Maroc, l’incidence de ce cancer est faible par rapport aux pays développés - Néanmoins, cette incidence est en constante croissance comme le prouve l’évolution de l’incidence de ce cancer dans la région du grand Casablanca qui est passée de 7,3 cas/100000 habitants en 2004-2007 à 9,6 cas/1.000.000 habitants en 2008-2012 pour les deux sexes confondus - Il est devenu le premier cancer digestif, surclassant le cancer de l’estomac;
Ce travail est réalisé pour la première fois au centre Mohammed VI pour le traitement des cancers l’un des deux plus grands centre pour la prise en charge et le traitement des cancers au Maroc - Notre étude cas-témoin a mis en relief plusieurs aspects reliant les quatre grands types de facteurs de risque à savoir: héréditaires, hormonaux, nutritionnels et environnementaux;
Notre étude a démontré le lien entre certains facteurs de risque connus dans la littérature et le cancer colorectal dans notre contexte: le niveau d’études, les antécédents familiaux de cancer, l’activité physique, l’obésité, l’intoxication alcoolo-tabagique, l’utilisation de l’aspirine - L’association était moins évidente pour le diabète, la contraception orale, tandis que notre population étudiée est sujette à un déséquilibre alimentaire qui est en faveur du développement ou de la complication de cancer colorectal, d’où la nécessité d’adopter un régime alimentaire bien codifié.
Les môles hydatiformes (du grec môles: masse et hydatide: sac hydrique) appartiennent aux groupe des maladies trophoblastiques gestationnelles au cours desquelles le trophoblaste prolifère de manière anarchique et forme des vésicules hydropiques [1, 2]. Elles sont caractérisées par l'absence d'embryon et la dégénérescence villeuse totale du placenta, et résultent de la fécondation d'un ovule dont le pronucléus maternel est absent ou immature [2, 3]. Les môles hydatiformes (MH) représentent un réel problème de santé publique notamment dans les « pays du sud » et de l'Asie, de par leur incidence et leur risque d'évolution vers la môle invasive et le choriocarcinome . Les modalités diagnostiques et de prise en charge étaient initialement basées sur l'histoire clinique et les données biologiques et histologiques. Actuellement, elles incluent en grande partie l'imagerie, notamment l'échographie et l'imagerie par résonnance magnétique . À cause de sa survenue le plus souvent dans une population au niveau socio-économique bas , l'imagerie par résonnance magnétique ne peut pas être envisagée comme moyen diagnostique dans nos contrées. L'échographie s'avère être le seul moyen d'imagerie effectif dans sa prise en charge dans notre pratique quotidienne. C'est pourquoi, nous avons initié cette étude pour décrire les aspects échographiques rencontrées au cours des moles hydatiformes dans un pays d'Afrique subsaharienne ainsi que la population concernée.
Nous avons réalisé une étude transversale de 6 ans (2011 à 2016) au Service de Radiologie du CHU de Yopougon. Elle a concerné toutes les échographies pelviennes ayant mis en évidence une MH dont certaines ont été confirmées par l'examen anatomopathologique du contenu utérin après aspiration. Les variables recherchées étaient l'âge, le motif de l'échographie, la taille de l'utérus, l'échostructure de l'utérus, l'aspect et le signal Doppler du contenu utérin ainsi que les ovaires. Ces variables étaient regroupées en paramètres épidémio-cliniques (fréquence, âge et indications) et échographiques (aspect de l'utérus et des annexes, le type de MH). Les échographies avaient été réalisées par voie mixte (endovaginale et sus pubienne) en modes B et Doppler Couleur. Les données ont été recueillies grâce aux comptes rendus d'échographie et au registre d'anatomopathologie.
Nous avons objectivé 25 cas de MH sur 12,190 échographies obstétricales réalisées pendant la période d'étude (soit 0,2% d'incidence échographique). Les patientes étaient âgées de 22 à 50 ans avec une moyenne d'âge de 33,4 ans. Il n'y avait pas de classe d'âge prédominant (Tableau 1). Les indications des échographies étaient dominées par la masse abdominale (9 cas, 36%) suivies par les métrorragies (7 cas, 28%), les douleurs pelviennes (5 cas, 20%) et le diagnostic de grossesse (4 cas, 16%). La notion d'aménorrhée était retrouvée chez toutes les patientes (100%). Au plan échographique, l'utérus était hypertrophique avec les dimensions moyennes suivantes: hauteur = 138 mm (78 à 288 mm), largeur = 99 mm (51 à 126 mm) et épaisseur = 73 mm (42 à 96 mm). L'utérus était homogène dans 24 cas (96%) et myomateux dans 1 seul cas (4%). La MH avait une épaisseur moyenne de 42,7 mm (18 à 98 mm). Son aspect (Tableau 2) était décrit comme multivésiculaire (Figure 1) était prédominante (17 cas soit 68%), suivi de l'aspect en nid d'abeille dans 4 cas (16%). Les MH étaient classées partielles (Figure 2) dans 4% des cas, complètes (Figure 1) dans 92% des cas et invasives dans 4% des cas. Les ovaires étaient hypertrophiques dans 44% des cas avec une notion de macrofollicules dans 32% et des kystes dans 8% des cas. Dans 12 cas (48%), une étude anatomopathologique du contenu utérin a été effectuée (Figure 3). Elle a permis de confirmer la MH dans 100% des cas. Ce qui confère à l'échographie une valeur diagnostique positive de 100%.
échographie pelvienne réalisée par voie sus pubienne chez une jeune dame de 28 ans présentant des métrorragies dans un contexte d’aménorrhée gravidique. Aspect en tempête de neige du contenu utérin (flèche blanche) avec un kyste bilatéral de l’ovaire (flèche noire)
Aspect anatomopathologique du contenu utérin traduisant une môle hydatiforme; A) placenta avec de nombreuses vésicules de taille variable; B) hématoxyline-Eosine (HE) X100: villosités placentaires de taille variable avec un axe œdémateux avasculaire et une hyperplasie trophoblastique circonférentielle ou partielle
Sur un total de 12,190 échographies obstétricales réalisées pendant les 6 ans de notre étude, nous avons répertorié 25 cas de MH. Ce qui correspond à une incidence échographique de 0,2% de cas. Nos résultats étaient en concordance avec Tsuala au Cameroun qui a mis en évidence 1 cas sur 556 grossesses en une année soit 0,18%. Mais ce taux est doublé en Afrique du nord où Boufettal au Maroc a objectivé 0,4% de cas. Cette incidence est pratiquement insignifiante en Europe où Candelier met en évidence moins de 1/1.000 grossesses. Cette différence de prévalence s'expliquerait par la survenue de cette affection en milieu socio-économique défavorisé. En effet selon Boufettal , les patientes concernées ont un niveau socio-économique bas, appartenant à des populations à risque soumises à des conditions climatiques drastiques et à un environnement agricole. Dans notre, la population concernée par les MH était relativement jeune et la notion de survenue aux âges extrêmes telles que décrites dans la littérature [2, 5] n'a pas été retrouvée. En effet, la moyenne d´âge des femmes était de 33, 4 ans avec des extrêmes de 22 et 50 ans. Les patientes étaient plus jeunes au Maroc avec une moyenne d'âge de 25 ans avec des extrêmes de 16 à 55 ans . Il en était de même pour l'unique patiente de Tsuala au Cameroun qui avait 23 ans. Dans notre étude il n'y avait pas de classe d'âge dominante contrairement à Boufetall chez qui les tranches d'âge de 20 à 29 ans (39,8 %) et 30 à 39 ans (29,5%) étaient prédominantes. Au plan clinique, la masse abdominale (36%) et les métrorragies (28%) étaient les signes d'appels prédominants qui accompagnaient la notion d'aménorrhée qui quant à elle était objectivée dans 100% des cas. Pour Tsuala , la métrorragie reste le signe majeur de la MH. Mais elle n'était présente que dans 93,7% des cas dans l'étude de Boufettal . Selon la littérature , les signes cliniques pathognomoniques de la MH sont les métrorragies du 1er trimestre associées à un utérus trop volumineux pour le terme. Quoi qu'il en soit, l'échographie constitue le moyen d'imagerie majeur pour rétablir le diagnostic [4, 7, 8]. L'aspect échographique caractéristique des MH est celui d'une formation échogène et hétérogène, donnant un aspect en tempête de neige, en « nid d'abeille » ou multivésiculaire. L'association d'ovaires présentant plusieurs kystes lutéiniques est fréquente. L'aspect en « nid d'abeille » a été retrouvé dans 4 cas (16%) et en tempête de neige dans 4% des cas. L'aspect échographique le plus fréquemment décrit dans notre étude était l'aspect multivésiculaire (68%). Boufettal a objectivé 87,5% d'image en « tempête de neige » et en « nid d'abeille ». Selon Chelli , l'aspect multivésiculaire était auparavant qualifié de « nid d'abeille » ou de « tempête de neige » sur les anciens appareils d'échographie qui manquaient de résolution spatiale suffisante pour distinguer les vésicules de petite taille. L'augmentation de la taille de l'utérus est un signe échographique important. Elle était retrouvée dans 100% des cas dans notre étude et dans 85% des cas dans celui de Boufettal . Selon Lazrak , lorsque l'échographie montre des kystes dispersés dans le placenta et que le diamètre de l'utérus est augmenté, le diagnostic prédictif d´une môle partielle est estimé à 90% des cas. Dans notre étude, les dimensions de l'utérus pouvaient atteindre 28,8 cm de hauteur contre 22 cm dans celui de Tsuala . Les moles hydatiformes sont habituellement classées en môle partielle et complète; les deux formes pouvant être invasive ou non invasive. Dans notre pratique nous les avons classés en MH partielles dans 4% des cas, complètes dans 92% des cas et invasives dans 4%. Les deux premières sont des formes bénignes de la maladie trophoblastique et la 3ème forme peut être considérée comme potentiellement maligne. Lazrak a décrit un cas de môle partielle invasive avec métastase pulmonaire au Maroc. Selon Delcominette en Suisse , la mole invasive a une évolution vers une néoplasie maligne qui s'observe dans 10 à 15% des cas des môles complètes et moins de 1% des môles partielles. En cas de doute, l'examen de l'environnement péri-utérin peut aider l'échographiste à asseoir le diagnostic. Les hypertrophies kystiques, le plus souvent bilatérales constituent un signe clé venant en appoint de l'augmentation de la taille de l'utérus et l'aspect multivésiculaire [7, 11-14]. Dans notre étude, les ovaires étaient hypertrophiques dans 44% des cas avec une notion de macrofollicules dans 32% et des kystes dans 8% des cas. Un accroissement du volume des ovaires a été objectivé dans 15 à 30% des cas au Cameroun et dans 30,7% des cas, des kystes ont été retrouvé dans l'étude de Boufettal . Les patientes ont bénéficié d'une aspiration du contenu utérin avec un examen anatomopathologique. Le diagnostic de MH a été confirmé dans 100% des cas y compris le cas de môle invasif. Cette valeur diagnostique positive de l'échographie était de 96% dans les môles complètes chez Chelli et 28% dans les cas de môles partielles . Cette grande différence peut s'expliquer par les consultations tardives en Afrique subsaharienne rendant la tâche facile à l'échographiste qui rencontre le patient à une période où toute la sémiologie est présente et évidente contrairement aux diagnostics précoces effectués dans les pays développés .
Les moles hydatiformes demeurent rares à Abidjan et sont dominées par la forme complète. Elles surviennent de façon équitable dans toutes les classes d'âge et sont révélées par une notion de masse pelvienne et de métrorragies dans un contexte d'aménorrhée. La forme complète est prédominante et l'aspect vésiculaire associé à une hypertrophie kystique des ovaires constituent les signes échographiques classiquement observés. L'imagerie médicale fait le diagnostic dans 100% des cas.
La mortalité est le rapport entre le nombre de décès et l'effectif moyen de la population dans un lieu donné pendant une période déterminée. Elle permet d'avoir une approche scientifique pour élaborer un plan de développement d'où l'intérêt de ce sujet. Les indicateurs de mortalité évitable ont été définis à partir des listes de causes de décès et de classes d´âges, généralement sélectionnées sur la base de la littérature et les dires des experts. En France, la mortalité évitable cible plus particulièrement la mortalité liée aux comportements à risque et à la prévention primaire. D´autres, souvent utilisées dans les pays anglo-saxons, sélectionnent des causes dont l´éventualité est plus directement associée à un acte médical (prévention secondaire, soins…). Ces différents choix ont pour objectif d´identifier les principaux problèmes de santé publique des pays dont ils émanent. Ce suivi passe par la connaissance systématique de tous les décès par le corps des médecins. Le certificat de décès a un rôle juridique mais aussi épidémiologique car il permet l´établissement de la statistique de santé publique. Au Sénégal, le taux de mortalité semble être encore élevé, les causes de décès revêtent une grande importance dans l'évaluation de l'état de la santé de la population et de la qualité des soins. Elles donnent une idée des mesures préventives et médico-curatives et des investissements dans la recherche qui pourraient accroître l'espérance de vie de la population. Ce sont les résultats des statistiques sur les causes médicales de décès qui mettent ainsi en évidence certaines caractéristiques épidémiologiques importantes. La connaissance des causes de décès contribue à l´évaluation et au suivi des actions de santé publique. C'est pourquoi l'objectif général de ce travail était d'évaluer les causes de mort dans la population générale à partir des informations figurant sur les registres de décès à Dakar. Les objectifs spécifiques étaient de déterminer les causes de mort, d'identifier les facteurs sociodémographiques influençant les décès et d'identifier les genres de mort et type de mort.
Il s'agit d'une étude rétrospective portant sur les cas de décès ayant bénéficié d'une autopsie dans la population générale de Dakar, de 2003 à 2012. Les sources des données étaient les registres des autopsies de l'Hôpital Aristide le Dantec (HALD) et de l'Hôpital Général de Grand-Yoff (HOGGY), seuls hôpitaux de Dakar où sont effectuées des autopsies. Le rapport d'autopsie et le certificat de genre de mort nous ont permis d'avoir des informations sur les circonstances de décès, du type de mort, des causes de décès. Les critères recherchés étaient l'âge, le sexe, adresse (Dakar centre, Dakar périphérie, banlieue, autres), lieu de décès, type de mort (naturelle, suspecte, violente, toxique, subite), les causes de décès, le genre de mort (naturelle, homicide, accident, suicide). Les informations contenues dans les différentes sources de données ont été rapportées sur une fiche d'enquête analysée par Epi-info version 6.04. Les variables qualitatives ont fait l'objet d'une analyse descriptive en pourcentage. Les variables quantitatives ont été analysées à l'aide de moyenne, de médiane et d'écart-type.
Durant la période d'étude, nous avions trouvé 985 décès parmi lesquels, 693 morts violentes (70,3%), 261 morts naturelles (26,5%) et 14 morts indéterminées (1,4%). Il y avait une prédominance des accidents de la circulation au nombre de 394 (40%). La voie publique était le lieu de décès de 594 personnes de la population d'étude (60,3%). La moyenne d'âge des sujets décédés était de 34 ans avec des extrêmes allant de 0 à 90 ans (Figure 1). La classe d'âge la plus touchée était celle des 20-29 ans (n = 250 soit 25,4%). Les décès étaient à prédominance masculine avec 846 cas (85,9%). Selon leurs adresses, 46,2% des patients venaient du Centre de Dakar et environ 1 sujet sur 3 habitait la banlieue de Dakar (Figure 2).
Les accidents de circulation étaient la première cause de décès des patients de la population d'étude avec 40% (Tableau 1). Les autres causes de décès étaient des morts violentes avec les homicides par coups et blessures (n = 86), les noyades (n = 54), les pendaisons (n = 20), les strangulations (n = 12), les brulures (n = 38) et les chutes (n = 52). Concernant le genre de mort (Figure 3), plus de la moitié des cas de décès étaient accidentels (n = 621 soit 65,1%) donc des morts violentes.
S'agissant des types de mort, les morts subites (1,2%), les morts toxiques (1,2%) et les morts suspectes (0,8%) étaient peu retrouvées. Nous avions retrouvé surtout les morts violentes (70,3%) et les morts naturelles (26,5%). Nous avions trouvé une corrélation significative entre l'âge et la cause de décès (p = 0,0001), les affections cardiovasculaires étant plus fréquentes entre 50 et 59 ans (Tableau 2). Les accidents de la circulation concernaient surtout les adolescents entre 10 et 19 ans. Cette classe d'âge était aussi touchée par les autres causes de mort violente, suivie de la classe d'âge entre 20 et 29 ans. Nous n'avions pas retrouvé de corrélation significative entre le sexe et les causes de décès (p = 0,501).
Les décès par accident de la circulation se passaient le plus souvent en zone préhospitalière ou à l'arrivée à l'hôpital. Les décès par cardiopathie ischémique se passaient surtout au domicile. Nous n'avions pas trouvé de corrélation significative entre les causes de décès et le lieu de résidence (p = 0,1).
Les limites de notre étude sont liées à la nature rétrospective de l'étude. Certaines informations concernant les décès par accident de circulation ou par coups et blessures n'étaient pas recueillies. Certaines causes de décès étaient indéterminées et quelques cas d'autopsie impraticable. Nous avons évalué la fréquence des causes de décès recueillies dans les registres des morgues des hôpitaux (HALD, HOGGY) représentatifs de Dakar. Elle varie d'un pays à l'autre dans le monde. Ces informations assurent une couverture des évènements et leur datation précise. Dans notre étude les décès violents étaient plus représentés dans les 2 sites soit 70,3%. Concernant les causes de décès, elles sont dans l'ensemble mal connues en Afrique sub-saharienne . Cette situation est due au fait que des décès ont lieu sans qu'un médecin n'ait vu le malade avant sa mort ou qu'une autopsie n'ait pu être faite après. La méthode d'enquête utilisée ici a permis de déterminer pour la plupart des décès s'ils étaient dus à une cause violente ou non.
Nous avions une prédominance masculine parmi la population de notre échantillon avec 86% d'homme et 14% de femmes soit un sexe ratio 6,1. La tranche d'âge la plus représentée était comprise entre 20 et 29 ans et était victime d'accidents et mort violentes. La majorité des accidents de la circulation concernaient des victimes entre 0 et 19 ans. Les cardiopathies ischémiques étaient plus importantes entre 50 et 59 ans. L'accident de circulation était de prédominance masculine. Ces résultats sont comparables à ceux de Naumann et al. . La surmortalité masculine est présente à tous les âges, mais surtout chez les jeunes (15 à 35 ans). Le phénomène est plus accentué en Afrique avec la constitution jeune des populations, avec une pyramide des âges élargie à la base et une faible espérance de vie . La plupart des pays en développement, en revanche doivent estimer le nombre de décès selon les causes à partir de données lacunaires. Des progrès dans ce domaine sont nécessaires pour améliorer la santé et réduire les décès. La comptabilisation annuelle des décès et la détermination des causes sont essentielles pour évaluer l'efficacité du système de santé d'un pays, que l'on estime aussi en mesurant l'impact des maladies et des traumatismes. Ces chiffres permettent aux autorités sanitaires de déterminer si elles prennent des mesures de santé publique adéquates.
Au Sénégal et dans les pays en voie de développement, les traumatismes sont négligés dans les statistiques nationales et nous restons au concept de primauté des maladies transmissibles. La place de plus en plus importante des traumatismes et des violences doit faire réfléchir sur les priorités en santé dans nos pays. « Pourquoi continuons-nous à mettre autant de ressources sur la recherche sur l'infection à VIH que dans les causes de suicide et dans la prévention des accidents de la circulation ? » Telle est la question posée déjà en 1997 dans l'éditorial du Lancet (Vol 349, May 3, 1997). En effet les principales causes de décès étaient en 1990 les cardiopathies ischémiques (6,3 millions), les accidents vasculaires cérébraux (4,4 millions), les infections respiratoires basses (4,3 millions), les maladies diarrhéiques (2,9 millions), la mortalité périnatale (2,4 millions), les pneumopathies chroniques obstructives (2,2 millions), la tuberculose (2 millions), la rougeole (1,1 million), les accidents de la circulation (1 million) et le cancer du poumon (0,9 million) . En 2001, on note une hausse des causes cardiovasculaires et une progression des traumatismes et des violences surtout dans la population adulte. Or les dépenses en santé restaient constantes sur les infections et les maladies transmissibles en général. Les projections par modélisation montraient une progression de trois places des accidents de la circulation, de la 9ème place à la 6ème place, dans le top 10 des causes de décès dans le monde. Cette progression se faisait surtout dans les pays à faible revenu. Ces projections corrélées à l'analphabétisme expliquent la progression des traumatismes et des violences en Afrique. Selon ces projections, les traumatismes pointeraient à la 3ème place des dépenses de santé à l'horizon 2020. Une autre méthode de modélisation de type « Diamond » classait les accidents dus aux véhicules à moteur comme 4ème priorité. Mais dès qu'on prenait en compte les inégalités dans le monde, ces mêmes accidents devenaient 2ème priorité de santé. C'est pourquoi nous recommandons au ministère chargé de la sécurité routière et de transport de veiller à une bonne prévention routière par le port des casques pour les motocyclistes, l'utilisation effective des ceintures de sécurité, l'application stricte de la législation en matière d'alcool au volant, le contrôle des normes de sécurité des véhicules, la limitation de vitesse sur les voies rapides, la formation continue des usagers et l'introduction du permis à points. Le ministère de la santé devra continuer les efforts sur la prévention et la prise en charge des maladies transmissibles. Les deux priorités devront être les maladies cardiovasculaires et les traumatismes. La prévention des maladies cardiovasculaires notamment par la lutte contre les facteurs de risque cardiovasculaire doit être un effort national. Dans la prévention secondaire, la mise en place de défibrillateurs et l'éducation des populations au secourisme sont fondamentales dans ce domaine. Pour les traumatismes, le maillage adéquat du territoire en structures bien équipées et un système de ramassage efficient des blessés amélioreraient les chiffres de mortalité. De nombreux décès pourraient être évités par des mesures de prévention et de réglementation adaptées.
L'étude des causes de décès dans deux hôpitaux représentatifs de Dakar montre la progression des décès par des causes cardiovasculaires et des traumatismes. Ce constat devrait induire une réorientation des ressources en santé vers ces domaines. Les maladies transmissibles restent importantes dans nos pays mais l'amélioration des conditions de vie induit une réduction de ces dernières. Un accent devra être mis sur la prévention des maladies de surcharge et leur prise en charge adéquate sur la voie publique et dans les structures de santé sur tout le territoire national. Les actions pour la réduction de la mortalité liée aux traumatismes devront agir sur le milieu, l'usager et les véhicules.
Les malformations ano-rectales (MAR) regroupent un large spectre d'anomalies congénitales allant de l'imperforation anale à la persistance du cloaque . Elles concernent toute anomalie de mise en place de la filière rectale survenant entre la sixième et la dixième semaine de développement embryonnaire. Les MAR couvrent un large spectre des malformations au pronostic fonctionnel hétérogène s'associant dans 60% des cas à d'autres malformations . Ces MAR sont des maladies rares, dont l'incidence varie de 1/2500 à 1/5000 naissances mais celle-ci pourrait être plus élevée dans certains pays en développement . Ces différences d'incidences sont liées aux variations géographiques, ethniques et génétiques . Les garçons sont légèrement plus touchés , le sexe ratio est de 1,6/1. Dans une étude menée à l'Est de la RDC a trouvé que les MAR représentaient 21,1% de toutes les malformations alors qu'à Lubumbashi, Lubala a trouvé une prévalence de 10,6% . La prise en charge a un double objectif: refaire l'anatomie rectale/anale et génito-urinaire et du point de vue fonctionnel, de maintenir la continence urino-fécale . Pour cela, plusieurs interventions médicales et chirurgicales peuvent être nécessaires . Cette prise en charge doit se faire en période néonatale car d'elle dépend le devenir immédiat du nouveau-né . Cependant, des cas de prise en charge tardive ont été rapportés et ce, essentiellement dans les pays en développement . Cet article présent un cas rare des malformations anorectales (imperforation anale avec fistule recto-uretrobulbaire prise en charge tardivement chez un nourrisson.
Nous rapportons le cas d'un nourrisson de 10 mois de sexe masculin, né à terme, qui avait pesé à la naissance 2300g admis au service de chirurgie des cliniques universitaires de Lubumbashi en date du 16/9/2018 pour la non émission des selles par l'anus et l'émission des selles par le méat urétral depuis sa naissance. Dans ses antécédents, nous n'avons pas trouvé la notion d'infection urogénitale pendant le 1er trimestre chez la mère, ni la notion de prise des médicaments tératogène dans cette période. Signalons aussi que la mère ne prenait pas l'alcool et ne fumer pas pendant la même période, et vivait dans une région minière avant et pendant la grossesse. Cependant, on ne signale aucune malformation congénitale visible dans la famille. Au complément d'anamnèse, la mère signale l'émission des urines mélangées aux matières fécales, de coloration jaune verdâtre depuis la naissance par le méat urétral (fécalurie) et l'absence d'émission des selles par l'anus. Pas de notion de vomissement, pas de notion de ballonnement abdominal, ni de fièvre. À l'examen physique, son état général était bon et les signes vitaux étaient dans les normes physiologiques. À l'examen locorégional, le patient en position de taille, nous avions noté la présence de l'empreinte anale (Figure 1). Une fistulographie a montré une communication anormale entre l'urètre bulbaire et le rectum (Figure 2) qui, par ailleurs, était la forme classique par rapport à la classification Krickenbeck. La radiographie du rachis incidence face et profil avait montré une colonne vertébrale bien formée. Le sondage vésical a noté l'issu des matières fécales mélangées aux urines faisant suspecter une forme rare d'une malformation ano-rectale et fistule recto-urétrale. Des bilans malformatif et préopératoire ont été réalisés et ont révélés ce qui suit: Echographie abdomino-pelvienne a montré les reins avec bonne différentiation corticomedullaire; à la biologie l'urée 16 mg%; créatinine 0,7% mg; temps de saignement 3 secondes; temps coagulation 6 secondes, hémoglobine 14%, hématocrite 42%. Nous avons réalisé une anorectoplastie avec fermeture de la fistule par voie périnéo-abdominale. Le premier temps, périnéal a été une incision cruciforme centrée sur l'emprunt anale. Une dissection des structures profondes a été faite jusqu'à la mise en évidence du cul de sac rectal. Le second temps, abdominal a été une laparotomie médiane sous-ombilico-sus pubienne qui a révélé un côlon sigmoïde très dilaté avec son méso intact et présence du trajet fistuleux entre l'urètre bulbaire et le rectum. Ensuite fermeture de la paroi abdominale. La sonde urinaire numéro 6 placé en préopératoire a été perçue dans le rectum ensuite retirée. Au niveau de l'incision périnéale, la dissection du tissu cellulaire sous-cutané a montré le trajet fistuleux recto-bulbaire. Une ligature-section du trajet fistuleux a été réalisée. Nous avons replacé une nouvelle sonde urinaire de même calibre du méat urétral jusque dans la vessie. La descente du cul de sac rectal jusqu'à la région périnéale suivie de son ouverture et de la suture entéro-cutanée en deux plans en points séparés éversants ont été faites. En période postopératoire, le malade était pris en charge par une équipe mixte associant les réanimateurs et les chirurgiens. Il a bénéficié d'une antibiothérapie (Cefotaxime 3x500mg), un apport liquidien en perfusion (Sérum Physiologique, Sérum glucosé 5% et Sérum Ringer Latacte, au total 1,5 L pendant 24H), une analgésie par voie parentérale (Paracétamol infusion a raison de 2x500mg). La cicatrisation est survenue au 21 ème jour et nous avons envisagé sa sortie (Figure 3). Et au reste, continuer avec les séances de dilatations anales.
Les MAR regroupent un complexe hétérogène des anomalies intéressant l'anus et le rectum, tout comme les systèmes urinaire et génital dont le pronostic fonctionnel est proportionnel à la simplicité ou complexité des anomalies; les plus complexes étant difficile à prendre en charge et associant souvent d'autres anomalies . L'étiologie reste floue; probablement multifactoriel. La cause génétique est à ne pas écarter . La fièvre pendant le premier trimestre de la grossesse et les emplois responsables de l'exposition maternelle aux agents de nettoyage (les solvants) sont des facteurs qui ont été incriminés pour engendrer ces types de malformations . L'incidence est autour de 1/5000 naissances, mais est reconnue pour certains auteurs alors que pour d'autres, la prédominance est féminine comme étant plus élevée dans les milieux Africains . Les garçons sont légèrement plus touchés , la forme la plus fréquente étant chez eux, l'atrésie anale associée à une fistule recto-urétrale; alors que chez les filles, il s'agit de l'atrésie associée à une fistule recto-vestibulaire . Ces malformations sont en défaveur du sexe féminin . Ceci rejoint notre observation; le patient étant du sexe masculin et ayant présenté une fistule recto-urétrale associée à une atrésie du canal anal. Approximativement 60% des patients ont une malformation associée . Les incidences varient selon les études, mais les plus rencontrées sont génito-urinaires (40-50%), cardiovasculaires (30-35%), vertébrales (25-30%), gastro-intestinales (5-10%) et l'association VACTERL (vertebral, anal, cardiac, tracheal esophagal, fistula, renal, limb) (4-9%) . Cela n'a pas été le cas chez notre patient qui n'avait aucune malformation visible.
Depuis la classification de Ladd et Gross de 1934, plusieurs autres ont été proposées et depuis 2005, c'est le système international de Krickenbeck qui est utilisé. Il regroupe les formes cliniques majeures et les variantes régionales/locales . La forme de notre patient était classée parmi les formes cliniques majeures, appelées ainsi car étant les plus fréquentes. C'est fait habituellement à la naissance lors de l'examen physique. Le médecin remarque un anus non-ouvert ou placé anormalement. Dans les pays en développement, les principales raisons du retard de diagnostic sont le faible niveau intellectuel, la désinformation et la pauvreté . Le retard de prise en charge de notre patient (10 mois de vie), illustre encore mieux le challenge que représente la prise en charge des MAR dans les milieux à faibles revenus. Dans ces pays en développement, le retard de diagnostic et le manque de chirurgiens pédiatres rendent complexe la prise en charge des MAR . La PEC chirurgicale peut être réalisée avec ou sans colostomie préalable, selon la présence ou non d'une fistule périnéale ou vestibulaire, ou encore la présence ou pas d'une constipation chronique, dans les présentations tardives . Elle consiste en une anorectoplastie sagittale, laquelle peut être faite par voie postérieure (la technique la plus utilisée actuellement) ou antérieure. L'abaissement abdominopérinéal est encore utilisé dans nos milieux . Dans les soins postopératoires, les dilatations rapides, mais délicates sont réalisée à l'aide des bougies de Hegar, en commençant par le numéro 8, jusqu'au 14 . L'abaissement abdominopérinéal a été la technique chirurgicale utilisée chez notre patient, suivi des dilatations à partir du 21ème jours post opératoire. De nos jours, grâce à une meilleure compréhension de l'anatomie et à l'expérience dans la prise en charge, des meilleurs résultats sont obtenus . Mais dans les pays à faibles revenus, les complications sont relativement fréquentes et la mortalité reste alarmante . En ce qui concerne notre patient, nous n'avons pas eu de complication et le pronostic fonctionnel a cours terme a était bon.
Les MAR dans leurs formes anatomiques de fistule recto-urétrale comporte intrinsèquement un risque élevé d'infection urinaire avec retentissement sur le haut appareil, surtout si le diagnostic est posé tardivement, d'où l'intérêt d'un diagnostic précoce anténatal, néonatal et de référer les cas dans un centre expert afin d'assurer une chirurgie d'excellente qualité. Le retard encore porté au diagnostic suggère une sensibilisation plus accrue des matrones, sages-femmes, obstétriciens et pédiatres, et une vulgarisation de l'inspection systématique du périnée de tout nouveau-né. Le résultat fonctionnel à terme résume tout l'enjeu de cette chirurgie qui doit conférer au patient une continence socialement acceptable.
La tuberculose est une maladie consécutive à une infection par des bacilles du complexe Mycobacterium tuberculosis qui comprend Mycobacterium tuberculosis stricto sensu, M. bovis, M. africanum et d'autres espèces mycobactériennes plus rarement rencontrées en pathologie humaine. Les localisations sont multiples. La suspicion clinique de la tuberculose du col utérin ne se fait pas généralement en première intention, du fait de sa rareté et de sa similitude avec le cancer du col, maladie fréquente et souvent dépistée dans notre contexte . Du fait de la localisation cervicale, la découverte de cette pathologie est souvent différée par un diagnostic différentiel large. Dans le cas que nous rapportons, nous insistons sur l'importance de l'examen histologique dans la démarche diagnostique en attirant l'attention du praticien sur le fait que tout col rouge qui saigne n'est pas nécessairement un cancer du col
Nous vous présentons une femme de 48 ans sans antécédents pathologiques particuliers qui a consulté il y'a 2 ans pour métrorragies. Une vaccination au BCG a été faite et nous avons noté une notion de contage tuberculeux dans la famille. A l'examen physique, nous avons objectivé des métrorragies qui survenaient de manière spontanées, associées à des douleurs pelviennes d'évolution intermittentes, des leucorrhées non fétides. Au toucher vaginal, le col était dur, légèrement sensible et le doigtier souillé de sang. L'examen au spéculum montrait un col augmenté de volume, épaissi et induré sans ulcération, à bords irréguliers, saignant au contact. Le reste de l'examen est sans particularités. Deux échographies pelviennes ont été réalisées mais ne décelant aucune anomalie. Une tomodensitométrie abdominopelvienne a été faite retrouvant un col utérin modérément épaissi avec des contours antérolatéraux irréguliers, postéro latéraux irréguliers en rapport avec l'infiltration des paramètres, un épaississement modéré du 1/3 supérieur du vagin, une absence d'infiltration suspect des structures urinaires et digestive pelviennes, des adénopathies iliaques bilatérales et retro péritonéales, une absence de localisation néoplasique, séquelles bilatérales de pyélonéphrite et concluait à une tumeur du col de l'utérus de stade T3bN1M0 (Figure 1). Cependant une première biopsie du col avec étude histologique pour confirmation trouvait une inflammation chronique non spécifique. Une seconde biopsie trouvait un granulome avec zone de nécrose faisant conclure à une tuberculose du col utérin. Elle montrait une muqueuse endocervicale siège d'un infiltrat inflammatoire granulomateux épithélio-giganto-cellulaire (Figure 2) et la nécrose (Figure 3). Une poursuite des explorations trouvait une intradermoréaction à la tuberculine phlycténulaire à 21 mm, une CRP positive à 12 mg. L'étude cytobactériologique des urines était normale. Des examens complémentaires à la recherche d'un terrain particulier étaient alors demandés: la radiographie des poumons et la radiographie du rachis dorsolombaire étaient normales, l'utérus et ses annexes étaient normaux à l'échographie pelvienne, la sérologie rétrovirale de l'immunodéficience humaine était négative. Sur la base des résultats des éléments cliniques, des éléments présomptifs paraclinique et surtout de l'examen anatomopathologique, un traitement antituberculeux est entrepris pour 6 mois, selon le protocole national. Au bout de quatre mois de traitement, les métrorragies ont disparu. La symptomatologie avait complètement régressé pour disparaitre trois mois plus tard.