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La présence d'un utérus pseudo-unicorne avec corne rudimentaire non communicante est une source importante de complications gynéco-obstétricales. Le pronostic des grossesses associées à cette malformation est le plus souvent défavorable, d'où l'importance de l’échographie obstétricale du premier trimestre qui permet de faire le diagnostic de la grossesse intra utérine mais aussi de vérifier l'absence de malformation utérine.
L'angiomyxome agressif est une tumeur mésenchymateuse développée aux dépens de tissu conjonctif . Son site de prédilection étant les parties molles du tractus génital féminin et sa localisation cervico-faciale demeure rare [2–4]. Le problème posé par cette tumeur est surtout thérapeutique lié au risque accru de récidive après traitement [1, 2, 4]. Dans ce travail et à partir d'une observation d'un patient porteur d'un angiomyxome agressif, nous nous proposons de rappeler les aspects cliniques, histologiques et thérapeutiques de la tumeur.
Il s'agit d'un patient âgé de 63 ans, diabétique, hypertendu, sans habitudes toxiques, ayant consulté pour une tuméfaction de la face interne de la joue droite augmentant progressivement de volume dépuis un peu plus de 3 mois, évoluant dans un contexte de conservation de l’état général sans signes cliniques associés. L'examen clinique a objectivé l'existence d'une masse d'environ 4cm de diamètre occupant la face interne de la joue droite n'atteignant pas le trigone retro molaire, de consistance ferme et mobile par rapport aux deux plans, le reste de l'examen orl était sans particularité notamment pas de localisation synchrone au niveau de la cavité buccale et des voies aéro digestifs supérieures, les aires ganglionnaires étaient libres. Une tomodensitométrie du massif facial avait objectivé un volumineux processus expansif de la région ptérygo-palatine droite de 4 cm de grand axe. Une biopsie avec examen histopathologique avait conclu à un angiomyxome (Figure 1). Le patient a été opéré avec une exérèse large de la tumeur suivie d'une reconstruction par un lambeau infra hyoidien à palette cutanée horizontale. L'incision cutanée était centrée sur les muscles infra hyoidiens homo- latéraux à la perte de substance à hauteur de la région cricoïdienne (Figure 2), l'artère thyroïdienne supérieure repère (Figure 3), le lambeau transposé librement sur la perte de substance (Figure 4) suivi d'une fermeture en 3 plans (Figure 5). La pièce opératoire a été adressée pour examen histopathologique (Figure 6). Les suites opératoires étaient simples et le patient a quitté l'hôpital à j7. Malheureusement il a été perdu de vue.
Les angiomyxomes rentrent dans le cadre des tumeurs mésenchymateuses myxoïdes dont le site de prédilection est la région périnéale féminine. La localisation faciale demeure exceptionnelle [2–4]. La tumeur se présente habituellement comme une excroissance muqueuse qui croit insidieusement mais qui infiltre rapidement les tissus environnants . L'incidence médiane de survenue est la 4ème décennie chez la femme (16 à 70 ans), 6ème -7ème décennies chez l'homme. Elle peut survenir également chez l'enfant. Le patient le plus jeune a 2 ans.
Anatomopathologie: L'angiomyxome agressif présente un aspect infiltrant plus marqué, un aspect général moins nodulaire et plus pauvre en cellules, ainsi que des cellules musculaires lisses et des fibroblastes disposés de façon concentrique autour des vaisseaux [2, 5]. Le tissu environnant apparaît myxoïde par endroits renfermant une prolifération de collagène dense . Généralement, les cellules tumorales de l'angiomyxome agressif ne montrent pas d'atypies cyto-nucléaires. L’étude immuno-histochimique montre une positivité importante à la vimentine et à la désamine [1, 5]. Une étude cyto-génétique tente de démontrer que l'angiomyxome agressif serait le produit de mutation d'un gène situé sur le chromosome 12.
Diagnostic différentiel: Le diagnostic différentiel de l'angiomyxome se pose avec le groupe des tumeurs « stromales » à différenciation fibroblastique-Myofibroblastique . De ce fait il n'est pas toujours aisé de le différencier d'un angiomyofibroblastome, d'un sarcome myxoïde de bas grade ou d'un liposarcome myxoïde [1, 2, 5–7], d'autant plus que l’étude immuno-histochimique ne permet pas toujours de trancher entre ces différentes formes histologiques pouvant présenter toutes une positivité aux marqueurs musculaires [1, 5].
Le bilan radiologique: L’échographie montre un aspect polyploïde hypoéchogène parfois kystique. Les images tomodensitométriques sont variables et montrent souvent une masse homogène hypodense par rapport au muscle. L'aspect en imagerie par résonance magnétique (IRM) est caractéristique montrant une tumeur iso ou hypo intense par rapport au muscle dans les séquences pondérées T1 et hyper intense dans les séquences pondérées T2. La masse se rehausse fortement et de façon hétérogène après injection de produit de contraste et peut montrer des zones moins hyper intenses au sein de la tumeur . L'IRM détient un rôle important dans le diagnostic de récidive tumorale puisque les mêmes aspects radiologiques sont présents au niveau des zones de récidive .
Traitement: Dans les formes débutantes et limitées, une excision large de la tumeur est généralement le garant d'un traitement curatif avec peu de séquelles fonctionnelles . Cependant, le caractère infiltrant en profondeur de l'angiomyxome rend parfois l'excision complète difficile et dangereuse. Dans tous les cas, la chirurgie demeure l'option de choix, à moins qu'elle est techniquement difficile ou que les risques encourus sont potentiels [1, 2]. Une chimiothérapie adjuvante a été tentée par certaines équipes . La radiothérapie n'est pas indiquée dans ce type tumoral vue l'activité mitotique faible [1, 2]. Il est à noter qu'aucune démarche thérapeutique claire et bien codifiée n'a été jusque là précisée pour le traitement des angiomyxomes agressifs. Pour notre patient nous avons optes pour une exérèse complète de la tumeur suivie dans le même temps opératoire d'une reconstruction par un lambeau musculocutané infra hyoïdien a palette cutanée horizontale .
Technique de prélèvement: L'incision cutanée dessine un fuseau horizontal dont la partie médiane est centrée sur les muscles infra hyoidiens homo- latéraux a la perte de substance a hauteur de la région cricoïdienne. L'incision se prolonge latéralement pour l’évidement cervical. La dissection suit la description du prélèvement de Wang . Le lambeau est levé de bas en haut. La veine jugulaire antérieure est liée, puis sectionnée. Les muscles sternohyoïdien et sternothyroïdien sont sectionnés près de l’échancrure sternale. La peau est suturée aux muscles a la périphérie du lambeau pour éviter le cisaillement des perforantes cutanées. Le lambeau est séparé de la glande thyroïde en passant dans l'espace avasculaire prècapsulaire. Le chef supérieur du muscle omohyoïdien est séparé de l'inférieur. Au pole supérieure de la glande thyroïde, les branches terminales de l'artère et de la veine thyroïdienne supérieure sont liées. Il faut préserver, a ce stade, la branche externe du nerf laryngé supérieur. Puis les artères thyrohyoïdienne et cricothyroïdienne sont liées. Une fois que les insertions des muscles sternothyroïdien, omohyoïdien et sternohyoïdien ont été détachées du cartilage thyroïde et de l'os hyoïde, le lambeau est transposable librement. Le site donneur est refermé sur un drain, après un éventuel évidement ganglionnaire cervical.
Évolution: Le caractère agressif de l'angiomyxome est dû à ses potentialités d'extension et d'infiltration muqueuse mais surtout aux récidives locales fréquentes après exérèse chirurgicale [1, 2, 4]. Ces récidives sont dues à la difficulté d'une résection tumorale complète. Elles peuvent apparaître des années après le geste chirurgical et justifient, de ce fait, la nécessité d'une surveillance régulière de ces patients .
En conclusion, l'angiomyxome agressif est une tumeur mésenchymateuse infiltrante non métastatique. Le diagnostic anatomopathologique doit être précis afin d’éliminer une prolifération sarcomateuse maligne. Une chirurgie d'exérèse large demeure l'option thérapeutique de choix sans causer de préjudice fonctionnel important. Les récidives sont fréquentes justifiant une surveillance régulière après traitement.
La majorité des systèmes de santé dans le monde font face actuellement au défi majeur de la qualité et la sécurité des soins . En faisant référence à l'Institute Of Medicine (IOM), la sécurité des soins fait partie des cinq dimensions essentielles de la qualité des soins (l'efficacité, la sécurité, la réactivité, l'efficience et l'accessibilité). Cette dimension est basée sur le principe de ne pas nuire aux patients . La littérature montre que l'incidence des événements indésirables (EI) liés aux soins est en moyenne de l'ordre de 10% avec une haute évitabilité d'au moins 50% . Parmi ces événements indésirables, ceux liés au circuit des médicaments occupent une place importante et risquent de causer un préjudice grave aux patients . Ce préjudice varie de l'allongement de la durée de séjour à l'hôpital jusqu’à l'augmentation de la morbi-mortalité . Le circuit des médicaments dans un établissement de santé recouvre la prescription, l'analyse et la validation de cette prescription, la préparation, la livraison, la distribution, le transport, la détention et l'administration du médicament, l'information du patient, la surveillance du traitement, les commandes par la pharmacie, l'analyse de l'activité, la gestion des périmés et des retraits de lots . Il s'agit d'un processus complexe combinant des étapes pluridisciplinaires et interdépendantes visant un objectif commun: l'utilisation sécurisée, appropriée et efficiente du médicament chez le patient pris en charge en établissement de santé . Cette complexité est source d'erreurs . Parmi les médicaments en milieu hospitalier, et devant l'augmentation considérable de l'incidence des cancers, les anticancéreux sont devenus d'un usage de plus en plus fréquent. Cette entité de médicaments suscite un intérêt particulier du fait du risque qu'elle engendre aussi bien pour les patients que pour le personnel soignant au cours du processus de son utilisation . En Tunisie, rares sont les études évaluant la sécurité du circuit des médicaments d'une façon générale et ceux des anticancéreux en particulier. Dans ce contexte, nous avons mené cette étude dans l'optique de décrire et d’évaluer le circuit des médicaments anticancéreux au service de cancérologie de l'Hôpital Régional de Gafsa (HRG).
Il s'agit d'une étude évaluative du risque lié aux médicaments anticancéreux, type « visite de risque » menée sur une période de 15 jours au cours de l'année 2014 au service de cancérologie de l'hôpital régional de Gafsa. Il s'agit d'un hôpital public régional (2 ème niveau) comportant 20 services et faisant l'objet de près de 16000 admissions par an. Le service de cancérologie est un service fonctionnel depuis 3 ans. Le choix de ce service comme lieu d’étude était fait de manière raisonnée du fait de l'utilisation de médicaments à haut risque (anticancéreux). La visite de risque (ou de site) combine plusieurs outils d’évaluation: consultation de documents, questionnaires standardisés, entretiens avec les acteurs du circuit du médicament, une observation en fonctionnement des systèmes étudiés et la réalisation des différentes mesures sur site. Cette méthode d’évaluation est inspirée de celle conduite auparavant par le projet « SECURIMED ». Ce dernier a été développé par le Comité de Coordination de l'Evaluation Clinique et de la Qualité en Aquitaine (CCECQA), en France . Dans notre travail cinq étapes étaient menées successivement. Première étape: présentation du groupe de travail de la visite de risque. Deuxième étape: consultation des documents disponibles au niveau du service et portant sur la sécurité du circuit du médicament. Troisième étape: observation du circuit des anticancéreux par le groupe de la visite. Cette étape avait évalué les vulnérabilités et les défenses à l'aide de deux types de check-list: une pour les services cliniques et la seconde pour le service de pharmacie. Quatrième étape: entretiens individuels avec les professionnels. Ces entretiens ont été effectués auprès des médecins, des pharmaciens et d'infirmiers présents lors de la visite à l'aide de questionnaires spécifiques pour chaque catégorie professionnelle afin de connaitre les vulnérabilités et les défenses perçues par les professionnels et leurs attitudes. Cinquième étape: restitution à la fin de la visite de risque. Au cours de cette étape, les principales défenses identifiées, les défenses absentes ou présentes mais non opérationnelles, et les perspectives d'amélioration ont été communiquées aux professionnels du service Groupe de travail. Cette visite de risque a été menée par un groupe de travail pluridisciplinaire formé par deux médecins spécialistes en cancérologie, deux pharmaciens et une technicienne supérieure en sciences infirmières. Analyse statistique. Une analyse descriptive des résultats des entretiens avec les professionnels de la santé et des observations du circuit du médicament a été effectuée.
Le service de cancérologie de l'hôpital régional de Gafsa est classé niveau III d'exposition. Deux types de classement des niveaux d'exposition précisés dans les recommandations du Centre National d'Information sur les Médicaments Hospitalier (CNIMH) (en France) sont admis. En pratique, il existe un regroupement de ces deux classifications, aboutissant chacune à trois niveaux d'exposition à prendre en termes de locaux, d’équipement, de matériels et de protections individuelles. Le niveau I correspond à la préparation et l'administration occasionnelle, le niveau II correspond à la préparation et l'administration en quantité modérée et le niveau III correspond à la préparation et l'administration de façon intensive .
le staff du service de cancérologie de l'HRG était formé de deux médecins spécialistes en carcinologie et exerçant depuis deux ans et demi dans cette structure ainsi que dix infirmiers (9 femmes + 1 homme). Cette équipe collaborait avec deux pharmaciens, exerçant depuis cinq ans dans cet hôpital. Ces derniers étaient affectés à la pharmacie de l'hôpital. Tous les infirmiers travaillant au sein du service n'ont jamais eu de formation spécialisée en matière de cancérologie, ni avant d’être affectés au service ni au cours de leur fonction actuelle. Quarante pour cent du personnel n’était pas qualifié pour son poste. Les aides-soignants faisaient fonction d'infirmiers et ceci par manque de personnel. Un seul infirmier parmi le personnel du service de cancérologie de Gafsa (SCG) avait une tenue conforme aux protocoles de bonne pratique.
Le service de cancérologie ne disposait pas de hotte à flux laminaire et seul un isolateur était mis à la disponibilité du personnel de ce service. Dans toutes les chambres, on a noté l'absence de lavabos qui étaient présents uniquement dans les vestiaires. Un réfrigérateur et un système de rangement (armoires) étaient présents au niveau de la salle de préparation des médicaments. Parmi les accessoires de protection, seuls les gants propres et les bavettes étaient disponibles. On a également constaté un manque au niveau de certains équipements tels que les lunettes de protection, les gants stériles et les sur-blouses.
Les principaux supports de prescription des médicaments étaient des ordonnances médicales, et des supports de prescription pour les infirmiers. Par ailleurs, on n'a pas constaté l'existence de pancartes de signalisation de la dangerosité des produits manipulés au niveau du service ni d'affiches indiquant les protocoles de la préparation des médicaments.
La Figure 1 récapitule le circuit des anticancéreux au service de cancérologie de l'HRG. Au total, onze observations ont été effectuées, réparties entre le service clinique et la pharmacie de l'hôpital. Lors de l'observation des conditions matérielles de prescription, on a noté certaines insuffisances notamment: absence totale de documentation d'information (liste ou livret mis à jour des médicaments dans l’établissement, dictionnaire Vidal, protocoles thérapeutiques) pour les médecins prescripteurs, absence de pharmacien ou de préparateur en pharmacie au sein du service, absence de relecture systématique de l'ordonnance particulièrement après interruption du médecin lors de sa prescription, absence de séparation des médicaments look alike, sound alike (LASA). Les résultats de l'observation des différentes phases du circuit du médicament anti-cancéreux sont résumés dans le Tableau 1 et le Tableau 2.
Au total, dix entretiens avec les infirmiers travaillant dans le SCG ont été effectués. Le nombre de patients bénéficiant des ordonnances de médicaments était estimé entre 15 à 20 patients par jour. Le nombre de médicaments prescrits par patient était estimé entre 3 à 4. L'ordonnance nominative manuscrite du médecin ou une recopie manuscrite par l'infirmier sont les seuls supports reportés par les infirmiers comme moyens à partir des quels ils vont préparer et administrer les médicaments anticancéreux. Le recopiage se fait sur la feuille de température et sur le cahier de l'infirmier. La moitié des infirmiers interrogés (50%) juge comme non sécurisé, ce support de prescription. Les deux médecins spécialistes travaillant dans le SCG ont participé aux entretiens. Parmi les renseignements reconnus par les médecins comme non signalés lors de la prescription, on cite l’âge du patient. Deux entretiens ont été fait avec le personnel de la pharmacie (pharmacien et préparateur). Les deux sujets interrogés ont reconnu que l’âge du patient est la seule information reconnue comme manquante à l'ordonnance nominative, lors de la délivrance du médicament. Ils ont déclaré que les ordonnances transmises sont toutes analysées à la pharmacie par l'agent présent (pharmacien ou préparateur) et ceci le jour même de sa réception. Les interactions médicamenteuses étaient déclarées comme recherchées systématiquement. Le Tableau 3 récapitule le résultat de l'entretien avec les professionnels de la santé.
Notre étude est parmi les rares études menées en Tunisie ayant pour but d'explorer les conséquences de la prescription des médicaments en termes de sécurité pour les patients. Dans notre travail, le suivi du circuit des médicaments a été motivé par le résultat des études antérieures qui ont démontré la fréquence élevée des événements indésirables liés aux médicaments et leurs graves conséquences pour les patients et en termes de coûts de santé . Elle nous a permis de faire un état des lieux sur la sécurité du circuit des médicaments anticancéreux dans un service de cancérologie intégré dans un hôpital de deuxième niveau. Ce travail a montré que le système actuel du circuit des médicaments ne permet pas de minimiser les risques pour la sécurité des patients et que ce système dans sa globalité nécessite des améliorations. L'identification de ces défaillances s'est basée sur une méthode scientifiquement prouvée en matière d’évaluation des pratiques, qui est la visite du risque. Cette méthode permet d'appréhender les facteurs humains, de comprendre la chaîne des événements et d'analyser les causes des problèmes identifiés . Cette approche a le mérite d'aller à la rencontre des professionnels, d’être à leur écoute, de les impliquer dans la démarche de gestion des risques, d'introduire une culture de risques, de faciliter la communication entre les différents acteurs d'un même système . Cependant, le service choisi a été informé à l'avance à propos de la visite de risque, ce qui peut induire un changement des comportements du personnel observé. Dans notre étude, on a noté que la répartition des missions des différents acteurs est sujette parfois à des glissements de tâches qui risquent d’être parfois dangereux. En effet, on a constaté que par moment, des aides-soignants effectuent des tâches d'infirmiers. Ainsi, en plus du manque de formation spécialisée que doit recevoir les professionnels de ce service, s'ajoute l’éloignement de chaque acteur à sa mission prioritaire. En référence au guide de la Haute Autorité de Santé « Outils de sécurisation et d'auto-évaluation et de l'administration des médicaments» le glissement des tâches figurent parmi les causes des erreurs médicamenteuses .
Un manque important ainsi qu'une inadéquation aux normes au niveau des équipements nécessaires pour la préparation et la protection des professionnels manipulant ces médicaments ont été également décelés. Ce même constat a été rapporté dans d'autres études tunisiennes comme celle de Triki et al, menée au service d'oncologie médicale du centre hospitalo-universitaire Habib Bouguiba de Sfax et qui a conclu à ce que seulement 70% des infirmières portaient des gants en latex lors de la préparation des cytotoxiques et 40% portaient un masque. Par ailleurs, l'observation du circuit de l'Endoxan a dévoilé de nombreuses défaillances . La prescription manuscrite des traitements et par la suite leurs transcriptions au niveau des fiches de prescription des infirmiers exposent à un risque d'erreurs important. Ces erreurs sont néanmoins souvent évitables [14, 15]. Au cours de la transcription, la dose, l'unité, la voie d′administration, et la durée d′administration peuvent être modifiées . Dans notre étude, bien qu'il y ait une vérification et une analyse pharmaceutique des médicaments demandés, on a noté un manque de communication entre le pharmacien et les médecins prescripteurs avant la prescription du traitement, un manque d'informations portant sur les renseignements cliniques du patient sur la prescription adressée au pharmacien et la non disponibilité du pharmacien pendant des plages horaires journalières et même pendant des journées entières comme les jours fériés. Ceci met à risque la sécurité des patients. Un tel constat a été retrouvé dans l’étude de El Mhamdi et al .
Dans notre étude, on a remarqué l'absence de séparation des médicaments dont le nom ou l'apparence prêtent à confusion ou les médicaments look alike, sound alike (LASA). Certaines données révèlent que les confusions entre différents noms de médicaments représentent environ un quart des erreurs en lien avec leur utilisation . Certaines interventions impliquant une approche multidisciplinaire dans l'acquisition des médicaments associant médecins, pharmaciens, professionnels de la santé, dirigeants d'hôpitaux, agences d'accréditation des médicaments et industries ont fait la preuve de leur efficacité pour mieux sécuriser l'utilisation des médicaments et devraient être promulguées par tous les intervenants, depuis la fabrication des médicaments jusqu’à leur administration aux patients . Le circuit du médicament est un processus complexe impliquant plusieurs acteurs et chaque acteur doit contribuer dans une logique d'enchaînement à sécuriser le processus . La collaboration des pharmaciens avec l′équipe médicale contribue à une réduction significative des évènements indésirables liés aux médicaments jouant ainsi un rôle crucial dans la promotion de la sécurité des médicaments. C'est ainsi que dans l’étude de Kucukarslan et al , la présence d'un pharmacien dans l'unité médicale réduit de 78% les événements indésirables liés aux médicaments. L'IOM affirme que les pharmaciens devraient être inclus pendant le processus de prescription et ce dans le cadre d'une stratégie visant à améliorer la sécurité des médicaments . D'un autre côté, il convient de compléter et renforcer la formation initiale des professionnels de santé en termes de connaissances et compétences à acquérir en vue d'améliorer la sécurité des patients . La gestion du circuit du médicament nécessite une approche participative se basant sur une collaboration entre les différents acteurs. Une approche privilégiant la communication peut être garante d'une administration médicamenteuse sûre et en temps opportun . C'est ainsi que les résultats de ce travail doivent être présentés aux différents acteurs impliqués dans la gestion du circuit des médicaments anticancéreux afin de les engager à la recherche de solutions adéquates et adaptées au contexte non dénué de contraintes.
La sécurisation du circuit des médicaments devrait être une priorité inscrite dans l'ensemble des démarches nationales et partagée par tous les intervenants et ce dans l'optique d'atteindre un objectif prémium: la qualité de la prise en charge globale et la sécurité des patients. De ce fait, des dispositions réglementaires et un cadre juridique doivent être mis en place pour garantir l'atteinte de cet objectif prioritaire.
La revue de la littérature montre que l'incidence des événements indésirables (EI) liés aux soins est en moyenne de l'ordre de 10% avec une haute évitabilité d'au moins 50% et que en moyenne 44 000 à 98 000 décès sont attribuables chaque année aux erreurs médicales. Parmi ces erreurs, celles liées aux cytotoxiques sont fréquentes et particulièrement dangereuses en raison du potentiel hautement toxique des médicaments concernés, d'où l'intérêt croissant de la sécurisation de ce circuit.
La revue de la littérature montre que l'incidence des événements indésirables (EI) liés aux soins est en moyenne de l'ordre de 10% avec une haute évitabilité d'au moins 50% et que en moyenne 44 000 à 98 000 décès sont attribuables chaque année aux erreurs médicales. Parmi ces erreurs, celles liées aux cytotoxiques sont fréquentes et particulièrement dangereuses en raison du potentiel hautement toxique des médicaments concernés, d'où l'intérêt croissant de la sécurisation de ce circuit.
Notre étude ayant trait à la sécurité des patients et à la qualité des soins, est parmi les rares études en Tunisie qui ont porté sur l’évaluation du circuit des médicaments et en particulier celui des anticancéreux. De plus et à notre connaissance, notre étude est la première à avoir utilisé la méthode de la visite du risque pour évaluer le circuit des anticancéreux en Tunisie.
Notre étude ayant trait à la sécurité des patients et à la qualité des soins, est parmi les rares études en Tunisie qui ont porté sur l’évaluation du circuit des médicaments et en particulier celui des anticancéreux. De plus et à notre connaissance, notre étude est la première à avoir utilisé la méthode de la visite du risque pour évaluer le circuit des anticancéreux en Tunisie.
La pandémie de l ‘infection par le Virus de l'Immunodéficience Humaine (VIH) est loin d ‘être contrôlée et ce nonobstant les grandes interventions menées à l ‘échelle planétaire. L′Afrique subsaharienne abrite plus de 67% de toutes les Personnes Vivant avec le VIH (PVVIH), soit 22,5 millions . L′accès au traitement antirétroviral (TAR) en Afrique subsaharienne reste très faible en raison d′obstacles [2–4] tels que le nombre limité de médecins, la mesure de la charge virale limitée, la problématique de la disponibilité d′examens plus simples comme la mesure des lymphocytes T CD4 ou les examens de biochimie . Devant ces difficultés, l′Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a proposé une approche de prise en charge «allégée» pour favoriser l′accès aux antirétroviraux (ARV) à grande échelle dans les pays à ressources limitées . Les premiers programmes africains structurés d′accès aux ARV ont vu le jour en 1998 dans des pays comme le Sénégal, la Côte d′Ivoire et l′Ouganda [6, 7]. Ces programmes ont montré l′efficacité du TAR en Afrique, avec des résultats comparables à ceux obtenus dans les pays du Nord en termes de survie, d′efficacité virologique, immunologique et clinique, d′observance, d′émergence des résistances et de toxicité [9, 10].
Dès l ‘apparition des premiers cas de SIDA en 1985 au Cameroun , divers plans de lutte contre le VIH/SIDA ont été élaborés et mis en'uvre avec plus ou moins de succès de 1987 à nos jours . Des progrès encourageants méritent d ‘être inscrits tels que l ‘accroissement important du nombre total des Centres de Traitement Agréés (CTA) et des Unités de Prise En charge du VIH/SIDA (UPEC), la gratuité des ARV depuis mai 2007, l ‘augmentation du nombre de personnes séropositives sous ARV . Le Comité National de Lutte contre le SIDA (CNLS) rapporte en Décembre 2009 que sur 560 000 PVVIH, le Cameroun compterait près de 74.710 patients sous antirétroviraux (ARV), soit 39% des 153.185 PVVIH éligibles aux traitements dans l ‘ensemble du pays [14, 15].
Au regard de toutes ces améliorations dans la prise en charge des PVVIH, il s ‘avère indispensable de déterminer les facteurs influençant la mise sous traitement antirétroviral. Aussi, l ‘objet de cette étude était d ‘identifier les déterminants de l ‘initiation au traitement antirétroviral en comparant les caractéristiques sociodémographiques et biocliniques, le traitement antirétroviral des PVVIH des CTA des deux régions à plus forte prévalence du VIH au Cameroun, à savoir l ‘Est et le Nord-Ouest-Cameroun.
Population d ‘étude: Etaient retenus dans notre étude, les patients séropositifs âgés de plus de 15 ans, en phase d ‘initiation de traitement, régulièrement suivi dans les deux CTA. Ceux transférés dans les CTA ou en échec thérapeutique y étaient exclus. Cette étude a fait l ‘objet d ‘une clairance éthique. A la fin de chaque comité thérapeutique, les informations étaient recueillies auprès des patients et dans leurs dossiers après avoir obtenu leur consentement. Le questionnaire utilisé s ‘intéressait aux caractéristiques sociodémographiques du patient, à la circonstance de découverte de son statut sérologique, à la durée entre le dépistage et l ‘initiation au TAR, à son entourage à savoir le nombre d ‘enfants, le statut sérologique des enfants de moins de 3 ans et pour les marié(e)s, le statut sérologique de leur(s) partenaire(s). Les dossiers permettaient de réunir les données sur le profil bioclinique du patient et le TAR choisi au cours du comité.
Analyse des données: Pour l'analyse des données, nous avons utilisé le logiciel EpiData Analysis Version 2.2.1.171. Les comparaisons entre les patients du CTA de Bamenda et ceux du CTA de Bertoua étaient faites à l ‘aide du test de Chi2 pour les variables qualitatives et du test ANOVA pour les variables quantitatives. Etait considérée comme différence statistiquement significative, une p value (p) <0,05.
Distribution générale: Nous avons recruté 460 patients séropositifs en phase d'initiation dans les CTA de Bamenda et de Bertoua, respectivement 53,9% et 46,1%. Cent cinquante huit séropositifs étaient de sexe masculin contre 302 de sexe féminin soit un sexe ratio de 1 homme pour 2 femmes (Tableau 1).
Caractéristiques socio-démographiques: L’âge médian était de 36 ans à Bamenda et de 35 ans à Bertoua et variait entre 17-76 ans et entre 16-66 ans respectivement (p = 0,44). Il y'avait plus de patients de sexe féminin autant dans le CTA de Bamenda (69,0%) que dans celui de Bertoua (61,8%). Le statut marié(e)-monogamie était le plus représenté dans les 2 CTA. Les patients séropositifs résidant dans les villes de Bamenda et de Bertoua étaient plus représentés, 54,4% et 57,5% respectivement. Le secteur privé était le plus représenté à Bamenda (59,1%) tandis que les sans-emploi l’étaient plus à Bertoua (49,3%) (p= 0.00) (Tableau 1).
Statut sérologique: Concernant la circonstance de dépistage, la majorité des patients avait soit découvert leur statut sérologique au cours d'une maladie (75,4% à Bamenda contre 68,4% à Bertoua), ou bien lors d'un dépistage volontaire (8,9% à Bamenda contre 19,3% à Bertoua) (p = 0,008). La durée entre le dépistage et l'initiation du traitement antirétroviral variait entre 0 et 96 mois avec une médiane de 1 mois dans le CTA de Bamenda et entre 0 et 90 mois avec une médiane de 2 mois au CTA de Bertoua (p = 0,499). Il y avait plus de VIH de type 1 et 2 dans le CTA de Bamenda par rapport à celui de Bertoua, 15 et 3 respectivement (p= 0.011). La majorité des patients était classé au stade clinique II à Bamenda (54,0%) tandis qu’à Bertoua, le stade clinique III était prédominant (52,4%) (Tableau 2) (p = 0,000). La plupart des patients étaient à un stade immunologique sévère à Bamenda (61,3%) et à Bertoua (55,7%) (p = 0,399) (Tableau 2).
Entourage: Cent quatre patients avaient des enfants de moins de 3 ans parmi lesquels 31 (29,8%) connaissaient leur statut sérologique. La majorité soit 72,7% à Bamenda et 70,0% à Bertoua était séronégatif (p = 0,87). Des 203 patients mariés, 105 (51,7%) connaissaient le statut sérologique de leur partenaire. La majorité soit 60,0% à Bamenda et 74,0% à Bertoua était séropositif (p = 0,13) (Tableau 3).
Caractéristiques biocliniques: Le taux de CD4 variait entre 1 et 555 cellules/mm3 avec une médiane de 133 cellules/mm3 dans le CTA de Bamenda et entre 1 et 825 cellules/mm3 avec une médiane de 175 cellules/mm3 à Bertoua. Il y avait une différence statistiquement significative (p = 0,008). Le poids des patients variait entre 36 et 110 Kg avec une médiane de 60 Kg à Bamenda et entre 30 et 102 Kg avec une médiane de 55 Kg à Bertoua. Cette différence était statistiquement significative (p = 0,000). Il y avait plus de patients ayant la tuberculose dans le CTA de Bertoua (53 contre 23, p= 0.000) tandis qu'il y avait plus de patients ayant l'hépatite virale B dans le CTA de Bamenda (10 contre 1, p = 0,013). Le taux d'hémoglobine variait entre 5,3 et 17,7 g/dl avec une médiane de 11,0 g/dl dans le CTA de Bamenda et entre 7,6 et 16,6 g/dl avec une médiane de 11,3 g/dl à Bertoua (p = 0,000) (Tableau 2).
Traitement antirétroviral: La Zidovudine était plus prescrit à Bamenda et le Ténofovir à Bertoua (p = 0,000). L'Efavirenz était plus prescrit à Bertoua tandis que la Névirapine l’était plus à Bamenda (p = 0,000) (Tableau 4). L'utilisation du Lopinavir/r était plus marquée à Bamenda qu’à Bertoua (p = 0,017). Concernant la prescription des autres ARV, il n'y avait pas de différence statistiquement significative entre les deux CTA (Tableau 4).
Au cours des dernières années, la question de l’équité dans l'accès aux soins pour les personnes vivant avec le VIH/SIDA s'est posé, le risque étant que l'accès aux soins soit limité aux populations des zones plus développées [5, 6] telles que Bamenda par rapport à Bertoua. Cette étude nous a permis de d’étudier 460 dossiers de PVVIH. Parmi lesquels 53,9% étaient suivi au CTA de Bamenda et 46,1% à Bertoua, ceci pouvant s'expliquer par la démographie plus importante dans la ville de Bamenda [5, 6].
Les personnes vivant avec le VIH ayant participé à l'enquête étaient en majorité des femmes (302 sur 460) autant dans le CTA de Bamenda (69,0%) que dans celui de Bertoua (61,8%). Cette proportion élevée s'explique d'une part par la réalité épidémiologique de l’épidémie au Cameroun, plus de 60% de ces personnes sont des femmes et, d'autre part, par une couverture en antirétroviraux plus élevée dans la population féminine . L’âge médian était de 36 ans à Bamenda et de 35 ans à Bertoua et variait entre 17-76 ans et entre 16-66 ans respectivement. Des résultats similaires ont été retrouvés au cours de l'enquête EVAL-ANRS où l’âge médian de la population étudiée était de 36,8 ans. Le secteur d'emploi des patients sous antirétroviraux suivis à Bamenda était majoritairement le secteur privé tandis qu’à Bertoua la plupart était sans emploi (49,3%). L'enquête EVAL-ANRS a révélé que la majorité des PVVIH exerçait dans le secteur informel (54,5%) au niveau régional . Ces différences pourraient s'expliquer par le fait que la région de l'Est est la moins développée des deux en ce qui concerne le statut économique .
La raison du dépistage était préférentiellement au cours d'une maladie autant à Bamenda qu’à Bertoua (75,4% et 68,4%) mais plus de PVVIH faisaient leur dépistage volontairement à Bertoua qu’à Bamenda (19,3% contre 8,9%). La durée entre le dépistage et l'initiation au traitement antirétroviral était de 1 mois à Bamenda et de 2 mois à Bertoua, ce qui dénote des lacunes dans le dépistage précoce de l'infection à VIH et par conséquent de la sensibilisation.
Une faible proportion de patients suivis dans les 2 CTA était considérée comme coinfectée au VIH type 1 et 2, mais la majorité était du CTA de Bamenda (6% contre 1,4% à Bertoua). Le stade clinique III de l'OMS était plus présent dans le CTA de Bertoua et le stade clinique II à Bamenda. Paradoxalement, bien qu'au niveau de la classification immunologique de l'OMS il n'y avait pas de différence statistiquement significative (le stade sévère étant plus représenté dans les 2 CTA), le taux de CD4 médian dans le CTA de Bamenda était plus petit qu’à Bertoua au moment de l'initiation du traitement. Ce qui laisse sous-entendre une entrée plus précoce dans les soins chez les patients suivis à Bertoua. Par ailleurs, il est intéressant de noter que le poids des patients en phase d'initiation était plus élevé chez ceux suivis au CTA de Bamenda. Ceci pourrait s'expliquer par le fait que l'agriculture soit la principale activité dans la région du Nord-Ouest. Les traitements de première ligne contenant de la Zidovudine étaient plus souvent prescrits dans le CTA de Bamenda alors que le taux d'hémoglobine des patients en phase d'initiation était moins élevé chez eux. Ceci pourrait s'expliquer par les problèmes de rupture fréquente des ARV que les formations sanitaires connaissent.
Les similitudes entre les patients séropositifs des deux CTA étaient l’âge, la prédominance féminine, celle du statut marié(e)-monogamique, de la ville comme lieu de résidence, de la maladie comme raison de dépistage du VIH, de la séronégativité des enfants de moins de trois ans, de la séropositivité des partenaires des couples mariés. Ces caractéristiques pourraient être considérées comme facteurs influençant la mise sous traitement antirétroviral. Néanmoins, des différences avaient été observées au niveau du type de VIH, du stade clinique, du taux de CD4, du taux d'hémoglobine, du poids actuel, des coinfections tuberculose et hépatite virale B. Concernant les traitements antirétroviraux, les ruptures de médicaments ainsi que la prédominance de certaines pathologies pourraient expliquer les différences observées. Notre étude mais surtout en exergue l'urgente nécessité de standardiser la prise en charge des PVVIH dans les CTA du Cameroun.
Le syndrome de Tolosa-Hunt (STH) se caractérise par une ophtalmoplégie douloureuse en relation avec un processus inflammatoire non spécifique du sinus caverneux. Ce syndrome est aussi rare que méconnu en milieu ophtalmologique. Il reste un diagnostic d’élimination. Nous rapportons un cas de syndrome de syndrome de Tolosa Hunt à travers lequel nous rappelons les différents aspects diagnostiques, thérapeutiques et évolutifs de cette pathologie.
Il s'agit d'une patiente de 65 ans, sans antécédents pathologiques notables, qui a consulte aux urgences ophtalmologiques pour des céphalées unilatérales gauches apparues depuis 5 jours, associées depuis 72 heures à un ptosis gauche (Figure 1). L'examen ophtalmologique a retrouvé une paralysie complète du nerf oculomoteur commun gauche et un ptosis homolatéral avec la mise en évidence d'une diplopie binoculaire lors du soulèvement de la paupière supérieure gauche. On a retrouvé aussi une paralysie du regard vers le haut, en dedans et en bas (Figure 2, Figure 3), l'examen du segment antérieur et du fond d’œil est normal aux deux yeux. L'examen neurologique a objectivé une paralysie des branches 1 et 2 du nerf trijumeau. Le reste de l'examen somatique est sans particularité. La patiente a bénéficié d'une imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébrale et une angio-IRM qui sont revenues normales, notamment pas d'atteinte au niveau du sinus caverneux (Figure 4,Figure 5). Une ponction lombaire avec mesure de pression sont sans anomalies. On a complété l'enquête étiologique par un bilan biologique notamment inflammatoire et infectieux (vitesse de sédimentation, Protéine-C-Réactive, numération formule sanguine) ainsi que l'hémoglobine glyquée qui sont normales. Les sérologies virales (notamment herpétiques, cytomégalovirus, VIH) sont négatives. Le bilan immunologique (ANCA, anti DNA natifs), la biopsie des glandes salivaires ainsi que le dosage de l'enzyme de conversion, sont revenus sans particularité. Le diagnostic du syndrome de Tolosa Hunt a été retenu devant la négativité de tous les examens complémentaires réalisés. Notre patiente a été mise sous corticothérapie avec une amélioration de la symptomatologie et une régression spectaculaire des troubles oculomoteurs après 72 heures, sans récidive après 1 an de surveillance.
Le syndrome de Tolosa Hunt est un syndrome rare, son incidence est estimée à un cas par million par an . Il est caractérisé par une ophtalmoplégie douloureuse, due inflammation granulomateuse idiopathique du sinus caverneux. Il y a près de 50 ans, Tolosa a rapporté un cas d'un patient avec des douleurs orbitaires gauches et une ophtalmoplégie totale homolatéral, l'angiographie cérébrale a montré un rétrécissement intra-caverneux de l'artère carotide gauche, après le décès du patient l'autopsie a révélé une inflammation granulomateuse du sinus caverneux. Sept ans plus tard, Hunt et al ont défini une entité clinique d’étiologie obscure suite à l’étude de 6 patients. La réponse thérapeutique aux glucocorticoïdes a été reconnue par Hunt et son équipe. En 1966, Smith et Taxdal ont été les premiers à appliquer l’éponyme « syndrome de Tolosa-Hunt » pour cette entité clinique, sur la base d’étude de 5 cas supplémentaires. Bien que considéré comme une affection bénigne, des déficits neurologiques permanents peuvent se produire, et les rechutes sont possibles, nécessitant ainsi un traitement immunosuppresseur prolongé. Le syndrome de Tolosa-Hunt est causé par un processus inflammatoire d′étiologie inconnue. Sur le plan histologique, il existe une inflammation non spécifique des cloisons et de la paroi du sinus caverneux, avec des granulomes à cellules géantes, et une prolifération des fibroblastes [2, 3]. L′inflammation produit alors une pression et un dysfonctionnement secondaire des structures dans le sinus caverneux, y compris les nerfs crâniens III, IV et VI, ainsi que les divisions supérieures de nerf crânien V. Alors que les rapports d′extension intracrânienne de l′inflammation existent , il n′y a pas de rapports d′implication systémique. Des cas de syndrome de Tolosa-Hunt ont été rapportés chez des patients présentant d′autres troubles inflammatoires, telles que le lupus érythémateux disséminé, mais cela peut représenter une simple association de deux maladies auto-immunes . Le STH peut affecter des personnes de tout âge, sans prédominance du sexe. En général il est unilatéral, mais des cas de bilatéralité ont été rapportés .
L'International Headache Society décrit l′évolution et les caractéristiques du syndrome de Tolosa-Hunt comme: “douleur orbitale épisodique associée à la paralysie d′un ou plusieurs des troisième, quatrième, et / ou sixième nerfs crâniens qui disparaît généralement spontanément, mais tend à rechute et remettre” . Le diagnostic du STH repose actuellement sur des critères bien précis [6, 8]: La douleur, constante, est unilatérale, orbitaire, non pulsatile, apparaissant en quelques jours; L'ophtalmoplégie associée correspondant à une atteinte: du nerf oculomoteur commun: 80% (comme c'est le cas de notre patiente); du nerf abducens: 70%; du nerf pathétique: 29%; autres nerfs peuvent être touchés: nerf optique, nerfs maxillaire et mandibulaire, nerf facial. L'exclusion d'une autre cause par la neuro-imagerie; L'efficacité spectaculaire de la corticothérapie est évocatrice du diagnostic.
De nombreuses études se sont intéressées au STH et à l'apport de l'imagerie par résonance magnétique, examen indispensable au diagnostic de cette entité, car il permet : d’éliminer d'un processus inflammatoire spécifique (type sarcoïdose) ou tumorale; de montrer l'existence d'une zone d'iso-signal en T1 et T2 et la déformation du sinus caverneux qui sont des signes évocateurs.
Néanmoins, il semble possible que les techniques d'IRM puissent être mises en défaut et ne détectent pas les infiltrats minimes (comme c'est certainement le cas de notre patiente). La non visualisation de ces infiltrats par l'IRM indiquerait un stade précoce de la maladie et donc une meilleure réponse au traitement . La certitude diagnostique peut être donnée par la biopsie qui reste difficile et hasardeuse (mortalité et morbidité élevées) et n'est indiquée qu'en cas de non réponse à une forte dose de corticoïdes. L'efficacité spectaculaire de la corticothérapie est évocatrice mais pas spécifique. D'où la nécessité d'une surveillance prolongée de plusieurs mois pour retenir ce diagnostic de façon définitive. Le STH reste donc un diagnostic d'exclusion, le clinicien doit éliminer les différentes étiologies d'une ophtalmoplégie douloureuse, qui sont multiples, à savoir les causes tumorales (exemple: lymphome), vasculaires, traumatiques, inflammatoires (sarcoïdose, Wegener..), infectieuses et métaboliques . Le traitement consiste en une dose élevée de prednisone par voir orale pendant une durée de 4 semaines. Une amélioration notable est souvent évidente dès les premières 24 heures de traitement, une non réponse aux stéroïdes suggère un autre diagnostic. L'imagerie doit être effectuée tous les 1-2 mois jusqu’à la résolution des anomalies à l'imagerie. Les patients doivent être informés que les rechutes peuvent se produire et à long terme, une nouvelle cure de corticothérapie peut être nécessaire ou parfois même des immunosuppresseurs. Chez notre patiente, après un an de surveillance, on n'a pas constaté de rechute .
Le STH est certainement une entité anatomo-clinique rare, à part, malgré la non connaissance de ses bases étiopathogéniques. L'IRM est un examen précieux grâce à sa meilleure sensibilité pour la détection des lésions du sinus caverneux et sa reproductibilité. Cependant elle demeure non spécifique puisque plusieurs affections peuvent simuler le STH. Le diagnostic de STH est un diagnostic d’élimination avec nécessairement une évaluation précise initiale, un traitement par corticothérapie approprié et un suivi méticuleux.
Les traumatismes de l’étage antérieur représentent une entité particulière des traumatismes crâniens. Il s'agit du sous type le plus fréquent des traumatismes de la base du crâne et représentent 15 à 20% des traumatismes crâniens en général. Ces traumatismes menacent les structures neuro-encéphaliques sus-jacentes et sont très souvent responsables de brèches ostéoméningées exposant au risque infectieux. Les causes de ces traumatismes sont dominées par les accidents de la voie publique. Le diagnostic des fractures et des brèches ostéoméningées de l’étage antérieur peut être évident devant un tableau clinique typique. Des fois il est délicat et échappe aux investigations radiologiques standards. La TDM a résolu en partie ce problème; cependant certaines brèches durales peuvent passer inaperçues au scanner d'où l'intérêt de l'IRM. La diversité du tableau clinique et des lésions observées au cours des traumatismes de l’étage antérieur justifie l'intérêt d'une prise en charge pluridisciplinaire des patients qui en sont victimes. Enfin, le pronostic de ces traumatismes dépend des lésions cérébrales associées et de la présence d'une brèche ostéo-durale dont le diagnostic doit être le plus rapide et le plus précis possible.
Notre étude concerne des malades pris en charge pour un traumatisme de l’étage antérieur au service de Neurochirurgie de l'hôpital IBN SINA de Rabat sur une période de 10 ans allant du 1er Janvier 2003 au 31 Décembre 2012. L'analyse a porté sur les éléments épidémiologiques, cliniques, les explorations neuroradiologiques, l'attitude thérapeutique et sur l’évolution.
Nous avons réalisé une étude rétrospective sur un total de 1900 cas de traumatismes crâniens hospitalisés au service de Neurochirurgie de l'hôpital Ibn Sina de Rabat durant la même période. Nous avons retrouvé 136 dossiers exploitables, ce qui représente une fréquence de 7,16%. On a noté une nette prédominance masculine avec 118 hommes (soit 86,76% de l'ensemble) contre 18 femmes, soit 13,24% des cas. Soit un sexe ratio de 6,5H/1F. Dans notre série, l’âge moyen était de 32,7 ans avec des extrêmes de 16 ans à 75 ans. La population jeune dont l’âge est compris entre 16 et 35 ans était la plus concernée et représentait 66%. Les accidents de la voie publique (AVP) représentent la première cause du traumatisme dans notre série avec une fréquence de 69%. Les chutes occupent la seconde place avec une fréquence de 19% contre 12% pour les agressions. La rhinorrhée était présente chez 10,37% des patients en préopératoire et chez un seul patient en post-opératoire chez qui elle était tarie spontanément. 12,3% des malades ont présenté une épistaxis à l'admission, et 3% avaient une otorrhagie. Parmi nos patients, 82% avaient un traumatisme crânien bénin, 16% un traumatisme crânien modéré et 2% un traumatisme crânien grave. Un syndrome méningé a été noté chez 3 patients de notre série, tandis qu'on a relevé un cas de crises convulsives, un cas d'hémiparésie (dû à une pneumocéphalie compressive), et un cas de paralysie faciale dû à une fracture du rocher. Une plaie du scalp a été retrouvée chez 36,8% de nos malades, avec issue de LCR et de matière cérébrale à travers la plaie chez 2 patients. L'ecchymose périorbitaire était présente chez 67% des patients, dans 28% des cas elle était unilatérale et dans 72% des cas elle était bilatérale.
La radiographie standard du crâne a été réalisée chez 63% de nos malades, elle a permis d'objectiver des lésions osseuses telles les fractures de la voute, les embarrures, les lésions du sinus frontal, de dépister une pneumocéphalie et chez un cas elle a permis de visualiser une pneumoventriculie (Figure 1). La TDM cérébrale a été réalisée chez tous nos patients, en fenêtre osseuse et parenchymateuse, avec reconstructions coronales. Elle a permis de suspecter une fracture de l’étage antérieur de la base du crâne dans 87,7% des cas, une pneumocéphalie était présente chez 25% des patients. Les lésions osseuses de l’étage antérieur ont été classées selon la classification de Fain et Péri (Figure 2): type I: fracture de la paroi antérieure du sinus frontal; il peut exister de façon exceptionnelle des fractures de la paroi postérieure; type II: enfoncement médiofacial; c'est la dislocation naso-orbitoethmoïdo-frontale ou DONEF de la classification de Paul Tessier, une disjonction craniofaciale de type Le Fort II ou III peut y être associée; type III: fractures de la voûte irradiées à la base avec trait simple ou embarrure; en cas d'embarrure, les lésions de la base sont plus fréquentes de même que les atteintes de la dure-mère; type IV: association des types II et III; type V: lésions exceptionnelles isolées de l’étage antérieur. Dans notre étude, uniquement deux patients ont bénéficié d'une IRM cérébrale dans le cadre du bilan préopératoire pour pouvoir localiser la BOM qui n’était pas évidente au scanner (Figure 3).
La prise en charge thérapeutique a toujours commencé par les mesures de réanimation et de mise en condition. Une antibiothérapie préventive a été de mise chez tous les patients de la série qui avaient un traumatisme crânien ouvert. Chez les autres malades, l'antibiothérapie n'a été de mise qu’à visée curative en cas de complications infectieuses neuro-méningées. Dans notre étude, 91 patients ont bénéficié d'une exploration chirurgicale de leur étage antérieur soit 66,91% des cas. Un abord frontal bilatéral a été réalisé chez 67 malades, un abord frontal unilatéral chez 19, une exploration à travers une esquillectomie chez un malade, et une exploration après reprise d'un volet frontotemporal déjà réalisé pour hématome extra dural chez un seul malade. 3 comptes rendus opératoires n'ayant pas été retrouvés Au total 66 explorations extra durales ont été réalisées (75%) contre 22 (25%) d'explorations intra et extra durales. 119 brèches ont été retrouvées chez 80 malades alors que l'exploration s'est révélée infructueuse chez 9% des cas. Le siège de la brèche a été largement dominé par la localisation ethmoïdale chez 54 patients (Figure 4). Parmi nos patients 7 subi une levée d'embarrure avec craniectomie à os perdu, 6 ont bénéficié de l’évacuation d'un hématome extra dural compressif et 3 malades d'un parage avec fermeture d'une plaie cranio-cérébrale.
L’évolution a été jugée favorable chez 95,6% des patients opérés. Aucun cas de mortalité péri-opératoire n'a été noté dans notre série. L'analyse des dossiers de nos malades a permis de constater que 9 patients ont présenté au moins une complication, soit 6,6% des TEA. Parmi ces complications, on a noté 4 cas de brèches per-opératoire soit une fréquence de 4,39%, 2 cas de méningites purulentes traitées par antibiothérapie de 10 jours avec bonne évolution, 2 cas de persistance de rhinorrhée ayant nécessité une reprise chirurgicale soit 2,19%, et un cas de chute du lit ayant occasionné un hématome extradural nécessitant une évacuation chirurgicale avec bonne évolution. Seuls 22 de nos patients ont été revus en consultation selon les informations recueillies sur les dossiers médicaux soit 16,17% des malades, avec un suivi moyen de 17,3 mois avec des extrêmes de 1 à 78 mois.
Les séquelles notées étaient dominées par une hyposmie chez les malades présentant une brèche médiane avec abord frontal bilatéral soit 74% des malades, avec anosmie chez seulement 3 patients ayant nécessité la désinsertion des filets olfactifs. Les autres séquelles notées étaient représentées par 2 cas de céphalées persistantes jugulées par le traitement médical, un cas d’épilepsie secondaire jugulée par le valproate de sodium, un cas d'aphasie, et un cas de parésie faciale.
Les données épidémiologiques de notre série rejoignent celles de la littérature avec une nette prédominance masculine (86,7% d'hommes), un âge moyen proche de la trentaine (32 ans), et une large prédominance des accidents de la voie publique comme facteur étiologique (69% des cas). Lorsque le traumatisme crânien est grâve (2% des cas de notre série), il est difficile de rechercher la rhinorrhée ou l'anosmie, dans ce cas la recherche d'une lésion de l’étage antérieur entre dans le cadre du bilan complet surtout en cas de présence d'ecchymose péri-orbitaire ou d'enfoncement cranio facial.
La majeure partie de nos patients étaient conscients à l'admission (82%) facilitant ainsi la recherche de signes en faveur d'une brèche ostéo-méningée, très comparable à la série de Benbihi (81%). Cependant pour Piek , le traumatisme crânien était grave pour 13,51% des cas, modéré pour 50% et léger pour 36,49% des cas. La brèche ostéo-méningée (BOM) post-traumatique correspond à une solution de continuité ostéoméningée qui permet au liquide cérébrospinal (LCS) de s’écouler dans une cavité aérique de la base du crâne. Ainsi la rhinorrhée était présente chez 10,37% de tous les patients hospitalisés pour fracture de l’étage antérieur dans notre service. Elle survient dans la moitié des cas durant les premières 48h avec augmentation de cette fréquence de 8% durant la première semaine . D'expression variable, elle est difficile à mettre en évidence chez un patient intubé, il faut penser à la rechercher le matin sous la forme d'une tache claire sur l'oreiller. Dans sa forme typique, de diagnostic aisé, elle est décrite comme un écoulement par le nez de liquide clair, intermittent, souvent favorisé par la position tête penchée en avant. La recherche de glucose dans cet écoulement par bandelette est définitivement obsolète, du fait de la présence de celui-ci dans les sécrétions nasales. Lorsque le recueil de l’écoulement est possible, c'est le dosage de la b2-transferrine, protéine hautement spécifique du LCS, absente des autres fluides de l'organisme, qui confirme la rhinorrhée . Cette rhinorrhée se complique de méningite dans 7 à 30% [1, 4]. Dans notre série, 3 cas de méningites étaient notés parmi les 14 patients présentant une rhinorrhée franche à l'admission soit une fréquence de 21,4%. Herbella a étudié la relation entre le « raccoon eyes sign » et les fractures de la base du crâne dans une étude faite sur 50 cadavres. Il a trouvé que ce signe était associé aux fractures de la base du crâne dans 48% des cas. Dans notre série, 67% des patients présentaient une ecchymose péri-orbitaire (Figure 5), dans les trois quarts des cas elle était bilatérale. Par conséquent ce signe reste utile pour s'orienter vers une fracture de la base du crâne en particulier de l'os frontal. Une plaie cranio-cérébrale a été associée au traumatisme de la base chez 36,8% de nos malades majorant ainsi le risque infectieux lorsqu'il ya un retard de diagnostic et de prise en charge.
Les radiographies du crâne ne sont plus d'actualité dans le bilan des traumatismes de l’étage antérieur de la base du crâne. Lorsqu'ils sont réalisés, ils peuvent objectiver une fracture de la voute, du sinus frontal ou une pneumocéphalie. La tomodensitometrie est l'examen clé dans le bilan lésionnel des fractures de la base du crâne, des coupes fines de 1 à 2 mm dans les plans coronal et axial seront réalisées en fenêtre osseuse et parenchymateuse. Elle permettra d'objectiver le défect même en l'absence de rhinorrhée , son siège, le nombre de fractures, la présence de pneumocéphalie ou d'autres lésions associées (hématome extra ou sous dural, contusion, embarrure, lésions du massif facial…) Elle permet enfin de classer la lésion et de poser l'indication opératoire. Certains auteurs ont proposé une méthode de classification automatique informatisée qui serait plus objective et permettrai un gain de temps considérable. L'IRM n'a pas d'intérêt en urgence vu que le scanner haute résolution permet une bonne analyse des lésions, cependant elle est très utile pour localiser la brèche en présence de rhinorrhée alors que le scanner ne montre pas de brèche. La prise en charge thérapeutique a comme buts de protéger l'encéphale sur les plans mécanique et infectieux, tarir l’écoulement et fermer une éventuelle brèche ostéo-méningée, prévenir les méningites à répétition qui engagent le pronostic vital du malade.
La mise en condition du patient commence sur le lieu du traumatisme surtout en cas de coma avec le maintien des fonctions vitales, l'intubation oro-trachéale (jamais d'intubation naso-trachéale ni de sonde nasogastrique en cas de suspicion d'une fracture de l’étage antérieur ). Une vaccination anti-pneumococcique est toujours de mise. L'utilisation d'une antibiothérapie prophylactique est très controversée et n'a pas prouvé son efficacité dans la prévention de méningite en cas de trauma crânien ouvert. Le traitement anti-comitial a été largement utilisé dans notre série surtout en cas de contusion cérébrale, on préfère le valproate de sodium à la dose de 1,5g par jour au phénobarbital qui présente un grand nombre d'effet secondaires. L'acétazolamide a été utilisé chez les patients présentant une rhinorrhée à la dose de 750mg par jour. Les ponctions lombaires déplétives peuvent être d'un grand apport pour favoriser la cicatrisation spontanée d'une BOM post-traumatique. Parfois, on aura recours à un drainage spinal placé pendant quelques jours.
Pour explorer un étage antérieur de la base du crâne notre équipe utilise les voies neurochirurgicales classiques qui commencent par une incision coronale allant d'un tragus à l'autre suivant la ligne sinusoïdale d'implantation des cheveux (Figure 6). Le décollement du lambeau de scalp vers l'avant est associé à la découverte des muscles temporaux jusqu'aux piliers orbitaires externes. Il faut prendre garde à ne pas dénuder ces muscles trop bas pour ne pas léser la branche frontale du nerf facial. Par ailleurs, selon leur emplacement et leur importance, les plaies cutanées peuvent être utilisées pour l'exploration voire le traitement des fractures. A ce stade, il y a trois manières d'accéder aux lésions de la base, notamment en fonction de leur étendue: la voie transfrontale (Figure 7): au-dessus des sinus, un volet uni- ou bilatéral, donne accès à la base du crâne en limitant les risques d'anosmie; la voie trans-sinusienne: elle réalise un volet au ras des arcades sourcilières traversant les sinus frontaux. Elle permet un accès plus tangentiel vers la base du crâne et ses lésions, en imposant un écartement moindre au cerveau pour accéder au jugum, ce qui limite le risque d'oedème cérébral. L'anosmie est quasiment inéluctable si l'abord est bilatéral; et la voie transfracturaire ou trans-lésionnelle qui représente souvent un accès associé à l'un des deux précédents. Outre d’éviter parfois la réalisation d'un volet osseux, elle permet l'inventaire des lésions sous jacentes à la fracture.
Quelle que soit la voie d'abord, un temps d'exploration durale est indispensable. Il peut se limiter à un décollement de la dure-mère, très antérieur si les lésions intéressent la face postérieure du sinus frontal, épargnant ainsi l'odorat. Si ces lésions s’étendent en arrière, l'exploration doit pouvoir aller jusqu'au jugum sphénoïdal et au tubercule de la selle sacrifiant ainsi l'odorat. L'exploration intradurale impose l’écartement doux et progressif des lobes frontaux. Si cette voie intradurale est unilatérale, l’épargne olfactive devient possible mais avec le risque d'ignorer une fistule proche des filets olfactifs moins bien explorés. L'abord intradural permet aussi l'accès aux lésions cérébrales éventuelles, mais c'est la voie extradurale qui est la mieux adaptée pour la suture des lésions dure-mériennes. Cette suture se fait par des points simples ou un surjet, à l'aide d'un fil non résorbable 4/0. Pour en garantir l’étanchéité, une doublure doit être assurée par lambeau libre ou pédiculé d’épicrâne garni de colle biologique, ou par les lambeaux aponévrotiques du fascia lata ou du muscle temporal [1, 4, 9]. Il faut proscrire les plasties synthétiques dans cette région à priori contaminée. Au total on a utilisé 74% d'abords frontaux bilatéraux, 21% étaient unilatéraux, chez un cas à travers une esquillectomie, et chez un malade à travers un volet fronto-temporal déjà réalisé pour évacuation d'un hématome extra dural. La brèche a été retrouvée et suturée chez 91% de nos malades alors qu'elle s'est révélée infructueuse chez 9% faisant même discuter l'indication opératoire. Le site le plus fréquent de la brèche est la lame criblée de l'ethmoïde (61,36% de nos patients contre seulement 23% dans la série de Prosser ).
La crânialisation des sinus frontaux est la règle après effraction traumatique ou chirurgicale classique de leurs parois, après coagulation et excision la plus complète possible de la muqueuse, la cavité est remplie par des fragments musculaires pour favoriser la fibrose. L’épicrâne est ensuite inversée en dedans pour tapisser la base du crâne fermant ainsi la communication entre la base du crâne et les lobes frontaux, le tout renforcé de colle biologique. Le volet est ensuite remis en place et fixé. L'abord endoscopique endonasal [1, 10] permet de visualiser l’écoulement du LCS au niveau de l'orifice muqueux, soit après localisation de la fistule par les examens d'imagerie, soit lorsque ceux-ci ne la retrouvent pas. Dans le même temps opératoire, elle permet de colmater la brèche au niveau de l’écoulement muqueux. Malheureusement notre équipe n'a pas encore l'expérience de cette voie.
Concernant les indications, pour les fractures du sinus frontal ainsi que les fistules de LCR , les indications incluent: une fracture de la table externe avec défomation dysesthétique; une fracture avec obstruction évidente du canal nasofrontal; une fracture de la table interne avec déplacement supérieur à l’épaisseur de la voute prédisant une lacération durale; une fistule de LCS réfractaire; une plaie cranio cérébrale avec fistule de LCS; une pneumocéphalie avec fistule de LCS; la survenue d'une méningite lors de la surveillance d'une rhinorrhée; la survenue tardive d'une rhinorrhée; un défect de la base du crâne avec hernie cérébroméningée à travers ce défect.
Au terme de cette exploration la brèche a été retrouvée et colmatée avec succès chez 91% des malades de notre série avec une bonne évolution clinique. Chez les 9% restants il s'agissait de patients avec un tableau clinique et radiologique évocateur de brèche ostéo-méningée sans rhinorrhée, l'exploration intra et extra durale n'a pas retrouvé de brèche. Une brèche per-opératoire accidentelle est survenue chez 4 patients, mais dans tous les cas la fermeture était aisée. Aucun cas de mortalité péri-opératoire n'a été noté dans notre série. Enfin on a du reprendre 2,19% des patients pour récidive de la rhinorrhée.
Les complications sont essentiellement infectieuses et peuvent se manifester de façon précoce ou tardive. Les séquelles résultent d'une erreur de diagnostic, d'un bilan lésionnel incorrect, d'un traitement primaire mal adapté ou insuffisant ou d'une complication du traitement initial et parfois de lésions graves et complexes. L'anosmie est une séquelle souvent définitive ou de récupération très partielle, elle peut être liée aux lésions initiales quand elles atteignent le complexe frontoethmoïdal ou aux explorations d'une rhinorrhée. 3 cas de notre série ont nécessité une exploration intra et extra durale avec sacrifice du reste des filets olfactifs engendrant ainsi une anosmie définitive, ailleurs il n'y avait pas d'aggravation de l'hyposmie causée par le traumatisme.
Toute rhinorrhée post-traumatique nécessite une exploration systématique sans passer par les moyens médicaux, le timing idéal: c'est la disparition de l'oedème cérébral pour faciliter l'exploration, ceci est en général possible à partir de la 72ème heure sauf dans les cas associés à une plaie crânio-cérébrale ou une autre lésion intra crânienne (hématome extra-dural, sous-dural…) nécessitant une exploration en urgence.
Les tumeurs de l'enfant sont dominées par les tumeurs du blastème, les lymphomes et les sarcomes. Ces derniers peuvent se présenter sous forme de tumeurs à petites cellules rondes . La biopsie radioguidée percutanée joue un rôle de plus en plus croissant dans le diagnostic et la prise en charge. Elle permet d'obtenir un matériel adéquat pour l’étude histopathologique, immunohistochimique, cytogénétique et de biologie moléculaire [1, 2]. Cet examen est plus performant que la cytologie et constitue une alternative à la biopsie chirurgicale invasive. L'intérêt de notre étude est d’évaluer la valeur diagnostique des biopsies radioguidées observées au Laboratoire d'Anatomopathologie de l'Hôpital d'Enfants de Rabat (HER).
L’étude a porté sur l'exploitation de 78 fiches anatomopathologiques de biopsies radioguidées prises en charge au Laboratoire d'Anatomopathologie de l'HER durant la période de janvier 2008 à décembre 2011. Les données étudiées étaient les suivantes: l’âge, le sexe, la localisation de la lésion, le diagnostic morphologique et le diagnostic final après immunomarquage.
Les principales données cliniques sont répertoriées dans le Tableau 1. L’âge moyen de nos patients était de 5 ans et 10 mois (3 mois à 15 ans) avec une prédominance masculine (65,4% de garçons- 34,6% de filles). La biopsie a été réalisée dans 93,5% des cas pour tumeur primitive, dans 5% des cas pour métastases et dans 1,5% des cas pour récidive tumorale (Tableau 2). Le siège de la biopsie était comme suit: (Figure 1): abdominal dans 63 cas (80%): masse d'espace (52,5%), surrénalien (19,2%), rénal (2,5%), hépatique (3,8%), hépatosplénique et rectal (1,2% chacun); thoracique dans 12 cas (15%): Médiastinal (9%), pulmonaire (3,8%) et médiastinopulmonaire (2,5%); thoracique et abdominal dans 2 cas (2,5%); sacré dans 1cas (1,2%). Les biopsies étaient échoguidées dans 70 cas (90%) et scannoguidées dans 8 cas (10%). Le diagnostic histologique a été posé dans 89% des cas avec recours à un complément immunohistochimique dans 35 cas (45%). Les types histologiques retrouvés étaient par ordre de fréquence décroissant (Tableau 1): tumeurs neuroblastiques (53,8%), lymphomes non hodgkiniens (12,8%), rhabdomyosarcomes (7,7%), sarcome d'Ewing (3,8%), néphroblastomes (2,5%), tumeur myofibroblastique inflammatoire (2,5%), lymphome de Hodgkin (2,5%) et leucémie aigue, ostéosarcome et hépatoblastome (1,2% chacun). Dans 6 cas, le diagnostic histologique n’était pas possible du fait de l'exiguïté du prélèvement et/ou d'un immunomarquage non contributif (4 cas de tumeur abdominal et 2 cas de tumeur médiastinale). Dans 2 cas de tumeur abdominale d'espace, le prélèvement n’était pas tumoral.
En pathologie tumorale pédiatrique et malgré les avancées de l'imagerie médicale, il est important d'avoir un diagnostic histologique pré-thérapeutique . Chez l'enfant, on peut avoir recours à la cytoponction, à la biopsie chirurgicale ou bien à la biopsie percutanée radioguidée . La cytoponction a été proposée comme méthode de choix dans le diagnostic des tumeurs solides de l'enfant. Cependant, les tumeurs à cellules rondes, peuvent avoir un aspect cytologique similaire nécessitant alors une vérification histologique . La biopsie radioguidée est un moyen diagnostique très utile dans le diagnostic des tumeurs malignes de l'enfant et moins invasif que la biopsie chirurgicale. Elle est de plus en plus pratiquée en oncologie pédiatrique notamment pour la prise en charge des tumeurs solides et des lymphomes . Elle est d'un apport majeur dans les tumeurs difficiles à réséquer et celles qui peuvent bénéficier d'une chimiothérapie néo adjuvante. Le prélèvement biopsique obtenu permet généralement de réaliser l’étude histopathologique, immunohistochimique et moléculaire. Les séries cliniques publiées sur les biopsies radioguidées ont montré un taux de précision diagnostique de 65 à 100% .
Description de la biopsie radioguidée: la technique de biopsie: elle est la même pour de nombreux sites avec quelques particularités pour les tumeurs hépatiques et pulmonaires . Le plus souvent, on a recours à l'anesthésie générale ou à la sédation [4, 5] pour contrôler l'anxiété et les mouvements de l'enfant. Après la réalisation d'une incision cutanée de 2 à 3 mm, le trocart est dirigé sous contrôle radiologique vers la lésion. Le doppler couleur permet d'identifier et d’éviter les vaisseaux sanguins . On utilise des aiguilles de 22 gauge .
Le choix entre l’échographie et le scanner: il est préférable d'utiliser l’échographie pour les lésions qui peuvent être visualisées par cette technique [1, 4]. Couplée au doppler, elle permet d’éviter les lésions vasculaires accidentelles , l’étude de la vascularisation de la tumeur et le choix de zones viables à prélever . Les lésions peu visibles à l’échographie, les lésions pulmonaires et les lésions osseuses de la colonne vertébrale et du pelvis sont mieux approchées par le scanner [1, 4].
Taille et nombre des fragments biopsiques: l’étude morphologique de routine et de biologie moléculaire nécessite une taille adéquate . Celle-ci n'est pas prédéterminée pour tous les types de tumeurs. Elle n'est pas cruciale pour les tumeurs uniformes, à l'inverse des tumeurs hétérogènes qui nécessitent la réalisation de biopsies multiples dans différents sites [7, 8]. D'autres tumeurs comme les lymphomes, où l'architecture de la prolifération joue un rôle diagnostique important, nécessitent des biopsies relativement larges .
Résultats: la biopsie radioguidée permet d'obtenir un diagnostic histopathologique dans 65 à 100% des cas selon les séries . En général, les résultats sont significatifs pour les tumeurs primitives que les récidives, pour les tumeurs malignes que bénignes et pour les lésions larges que petites .
Causes d’échec de la biopsie radioguidée: l’échec est lié soit au geste biopsique qui ne ramène pas le tissu tumoral approprié, soit à un échantillonnage non représentatif . Ceci peut être réduit par la réalisation de biopsies larges et multiples intéressant différents sites de la tumeur et évitant les zones de nécrose .
Avantages par rapport à la biopsie chirurgicale et à la cytologie: la biopsie radioguidée est de réalisation plus facile et plus rapide, moins invasive, entraine moins de morbidité et permet de démarrer le traitement rapidement sans suites postopératoires [7, 9]. Dans une étude brésilienne ayant portée sur 101 biopsies scanno-guidées, les résultats étaient similaires à la biopsie chirurgicale avec un diagnostic histologique dans 76,6% et 90,8% des cas respectivement (.05 < P <.10) . Quant à la cytologie, elle est souvent peu utile pour le diagnostic des tumeurs de l'enfant . Plusieurs types de tumeurs, en particulier les tumeurs à cellules rondes de l'enfant peuvent avoir le même aspect cytologique . Les travaux rapportés ont conclu que la biopsie radioguidée a une valeur diagnostique supérieure à la cytoponction avec une sensibilité de 95% et 77% respectivement .
Complications: la biopsie radioguidée est moins utilisée chez l'enfant que chez l'adulte . Ceci est du au risque de traumatiser accidentellement un organe vital, d'entrainer des hémorragies et des infections chez des enfants déjà altérés ou une diffusion de la tumeur le long du trajet biopsique . Ces complications sont devenues très rares avec le développement des techniques radiologiques. L'essaimage de la tumeur à travers le trajet de la biopsie est une complication connue de la cytoponction et de la biopsie percutanée . Sa fréquence va de 1/625 à 1/8500 cas . Deux cas d'essaimage tumoral ont été rapportés dans la population pédiatrique chez des patients suivis pour néphroblastomes .
Le neuroblastome: 42 cas ont été diagnostiqués dans notre série soit 54% des cas. Le neuroblastome est la tumeur solide extra-craniale maligne la plus fréquente de l'enfant . Il représente 8% des cancers de l'enfant et 15% de causes de décès par cancer dans cette tranche d’âge. C'est une tumeur qui dérive des cellules neuroectodermiques primitives du système nerveux sympathique. Les modalités évolutives sont diverses allant de la rémission spontanée au la diffusion métastatique précoce . Le traitement dépend de l’âge du patient, de l'extension de la maladie et des facteurs histologiques et génétiques. La biopsie chirurgicale a été le pilier du diagnostic définitif du neuroblastome . La biopsie radioguidée a été proposée comme une alternative moins invasive. Le tissu obtenu permet non seulement l’étude morphologique mais également l'analyse des facteurs pronostiques comme le N-myc et la ploïdie . Du fait de l'hétérogénéité de cette tumeur, le sous type histologique ne peut être déterminé avec précision sur une biopsie. Ceci n'est pas un problème majeur du fait que l'amplification du N-myc, la délétion du bras court du chromosome 1 et les anomalies du bras long du chromosome 17 ont un impact sur le pronostic qui dépasse de loin la caractérisation du sous type histologique dans la majorité des cas . Une étude récente de Hassan et coll. a démontré qu'il n'y a pas de différence significative entre la biopsie percutanée et la biopsie chirurgicale. Cependant, cette dernière a été plus fréquemment associée à des complications majeures .
Les lymphomes: 10 cas ont été diagnostiqués dans notre série soit 13% des cas. Les lymphomes non hodgkiniens représentent environ 10-15% . Ils diffèrent des lymphomes de l'adulte car ils sont presque tous de haut grade histologique de malignité, ont une architecture diffuse et une atteinte fréquente extra-ganglionnaire. Trois groupes histologiques prédominent chez l'enfant: le lymphome de Burkitt de topographie essentiellement abdominale, le lymphome lymphoblastique de localisation médiastinale prédominante et le lymphome anaplasique à grandes cellules. Ces tumeurs progressent vite. Le traitement est différent pour les 3 groupes histologiques et nécessite un diagnostic rapide et de certitude. Dans les localisations profondes abdominales et médiastinales, les biopsies radioguidées permettent le plus souvent de poser le diagnostic de lymphomes et de son type histologique [1, 13]. Dans une étude publiée par Garret et coll, le diagnostic histologique a été obtenu dans 77% des cas . Pour le lymphome de Hodgkin, dans les localisations profondes abdominales et médiastinales, les biopsies radioguidées permettent le plus souvent de poser le diagnostic . Le problème de diagnostic différentiel sur un matériel exigu se pose avec les thymomes .
Les sarcomes des tissus mous: 6 cas ont été diagnostiqués dans notre série soit 7,7% des cas. C'est un groupe hétérogène de tumeurs malignes qui se développent à partir du mesoderme. Ils représentent 8 à 10% des tumeurs malignes de l'enfant et de l'adulte jeune . Le rhabdomyosarcome représente environ la moitié des sarcomes de l'enfant . Les autres sarcomes rencontrés chez l'enfant sont le groupe de PNET/sarcome d'Ewing, le synovialosarcome, le sarcome alvéolaire, le fibrosarcome infantile, le sarcome indifférencié et peu différencié et la tumeur desmoplastique à petites cellules rondes. La biopsie percutanée permet une chirurgie adaptée au type histologique ou la mise en œuvre d'un éventuel traitement néoadjuvant . Les prélèvements percutanés sous imagerie sont actuellement un standard de prise en charge initiale des tumeurs conjonctives . La démarche diagnostique des tumeurs des tissus mous de l'enfant est particulière car de nombreux sarcomes peuvent avoir un aspect histologique semblable . Le pathologiste a souvent recours à l'immunohistochimie et à la biologie moléculaire pour poser le diagnostic.
Le néphroblastome: c'est une tumeur maligne embryonnaire développée à partir des cellules du blastème néphrogénique. Il représente environ 85% des tumeurs du rein de l'enfant . L’âge moyen est de 36 mois chez les garçons et de 42 mois chez les filles. L'aspect histologique est classiquement celui d'un néphroblastome triphasique associant un contingent blastémateux, épithélial et mésenchymateux . Des formes biphasiques et monophasiques sont possibles de même que des foyers de différenciation hétérologue . Selon le protocole de la SIOP appliqué dans notre formation, les tumeurs rénales ne sont pas biopsiées et le diagnostic est radioclinique; elles sont traitées par une chimiothérapie préopératoire suivie par une néphrectomie chez les enfants âgés de plus de 6 mois .
La tumeur myofibroblastique inflammatoire: il s'agit d'une tumeur à malignité intermédiaire faite de d'une prolifération de cellules fusiformes associées à un infiltrat inflammatoire de lymphoplasmocytes et de polynucléaires . C'est une tumeur de localisation ubiquitaire qui peut se voir chez l'enfant et l'adulte. Les récidives sont possibles et la transformation maligne est rare. Chez l'enfant, la localisation abdominale est plus fréquente que la localisation pulmonaire . Sur le plan immunohistochimique, les cellules tumorales expriment l'anticorps anti Actine muscle lisse et l'ALK dans 50% des cas.
L'hépatoblastome: les tumeurs malignes du foie représentent environ 1% des tumeurs malignes de l'enfant dont les 2/3 correspondent à l'hépatoblastome . Les garçons sont plus touchés que les filles. L’âge moyen au moment du diagnostic est de 18 mois. Histologiquement, il rappelle le foie embryonnaire et fœtal . La biopsie percutanée peut être utilisée pour établir le diagnostic d'hépatoblastome . Les autres diagnostics retrouvés dans notre série sont le sarcome d'Ewing (3 cas), la leucémie aigue (1 cas) et l'ostéosarcome (1 cas).
Les lésions hépatiques: la biopsie radioguidée peut jouer un rôle essentiel dans le diagnostic des lésions hépatiques de l'enfant, quelles soit focales ou diffuses . La biopsie percutanée est anodine chez les enfants ayant un bilan normal de la crase sanguine. Le doppler couleur est utilisé afin d’éviter les gros vaisseaux. Elle permet d'instaurer une chimiothérapie néoadjuvante pour les tumeurs chimiosensibles. Elle permet le diagnostic des hépatoblastomes et des carcinomes hépatocellulaires. En cas de contre indications, la biopsie peut être faite par voie transjugulaire .
Les lésions pulmonaires: la biopsie radioguidée doit être considérée comme le moyen diagnostic de première ligne dans la pathologie pulmonaire . Les biopsies peuvent être échoguidées pour les lésions pleurales et pulmonaires superficielles, mais le plus souvent on a recours au scanner .
Dans notre série, toutes localisations et tous diagnostics confondus, le diagnostic histopathologique était posé dans 89% des cas. La tumeur la plus fréquente était le neuroblastome suivi des lymphomes non hodgkiniens. Dans 10% des cas, la biopsie était non concluante pour les raisons suivantes: matériel non représentatif, matériel tumoral mais peu représentatif, immunomarquage non contributif. Cette technique nécessite une étroite collaboration entre clinicien, radiologue et pathologiste pour discuter son indication à fin de diminuer le nombre de biopsies peu ou non représentatives.
La maladie de Steinert ou DM1 est une maladie génétique à transmission autosomique dominante caractérisée par une myotonie (lenteur à la décontraction musculaire) et une atteinte multisystémique: musculaire, neurologique, oculaire, respiratoire, digestive, endocrinienne et cardiaque. Il s'agit de la plus fréquente des dystrophies musculaires héréditaires de l'adulte avec une prévalence de 1 à 10 cas pour 100 000 habitants . Elle se caractérise sur le plan génétique par une mutation du gène codant pour la protéine DMPK (myotonic dystrophy protein kinase) situé sur le bras long du chromosome 19 (19q13, 3) et une expansion du triplet cytosine-thymine-guanine (CTG) (plus de 50 triplets), avec comme corollaire une accumulation intranucléaire de l'ARN complémentaire des CTG et réduction du taux de la protéine DMPK. Cette dernière est ubiquitaire mais s'exprime essentiellement dans le muscle squelettique et cardiaque. L'atteinte cardiaque est fréquente et, bien que souvent asymptomatique, conditionne le pronostic vital et explique en partie le taux élevé de mort subite rencontré dans cette affection.
18 patients atteints de dystrophie myotonique de type 1 (DM1) et appartenant à 9 familles ont été colligés au service de cardiologie B (laboratoire de Rythmologie) sur une période de 3 ans s’écoulant de septembre 2009 à décembre 2012. Ces patients ont été vus initialement au service de Neurologie où le diagnostic de DM1 a été retenu en se basant sur l'histoire clinique, la myotonie, les données de l’électromyogramme et l’étude génétique. Les patients ont bénéficiés d'un examen ophtalmologique, endocrinien et digestif puis ils ont été adressés dans notre structure à la recherche systématique d'une atteinte cardiaque associée. L'exploration cardiaque comporte un examen clinique, un électrocardiogramme, une échocardiographie transthoracique, un Holter rythmique de 24 heures, et pour quelques patients on a eu recours à une épreuve d'effort, un ECG haute amplification, une coronarographie et une étude électrophysiologique (EEP).
Notre série comprend 9 hommes et 9 femmes. Leur âge moyen est de 41,8 +/- 16,2 ans (âges extrêmes: 14 à 71ans) et l’âge moyen au moment du diagnostic est de 38,2 +/- 14,3 ans (âges extrêmes: 14 à 69 ans). La durée d’évolution de la maladie est de 4 ans en moyenne.
Le motif de consultation initial est une fatigabilité à la marche. L'examen neurologique objective une myotonie chez tous les patients ainsi qu'un déficit musculaire distal et trouble de la marche à type de steppage dans 44% des cas. Par ailleurs, on retrouve un ptosis dans 55% des cas, une parésie faciale dans 72% des cas et un trouble de la déglutition dans 22% des cas. L’électromyogramme réalisé chez tous nos patients est de type myogène, et l’étude de l'acide-désoxyribo-nucléique (ADN) leucocytaire a confirmé la dystrophie myotonique de Steinert en objectivant une expansion de triplets CTG supérieure à 37 répétitions. Aucun des patients n'est grabataire. En outre, on note un trouble de la vigilance et de la fonction cognitive chez deux patients.
12 patients (soit 66% des cas) présentent des signes fonctionnels cardiovasculaires avec une prédominance de dyspnée et de lipothymie (Tableau 1). Aucun patient n'est en insuffisance cardiaque. L'ECG de base objective des troubles de la conduction chez 6 patients: un BAV 1er degré dans 3cas(P12, P14, P17) et un trouble de conduction intracardiaque à type de BBDI et BBGC dans 3 cas (P3, P9, P1) (Tableau 2). Seuls 50% de ces patients sont symptomatiques (Tableau 3). Par ailleurs, on note une bradycardie sinusaleasymptomatiquechez un patient (P10), une onde p micro-voltée chez une patiente (P8) aux antécédents de syncope; et un syndrome de Wolf Parkinson White (WPW) dans un cas (P4). L'Holter ECG, réalisé systématiquement chez tous nos patients, objectivedes anomalies dans 50% des cas, à type d'hyperexcitabilité atriale, hyperexcitabilité ventriculaire et dysfonction sinusale (Tableau 2). Aucun cas de BAV paroxystique n'a été noté. Tous nos patients ont eu une ETTqui était normale chez 17 patients avec notamment un VG non dilaté (DTD moyen à 46,5 mm) et une fonction systolo-diastolique correcte (FEVG moyenne à 62%). Le patient P16 présente un prolapsus de la petite valve mitrale responsable d'une insuffisance mitrale grade II. L'ECG haute amplification a été réalisé chez deux patients symptomatiques (P5 et P6) chez qui l'ECG de repos n'objectivait pas de trouble conductif. Ce dernier était normal.
3 patients (P3, P5, P8) ont bénéficiés d'une EEP au début du suivi: P3: patiente asymptomatique et porteuse d'un BBDI. L'EEP est normale; P8: patiente présentant des syncopes et une onde P micro-voltée. L'EEP a objectivé un bloc tronculaire ayant conduit à l'implantation d'un PM DDDR; P5: présente des ondes T négatives en V1 et V2 et une hyperexcitabilité ventriculaire stade II de LOWN. L’épreuve d'effort ainsi que l'ECG haute amplification sont normaux. L'EEP n'a pas objectivé de trouble conductif, avec notamment un temps His-Ventricule à 53 ms, et la patiente a été mise sous BB. A noter que le patient P12 porteur d'un BBGC a été perdu de vue sans pouvoir être exploré. De plus, les patients P9, P10 et P11, présentant une dysfonction sinusale, ainsi que les patients P6 et P16, présentant une bradycardie sinusale paroxystique, n'ont pu bénéficier d'une EPP pour causes sociales.
Neufs patients (soit 50% des cas) présentent une cataracte sous-capsulaire postérieure; quatre présentent une dysthyroïdie (3 cas d'hypothyroïdie et un cas d'hyperthyroïdie); quatre patients sont diabétiques (dont un présente également une impuissance sexuelle), deux patients de sexe masculin ont une calvitie précoce et enfin un patient est porteur d'une lithiase de la vésicule biliaire.
Le patient P14 porteur d'un BAV 1er degré et d'une FA paroxystique, a présenté des lipothymies après une année d’évolution et est décédé d'une affection respiratoire avant qu'une EEP n'ait pu être réalisée (manque de moyen). La patiente P8 (porteuse d'un PM DDD) a présenté une syncope après 4 ans d’évolution. Une nouvelle EEP a objectivé un rythme idio-ventriculaire accéléré (RIVA) et elle a été mise sous Sotalol avec une bonne évolution. A noter que sa sœur (connue porteuse de la DM1) est décédée d'une mort subite et a toujours refusé de subir un examen cardiovasculaire de dépistage. Le patient P4 (WPW): accuse des lipothymies et des palpitations après un an d’évolution, avec un BBG sur l'ECG de base. L'ETT a été effectuée montrant une dilatation du VG et une dysfonction systolique modérée à 48% (initialement 56%) avec hypokinésie inférieure et inféro-septale. L'Holter ECG a révélé des ESV stade IV de LOWN. La coronarographie est normale et l'EEP n'a pas objectivé d'anomalies sur les voies de conduction, justifiant l'administration d'un bétabloquant associé à l'IEC.
66% de nos patients présentent des signes fonctionnels cardiaques. Ce taux concorde avec la série de Nishioka portant sur 83 patients dont 56% sont symptomatiques après 6 ans d’évolution . Ce taux peut atteindre 89% à des stades avancés de la maladie et l'atteinte cardiaque peut même être inaugurale dans certains cas. Contrairement aux autres dystrophies musculaires où l’évolution vers une cardiomyopathie dilatée en dysfonction systolique sévère est quasiment inéluctable; dans la maladie de Steinert la fraction d’éjection du ventricule gauche reste longtemps conservée etle pronostic de la DM1 est avant tout lié aux troubles de conduction et tachyarythmies, expliquant un taux de mortalité à peu près 7 fois plus important que dans la population générale . Les autres causes de mortalité seraient un infarctus du myocarde, une embolie pulmonaire et des complications respiratoires (cas du patient 14). Les troubles de conduction sur l'ECG de repos sont les plus fréquemment rencontrés dans notre série avec 16 p.100 de BAV 1er degré et 16 p.100 de trouble de la conduction intraventriculaire. Ces résultats correspondent globalement à ceux de la littérature où le BAV 1er degré est le trouble le plus fréquent (64% dans la série de Chebel , 29% dans la série de Nishioka ), suivi de trouble de la conduction intra-ventriculaire à type d'hémiblocs, BBD et BBG (32% dans la série de Chebel, 25% dans celle de Nishioka). Ces troubles de la conduction sont le plus souvent en rapport avec des anomalies de la conduction infrahissienne [PM] et plusieurs études ont montré qu'un patient sur deux avait un allongement de l'intervalle HV > 70 ms. La dysfonction sinusale, le plus souvent exprimée sous forme de bradycardie sinusale, est retrouvée dans 22% des cas dans notre série, alors qu'elle est moins fréquente dans les études (1 à 2%) [8, 9].
Les troubles du rythme et de la repolarisation sont plus rares (3 à 21%) : nous avons noté dans notre série un seul cas de trouble de la repolarisation et aucun cas de trouble du rythme sur l'ECG de repos. L'Holter ECG est par contre plus sensible pour la détection des hyperexcitabilités atriales et ventriculaires: 16,5% dans notre série, 26% dans la série d'Antonini et 13% dans celle de Chebel . Par ailleurs, l'Holer ECG permet de dépister un BAV paroxystiquedans 3% des cas [7, 12], une tachycardie ventriculaire dans 3% des cas , une fibrillation atriale dans 6 à 9% des cas (5,5% dans notre série) ou encore une dysfonction sinusale (22% de nos patients), passés inaperçus sur le tracé électrique de base. Un ECG haute amplification pourrait également orienter vers la présence d'un trouble conductif puisque son anomalie (QRSD supérieur ou égal à 100 ms et LAS supérieur à 36) est le reflet d'un intervalle HV supérieur à 70 ms avec une bonne sensibilité et spécificité . L'ETT à mis en évidence un prolapsus de la valve mitrale dans un cas (soit 5,5%). Cette anomalie est rapportée dans la littérature chez 0,33 à 33% des patients atteints de DM1 . En outre, la fonction systolique, souvent normale selon la plupart des études , n'a été abaissée que chez un seul patient (dont la coronarographie était par ailleurs normale), probablement en rapport avec une baisse de la réserve coronaire et anomalie de la microcirculation. Quant à l'exploration électrophysiologique, ses indications sont larges dans la maladie de Steinert (Tableau 4) . Elle est indiquée principalement en cas de symptômes ou d'anomalies à l'ECG de surface. Cependant, certains auteurs l'ayant pratiquée systématiquement chez tous leurs patients atteints de DM1, ont obtenu un intervalle HV supérieur à 70 ms chez des patients asymptomatiques et avec ECG de surface normal dans 13 à 30% des cas [12, 17]. Dans notre contexte, vus le coût et le caractère invasif de l'exploration du faisceau de His, on réserve cette dernière aux patients répondant aux critères résumées dans le Tableau 4.
Au terme de la description des troubles conductifs, les recommandations de l'ACC et de l'AHA indiquent l'implantation d'un pacemaker en cas de BAV de haut degré ou complet, symptomatique ou non, en cas de déficience sinusale avec une pause supérieure à trois secondes et en cas de bloc bifasciculaire avec intervalle HV supérieur à 100 ms (Classe I). D'autres indications sont fortement recommandées: patient se plaignant de syncope avec un intervalle HV supérieur ou égal à 100 ms (Classe II a) ou les patients ayant des arythmies atriales symptomatiques avec un intervalle HV long et qui nécessitent un traitement antiarythmique. Certains auteurs plaident pour l'implantation d'un pacemaker prophylactique en cas de découverte à l'EEP d'un intervalle HV supérieur à 70 ms chez un patient par ailleurs asymptomatique [7, 9]. Cependant, le pacemaker n’épargne pas une mort subite d'origine rythmique ventriculaire et il n'existe pas de recommandations à ce jour quant à l'implantation d'un défibrillateur automatique implantable en cas de DM1. Ce dernier est indiqué en prévention secondaire en cas d'arrêt cardiaque sur TV ou FV, ou chez les patients relevant de l'implantation d'un pacemaker et qui présentent une dysfonction ventriculaire gauche ou une tachycardie ventriculaire documentée. L’évolution globale de la maladie de Steinert se fait vers un état grabataire à un âge plus tardif par rapport aux autres dystrophies musculaires, après une durée moyenne d’évolution de 28,4 ans . Aucun de nos patients n'est grabataire, même après 25 ans d’évolution.
L'atteinte cardiaque au cours de la maladie de Steinert est fréquente, évolutive, non corrélée à l'atteinte neuro-musculaire, et souvent responsable d'une mort subite de cause rythmique. Tout cardiologue doit être averti des complications cardiaques et soumettre son patient à un bilan cardiovasculaire minutieux, annuel ou bi-annuel, afin de dépister les troubles rythmiques et/ou conductifs et d'instaurer un traitement à temps. Inversement, devant tout trouble du rythme ou de la conduction du sujet jeune, un examen neurologique s'impose à la recherche d'une dystrophie musculaire type Steinert.