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Pendant l’allocution télévisée du président argentin Mauricio Macri annonçant des mesures sociales pour la classe moyenne, à Buenos Aires, le 14 août. AGUSTIN MARCARIAN / REUTERS Mauricio Macri cherche à redorer son blason auprès des classes moyennes, peu après sa lourde défaite aux primaires, dimanche. Le président argentin a annoncé, mercredi 14 août, une hausse du salaire minimal, des primes ponctuelles, des réductions d’impôts et le gel des prix de l’essence durant trois mois. Destinées aux classes moyennes, ces mesures visent à « donner un coup de pouce aux Argentins », a déclaré le chef de l’Etat, qui brigue un nouveau mandat, lors d’un discours télévisé avant l’ouverture des marchés. « Ce que je vous ai demandé était très difficile, c’était comme d’escalader l’Aconcagua [plus haute montagne des Andes] », a reconnu M. Macri à propos des efforts demandés aux Argentins depuis son arrivée au pouvoir. Parmi le paquet de mesures annoncées figure une hausse du salaire minimal, qui se situe actuellement à 12 500 pesos (190 euros), dont le montant n’a pas été précisé. Une aide sociale extraordinaire de 2 000 pesos (30 euros) sera aussi versée aux employés et une autre de 5 000 pesos (76 euros) aux fonctionnaires et aux forces de sécurité. Une réduction d’impôts sur le revenu est également mise en place pour les salariés. Lire l’analyse économique : Les marchés secoués en Argentine après le revers électoral infligé à Mauricio Macri Dix-sept millions de travailleurs concernés Les petites et moyennes entreprises pourront étaler sur dix ans le remboursement de leur dette auprès des impôts et le prix de l’essence sera gelé durant quatre-vingt-dix jours. Ces annonces concernent « dix-sept millions de travailleurs et leurs familles ainsi que toutes les petites et moyennes entreprises », a ajouté le chef de l’Etat. Mauricio Macri espère ainsi combler son retard avant le scrutin présidentiel du 27 octobre et calmer la grogne sociale dans ce pays englué dans la récession. Alberto Fernandez, un péroniste modéré, et sa colistière Cristina Kirchner, l’ancienne présidente de centre gauche inculpée dans plusieurs affaires de corruption, ont obtenu dimanche 47 % des suffrages aux primaires, contre 32 % pour le tandem composé de Mauricio Macri et du dirigeant péroniste Miguel Angel Pichetto. Si un tel résultat se confirmait lors de la présidentielle, M. Fernandez, 60 ans, serait proclamé vainqueur dès le premier tour : selon la loi électorale, pour être élu, il faut obtenir au moins 45 % des suffrages ou 40 % et une avance de dix points sur le deuxième.
Ces mesures, qui concerneront 17 millions de personnes, sont destinées à la classe moyenne, a dit le chef de l’Etat, qui brigue toujours un nouveau mandat.
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/08/14/hausse-du-salaire-minimal-et-baisses-d-impots-en-argentine_5499460_3210.html
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LASSE RUSSE Alors que je ne suis pas personnellement adepte de ce nouvel art de vivre, je dois me rendre à l’évidence : au fil des mois, mon fils de 8 ans s’est progressivement transformé en survivaliste en culottes courtes. Désormais, la moindre virée au Monoprix, le plus petit ­déplacement hors de notre cocon domestique ne ­s’envisage plus sans l’indispensable paquetage qui l’accompagne jusque dans son lit. Ce petit sac à dos, qu’il désigne lui-même comme son « kit de survie », doit permettre – en théorie – de parer à toute situation d’urgence (tsunami, famine, écharde dans le doigt). Il concentre un ensemble d’éléments disparates que mon fils a amassés au fil du temps, avec la patience d’un écureuil qui thésauriserait les noisettes en vue de l’hiver. Le premier de ces objets visant à conjurer l’angoisse d’un avenir incertain est une lampe de poche à manivelle, achetée chez ­Decathlon. Sa fonction est de prodiguer un éclairage suffisant pour lire Picsou Magazine (également présent dans le paquetage) en cas de panne généralisée du réseau électrique. J’en ai donc tiré un premier enseignement : survivre, c’est non seulement assurer au quotidien l’entretien de ses fonctions vitales, mais aussi être en mesure de continuer à s’amuser, soit une ­façon de perpétuer la culture commune. A quoi bon se forcer à avaler des insectes et dormir dans une hutte de branchages si c’est pour ­s’ennuyer à mourir ? Aspivenin, lampe frontale et boussole Font également partie de la liste de choses indispensables : quatre boîtes d’allumettes récupérées dans un resto routier, deux mousquetons, un paquet de mouchoirs à moitié entamé, une paire de jumelles, une boussole, un cadran solaire portatif, une minitrousse de premiers soins, un sifflet, une bougie, un poignard et un Opinel à bout rond, un petit canif à bout pointu, un outil multifonction intégrant cuillère et fourchette, un Aspivenin, une lampe frontale, une gourde, un pointeur laser, des fruits secs, un stick fluorescent, des lingettes. En discutant avec mon fils, j’appris que ce kit n’était pas tout à fait complet et qu’il manquait, pour bien faire, une bouteille permettant de filtrer l’eau et une pierre à feu. Ce qui est étonnant dans cet engouement, me dis-je, c’est qu’il ne procède ni d’une dynamique imitative ni de la conformation à une volonté extérieure. Même si j’aime bien le voir ramasser des mûres avec ses grands-parents pendant les vacances et attraper des lézards pour se distraire durant les après-midi d’été, je ne lui ai jamais dit : « Tu seras survivaliste, mon fils ! » J’aurais d’ailleurs été fort mal placé pour l’encourager dans cette voie. Car, en la matière, ma compétence se ­limite à ce que j’ai pu mémoriser depuis mon canapé en regardant la série Seul face à la nature (Man vs Wild), soit un ensemble de préceptes difficilement applicables en centre-ville. Si j’ai cognitivement intégré le fait que l’on pouvait dormir dans la carcasse d’un chameau éventré pour se protéger des nuits glaciales du désert et se nourrir de grosses larves gluantes prélevées sous les écorces d’arbres, tout ce savoir reste exclusivement théorique.
L’éducation est une science (moyennement) exacte. Cette semaine, Nicolas Santolaria nous plonge dans ces nouvelles angoisses enfantines liées à la théorie de l’effondrement. Quand le kit de survie évince le doudou.
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2019/08/31/parentologie-mon-fils-est-un-survivaliste_5504770_4497916.html
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Entretien. Maîtresse de conférences en droit privé à l’université de Rennes-I, Marie Mesnil est spécialiste du droit de la procréation. Elle a réalisé sa thèse sur le sujet et publié plusieurs articles dans des revues juridiques sur la persistance des stéréotypes de genre dans le droit de la santé. Dans le cadre de la révision des lois de bioéthique, le gouvernement a mis à l’agenda simultanément l’ouverture de la PMA à toutes les femmes et la question de l’accès aux origines des enfants nés de PMA avec tiers donneur. Faut-il lier ces deux aspects ? Je crois au contraire qu’il est nécessaire de les dissocier. Le mode d’établissement de la filiation pour la seconde mère et l’accès aux origines des enfants issus de la PMA sont deux questions distinctes. Certes il est évident que l’ouverture de la PMA, en banalisant la diversité des façons de « faire famille », conduira la société à changer son regard sur le don de gamètes. C’est une bonne chose, et c’est toute une « culture du secret » qui finira par être remise en cause. L’établissement de la filiation de la seconde mère, selon les règles existantes et mises en œuvre pour les couples hétérosexuels, permettrait de sécuriser la filiation de l’enfant Mais au vu des annonces de la ministre de la santé, Agnès Buzyn, des incertitudes subsistent quant à l’imbrication de ces deux questions. Avec la « déclaration commune anticipée de filiation », le rapport Théry-Leroyer [rendu public en avril 2014, le rapport « Filiation, origines, parentalité » avait été commandé en 2013 par la ministre de la famille de François Hollande, Dominique Bertinotti] donne l’impression d’un régime unifié pour tous les couples ayant recours à la PMA, mais il présente en fait le risque de stigmatiser les seuls couples lesbiens. En effet, on peut s’attendre à ce que les couples hétérosexuels contournent le système et ne mentionnent pas à l’officier d’état civil l’existence de cette déclaration. Cette déclaration commune anticipée de filiation ne pourrait-elle pas résoudre la question de l’accès aux origines ? En réalité, non, et d’ailleurs plusieurs associations d’enfants conçus par PMA y sont réticentes. Il faut savoir qu’avec cette procédure, la mention sur l’acte d’état civil du mode d’établissement de la filiation n’apporte aucune information supplémentaire sur le donneur, mais révèle seulement l’existence d’un don de sperme ou d’ovocyte. Et encore une fois, les couples hétérosexuels auraient toujours la possibilité de contourner cette obligation. Quand bien même on établirait une transmission directe entre les centres de PMA et l’officier d’état civil, il leur suffirait d’aller à l’étranger pour que cela ne soit pas mentionné sur l’acte de naissance.
La spécialiste du droit de la santé Marie Mesnil considère, dans un entretien au « Monde », que l’ouverture de la PMA à toutes les femmes doit prendre la forme d’une extension des modalités applicables aux couples hétérosexuels, pour ne pas créer de différences entre les régimes de filiation.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/07/01/la-genealogie-des-enfants-nes-de-pma-n-est-pas-donnee-par-la-biologie-mais-par-le-droit_5483594_3232.html
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Valérie Gauvin après son but face à la Norvège, le 12 juin à Nice. CHRISTOPHE SIMON / AFP La Coupe du monde de Valérie Gauvin avait mal commencé. Déambulant sur la pelouse du Parc des Princes, les yeux rougis, soutenue par la gardienne remplaçante et amie Pauline Peyraud-Magnin, après avoir appris qu’elle ne serait pas titulaire pour le match d’ouverture entre la France et la Corée du Sud. La raison ? Deux retards et une sanction immédiate de la sélectionneuse, Corine Diacre. Mais Valérie Gauvin est une forte tête. Titularisée face à la Norvège, elle a marqué son premier but en Coupe du monde, avec le titre de joueuse du match à la clé. Un début de Mondial à l’image de la carrière et du caractère de la jeune attaquante de Montpellier, carrière semée d’embûches, mais toujours prête à rebondir. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Coupe du monde féminine 2019 : à Nice, les Bleues testent leur esprit d’équipe « J’étais déçue sur le premier match, mais j’ai montré que je peux être présente et j’ai donné le meilleur de moi, a-t-elle commenté après la rencontre face aux Scandinaves. Pourquoi j’ai été écartée au premier match ? J’ai eu des retards, pas à l’entraînement, mais des retards. Voilà, c’est passé. Mon but, j’espère que c’est le premier d’une longue lignée. » Avec 11 buts inscrits en 21 sélections, la Réunionnaise de 23 ans est déjà sur de bonnes bases. Respect mutuel Rencontrée avant le début de la Coupe du monde au Domaine de Grammont, le centre d’entraînement de l’équipe féminine de Montpellier, Valérie Gauvin ne cachait pas son excitation – toute relative, vu sa timidité – à l’idée de disputer la compétition ultime. « Depuis petite, j’avais pour objectif d’intégrer l’équipe de France. J’ai tout fait pour. Le fait de jouer un Mondial en France est quelque chose d’exceptionnel. Il faut saisir sa chance. » Sa non-titularisation face à la Corée du Sud a donc été d’autant plus difficile à vivre. Valérie Gauvin avait pourtant toutes les cartes en main depuis l’annonce de la liste des 23 Bleues amenées à disputer la Coupe du monde et l’absence de Marie-Antoinette Katoto, la jeune et talentueuse attaquante du PSG, sa principale concurrente sur le front de l’attaque tricolore. Elle s’est appuyée sur son mental d’acier pour rebondir, et rendre la confiance qui lui a été accordée. « Elle avait à cœur de montrer ce qu’elle pouvait apporter à cette équipe, a apprécié Corine Diacre, qui connaît bien la propension de sa joueuse à devoir se faire violence pour avancer. C’est bien, mais il ne faut surtout pas qu’elle s’arrête là. » Les deux femmes se vouent un respect mutuel. Valérie Gauvin a connu sa première sélection avec les Bleues en octobre 2015, lors d’une défaite contre les Pays-Bas (1-2), après avoir été appelée par Philippe Bergeroo. Il lui a fallu attendre deux ans et la nomination de Corinne Diacre pour être convoquée une deuxième fois.
La joueuse de 23 ans a démontré sa force de caractère et son apport à la pointe de l’attaque française après un début de Mondial compliqué.
https://www.lemonde.fr/football/article/2019/06/16/coupe-du-monde-feminine-valerie-gauvin-la-forte-tete_5476890_1616938.html
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« Ça, chapitre 2 », d’Andrés Muschietti, marque le retour d’It, la créature protéiforme qui aime se maquiller en clown. BROOKE PALMER / WARNER BROS. ENTERTAINMENT INC. L’AVIS DU « MONDE » - ON PEUT ÉVITER Pendant presque trois heures, la projection de Ça, chapitre 2 est scandée par un gag à répétition : Bill Denbrough (James McAvoy), le garçon gauche et bègue de Ça, chapitre 1, est devenu écrivain et scénariste, non sans succès. Mais encore et encore, ses interlocuteurs lui demandent quand il réussira à terminer ses histoires aussi brillamment qu’il les commence. L’humour ne réside pas tant dans le badinage littéraire (les dialogues du film sont d’une extrême platitude) que dans le fait indéniable que le deuxième long-métrage qu’Andrés Muschietti a tiré de l’énorme (par le nombre de pages comme par celui des exemplaires vendus) best-seller de Stephen King peut se prévaloir de l’une des fins les plus calamiteuses de l’histoire du cinéma. Le premier chapitre a rapporté presque un milliard de dollars de par le monde Non seulement elle occupe presque un tiers du film, mais elle en défait la cohérence, remplaçant les angoisses (pourtant bien édulcorées) du premier volet par des cataractes d’hémoglobine dans lesquelles pataugent des créatures qui ont l’air d’avoir été récemment licenciées d’un train fantôme de troisième catégorie. Ça, chapitre I avançait prudemment, mais avec une relative subtilité, entre la représentation horrifique de l’american way of life sorti de l’esprit de Stephen King et la nécessité de contenir l’imagination du romancier dans les limites du commerce en gros du cinéma, perfectionnant au passage la notion de cinéma d’horreur familial. Le second chapitre a été conçu pour rééditer cet exploit, si fructueux pour la Warner, puisque le premier chapitre a rapporté presque un milliard de dollars de par le monde. On voit mal comment ce récit boursouflé et interminable y parviendra. Démons intérieurs Vingt-sept ans après les événements rapportés dans Ça, chapitre I, un meurtre homophobe signale le retour d’It, créature protéiforme qui aime se maquiller en clown, dans la ville de Derry (Maine). Des sept adolescents qui avaient réussi à contenir cette force maléfique, seul Mike (Isaiah Mustafa) vit toujours dans la petite ville. Se prévalant d’un serment prononcé un quart de siècle plus tôt, il convoque ses anciens camarades afin de faire barrage au mal. Sans que l’on comprenne bien pourquoi des adultes pour la plupart installés dans la vie laisseraient tout tomber alors qu’ils ne se souviennent pas des événements qui les ont amenés à jurer de se retrouver (le scénario de Gary Dauberman révèle presque systématiquement les incohérences du récit de Stephen King, que le romancier avait réussi à maquiller), un écrivain, une styliste (Jessica Chastain), un architecte (Jay Ryan) et un comique (Bill Hader) à succès prennent le chemin de Derry. Stanley, le petit garçon juif, manquera à l’appel, au contraire d’Eddie (James Ransone), qui tient le rôle du raté de la bande.
Les interprètes adultes de cette deuxième partie de l’adaptation du best-seller de l’auteur de « Carrie » sont soumis à rude épreuve.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/09/13/cinema-ca-chapitre-2-stephen-king-noye-dans-l-hemoglobine_5509800_3246.html
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Avant de s’atteler au « pentester » de l’entreprise, il faut établir ses besoins. QUENTIN HUGON / PIXELS Certaines choses sont trop belles pour être vraies. Comme ce courriel reçu par Marc en janvier 2018. A l’occasion de la nomination de Star Wars 8 aux Oscars, son comité d’entreprise lui annonce qu’un jeu-concours est organisé pour les salariés. A la clé, des mugs, des sabres lasers et des costumes. Pour tenter sa chance, il faut seulement remplir le document Word joint. Les images représentant les lots ne se chargent pas. Le texte suggère d’« activer les macros » pour qu’elles apparaissent. Le salarié s’exécute et lance alors le téléchargement discret d’un logiciel malveillant qui permettra de prendre le contrôle de son ordinateur. Cette fois, Marc a eu de la chance. Le courriel qu’il a reçu n’est pas issu de l’une des 1 869 attaques – pas forcément réussies – signalées en 2018 à l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi). Il a été envoyé par Sylvain Hajri, un consultant mandaté par son employeur pour tester la sécurité de son réseau informatique. Un manquement grave à la sécurité des données de leurs clients peut coûter très cher aux entreprises depuis l’entrée en vigueur du RGPD La démarche est de plus en plus courante au sein des grandes entreprises, conscientes que leurs secrets industriels font l’objet de convoitises, mais aussi qu’un manquement grave à la sécurité des données de leurs clients peut coûter très cher depuis l’entrée en vigueur du règlement général sur la protection des données (RGPD) en mai 2018 – jusqu’à 20 millions d’euros ou 4 % de leur chiffre d’affaires mondial. Pour cartographier leur niveau d’exposition, certaines organisations font donc appel à des experts en intrusion, désignés par le terme anglais pentester (contraction de penetration et tester). Lire aussi En Suisse, on encourage les hackers à pirater le système de vote électronique Evaluer toutes les menaces Avant de s’atteler au test, il faut établir les besoins du client. S’agit-il de trouver des failles ou d’évaluer aussi la réactivité des systèmes de détection internes ? Quelles menaces pèsent sur l’entreprise ? Veut-elle se protéger d’un potentiel employé malveillant, d’un attaquant opportuniste qui chercherait à gagner rapidement de l’argent ou d’une organisation professionnelle qui dispose, elle, de temps et de moyens pour chercher une faille durant des mois ? Faut-il tester seulement un site Web ou aussi les services des sous-traitants et la sécurité du siège social ? L’entreprise et les « pentesteurs » décident également des personnes au courant des tests. Moins les salariés sont informés, plus on s’approche des conditions réelles. Ils doivent aussi s’accorder sur les techniques autorisées. Un e-commerçant appréciera peu qu’un pentesteur paralyse son site pour montrer qu’il est en capacité de le faire.
« Où va le travail ? » – Les entreprises font de plus en plus appel à des consultants pour protéger leurs secrets industriels et les données de leurs clients.
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2019/11/11/profession-pentester-expert-en-intrusion-des-systemes-informatiques_6018758_4408996.html
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Il faut avoir l’estomac bien accroché pour visionner ces images. Dans un bâtiment fermé, six vaches, chacune dans un enclos, avec sur leur flanc… un hublot en plastique d’une quinzaine de centimètres Un technicien vient ouvrir l’équipement avec une clé, effectue un prélèvement, puis met tout son poids pour refermer le clapet. La manipulation est répétée à intervalles réguliers. Nous sommes à Saint-Symphorien, dans la Sarthe, dans une station expérimentale de l’entreprise d’alimentation animale Sanders, filiale du groupe agroalimentaire Avril (Matines, Lesieur, Puget…). Ces images de vaches porteuses de canules, aussi appelées vaches fistulées, tournées en février et mai, ont été obtenues par l’association L214. Les canules, qui permettent un accès direct à la panse des bovins, servent à observer et à étudier leur digestion. Une pratique peu connue du grand public, mais ancienne. Dans les archives de l’Institut national de l’audiovisuel, un documentaire datant de 1970 décrit ces technologies tout en poésie : « Les fistules sont un livre ouvert sur les mystères de la genèse de nos plats favoris. » En France aujourd’hui, quelques dizaines de vaches tout au plus sont concernées. Une trentaine d’animaux sont ainsi appareillés par l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), deux fois moins qu’il y a dix ans, selon Jean-Baptiste Coulon, président du centre de Theix, près de Clermont-Ferrand. Avec quatre poches distinctes d’estomac, parmi lesquelles le rumen fonctionne comme une cuve de fermentation, les vaches ont un fonctionnement digestif particulièrement complexe. « Ces recherches servent plusieurs objectifs, explique M. Coulon : tout d’abord, optimiser l’apport alimentaire des animaux ; limiter les problèmes sanitaires, par exemple les troubles liés au fonctionnement du rumen ; améliorer la qualité des produits, en maîtrisant les matières grasses du lait, qui dépendent de la façon dont sont dégradés les aliments dans la panse ; et enfin, étudier comment limiter les émissions de méthane. » D’autres laboratoires de recherche dans le monde recourent aux bovins fistulés, en Suisse, au Canada ou aux Etats-Unis. La particularité de l’enquête de L214 est de montrer l’usage de « vaches à hublot » par un centre de recherche privé, dont le propriétaire, Sanders, fournit 26 000 élevages en alimentation animale. Contactée, la maison mère, Avril, a précisé que ces expériences sont soumises à l’approbation d’un comité d’éthique et que « l’objectif est de remplacer d’ici à 2025 l’essentiel des tests sur animaux par des méthodes alternatives ». Des canules posées à vie L’INRA, qui assure ne pas fournir d’animaux à des centres privés, travaille notamment à développer d’autres techniques, comme des modélisations, des rumens artificiels ou des capteurs avalés dans le tube digestif animal. Mais pour l’heure, selon Jean-Baptiste Coulon, ces technologies ne permettent pas de se passer complètement de l’observation directe du rumen permise par les canules. « Les canules sont impressionnantes vu de l’extérieur, mais pour nous vétérinaires, c’est très fréquent d’utiliser cette technique pour traiter des vaches qui ont des problèmes digestifs, détaille Bérénice Senez, vétérinaire auprès de bovins à Lamastre (Ardèche). On place, sous anesthésie locale, un trocart, pour permettre aux gaz de s’échapper et ainsi soulager l’animal. » Ces interventions curatives, sur des diamètres de 2 à 3 cm, sont temporaires et la vache cicatrise généralement en quelques jours. En expérimentation scientifique, en revanche, les canules sont posées à vie. Difficile de dire si les vaches souffrent de la pratique. L’intervention chirurgicale en elle-même nécessite la prise d’antalgiques et d’antidouleurs pendant plusieurs jours. Ensuite, une fois la plaie cicatrisée, y a-t-il douleur physique ? Pour l’association L214, cela relève en tout cas d’une « mutilation ». « Ces pratiques sont symptomatiques de comment on traite les animaux et de la course à la performance, estime Sébastien Arsac, responsable des enquêtes pour L214. On considère les vaches comme des rumens sur pattes. » L’association a annoncé son intention de porter plainte auprès du procureur de la République du Mans, en contestant notamment le « caractère strictement nécessaire » des expérimentations menées par Sanders, et demande l’interdiction de ces recherches, privées et publiques.
L’association L214 diffuse des images de bovins équipés de canules en plastique permettant un accès direct à leur système digestif, provenant d’un centre de recherche privé sur la nutrition animale.
https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/06/20/des-hublots-dans-la-panse-de-vaches-pour-etudier-leur-digestion_5478758_3244.html
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Quoi de mieux qu’un sondage pour réussir à se déterminer ? Depuis plusieurs semaines, Benjamin Griveaux et Cédric Villani guettent le choix du MoDem, qui n’a toujours pas décidé quel candidat soutenir aux élections municipales Paris en mars 2020. Celui officiellement investi par La République en marche (LRM) comme son dissident aimeraient obtenir l’appui du parti centriste pour démontrer leur capacité à rassembler, et ainsi faire la différence avec l’adversaire. Las, le parti de François Bayrou semble avoir d’autres plans en tête. Selon plusieurs sources au sein de LRM, le MoDem aurait en effet commandé un sondage testant les candidatures dans la capitale… d’Agnès Buzyn, ministre de la santé, et de Jean-Louis Borloo, ancien ministre de Nicolas Sarkozy. François Bayrou rechigne en effet à soutenir Benjamin Griveaux, qu’il trouve trop clivant, et craint que son duel fratricide avec Cédric Villani ne conduise la majorité à la défaite face à la maire sortante Anne Hidalgo. « François pense que c’est mal barré, qu’il faut trouver une porte de sortie, souffle un proche. On ne peut pas rester dans une impasse à six mois d’une élection. » Article réservé à nos abonnés Lire aussi Municipales 2020 à Paris : entre Benjamin Griveaux et Cédric Villani, la bataille des frères ennemis Bayrou cherche un troisième homme Du côté du MoDem, on feint l’ignorance ou on dément (mollement) avoir commandé une telle enquête. « Je ne suis pas au courant, je n’ai pas vu ce sondage », assure Maud Gatel, présidente de la fédération parisienne du parti centriste. « Ce n’est pas le MoDem qui l’a commandé, contrairement à ce que beaucoup croient », jure de son côté un cadre bayrouiste, qui assure néanmoins avoir vu le dit sondage : « On m’a montré que Borloo et Buzyn étaient testés, mais je n’ai pas les résultats. » « François compile beaucoup de sondages, il regarde attentivement », évacue-t-on dans l’entourage de M. Bayrou. Ces atermoiements irritent au sein de LRM. « Comme Bayrou s’est toujours rêvé en troisième homme, il en cherche un pour Paris », s’agace un cadre macroniste. Si les relations du maire de Pau sont fraîches avec Jean-Louis Borloo, son vieux rival centriste, « il a, en revanche, beaucoup d’affection pour Agnès Buzyn », rappelle un proche. M. Bayrou avait déjà essayé d’imposer sa candidature comme tête de liste aux élections européennes, en mai. « Elle a toujours dit qu’elle n’avait pas l’intention d’être candidate compte tenu des dossiers qui sont les siens et du fait, qu’étant parisienne, le sujet était clos avec la désignation du candidat LRM », insiste-t-on dans l’entourage de Mme Buzyn. « Borloo n’est pas crédible, et Buzyn n’a pas assez de charisme et n’est pas assez politique », tranche pour sa part un dirigeant macroniste. La formation de François Bayrou, elle, donne rendez-vous « fin octobre » pour dévoiler son choix. « Je me souviens de précédentes élections où les candidats de l’automne n’étaient pas ceux de janvier. Beaucoup de choses peuvent se passer », estime Maud Gatel. Article réservé à nos abonnés Lire aussi François Bayrou, allié agile et affectif de Macron
Le MoDem aurait commandé un sondage pour évaluer les candidatures de l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy et de l’actuelle ministre de la santé.
https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/10/11/municipales-le-mysterieux-sondage-qui-teste-les-candidatures-borloo-et-buzyn-a-paris_6015106_823448.html
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HSBC à New York, le 7 août 2019. La banque britannique a annoncé, le 5 août, la suppression de 2 % de ses effectifs, soit près de 4 000 postes. BRENDAN MCDERMID / REUTERS « Les perspectives ont changé. » Le communiqué du géant bancaire britannique HSBC, publié à l’occasion de ses résultats semestriels, lundi 5 août, ne laisse planer aucun doute sur la période d’austérité qui attend l’institution. Le conseil d’administration a exclu John Flint, patron du groupe depuis moins de deux ans, et son programme d’investissement de plus de 15 milliards de dollars ( 13,4 milliards d’euros). Place désormais à un plan de restructuration, la banque ayant annoncé la suppression de 2 % de ses effectifs, soit près de 4 000 postes. Le groupe, sis à Londres mais très puissant en Asie, est fragilisé à la fois par les tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine et par les incertitudes entourant le Brexit. Comme lui, toutes les banques européennes adoptent une approche défensive. « Le rythme de croissance en Europe est aujourd’hui très bas, autour de 1 % à 1,5 %, et il est difficile de voir où nous en sommes dans le cycle économique. Les banques ne peuvent donc plus fonder leur stratégie sur un développement de leur activité », note Laurent Quignon, responsable de l’équipe d’économie bancaire au sein de BNP Paribas. Début juillet, c’est Deutsche Bank, la première banque allemande, en crise chronique depuis plusieurs années, qui annonçait le plus grand plan de restructuration de son histoire, avec la suppression de 18 000 emplois – un cinquième de ses effectifs. La britannique Barclays a de son côté indiqué qu’elle avait supprimé 3 000 postes au cours du second trimestre. UniCredit a revu à la baisse son objectif de chiffre d’affaires D’autres plans massifs sont attendus. UniCredit, la première banque italienne, a déjà supprimé 14 000 emplois depuis l’arrivée à sa tête du banquier français Jean-Pierre Mustier, il y a trois ans. Selon l’agence Bloomberg, l’établissement envisagerait de supprimer à nouveau jusqu’à 10 000 emplois (près de 10 % des postes) dans le cadre de son futur plan stratégique, qui doit être présenté en décembre. Sans confirmer l’ampleur de la restructuration, le patron de l’institution a averti ses salariés que « toute évolution du groupe (...) [serait] gérée à travers le système de retraite anticipée ». Lors de la présentation de ses comptes à mi-année, le 7 août, UniCredit a dû revoir à la baisse son objectif de chiffre d’affaires pour 2019, mettant en cause le contexte de taux d’intérêt bas. Pour les mêmes raisons, en début d’année, BNP Paribas et Société générale avaient, elles aussi, dû renoncer à certains objectifs financiers de leurs plans stratégiques et annoncer de nouvelles mesures d’économie, dont un plan de suppression de 1 600 postes chez Société générale.
Sous la pression des taux bas, des tensions sino-américaines et du Brexit, les établissements financiers du Vieux Continent multiplient les mesures draconiennes.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/08/13/les-banques-europeennes-suppriment-des-milliers-d-emplois-et-delocalisent_5499022_3234.html
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Il est loin le temps où les premiers festivaliers arpentaient la cour de l’Epita, école d’ingénieurs du Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne) pour une kermesse estudiantine. En vingt ans, Japan Expo, qui se tient du 4 au 7 juillet au Parc des expositions de Villepinte (Seine-Saint-Denis), est devenu le rendez-vous le plus important d’Europe en matière de pop culture japonaise. Aujourd’hui, plus de 240 000 visiteurs bravent la chaleur écrasante dans la bonne humeur pour assister à l’événement, à la croisée de la convention culturelle et de la foire commerciale ; soit 60 000 visiteurs en moyenne par jour. Un chiffre qui n’a pas à rougir face au très plébiscité Salon de l’agriculture, qui a reçu, cette année, 70 000 personnes par jour en moyenne. De mémoire d’anciens, Japan Expo a toujours attiré du monde. « Au début il s’agissait d’un rendez-vous de passionnés à travers la France qui se connaissaient et discutaient manga, jeux vidéo et animes sur des forums et des tchats IRC. C’était une rare occasion de rencontrer, de se retrouver. Les créateurs viennent de la communauté des fanzines », se remémore Karim Talbi, qui a fait partie un temps de l’équipe d’organisation avant de devenir commissaire d’exposition free-lance pour le salon. Un succès qui tranche avec les clichés folkloriques En 2004, « c’était la folie ». Japan Expo, qui avait pris ses quartiers au CNIT près du quartier d’affaires de la Défense, n’était pas en mesure de faire entrer tous les visiteurs. La file d’attente avait atteint rapidement l’arche de la Défense. « C’était absurde, il y avait autant de gens dehors que dedans. C’est probablement la seule fois où ils ont dû refuser l’accès à des gens », ajoute Karim Talbi. C’est aussi à cette époque que commence à péricliter son principal concurrent : le festival Cartoonist. Japan Expo devient trop gros et trop rentable pour une organisation associative qui se repose sur des centaines de bénévoles. Après une année sans édition, le festival s’agrandit et se délocalise au Parc des expositions de Villepinte en 2006. Et il se professionnalise : l’année suivante, Thomas Sirdey, Jean-François Dufour et Sandrine Dufour, les trois amis à l’origine du salon, s’associent en entreprise, SEFA Event, dont le chiffre d’affaires avoisine aujourd’hui 7 millions d’euros. La société emploie une équipe permanente d’une trentaine de personnes et quelque 300 saisonniers pour l’événement. L’énorme succès de Japan Expo tranche avec l’image folklorique qui colle parfois à la peau des participants : celle d’otakus déguisés et de fans bruyants d’une culture de niche. « On a réussi à devenir les représentants d’un marché culturel invisibilisé, qui poursuit sa croissance et touche une large frange de la population », se félicite l’un des patrons, Thomas Sirdey. « Il y a eu au fil des années différentes innovations pour casser cette image de centre commercial géant » Si le manga et les animes restent le cœur de la programmation avec l’espace consacré au jeu vidéo, les cofondateurs défendent un élargissement à 360 degrés des animations. « Il y a eu au fil des années différentes innovations pour amener les gens à rester et casser cette image de centre commercial géant, résume Pascal Lafine, directeur éditorial pour le manga chez Delcourt. Ils ont su s’adapter aux goûts et aux mœurs en organisant des spectacles, des concerts de J-Pop, des démonstrations de culture traditionnelle, des avant-premières de films ou de séries. Mais surtout en devenant la Mecque du cosplay en hébergeant des compétitions européennes. » « Il y a un côté shopping assumé chez nos visiteurs qui économisent parfois toute l’année pour acheter sur place. En moyenne, ils dépensent 138 euros hors billet d’entrée, expliquent Thomas Sirdey et Jean-François Dufour. Mais Japan Expo est désormais un festival de contenus avec 216 invités, une scène de 500 mètres carrés, des spectacles et aussi un nouvel espace dédié à l’e-sport. Il y a des centaines d’heures de programmation. » Un thermomètre pour les éditeurs japonais Désormais, le rassemblement, que d’aucuns estiment très bon enfant, est fréquenté par autant d’hommes que de femmes dont 54 % viennent de province. Une démographie qui concorde avec le profil des Français consommateurs de manga et d’animes. « Ce qui fait le succès de Japan Expo, c’est que chacun se sent représenté. Le public est une radiographie de la communauté de fans de son époque », analyse Matthieu Pinon, journaliste spécialiste de la pop culture japonaise et auteur d’Histoire(s) du manga moderne (Ynnis). Le cosplay est l’une des disciplines les plus plébiscitées pendant le salon. NICOLAS SIX / « LE MONDE » Cette grand-messe est aussi un rendez-vous incontournable pour les professionnels. A commencer par les éditeurs de mangas et d’animes qui, comme s’il s’agissait de leur rentrée littéraire, lancent de nombreuses nouveautés et multiplient les animations pendant le salon. Quand bien même leur stand leur « coûte un bras ; les frais ne cessent d’augmenter », estiment-ils. « Cela représente environ un tiers de notre budget de communication de l’année », évalue par exemple Arnaud Plumeri, directeur éditorial des mangas Doki-Doki. Un investissement à peine rentabilisé en vente de manga lors du salon en ce qui le concerne, même si les volumes achetés par les lecteurs peuvent être dans l’ensemble colossaux. « Mais c’est un moment important de rencontre avec nos lecteurs qu’on a rarement l’occasion de croiser, cela permet aussi d’installer notre marque et de fidéliser. C’est aussi l’occasion de rendez-vous professionnels stratégiques. » Une grande majorité de maisons d’édition et d’ayants droit japonais font d’ailleurs le déplacement à Japan Expo, devenu un thermomètre du marché français, dans un secteur habituellement très insulaire, replié sur lui. « C’est l’occasion de briller et de rebattre les cartes auprès des ayants droit nippons », assure Ahmed Agne, fondateur des éditions Ki-oon. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Japan Expo 2019 : nos 20 mangas cultes Esprit « start-up » et mécontentements Par le biais des éditeurs ou simplement « avec [leur] bâton de pèlerin, [leur] naïveté et l’aide de Français sur place », les époux Dufour et leur acolyte Thomas Sirdey ont, au fil des ans, su convaincre les institutions de l’Archipel mais aussi des superstars de soutenir leur convention. A l’instar de la rockstar Yoshiki ou du père de Goldorak Go Nagai, qui ont accepté de revenir pour l’édition 2019. Sandrine Dufour, Jean-François Dufour et Thomas Sirdey ont cofondé Japan Expo. ARCHIVES PERSONNELLES SEFA EVENT Dans un article de 2006, Le Monde comparaît la communauté de fans de manga et d’animation japonaise avec « la scène rock née dans la foulée du mouvement punk britannique », parce « qu’amateurs et professionnels s’y côtoient et que son développement s’est fait quasiment à l’insu du reste de la société ». Mais d’après certains critiques de Japan Expo, qui ne s’expriment que sous condition d’anonymat, c’est plutôt les mauvais côtés d’un « esprit start-up » qui peut être reproché aujourd’hui à SEFA Event. Sous des dehors sympathiques et passionnés, la personnalité écrasante des trois fondateurs et une certaine pression dans l’organisation conduiraient à un fort turnover parmi les salariés. A ses 900 exposants, l’entreprise ne ferait aucun cadeau et ne laisserait aucune marge de négociation des tarifs. Pis, pour certains d’éditeurs, ils manqueraient d’égards et de soutien. « C’est fini le côté bricolage comme il y a pu avoir au début. On a beaucoup évolué, nos attentes ne sont pas les mêmes. De plus nous avons affaire à des interlocuteurs japonais tatillons, ça a pu alourdir la machine », se défend Jean-François Dufour, qui ajoute : « Pour les départs, le taux est toujours plus ou moins resté le même. On embauche souvent des gens qui sortent d’école, dont c’est le premier job. Il n’est pas anormal qu’ils souhaitent au bout de trois, cinq ans se tourner vers autre chose. » Malgré les mécontentements, Japan Expo semble pour l’heure indétrônable. « Ou alors il faudrait un salon Livre Paris du manga pour le déboulonner, imagine Pascal Lafine, de la maison d’édition Delcourt. Mais tant qu’ils continuent de mettre le visiteur au centre des décisions, cela continuera de marcher. »
Passé de petite convention étudiante de 3 000 visiteurs à grande célébration de la pop culture japonaise en France, l’événement attire désormais 240 000 festivaliers.
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2019/07/04/japan-expo-comment-le-salon-est-devenu-en-vingt-ans-l-un-des-plus-imposants-de-france_5485087_4408996.html
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A Lion-sur-Mer (Calvados), le 27 février. CHARLY TRIBALLEAU / AFP Tribune. Le vieillissement a, de tout temps, été considéré comme la simple phase d’un cycle de vie. Cette vérité simple ne peut plus cacher que nous vivons aujourd’hui une rupture unique dans l’histoire de l’humanité. On prête à Fernand Braudel ce trait : « L’histoire du monde, c’est l’histoire de la démographie. » Nous voici plongés dans l’ère de la société du vieillissement, dans laquelle un tiers de la population passera un tiers de sa vie en tant que senior. Toutes les recherches académiques, toutes les politiques ont jusqu’alors considéré que les problèmes du vieillissement devaient être traités comme des problèmes spécifiques, abordés selon les techniques traditionnelles de l’économie, de la sociologie et de la politique. Nous défendons, à l’inverse, l’idée que la progression vers la société du vieillissement, tant dans les pays avancés qu’émergents, constitue, avec les révolutions technologiques et le choc environnemental, le triptyque de l’évolution du monde. Nous ne pouvons plus nous contenter de mettre en œuvre des solutions partielles, mais nous appuyer sur une approche globale d’un nouveau modèle de société. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Retraites : l’exécutif face à un choix périlleux Cette rupture est celle de tous les dangers. En effet, la génération des retraités possède l’essentiel des patrimoines et de l’expérience ; elle pourrait être à l’origine d’une captation inédite du pouvoir politique. La véritable ambition politique pour une société du vieillissement sera de parvenir à une harmonie entre les générations tout en augmentant le bien-être de chacun. Subtil équilibre Une société du vieillissement harmonieuse est une société où les conditions de vie des seniors sont satisfaisantes ; où se généralise une activité socialisée, engageante et altruiste pour chacune et chacun ; où est reconnu comme valeur première le souci de soi, c’est-à-dire la permanence de l’acquisition de connaissances, le développement des activités réflexives, physiques, intellectuelles et spirituelles ; où la priorité est donnée à la recherche de la longévité en bonne santé. Et surtout, ne l’oublions pas, l’implication des seniors dans la vie de la société est une contrepartie essentielle des transferts monétaires dont ils bénéficieront de plus en plus. En fait, c’est à un nouveau contrat social entre les générations que nous appelons. Dans cette perspective, il faut repenser tous les transferts publics et collectifs, lesquels vont principalement aux plus de 60 ans. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Retraites : l’« âge d’équilibre » en débat Comment y parvenir de manière équilibrée et acceptable par toutes les générations ? Les jeunes sont paradoxalement les premiers concernés. Il faut leur garantir deux principes fondamentaux : la volonté absolue de concentrer prioritairement tous les efforts sur l’éducation et la formation, afin de surmonter le délitement de notre système éducatif. Par ailleurs, l’immense majorité de la jeunesse ne croit plus au système de retraite. Il faut donc constitutionnaliser l’existence d’un régime de retraite universel et unique. Le montant de 14 % du poids des retraites dans le produit intérieur brut ne doit pas être dépassé, sauf à créer des phénomènes violents de rejet de la part de la jeunesse.
Les économistes François-Xavier Albouy, Jean-Hervé Lorenzi et Alain Villemeur appellent, dans une tribune au « Monde », à revisiter les approches traditionnelles de l’économie, de la sociologie et de la politique à travers le prisme de notre entrée dans l’ère de « la société de la longévité ».
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/07/05/reforme-des-retraites-le-vieillissement-une-rupture-unique-dans-l-histoire-de-l-humanite_5485728_3232.html
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Cette tribune a été écrite par un groupe d’élèves de classes de première du lycée d’enseignement général et technique Jacques-Feyder d’Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis). Leur établissement est en cours de reconstruction, ce qui se traduit par un vaste chantier, démarré à l’été 2018 et qui devrait durer encore au moins deux ans, soit la scolarité complète d’un élève entré en seconde en septembre 2018. Le site se présente aujourd’hui comme un ensemble de modules préfabriqués où les cours sont donnés. Le caractère hors norme et l’inconfort de cette situation, difficilement envisageables dans des endroits plus privilégiés, ont conduit ces lycéens à un questionnement sur leur rapport à la citoyenneté. La rédaction du texte s’est effectuée dans le cadre d’un atelier d’écriture proposé et coordonné par l’association Solidarité laïque. Les prénoms mentionnés dans le premier paragraphe ont été choisis pour l’occasion par les auteurs, que Le Monde a rencontrés.] Tribune. Aujourd’hui, nous qui venons de passer le bac français, nous élèves de Seine-Saint-Denis, Nedjma, Chaïneze, Karim, Claire, Léa, Alex, Thehasna, Amel, Chantal, Chimamanda, Délia, Nelia, Farah, filles et garçons, hétéros, homos, juifs, musulmans, chrétiens, Blancs, Noirs, métisses, Algériens, Iraniens, Soudanais, Sri-Lankais, Ivoiriens, Tunisiens, Maliens, tous Français, nous avons des choses à dire : l’école de la République ne réserve pas les mêmes conditions à la jeunesse de Seine-Saint-Denis, aux fils et filles d’immigrés, aux pauvres qu’aux élèves des centres-villes. Et, pour nous, cela ne peut signifier qu’une seule chose : vous préférez vivre ensemble « entre vous », plutôt que de vivre ensemble « avec nous ». A la rentrée 2018, que nous avons faite trois semaines après le reste de la France en raison de problèmes techniques et administratifs, nous nous frayons un chemin au milieu de ce qui nous est apparu comme un immense chantier au centre duquel étaient alignées et superposées des boîtes, des préfabriqués. Notre lycée ressemble à un camp de regroupement. Un peu plus tard, nous découvrirons la réverbération assourdissante des sons dans ces boîtes que nous apprendrons à nommer salles de classe. Conditions d’examen à peine croyables Notre scolarité est donc censée se dérouler dans le brouhaha des travaux, dans le bruit continu des marteaux piqueurs et des perceuses, dans des salles trop petites pour tous nous accueillir, trop froides en hiver et trop chaudes en été, dans un établissement où il n’y a plus ni cour de récréation, ni aucun espace abrité où nous retrouver, discuter, travailler, vivre…
Des lycéennes et lycéens sont en colère devant les conditions « à peine croyables » dans lesquelles se déroule leur préparation au bac.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/06/21/sommes-nous-moins-francais-parce-que-nous-vivons-de-l-autre-cote-du-peripherique_5479415_3232.html
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L’écrivaine britannique Nina Allan, en 2013. Fred Kihn/adoc-photos/BN Ce qui caractérise la science-fiction, selon Nina ­Allan, c’est d’abord le brassage d’idées. Il n’y a pas chez elle d’expérimentations scientifiques qui auraient mal tourné ou de projections futuristes fondées sur la technologie. Pour la Britannique, la « science », dans la SF, renvoie à la connaissance tirée d’un vaste éventail de disciplines : linguistique, politique, philosophie, anthropologie, médecine, musique, mathématiques, cosmologie, géographie… Rien qui ne soit de l’ordre de l’explication rationnelle, de l’interprétation mystique ou d’un dénouement tranchant les questionnements existentiels surgis en cours de lecture. Si l’expression « sortir de sa zone de confort » a un sens, il est à chercher dans l’œuvre de cette auteure de 53 ans qui, depuis le recueil de nouvelles Complications (Tristram, 2013, Grand Prix de l’imaginaire 2014), décompose méthodiquement la frontière entre rêve et réalité. Avec La Fracture, prix British Science Fiction 2017, Nina Allan ­livre un fascinant récit alternatif, combinant plusieurs régimes d’écriture afin de fusionner réalisme et fantastique. Désassemblage d’un dispositif littéraire aussi captivant qu’inquiétant. Chronophobie Styliste élégante, Nina Allan est une horlogère qui dérègle, par de légers à-coups, des mécanismes de précision. Diplômée de litté­rature à l’université d’Oxford, auteure d’une thèse sur « Folie, mort et maladie dans les romans de Vladimir ­Nabokov », elle partage, avec le natif de Saint-Pétersbourg, la « chronophobie » que l’écrivain américain d’origine russe évoque dans ses Mémoires, Autres rivages (Gallimard, 1961). « Depuis l’âge de 7 ans, confie-t-elle au “Monde des livres”, j’ai conscience de la finitude des choses, qu’elles ne peuvent durer, au moins sous la même forme. » D’où sa dilection pour les histoires de traumas, de perte, pour le passage du temps et les effets de disjonction que celui-ci produit « sur nos vies, un groupe d’amis, une famille. Par exemple, six semaines de vacances d’été, de la fin des cours à la rentrée des classes, peuvent modifier la nature des liens noués par plusieurs personnes. Pour les uns et les autres, l’expérience de l’absence a été décisive. Face à la fuite du temps et aux métamorphoses qu’elle induit, il est important de déposer des traces mémorielles ». La « fracture » qui donne son titre à son nouveau roman fait référence au vortex entre deux planètes mais aussi au temps, dont la chronologie étale est brisée chez Selena, l’une des deux protagonistes, par la disparition de sa sœur aînée, vingt ans plus tôt. D’où un perpétuel sentiment d’irréalité. « Je n’arrivais pas à m’y habituer, lit-on dans La Fracture, ­probablement parce que cela me faisait douter de tout ce que je croyais savoir – de ma vie et de ce que je pensais avoir vécu, et même de mon identité. Caelly ne cessait d’affirmer que mes souvenirs me reviendraient, mais tous les jours je m’éveillais et j’étais encore moi, je savais que j’étais de Warrington dans le Cheshire, que Caelly, Noah et Fiby n’avaient pas d’existence réelle. »
Tel « La Fracture », son nouveau roman, les captivantes fictions spéculatives de l’écrivaine britannique regorgent de distorsions temporelles, de personnages à éclipses, d’animaux jamais vus, d’êtres venus d’ailleurs. Désassemblage.
https://www.lemonde.fr/livres/article/2019/09/07/dans-les-engrenages-de-nina-allan_5507753_3260.html
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Discrète mais attentive à toutes les évolutions de la musique, notamment dans le domaine de l’électronique en direct, Kaija Saariaho, 66 ans, a produit un abondant catalogue d’œuvres dont l’auteure se reconnaît en quelques secondes, dans des genres aussi variés que ceux de la musique de chambre, de l’orchestre et de l’opéra. Son style, tout en raffinement de timbres et d’harmonies, a valu à la compositrice finlandaise un statut de référence mondiale, que le festival ManiFeste honore en programmant ses pièces dans plusieurs concerts et en lui confiant une académie. L’Ircam a beaucoup compté dans votre développement personnel. Est-ce encore le cas aujourd’hui ? En fait, ces temps-ci je n’y viens plus souvent. Je possède un « home studio » à Paris et j’écris la plupart de mes œuvres à la campagne. La technologie a considérablement changé depuis mes débuts à l’Ircam, en 1982, à l’occasion d’un stage qui, pendant six semaines, permettait de découvrir non seulement des outils qui n’existaient nulle part ailleurs en Europe mais aussi d’aborder des domaines aussi passionnants que celui exploré par le psycho-acousticien Stephen McAdams. Beaucoup de choses attisaient ma curiosité, entre autres la synthèse des sons, que je peux aujourd’hui réaliser chez moi. Si vous aviez 30 ans, comme lors de votre premier séjour à l’Ircam et que, à l’instar de la plupart des jeunes compositeurs d’aujourd’hui, vous disposiez d’un accès par Internet aux outils développés par cette institution, auriez-vous quand même envie de venir y travailler ? Vous connaissez sans doute la boutade qui consiste à dire qu’à l’Ircam la machine la plus importante est la machine à café… Cela signifie que ce sont surtout les rencontres qui importent, en particulier quand on est jeune. Les échanges font souvent émerger des idées et des désirs de collaboration. C’est d’ailleurs ainsi que vous avez rencontré votre futur mari, le compositeur et philosophe Jean-Baptiste Barrière. En effet, ce ne fut pas la moindre de mes rencontres à l’époque de mes débuts ici, car elle a changé ma vie et nous avons depuis aussi beaucoup travaillé ensemble. Et sur le plan technologique ? Je me suis passionnée pour le programme « Chant », sorte de grande bibliothèque des paramètres qui affectent directement le son. Quels paramètres doit-on modifier pour qu’une voix de femme soit perçue comme une voix d’homme ou comme une partie de hautbois ? Des questions de ce type ont beaucoup stimulé mon imagination. Quelle place l’ordinateur occupe-t-il dans votre vie quotidienne ? Je prends beaucoup de notes à la main dans un journal, des petits cahiers et un agenda. Je pense qu’il faut laisser mûrir les choses avant de les noter. Ensuite, je fais une esquisse de l’ensemble et si je n’utilise pas l’ordinateur pour renouveler mon réservoir de sons – ce qu’il m’arrive de faire parfois – je ne m’en sers pas avant de créer un nouveau fichier et d’y entrer les premières données de la pièce. Je l’utilise alors comme une machine à écrire ; je crée des pages, j’écris des notes, j’imprime et je rajoute des dynamiques à la main. Vous arrive-t-il de recourir au piano pour vérifier certains éléments ? Cela m’arrive pour certaines harmonies, mais, en général, je m’en tiens à l’essentiel : imaginer la musique. Comment pouvez-vous imaginer des sons électroniques qui n’existent pas et que vous allez créer de toutes pièces ? Vous les avez en tête ? En général, j’ai une idée. Je trouve plus ou moins rapidement comment la réaliser, mais, souvent, ce sont des idées assez précises. Elles proviennent, bien sûr, de mes expériences avec certains outils. J’éprouve d’ailleurs une frustration dans ce domaine. Pendant des années, j’ai employé des outils informatiques qui dorénavant n’existent plus. Certains types de réverbération, par exemple, dont j’ai aimé la couleur et que je ne retrouve plus… Ce travail aboutit souvent à un « son » qui vous est propre. C’est normal. Si ma musique sonne d’une certaine manière, c’est que je l’ai imaginée ainsi. Il y a des personnes qui pensent que, pour moi, le timbre est le paramètre le plus important. En fait, tous les paramètres sont importants – et je ne les sépare pas – mais peut-être le timbre est-il le plus personnel ? « On ne peut pas construire la musique juste avec des sons. » Au-delà de ces considérations, vous semblez illustrer d’œuvre en œuvre une sorte de développement de la musique spectrale hors de l’époque et de l’esthétique qui l’ont vu naître. Oui, sauf que je ne pense pas être une compositrice spectrale. J’ai gardé beaucoup de Palestrina, de Luigi Nono, de toute mon éducation sérielle et, quand j’ai découvert à Paris les musiques de Gérard Grisey et de Tristan Murail, je me suis sentie libérée et encouragée. Au sortir des études à Fribourg, en Allemagne, avec Klaus Huber et Brian Ferneyhough, je me trouvais soudain confrontée à des compositeurs à l’approche totalement différente, les spectraux, qui soutenaient que la musique est avant tout ce que l’on entend. J’ai trouvé en eux des alliés, mais me ranger dans la catégorie spectrale ne semble pas juste. Pour moi, l’essentiel est de comprendre ce qu’est la perception. Le travail de la composition et le choix des outils en découlent. On ne peut pas construire la musique juste avec des sons. Il faut aussi penser à la mémoire pour percevoir la forme musicale. La musique spectrale pour les simples mortels Un collectif et une pensée. En 1973, un groupe de compositeurs et d’interprètes se réunissent à Paris pour fonder l’Itinéraire, dont l’ensemble instrumental va assurer la création des premières œuvres qualifiées ultérieurement de « spectrales ». En réaction à la musique sérielle, fondée sur une combinatoire manifestant la toute-puissance de l’écrit, de jeunes compositeurs majoritairement issus de la classe d’Olivier Messiaen au Conservatoire de Paris proclament la nécessité de déduire des propriétés acoustiques du son le devenir et la cohérence d’une œuvre. En 1973, un groupe de compositeurs et d’interprètes se réunissent à Paris pour fonder l’Itinéraire, dont l’ensemble instrumental va assurer la création des premières œuvres qualifiées ultérieurement de « spectrales ». En réaction à la musique sérielle, fondée sur une combinatoire manifestant la toute-puissance de l’écrit, de jeunes compositeurs majoritairement issus de la classe d’Olivier Messiaen au Conservatoire de Paris proclament la nécessité de déduire des propriétés acoustiques du son le devenir et la cohérence d’une œuvre. Un outil et une pratique. L’ordinateur devient l’auxiliaire par excellence du compositeur pour analyser le son, en révéler ses qualités intrinsèques, obtenir son spectre (comme par radiographie). Les partitions consacrent le procédé de la synthèse. Soit instrumentale, en superposant diverses sources acoustiques pour reconstituer un son originel, soit électronique par le recours aux nouvelles technologies. L’ordinateur devient l’auxiliaire par excellence du compositeur pour analyser le son, en révéler ses qualités intrinsèques, obtenir son spectre (comme par radiographie). Les partitions consacrent le procédé de la synthèse. Soit instrumentale, en superposant diverses sources acoustiques pour reconstituer un son originel, soit électronique par le recours aux nouvelles technologies. Une génération (voire deux). Roger Tessier (né en 1939, Clair-obscur), Hugues Dufourt (né en 1943, Saturne), Gérard Grisey (1946-1998, Les Espaces acoustiques), Tristan Murail (né en 1947, Mémoire/Erosion) et Michaël Levinas (né en 1949, Ouverture pour une fête étrange) participent à la naissance d’un mouvement qui sera surtout développé par les trois derniers au-delà des années 1980 et même 1990. Le terme « spectral » est proposé par Hugues Dufourt en 1978, mais Gérard Grisey lui préfère ceux de « liminal », de « différentiel » ou de « transitoire ». Leurs cadets Philippe Hurel (né en 1955, Pour l’image) et Marc-André Dalbavie (né en 1961, Diadèmes) ont figuré une deuxième génération de compositeurs « spectraux » à laquelle ont été associés des musiciens tels que le Britannique George Benjamin et la Finlandaise Kaija Saariaho, qui ont ainsi évité au spectralisme de demeurer un phénomène strictement français. D’autres, plus jeunes, à l’instar de l’Italien Mauro Lanza, ont pu aussi apparaître dans la lignée spectrale. Roger Tessier (né en 1939, Clair-obscur), Hugues Dufourt (né en 1943, Saturne), Gérard Grisey (1946-1998, Les Espaces acoustiques), Tristan Murail (né en 1947, Mémoire/Erosion) et Michaël Levinas (né en 1949, Ouverture pour une fête étrange) participent à la naissance d’un mouvement qui sera surtout développé par les trois derniers au-delà des années 1980 et même 1990. Le terme « spectral » est proposé par Hugues Dufourt en 1978, mais Gérard Grisey lui préfère ceux de « liminal », de « différentiel » ou de « transitoire ». Leurs cadets Philippe Hurel (né en 1955, Pour l’image) et Marc-André Dalbavie (né en 1961, Diadèmes) ont figuré une deuxième génération de compositeurs « spectraux » à laquelle ont été associés des musiciens tels que le Britannique George Benjamin et la Finlandaise Kaija Saariaho, qui ont ainsi évité au spectralisme de demeurer un phénomène strictement français. D’autres, plus jeunes, à l’instar de l’Italien Mauro Lanza, ont pu aussi apparaître dans la lignée spectrale. Déclarations. Grisey : « Si les sons ont un corps vivant, le temps est à la fois leur espace et leur atmosphère. Traiter les sons hors temps, hors de l’air qu’ils respirent, reviendrait à disséquer des cadavres » ; Murail : « La révolution la plus brutale et la plus marquante qui ait affecté le monde musical dans les années récentes n’a pas pris sa source dans une quelconque remise en cause de l’écriture musicale (sérielle ou autre) mais bien plus profondément dans le monde des sons eux-mêmes… » ; Dufourt : « Qu’avons-nous voulu faire, si ce n’est édifier un langage commun sur des bases radicalement neuves, un langage qui soit fondé sur des transitions, sur un art du développement et de la durée ? Nous récusions les manifestations violentes et anarchiques des années 1960-1970, et cherchions à instaurer des formes de continuité et de cohérence. » Grisey : « Si les sons ont un corps vivant, le temps est à la fois leur espace et leur atmosphère. Traiter les sons hors temps, hors de l’air qu’ils respirent, reviendrait à disséquer des cadavres » ; Murail : « La révolution la plus brutale et la plus marquante qui ait affecté le monde musical dans les années récentes n’a pas pris sa source dans une quelconque remise en cause de l’écriture musicale (sérielle ou autre) mais bien plus profondément dans le monde des sons eux-mêmes… » ; Dufourt : « Qu’avons-nous voulu faire, si ce n’est édifier un langage commun sur des bases radicalement neuves, un langage qui soit fondé sur des transitions, sur un art du développement et de la durée ? Nous récusions les manifestations violentes et anarchiques des années 1960-1970, et cherchions à instaurer des formes de continuité et de cohérence. » Paradoxes. Déduite de la structurelle naturelle des sons et vouée à un processus d’écoulement où timbre et harmonie se rejoignent dans une expression lisse, voire consonante, la musique spectrale passe pour une sorte d’idéalisation du « beau son » alors qu’elle comporte souvent des zones à caractère « bruiteux ». Opposants déclarés au postsérialisme alors incarné par Pierre Boulez, les compositeurs spectraux ont développé une grande partie de leurs œuvres dans les studios de l’Ircam, institution fondée par ce même Boulez. Déduite de la structurelle naturelle des sons et vouée à un processus d’écoulement où timbre et harmonie se rejoignent dans une expression lisse, voire consonante, la musique spectrale passe pour une sorte d’idéalisation du « beau son » alors qu’elle comporte souvent des zones à caractère « bruiteux ». Opposants déclarés au postsérialisme alors incarné par Pierre Boulez, les compositeurs spectraux ont développé une grande partie de leurs œuvres dans les studios de l’Ircam, institution fondée par ce même Boulez. Et maintenant ? Si les initiateurs du mouvement, à l’instar de Tristan Murail, ont beaucoup évolué, les principes de base (prise en compte de la perception, développement par processus) continuent d’alimenter la réflexion des jeunes compositeurs, sans toutefois faire école. Comme en témoigne Adrien Trybucki (né en 1993), élève de Philippe Hurel : « On a gardé la boîte façonnée par nos aînés sans en conserver le contenu. » Le spectralisme demeure, mais pas le spectre. Vous êtes aujourd’hui célébrée dans le monde entier comme une référence majeure de la musique contemporaine. Comment le vivez-vous ? On va bientôt me remettre le titre de « doctor honoris causa » de la Juilliard School de New York et, dans cette même ville, il y a deux ans, mon premier opéra, L’Amour de loin, a bénéficié d’une diffusion mondiale depuis le Metropolitan Opera. J’ai reçu des messages d’un peu partout, de l’Afrique au Japon… J’ai été interviewée à l’entracte par Placido Domingo. C’était irréel. Je me suis demandé comment j’en étais arrivée là. Je suis quelqu’un de plutôt réservé et je n’ai jamais recherché une telle notoriété. Le succès de ma musique me donne beaucoup de responsabilités et j’essaie d’être à la hauteur dans toutes mes actions, mais c’est parfois lourd. Qu’écrivez-vous actuellement ? Une pièce d’orchestre qui s’intitule Vista et que j’ai dédiée à Susanna Mälkki pour son orchestre en Finlande, l’Orchestre philharmonique d’Helsinki. Juste avant, j’avais écrit un grand opéra, Innocence, qui sera créé l’an prochain lors du festival d’Aix-en-Provence. Sans aucun doute le travail le plus éprouvant que j’aie jamais effectué. Trois ans de composition, quasiment sans interruption… Alors, quand j’ai pu en sortir, j’ai eu l’impression de voir un nouveau paysage s’ouvrir devant moi, d’où le titre Vista. Lire aussi Le festival ManiFeste ou les sens du son CONCERTS Spectral 1. Terrestre, de Kaija Saariaho ; Metanoia, de Sina Fallahzadeh ; Entrance, de Fausto Romitelli ; In a Large Open Space, de James Tenney. Elise Chauvin (soprano), Mathieu Dubroca (baryton), Julie Brunet-Jailly (flûte), L’Itinéraire, Mathieu Romano (direction), Serge Lemouton et Laurent Pottier (réalisation informatique musicale). Le 12 juin, à 20 h 30, Centre Pompidou, grande salle, place Georges-Pompidou, Paris 4e. De 10 € à 18 €. Spectral 3. Nymphea, de Kaija Saariaho ; Quatrième Quatuor à cordes, de Jonathan Harvey. Quatuor Béla, Gilbert Nouno (réalisation informatique musicale). Le 20 juin, à 20 h 30, Musée de l’Orangerie, salle des Nymphéas, Jardin des Tuileries, Paris 1er. 10,70 € Fête du Quatuor. Nymphea et autres œuvres pour quatuor à cordes, de Kaija Saarioha. Le 21 juin, à 14, 15, 16 et 17 heures, Musée de l’Orangerie, salle des Nymphéas. Entrée libre, sur réservation. Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec l’Ircam.
Rendez-vous musical annuel de l’Ircam, le festival ManiFeste, qui se tient du 1er au 29 juin, honore la compositrice finlandaise au « son » reconnaissable en programmant ses pièces dans plusieurs concerts.
https://www.lemonde.fr/musiques/article/2019/06/03/le-festival-manifeste-consacre-kaija-saariaho_5470659_1654986.html
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Damien Cuypers pour M Le magazine du Monde « Le terrain, vous dis-je ! » Xavier Bertrand, qui a vu la mort politique de près, ne jure que par le terrain. C’est son mantra, son gimmick, sa potion magique, son doudou. Jamais sans mes Hauts-de-France, cher pays, sinon de son enfance (il est né à Châlons-en-Champagne en 1965), du moins de son avenir politique, s’il en a un… Cet enracinement sans doute sincère est à la fois sa force et sa faiblesse. Souvenez-vous : afin de conquérir en 2015 cette région à laquelle il a lié son destin, il a fallu une forte mobilisation de la gauche en sa faveur pour faire barrage à Marine Le Pen. Ce jour où ses ennemis sont devenus ses sauveurs a tout changé. Tel un Paul de Tarse contemporain ayant vu la lumière, il a décidé de jeter au feu ses oripeaux d’homme politique ordinaire et sa carte d’abonné grand voyageur de la ligne qui relie Saint-Quentin (sa ville d’élections, législatives et municipales) à Paris, où, sous des allures débonnaires, cet ancien assureur sorti de nulle part (en tout cas ni de Sciences Po ni de l’ENA – il en est assez fier) mais entré au RPR à 16 ans, en 1981, traçait un plan de carrière implacable, collectionnant les maroquins (ministre de la santé puis du travail), les charges (secrétaire général de l’UMP de 2008 à 2010) et les fidélités (Juppé, Raffarin, Villepin, Sarkozy, Fillon et peut-être un ou deux autres qu’on oublie). Article réservé à nos abonnés Lire aussi Xavier Bertrand ne perd pas le Nord Tant d’adaptabilité forçait le respect et lui valut d’apparaître comme un possible premier ministre d’Emmanuel Macron – une hypothèse qu’il se fit un plaisir de confirmer. C’est l’avantage d’avoir une tête d’électeur et un physique rondouillard : qui imaginerait que s’y blottissent des ambitions démesurées ? Sorti du bois Au soir de son élection miraculeuse, il abandonne, dans un discours de trois minutes et dix-huit secondes, tout ce qui avait fait sa vie jusqu’alors. « Cela changera à jamais ma façon de faire de la politique. » Adieu Paris, les honneurs, la course à l’échalote… Il lâche les Républicains et s’accroche à ses Hauts-de-France comme un naufragé à sa bouée. « La classe politique est dans un bus qui file à 100 à l’heure dans un mur. Moi, je suis juste descendu du bus », confie-t-il aux Échos en mars 2016. Descendu du bus, peut-être, mais pas rangé des voitures. Pendant presque quatre ans, il laisse les commentateurs lui prêter les ambitions qu’il ne peut avouer. Quatre ans, c’est long, même quand il faut peaufiner des punchlines à destination des journalistes qui continuent de venir le voir. Florilège : « Je n’ai pas changé, je suis redevenu moi-même » (M, mars 2016) ; « Je sais encore nager [dans la politique politicienne] mais je n’ai plus envie de me baigner » (L’Obs, juin 2019) ; « Fini l’auto-mise en scène » (Le Point, septembre 2019).
Chronique. Chaque semaine, Philippe Ridet croque une personnalité qui fait l’actualité. Cette semaine, le président du conseil régional des Hauts-de-France, qui a récemment fait connaître ses ambitions présidentielles.
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2019/09/28/il-est-comme-ca-xavier-bertrand_6013435_4500055.html
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Aline Bureau « Miss Islande » (Ungfru Island), d’Audur Ava Olafsdottir, traduit de l’islandais par Eric Boury, Zulma, 288 p., 20,50 €. UNE ISLANDAISE ÉRUPTIVE De l’Islande, même sans y être jamais allé, on connaît généralement trois choses. Ses volcans aux noms mythologiques et leur panache de cendres, d’abord. La passion littéraire de son peuple, ensuite. Cette île de l’Atlantique Nord compte en effet, proportionnellement à ses 350 000 habitants, non seulement le plus grand nombre de lecteurs au monde, mais aussi beaucoup d’écrivains qui, des sagas médiévales au polar contemporain en passant par un Prix Nobel (Halldor Kiljan Laxness, en 1955), portent haut la puissance d’une langue millénaire. Son féminisme, enfin : elle a été le premier pays à élire une présidente au suffrage universel et à appliquer un strict programme d’égalité des genres. Volcanique, littéraire, féministe : ces trois clichés sur l’Islande s’avèrent avec bonheur parfaitement justifiés dans le nouveau roman d’Audur Ava Olafsdottir, révélée en France par le très beau Rosa Candida (Zulma, 2010). Contrairement à ce que son titre semble annoncer, Miss Islande n’est pas un livre sur les concours de beauté – ou alors en négatif, puisqu’il s’agit pour l’héroïne d’échapper au destin de ravissante potiche que la société patriarcale voudrait lui imposer. Elle a, de naissance, certaines dispositions à la rébellion incandescente puisque son père l’a baptisée Hekla, du nom d’un volcan qui « bouillonne encore sacrément » et au pied duquel elle apprend dès son jeune âge « la langue des éruptions ». Quand elle quitte, à 21 ans, les terres rurales de la Saga des Gens du Val-au-Saumon (oui, la pêche, aussi, j’oubliais) pour s’installer à Reykjavik, la capitale, elle emporte avec elle Ulysse, de Joyce (1922), sa machine à écrire Remington et trois manuscrits. Car Hekla est écrivain – nous sommes en 1963, on ne dit pas encore « écrivaine », et la fine traduction d’Eric Boury respecte d’autant mieux la vérité historique que l’auteure en fait elle-même le constat : « “Poète” est un mot masculin. » Pour vivre, elle est serveuse dans un café mais elle arrime son rêve ailleurs : « L’écriture est mon ancrage dans la vie. Je n’ai rien d’autre. » Comme ce monde d’hommes, éditeurs compris, n’envisage pas qu’une femme puisse avoir du talent, elle écrit sous pseudonyme. Et quand elle rencontre Starkadur, poète de son état, qui lui déclame parfois d’un air inspiré des vers en toc, elle emménage avec lui en acceptant le seul rôle vacant pour elle, celui de muse. « Tu es ma Pénélope », lui dit-il, sans même imaginer que son métier à tisser est une machine à écrire planquée sous le lit. Seuls quelques proches connaissent son secret et partagent son désir d’accomplissement dans l’art. Son amie d’enfance, Isey, mère et femme au foyer, éprise de littérature, écrit aussi, mais elle dissimule son carnet dans un seau pour que son mari n’en sache rien. Quant à Jon John, son confident, il est homosexuel, passionné de stylisme mais contraint de s’embarquer sur des bateaux de pêche où il subit humiliations, menaces et coups.
Dans une langue à la précision minérale, le nouveau roman de l’auteure de « Rosa Candida » est empreint d’énergie militante.
https://www.lemonde.fr/critique-litteraire/article/2019/10/24/miss-islande-d-audur-ava-olafsdottir-le-feuilleton-litteraire-de-camille-laurens_6016719_5473203.html
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Le gardien lillois Mike Maignan a dû s’incliner trois fois face à l’Ajax, à Amsterdam, le 17 septembre. KENZO TRIBOUILLARD / AFP La marche était trop haute pour Lille : malgré une prestation correcte, le LOSC n’a rien pu faire face à la supériorité de l’Ajax Amsterdam et a été balayé (3-0), mardi 17 septembre lors de la première journée de la Ligue des champions. Les demi-finalistes de la précédente édition ont fait étalage de leurs qualités techniques pour surclasser des Lillois trop maladroits et fébriles. Les Néerlandais l’ont emporté grâce à des buts de Quincy Promes (18e), Edson Alvarez (50e) et Nicolas Tagliafico (62e). Malgré le départ de deux de ses pépites qui avaient grandement contribué au superbe parcours européen la saison dernière – le défenseur central Matthijs de Ligt et le milieu Frenkie de Jong – l’Ajax a montré qu’il n’avait rien perdu de sa superbe durant l’été. Ainsi, les joueurs d’Erik ten Hag ont multiplié les actions et gestes techniques de grande classe tout au long de la rencontre face à des Lillois impuissants, qui n’ont pourtant pas démérité. Mais leur manque de réalisme a empêché toute possibilité de créer la surprise. Les Lillois en manque d’efficacité « Il y a évidemment un écart important, mais je trouve quand même que le score est sévère », analysait l’entraîneur lillois, Christophe Galtier. « On a joué comme on voulait jouer, en créant du danger. Le match se résume sur l’efficacité dans les deux surfaces. Ils ont eu un maximum d’efficacité, et nous, on n’en a pas eu », a-t-il ajouté en rappelant que c’est « le gardien de l’Ajax qui a été élu homme du match, ça montre qu’il a su faire les arrêts. Ils sont terriblement forts offensivement, mais on a pris une leçon de réalisme ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Ligue des champions : à Lille, Luis Campos, scénariste dans l’ombre Dès le début de la rencontre, les Lillois auraient pu bénéficier d’un penalty quand l’attaquant nigérian Victor Osimhen se fait retenir le maillot dans la surface par Joël Veltman, mais ni l’arbitre, ni la VAR (assistance vidéo à l’arbitrage) ne sont intervenus. Après l’ouverture du score de Promes, les Dogues auraient pu égaliser sur une frappe d’Ikoné repoussée par le gardien, André Onana, avant que la reprise d’Osimhen ne passe juste au-dessus (45e). Les Lillois se sont ensuite fait punir au retour des vestiaires sur une belle frappe d’Alvarez (2-0) puis une tête victorieuse de Tagliafico sur corner (3-0). Lille, qui n’a jamais abdiqué, vendange encore deux énormes occasions en seconde période par Osimhen de la tête (58e) et Zeki Celik (78e), qui butent sur un André Onana infranchissable. En réussite, le portier de l’Ajax est ensuite sauvé par son poteau sur une reprise de Yusuf Yazici (89e). Ce 17 septembre restera une journée à oublier pour le LOSC, qui retrouvait la phase de groupes de la Ligue des champions après sept ans d’absence. En effet, avant la rencontre, 303 supporteurs nordistes avaient été arrêtés par la police locale « à la suite de troubles à l’ordre public dans la station de métro Strandvliet », à proximité de la Johan Cruyff ArenA. Lire aussi Ligue des champions : plus de 300 supporteurs lillois arrêtés à Amsterdam Liverpool, champion en titre, battu à Naples Le LOSC a pu mesurer l’écart qui le séparait des grandes équipes européennes et aura encore fort à faire dans deux semaines face à Chelsea, son prochain adversaire en Ligue des champions, qui a mal démarré également sa campagne européenne en étant battu à domicile par Valence sur un but de Rodrigo à la 75e (1-0). Carlo Ancelotti, l’entraîneur napolitain (au deuxième plan) a pris le dessus sur Jürgen Klopp, le technicien allemand de Liverpool, le 17 septembre, à Naples. ALBERTO PIZZOLI / AFP A Naples, le champion en titre Liverpool a été piégé par une formation italienne entreprenante et sans complexe. L’équipe de Carlo Ancelotti a inscrit ses deux buts en fin de match par l’international belge Dries Mertens sur penalty (82e) puis par l’attaquant espagnol Fernando Llorente, à point nommé pour profiter d’une mésentente de la défense anglaise et tromper Adrian, le gardien espagnol des Reds (90e + 2). A Dortmund, le Barça a résisté aux assauts allemands, bien aidé par son gardien de but… allemand Marc-André ter Stegen, qui a notamment stoppé un penalty tiré par Marco Reus (57e). Enfin, le score du jour est venu de Salzbourg qui a surclassé Genk 6 à 2 avec un triplé d’Erling Braut Haland.
Volontaire mais sans efficacité, le LOSC s’est lourdement incliné contre des Néerlandais éliminés il y a cinq mois du dernier carré européen par Tottenham.
https://www.lemonde.fr/sport/article/2019/09/17/ligue-des-champions-l-ajax-amsterdam-demi-finaliste-la-saison-derniere-surclasse-lille-3-0_5511636_3242.html
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Si vous deviez apprendre par cœur les paroles de Sandstorm, la chanson du DJ finlandais Darude, réjouissez-vous. Il n’y en a pas. Mais s’il vous venait l’envie de la fredonner, bon courage. Composée d’une succession ininterrompue et ultrarapide de « tututu » (ou de « dududu », selon les interprétations), elle ne se prête ni au fredonnement matutinal ni au karaoké. Le destin de cette musique était tout tracé. Une sortie sur un label finlandais, en 1999. Un très honnête succès ensuite, lorsque la trance, courant musical issu des musiques électroniques, n’était pas encore au rebut du bon goût musical. Quelques concerts de Darude, d’abord en Finlande puis dans le reste de l’Europe. Et, ensuite, plus grand-chose. C’est ce qu’il s’est passé, jusqu’à l’intervention de la proverbiale espièglerie des internautes. Grâce à eux, le morceau Sandstorm s’est vendu à des millions d’exemplaires et son interprète, de son vrai nom Ville Virtanen, a retrouvé le succès et le chemin de la scène. « Tu viens de te faire daruder » Lorsqu’il compose Sandstorm, ce dernier est un inconnu. Féru de musique électronique, qu’il découvre dans les clubs finlandais, Darude n’a même jamais mixé en boîte de nuit. Cela fait quelques mois à peine qu’il s’essaie à la composition, envoyant des démos à quelques producteurs et DJ du cru, espérant se faire remarquer. Il y parvient grâce à Sandstorm, qui tape dans l’oreille d’un producteur en vue, qui la publie sur son label. Le succès est très rapide, et la chanson commence à résonner dans tous les clubs du monde. Darude est le musicien d’un unique succès : la chanson et son compositeur disparaissent peu à peu des écrans radars. Le titre vivote dans certains coins d’Internet, où quelques internautes multiplient les blagues : quand l’un publie le « texte » sur un site de paroles de chanson, un autre arrose d’un feu nourri ses ennemis dans le jeu vidéo de tir Call of Duty avec Sandstorm en fond sonore tandis qu’une interprétation très habitée de la chanson à la trompette en plastique fait le bonheur des utilisateurs de YouTube. Difficile d’identifier précisément la date à partir de laquelle la chanson prend un nouvel envol. Les exégètes de l’humour en ligne mentionnent cependant le 24 juillet 2013, lorsqu’une vidéo de Brian Wyllie, joueur de League of Legends, un jeu vidéo extrêmement populaire, est mise en ligne. On l’y voit occire des ennemis à la chaîne. En fond sonore, Sandstorm. « Je ne peux pas perdre avec Darude », lance-t-il. « Tu viens de te faire daruder » dit-il en riant à la face d’un ennemi à terre. La vidéo devient extrêmement populaire sur les réseaux sociaux. De là naît un running gag. Lorsqu’un internaute s’enquiert, en commentaire, du nom de la chanson qui illustre une vidéo, se trouvera immanquablement un autre pour lui répondre, « Darude, Sandstorm ». La blague prend particulièrement dans le milieu des joueurs de jeux vidéo. « Ça n’a pas l’air d’être la chanson que je cherche », note ainsi, non sans perspicacité, le premier commentaire YouTube sous la vidéo de Sandstorm (la vraie). A ses côtés, des dizaines d’autres commentaires similaires d’internautes ayant mordu à l’hameçon. Infinie créativité Aussi étrange que cela puisse paraître, cette plaisanterie tire Ville Virtanen de l’oubli. Au printemps 2014, le nombre de recherches sur Google pour la chanson explose. Les internautes commencent à se ruer sur son clip et son téléphone recommence à sonner : partout, on le réclame, et le DJ repart en concert. « Au début, j’ai trouvé ça bizarre. Je ne comprenais pas », a-t-il expliqué en janvier 2015. « Je ne sais toujours pas vraiment comment ça s’est passé ni comment ça a pris de telles proportions », confesse-t-il deux ans plus tard dans un documentaire de Vice. Le Finlandais n’est pas plus troublé que cela de tirer ce regain de célébrité… d’une blague. « Je m’en fiche ! Ces deux dernières années il y a eu une explosion de mes demandes de concert, et on en a tiré parti, les gens en ont fait des mèmes [blagues virales sur Internet]… C’est pour rire, et c’est super qu’on veuille bien encore parler de ma chanson seize ans après ! » De fait, l’infinie créativité – et le temps libre – des internautes a fait des merveilles sur Sandstorm. On trouve sur Internet des centaines de reprises, plus loufoques les unes que les autres : au boomwhacker, un drôle d’instrument de percussion en plastique (4 millions de vues), à la pomme de terre crue évidée et transformée en sifflet (8 millions de visionnages), dans le jeu vidéo Minecraft (5,7 millions de vues) ou avec des disques durs d’ordinateur (4,3 millions de vues)… Même YouTube s’y est mis. Le 1er avril 2015, sur toutes les vidéos apparaît un discret bouton « Ajouter de la musique ». Lorsqu’on le clique, le bouton superpose la vidéo en cours avec Sandstorm. Un canular qui augmentera un peu plus la célébrité du DJ. Désormais, lors de ses concerts, impossible pour Darude de quitter ses platines sans avoir joué son tube, réclamé à cor et à cri par son public. Consécration populaire, le DJ a même été choisi pour représenter son pays au concours 2019 de l’Eurovision. Mais sa popularité numérique ne lui a pas été d’un grand secours : il a été éliminé dès les demi-finales.
Chansons à la mode Web (5/6). Succès éclair en 1999, « Sandstorm », du DJ finlandais, redevient populaire en 2013 grâce à un jeu vidéo.
https://www.lemonde.fr/festival/article/2019/07/19/l-espieglerie-des-internautes-ramene-darude-devant-ses-platines_5491282_4415198.html
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Sean Gallup/Getty Images/AFP « Voilà, c’est l’heure d’une nouvelle vidéo ! » Casquette vissée sur ses cheveux bleus, vêtu d’un hoodie orange, Rezo – c’est son pseudo sur YouTube – prend la parole depuis ce qui ressemble à une chambre d’étudiant. A côté de lui, deux claviers électroniques, une enceinte et deux guitares. D’emblée, le jeune homme explique qu’il est DJ. Mais, aujourd’hui, c’est de la CDU, le parti de la chancelière Angela Merkel, qu’il va parler. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Allemagne, la présidente de la CDU en pleine tourmente « Dans cette vidéo, je vais montrer comment les gens de la CDU mentent, à quel point ils sont incompétents et comment ils font de la politique en se moquant des experts. Je vais montrer comment la CDU détruit nos vies et notre avenir. » Longue de 55 minutes, la vidéo, montée comme un clip et postée sur YouTube le 18 mai, est un réquisitoire contre la politique sociale et environnementale de l’Union chrétienne-démocrate d’Allemagne, accusée d’avoir creusé les inégalités, aggravé la précarité, et de ne rien faire de sérieux contre le réchauffement climatique depuis l’arrivée de Mme Merkel au pouvoir, en 2005. Pour autant, Rezo n’appelle pas à voter explicitement pour les Verts. Le 23 mai, alors qu’elle a déjà été vue plus de 4 millions de fois, la présidente du parti décide de réagir. « Je me suis demandé si nous n’étions pas aussi responsables des sept (sic) plaies d’Egypte », ironise Annegret Kramp-Karrenbauer. Au siège du parti, à Berlin, Philipp Amthor, un député de 26 ans, tourne une vidéo pour répondre au youtubeur sur son terrain. Au dernier moment, la direction décide de ne pas la diffuser. Elle répondra par un texte de onze pages, justifiant ce choix par le fait que, « en des temps où les esprits s’échauffent, il est attendu de la CDU qu’elle réfléchisse et argumente en gardant la tête froide ». Le visage d’une jeunesse Trois jours plus tard, aux élections européennes, la CDU recueille 28,9 % des voix, son plus mauvais score depuis la guerre. Auprès des jeunes, la cote du parti, qui n’était déjà pas bien haute, s’est effondrée. Chez les moins de 30 ans, seuls 11 % ont voté CDU, 33 % pour les Verts. Dès le soir du scrutin, l’un des stratèges du parti rédige une analyse sur les causes de ce revers. Le document, qui fuite dans la presse le lendemain, évoque notamment « une série de ratés sur la façon de réagir au mouvement “Fridays for Future” et aux youtubeurs soudainement actifs en politique ». Car Rezo n’est pas le seul à avoir sonné la charge contre la CDU. Le 24 mai, un collectif de quatre-vingt-dix youtubeurs a publié une seconde vidéo appelant à ne voter ni pour le parti de Mme Merkel ni pour ses alliés sociaux-démocrates. Rezo fait partie du groupe. Depuis, il est devenu le visage d’une jeunesse qui, par son irruption soudaine dans le débat public, fait vaciller les vieux partis qui dominaient la vie politique allemande depuis l’après-guerre et menace la coalition d’une chancelière indéboulonnable depuis quatorze ans. Rezo aime regarder en livestream les trois conférences de presse hebdomadaires des porte-parole du gouvernement allemand, qu’il voit comme des personnages de télé-réalité. Mais qui est ce jeune homme qui refuse de donner son vrai nom et dont la photo – consécration s’il en est – a fait la « une » du Spiegel, le 1er juin, avec ce titre : « Rezolutionnaire » ? Agé de 26 ans, il est né à Wuppertal et vit à Aix-la-Chapelle, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Titulaire d’un master d’informatique et passionné de musique, il est présent sur YouTube depuis 2015, où il publie essentiellement des tubes remixés, des chansons de lui mais aussi des vidéos humoristiques. Au fil du temps, celui dont on sait, par quelques rares confidences intimes, qu’il ne mange plus de viande depuis ses 17 ans, s’est constitué un public de fidèles. Ses deux chaînes YouTube comptaient 3,5 millions d’abonnés au 1er juin. Ses vidéos, un peu plus d’une centaine, ont été vues plus de 200 millions de fois. Et la politique ? Dans l’entretien au Spiegel, Rezo, dont le père, la mère, deux tantes et deux oncles, et un des grands-pères sont pasteurs protestants, déclare qu’il ne se considère pas comme chrétien. Mais il ajoute qu’il ressent, « au plus profond de lui, quel genre de mec était Jésus ». Et, pour lui, pas de doute : « Je suis sûr qu’il n’aurait pas voté CDU », assure le jeune homme, qui adore regarder en livestream les trois conférences de presse hebdomadaires des porte-parole du gouvernement allemand, qu’il voit comme des personnages de télé-réalité. « Quand Steffen Seibert [porte-parole de la chancellerie] parle, ça se sent qu’il n’a pas de réponse. Ou, alors, il a une réponse, mais il ne la dit pas. (…) De Steffen, il n’y a pas grand-chose à tirer. Parfois, j’ai l’impression qu’il est mort de l’intérieur », explique le jeune homme, dont la vidéo, le 4 juin, dix-sept jours après sa mise en ligne, avait déjà été vue plus de 14 millions de fois. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les tabous de l’Allemagne mis à l’épreuve
Dans une vidéo diffusée avant les élections européennes, Rezo, 26 ans, a sonné la charge contre le parti conservateur allemand. Une diatribe qui a déstabilisé la CDU, dont la cote s’est effondrée auprès des jeunes.
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2019/06/11/le-youtubeur-qui-fait-mal-a-la-cdu-d-angela-merkel_5474536_4500055.html
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Un épisode de canicule précoce et intense touche depuis lundi une grande partie de la France. Le record de chaleur a été battu vendredi 28 juin, à Carpentras (Vaucluse), à 44,1 °C, puis dépassé ensuite dans la commune de Gallargues-le-Montueux(Gard) où le mercure a atteint 45,8 °C. D’autres records vont-ils être battus dans votre ville ? Pour le savoir, nous avons récupéré, auprès de Météo France, les températures maximales enregistrées dans les 158 principales stations météo de métropole. Une première version de cet article avait été publiée lors de canicule de 2018, mais depuis, cinq records ont été battus en août 2018 à Lille (Nord), Reims (Marne), Alistro (Haute-Corse), Béziers (Hérault) et Leucate (Aude), et trois autres en juin 2019, à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), La Rochelle (Charente-Maritime) et à Carpentras – la commune de Gallargues-le-Montueux ne fait pas partie des 158 stations étudiées. Ces données peuvent encore évoluer dans les heures et jours à venir. On découvre ainsi que le mercure a déjà atteint à 40,4 °C à Paris, dans la station Montsouris. C’était le 28 juillet 1947, journée particulièrement chaude d’une année exceptionnelle, puisque six records ont été enregistrés ce jour-là, par exemple à Orléans (40,3 °C), Chartres (40,1 °C) ou Alençon (39 °C). Le seuil des 40 °C a été dépassé dans plus d’un tiers des stations, dont Clermont-Ferrand, Bordeaux, Toulouse, Perpignan, Lyon et Nantes. Seules deux stations météo n’ont jamais dépassé 30 °C : il s’agit d’Ouessant, au large de Brest, et du mont Aigoual, dans le Gard, à 1 500 mètres d’altitude. La température a déjà dépassé 40 °C dans 54 villes en France Maximales enregistrées par Météo-France dans les 158 stations principales (au 25 juin 2019). Source : Météo-France En revanche, il est difficile de déceler quelle année est la plus torride, puisque toutes les stations n’ont pas commencé à mesurer à la même époque. On remarque toutefois que près de la moitié des maximales remontent à l’été 2003, année de canicule meurtrière en France. Retrouvez les records de chaleur enregistrés dans 158 stations météo dans le tableau ci-dessous. Vous pouvez trier les données ou effectuer une recherche par nom ou par département. Records absolus de température par station (au 28 juin 2019) Quels records pour un mois de juin ? La plupart des épisodes de chaleur se déroulent en août, mois qui concentre 60 % des maximales enregistrées, bien avant juillet, mais au moins dix records absolus ont été enregistrés en juin. En juin, 13 villes ont dépassé les 40 °C Records de chaleur au mois de juin dans 158 stations météo (données de Météo-France actualisées au 28 juin) Source : Source : Météo-France Les records enregistrés sont moins concentrés dans le temps. Seuls 33 ont été établis en 2003. En revanche, on repère les mêmes années « chaudes » : en 1947 (où la maximale de 37,6 °C a été atteinte à Paris), en 1976 (9 records battus), en 2011 (24 records) et en 2017 (28 records). Au moins six records ont déjà été battus en juin 2019. Retrouvez les records de chaleur au mois de juin enregistrés dans 158 stations météo dans le tableau ci-dessous. Vous pouvez trier les données ou effectuer une recherche par nom ou par département. Records de température en juin par station météo (au 28 juin 2019)
La température a atteint 44,3 °C vendredi à Carpentras dans le Vaucluse, l’une des 158 principales stations de Météo France, et plus de 45,8 °C dans le Gard.
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/06/25/canicule-quels-sont-les-records-absolus-de-chaleur-dans-votre-ville_5481319_4355770.html
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Jeff Goldblum dans « The Mountain », de Rick Alverson. STRAY DOGS DISTRIBUTION L’avis du « Monde » – Pourquoi pas C’est un épisode atroce, exhumé des annales médicales : les derniers moments de la vogue des lobotomies dans les hôpitaux psychiatriques américains. Ce n’est pourtant pas un film atroce – même si quelques séquences défient la résistance du spectateur. Rick Alverson, qui travaille depuis une décennie aux marges du cinéma américain, a construit autour de ce thème – que reste-t-il d’un humain une fois qu’on a détruit une part essentielle de son être ? – un voyage rêveur, ralenti, filmé dans les paysages hivernaux du Nord-Ouest des Etats-Unis, traversé d’éclairs de violence et de cruauté. Alors que les premiers neuroleptiques font leur apparition, le docteur Wallace Fiennes (Jeff Goldblum, mélancolique et toxique) a de plus en plus de mal à convaincre les directeurs des établissements qu’il démarche à le laisser opérer sur leurs patients. Sa technique, un coup de pic dans les lobes, à travers la cavité oculaire, est pourtant au point. Mais les temps changent et les pérégrinations du praticien vieillissant à travers l’Oregon et le Washington sont de moins en moins fructueuses. Il embarque néanmoins Andy (Tye Sheridan), jeune homme au regard éteint, dans sa Coccinelle Volkswagen, à charge pour son nouveau collaborateur de photographier les opérés, avant et après. Une société cruelle et policée Andy était jusque-là opérateur de Zamboni, la machine qui aplanit la glace des patinoires. On a eu le temps de découvrir son père, un patineur arrogant d’origine allemande (Udo Kier) qui empêche son fils de prendre contact avec sa mère, internée en hôpital psychiatrique. Ces signes (la glace, la mère absente, la ruine matérielle) esquissent un portrait d’une société aussi cruelle que policée. Rick Alverson se refuse à en faire un récit tout à fait lisible. Alors que la ruine du docteur Fiennes est annoncée, qu’Andy est tombé amoureux d’une jeune patiente, voici que le metteur en scène, également scénariste, fait intervenir le père de cette dernière, sous les traits de Denis Lavant. L’acteur français fait du Denis Lavant, improvisant un être dionysiaque qui fait exploser les codes de sa société d’adoption. Au risque de disloquer l’équilibre du film, de transformer son énigme en langage à jamais indéchiffrable. Film américain de Rick Alverson. Avec Jeff Goldblum, Tye Sheridan, Denis Lavant (1 h 48). www.stray-dogs.biz/the-mountain-une-odyssee-americaine
L’étrange et déprimant road movie de Rick Alverson suit les tribulations d’un chirurgien spécialiste de la lobotomie, dans les Etats-Unis des années 1950.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/06/26/the-mountain-les-perversions-de-la-psychiatrie-au-temps-d-eisenhower_5481526_3246.html
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Comme depuis plusieurs années, le PSG est le grand favori avant le début de la saison 2019-2020 de la Ligue 1… CHRISTOF STACHE / AFP On aimerait se dire que cette nouvelle saison de Ligue 1, dont le coup d’envoi est donné vendredi 9 août, ne sent pas le réchauffé. Mais dans ce championnat qui s’est trouvé un nouveau partenaire officiel – avec une entreprise de livraison de repas –, c’est bien l’ogre du Paris-Saint-Germain, titré six fois sur les sept dernières années, qui semble désigné pour tout croquer, et ne laisser que des miettes à ses camarades. D’autant que l’équipe de Thomas Tuchel n’a pas brillé la saison passée. C’est-à-dire, selon ses standards, qu’elle n’a remporté que la L1, laissant la Coupe de France aux Rennais, la Coupe de la Ligue aux Strasbourgeois, sans même parler de la Ligue des champions et de la cuisante élimination en huitièmes de finale contre Manchester United. Toujours aussi riche, rassuré par le retour du Brésilien Leonardo en tant que directeur sportif, emmené par sa flopée de stars internationales, dont Kylian M’Bappé (33 buts la saison dernière), Edinson Cavani (18 buts), ou Neymar (dont on ignore encore s’il sera encore parisien, ni même footballeur, la saison prochaine), le PSG entame la saison avec appétit, le ventre presque creux, et l’esprit un brin revanchard. Et le Trophée des champions remporté (2-1) face à Rennes, le 3 août, fait figure de mise en bouche. Lire aussi Leonardo fait son retour au PSG en tant que directeur sportif OL, OM, Lille, Saint-Etienne et Monaco en (plats de) résistance Une fois la question du titre évacuée, reste la course au podium, et surtout à la deuxième place, synonyme de qualification automatique pour la Ligue des champions. Le surprenant dauphin lillois, qui disputera la prestigieuse coupe d’Europe cette année, aura-t-il les moyens de rester compétitif en championnat ? Le club nordiste a dû attendre le transfert à Arsenal de son attaquant ivoirien Nicolas Pépé (22 buts, onze passes décisives la saison dernière), pour quelque 80 millions d’euros, le 1er août, pour y voir plus clair dans son mercato. Pas vraiment dans son assiette avant le début du championnat avec trois victoires en sept matchs de préparation, le LOSC inquiète, et misera sur des joueurs en devenir – comme c’est devenu la norme depuis la politique de « trading » mise en place par Luis Campos – à l’instar du Turc Yusuf Yazici, du Nigérian Victor Osimhen, ou de l’Américain Timothy Weah. L’OL a choisi un duo brésilien pour mener les Gones : l’ex-milieu star Juninho en tant que directeur sportif et l’ancien latéral Sylvinho, qui devient le premier entraîneur étranger du club de l’ère Aulas. JEFF PACHOUD / AFP Plus actif sur le marché des transferts, l’Olympique lyonnais, troisième la saison passée, espère grignoter une meilleure part du gâteau. Après le départ de leur entraîneur Bruno Génésio à la fin du mois de mai, les Gones ont fait leur révolution à la mode auriverde, avec l’arrivée d’une légende au poste de directeur sportif – Juninho, meilleur joueur de l’histoire du club –, et d’un novice en tant qu’entraîneur, son compatriote Sylvinho. Le duo s’est séparé de plusieurs joueurs-clés, dont Ferland Mendy (Real Madrid), Tanguy Ndombélé (Tottenham) et Nabil Fékir (Betis Séville), mais a enregistré plusieurs renforts comme Thiago Mendes (ex-Lille), Andersen (ex-Sampdoria) ou Jean Lucas (ex-Santos). Sur le plan financier, le mercato des Gones est pour l’instant une réussite, avec un bilan record de 309 millions d’euros de revenu (au 30 juin). Reste à voir quelle conséquence cela aura sur le terrain, et comment la « minirévolution » de l’arrivée d’un entraîneur étranger, selon les mots de son président Jean-Michel Aulas, permettra au club rhodanien de passer un palier, ou non. Même engagé dans une saison qui sera forcément de transition, l’OL est un sérieux candidat pour la 2e place. L’autre Olympique, celui de Marseille, qui n’a plus disputé la Ligue des champions depuis six ans, n’a pas de compétition européenne à se mettre sous la dent cette année, récompense d’une saison passée ratée, et marquée par le départ de Rudi Garcia. Ce quatrième exercice de l’ère Frank McCourt est l’occasion rêvée de se concentrer sur le championnat pour les Marseillais qui ont trouvé leur avant-centre en l’Argentin de 29 ans Dario Benedetto (ex-Boca Junior, Argentine). Menés par leur nouvel entraîneur, le Portugais André Villas-Boas, ils ont remporté le titre plus ou moins honorifique des EA Ligue 1 Games cet été ; un tournoi qui rassemblait l’OM, Saint-Etienne, Bordeaux et Montpellier, aux Etats-Unis. La tâche s’annonce en revanche plus difficile mais pas impossible pour Saint-Etienne, 5e l’an dernier. Après le départ de Rémy Cabella (Krasnodar, Russie), et la vente record du jeune William Saliba (30 millions d’Euros, à Arsenal, qui l’a prêté pour la saison… à Saint-Etienne), les Verts affichent un budget plutôt confortable estimé à 100 millions d’euros. Le maintien dans ce top 5 tout en disputant la Ligue Europa sera un challenge de taille. L’autre inconnue, grande comme son rocher, s’appelle l’AS Monaco. L’addition aurait pu être plus salée pour le club de la principauté passé tout près de la relégation l’an dernier. Depuis, l’ASM a enchaîné les déconvenues sur le marché des transferts, avec notamment l’arrivée avortée du Portugais André Silva, recalé à la visite médicale, et fait une préparation mitigée. Les Monégasques ont enregistré quatre victoires, dont une de prestige contre le FC Porto (1-0), mais aussi trois défaites, notamment contre Lokeren, un club de deuxième division belge. Montpellier, Nice, ou Rennes : qui sera la surprise du chef ? Le futur dauphin pourrait aussi ne pas faire partie des ces équipes. L’an dernier la sensation était venue de Lille, les Dogues s’étant hissé dans le gratin de la L1 alors que le club avait fini au 17e rang la saison d’avant. Montpellier s’appuie sur un effectif relativement stable pour une possible année de maturité. Le club a enregistré peu de départs de cadres, hormis le gardien Benjamin Lecomte (Monaco) et le milieu Ellyes Skhiri (Cologne). Et le club s’est adjugé les services de Téji Savanier, meilleur passeur de Ligue 1 l’an dernier avec Nîmes, cependant absent pendant deux mois à cause d’une blessure au genou droit. Montpellier peut espérer un podium avec sa recrue Téji Savanier, ici portant les couleurs de son ancien club de Nîmes, avec lequel il a été le meilleur passeur de Ligue 1 l’an dernier. PASCAL GUYOT / AFP Rennes, tombeur du PSG en finale de la Coupe de France en avril, un titre qui a mis fin à quarante-huit ans de jeûne, semble décomplexé, et peut confirmer, même si les départs des cadres Benjamin André et Mexer, voire celui de l’ailier Ismaïla Sarr, risquent de fragiliser l’équilibre. Nice, septième la saison précédente, est au contraire dans une situation contradictoire. En passe d’être racheté par le milliardaire anglais Jim Ratcliffe, et donc de passer dans une autre dimension financière, les Aiglons sont bloqués tant que la transaction n’est pas conclue, ce qui ne sera pas le cas avant le 15 août. Affaiblis par le départ de leur attaquant Allan Saint-Maximin à Newcastle, les hommes de Patrick Vieira ont connu une préparation qui a tourné au vinaigre, avec 14 buts encaissés en deux rencontres amicales contre Burnley (Premier League) et Wolfsburg (Bundesliga). Brest, Metz et Dijon ont du pain sur la planche… Parmi ceux qui ne savent pas à quelle sauce ils vont être mangés figurent logiquement les deux promus. Brest, absent de Ligue 1 depuis 2013, se reposera largement sur Gaëtan Charbonnier, auteur de 27 buts et 6 passes décisives en Ligue 2 l’an dernier. Après le départ de Jean-Marc Furlan, c’est Olivier Dall’Oglio qui mènera le club dans le pari du maintien. Une tâche qui a réussi à l’ex-entraîneur de Dijon, artisan de la montée en 2016 et du maintien dans l’élite du club. Le meilleur buteur de Ligue 2 (27 buts sur la saison 2018-2019), Gaëtan Charbonnier, devra confirmer dans l’élite pour y maintenir son club de Brest. SÉBASTIEN SALOM-GOMIS / AFP Champion de L2, le FC Metz a su garder ses joueurs, mais les Messins manquent peut-être d’un attaquant expérimenté. Ce pourrait être le Sénégalais de 24 ans Habib Diallo, mais il devra s’imposer pour confirmer son statut, acquis à l’échelon inférieur (26 buts en Ligue 2 l’an dernier). Autre équipe qui risque de boire la tasse, Dijon, sauvé in extremis lors d’un barrage face au RC Lens en juin, a enregistré neuf départs. Pour sa cinquième saison en Ligue 1, le club a donné les clés à Stéphane Jobard dont c’est le premier poste en tant qu’entraîneur principal. A moins que, comme la saison dernière, l’AS Monaco ne vienne jouer les trouble-fêtes dans le bas de tableau de cette Ligue 1 où tout semble incertain, mais possible.
Le champion en titre fait évidemment figure de grand favori en Ligue 1, où la course à la deuxième place est ouverte entre des prétendants sans repères.
https://www.lemonde.fr/sport/article/2019/08/08/ligue-1-qui-va-titiller-paris_5497649_3242.html
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A Sydney, le 12 novembre. STRINGER / REUTERS Les habitants de Sydney se sont réveillés, mardi 12 novembre au matin, avec une odeur âcre dans l’air sec et un manteau de fumée enveloppant leur métropole. La veille au soir, l’Etat de Nouvelle-Galles du Sud était placé en état d’urgence en raison de la violence des dizaines de feux de forêt qui menacent près de 6 millions d’habitants dans cet Etat le plus peuplé du pays. « Cela peut potentiellement être la semaine la plus dangereuse pour les feux de brousse que cette nation a jamais observée », a averti le ministre de la police et des services d’urgence de l’Etat, David Elliot, à propos de cette nouvelle série de feux débutée vendredi sur la côte est australienne. Le niveau de danger d’incendie est qualifié de « catastrophique » par les pompiers de Nouvelle-Galles du Sud, qui font face à la combinaison de températures élevées, dépassant les 30 degrés en ce printemps sec, et de rafales de vent allant jusqu’à 80 km/h, augurant du pire. Pas moins de 78 foyers étaient répertoriés mardi après-midi, dont à peine la moitié sous contrôle. Une cinquantaine de foyers étaient aussi répertoriés dans l’Etat voisin du Queensland, sur le flanc nord-est de l’île-continent, notamment aux abords de la capitale de l’Etat, Brisbane. Les dégagements de fumée sont si conséquents qu’ils sont repérables sur les images satellites. Ces traînées sont même visibles jusqu’aux côtes de la Nouvelle-Calédonie voisine, à 1 800 kilomètres de là. Trois morts durant le week-end Dans un climat d’urgence, plus de 600 écoles sont restées fermées le 12 novembre, ainsi que les parcs nationaux, et les habitants, depuis la ville de Newcastle jusqu’à celle de Wollongong en passant par Sydney sur la côte est, ont reçu pour conseil de se tenir prêts à évacuer. « Dans ces conditions, certains feux peuvent débuter et se répandre si rapidement qu’il y a très peu de temps pour avertir, alors n’attendez pas de voir », intimait dès lundi David Elliot. A raison de plusieurs avertissements par heure mardi, les pompiers de Nouvelle-Galles du Sud ont communiqué en cours de journée l’évolution des feux par région, les Tweet indiquant, dans certains cas : « Il est trop tard pour partir. Trouvez un refuge alors que le feu approche ». The Myall Creek Road fire (in Richmond Valley LGA) has crossed the Pacific Highway at New Italy and is spreading qu… https://t.co/vTw0jxw6Y8 — NSWRFS (@NSW RFS) Le premier ministre conservateur Scott Morrison a assuré, mardi, que « tout était fait pour être prêt à ces conditions d’incendie incroyablement dangereuses en Nouvelle-Galles du Sud et au Queensland. La défense est prompte à assister les Etats et à répondre localement avec tout ce qui est nécessaire ». Environ 3 000 pompiers, des centaines de camions-citernes et 80 aéronefs sont à pied d’œuvre, selon le décompte des services d’incendie de Nouvelle-Galles du Sud. A Bullocky Way, en Nouvelle-Galles du Sud, le 12 novembre. STRINGER / REUTERS Ces incendies de forêt hors de contrôle ont déjà coûté la vie à trois personnes durant le week-end. Le corps d’un homme a été retrouvé calciné dans sa voiture, celui d’une sexagénaire dans les décombres d’un bâtiment ravagé par les flammes et un troisième individu a succombé à ses brûlures, à l’hôpital, après avoir tenté de sauver sa maison. Une centaine d’autres personnes ont été blessées ces derniers jours, dont vingt pompiers. Plus de 150 résidences et près d’un million d’hectares sont déjà partis en fumée en Nouvelles-Galles du Sud, dans une saison des bush fires typique pour l’Australie, mais qui a démarré de manière précoce en septembre. « Ecologistes citadins illuminés » La situation a pris également une tournure politique, lundi, après la déclaration polémique du vice-premier ministre conservateur, Michael McCormack (Parti national), estimant sur les ondes de la radio publique que le lien établi entre l’ampleur des feux et le changement climatique était le fruit du « délire de certains écologistes citadins illuminés ». Ces propos ont déclenché de vives réactions parmi les maires de localités affectées, comme Carol Sparks, maire écologiste de Glen Innes, où deux personnes ont péri par le feu. « Je pense que M. McCormack doit se pencher sur la science (…) Ce n’est pas quelque chose de politique, c’est un fait scientifique que nous traversons un changement climatique », a-t-elle fustigé. Elle a fait part de son courroux dans une tribune publiée dans The Guardian. « La colère est réelle, justifiée, parce que ce désastre était bien anticipé et prévisible », a insisté l’élue. Le Monde Le Bureau météorologique australien confirme que « le changement climatique influence la fréquence et la sévérité des conditions de feux de forêt dangereux ». Dans une Australie en proie à une sécheresse prolongée, le chaos ravive le souvenir du « black saturday » de février 2009, lorsque 180 personnes avaient péri dans les bush fires.
Des conditions « catastrophiques » alimentent près de 80 brasiers dans les régions les plus peuplées du pourtour de Sydney, dans le sud-est de l’île.
https://www.lemonde.fr/climat/article/2019/11/12/la-cote-est-de-l-australie-confrontee-a-des-incendies-hors-normes_6018853_1652612.html
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La reine Elizabeth II et David Cameron, alors premier ministre, au 10 Downing Street à Londres, en 2012. BEN STANSALL / AFP Un « haussement de sourcil » pour l’Ecosse… Trois fois rien, en apparence : David Cameron a raconté dans un documentaire, diffusé ces jours-ci par la BBC, avoir réclamé à la reine Elizabeth II un geste symbolique de ce type, juste avant le référendum pour l’indépendance de l’Ecosse, en 2014. L’ex-premier ministre commençait à paniquer, alors que les sondages en faveur du oui prenaient l’avantage – c’est finalement le maintien dans le Royaume-Uni qui l’a emporté. Et il a avoué avoir sollicité le secrétaire privé de la souveraine. Cette confidence lui a valu un sévère recadrage de Buckingham Palace, le 19 septembre. Le palais a exprimé son « déplaisir et sa contrariété », après les indiscrétions de M. Cameron, en pleine promotion de ses Mémoires (For the Record, HarperCollins, non traduit). L’ex-premier ministre avait sollicité la reine lors d’une visite à Balmoral, sa résidence écossaise, en septembre 2014. Une semaine plus tard, une dame, en marge d’un service à l’église de Crathie, où la famille royale participe aux offices quand elle réside à Balmoral, jurait que la reine lui avait confié : « Espérons que les gens vont penser avec prudence à leur avenir. » Une réflexion aussitôt interprétée comme un signal contre l’indépendance de l’Ecosse. Politiquement moins sensible, quoique embarrassant : M. Cameron a aussi raconté au Times, dans une interview publiée le 20 septembre, qu’à Balmoral la reine conduisait « à une vitesse vertigineuse » et qu’elle lui aurait dit « être la seule femme à avoir servi de pilote au roi d’Arabie saoudite ». La « panique » de David Cameron M. Cameron a admis au micro de la BBC que « des gens doivent penser que j’en ai déjà trop dit ». L’épisode peut paraître anecdotique, mais il n’en est rien. Tout au long de son très long règne, Elizabeth II s’en est tenue à une règle considérée comme vitale pour la pérennité de la monarchie britannique : ne jamais intervenir dans le jeu politique national. Ni interview ni confidences par médias interposés. Il est par ailleurs d’usage que le contenu de ses entrevues avec les premiers ministres reste strictement confidentiel. « Je ne suis pas surpris que le palais ait répondu de cette manière. La relation entre le chef de l’Etat [la reine] et le chef du gouvernement est des plus spéciales, il n’y a rien de plus élevé en matière de confidentialité », a commenté l’historien Lord Peter Hennessy dans les colonnes du Times.
Alors que la Cour suprême britannique doit déterminer si le premier ministre Boris Johnson a menti à Elizabeth II pour suspendre le Parlement, son prédécesseur affirme avoir obtenu de la reine un soutien lors du référendum écossais de 2014.
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/09/20/royaume-uni-buckingham-embarrasse-par-les-revelations-de-david-cameron_6012468_3210.html
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Féminicides : la mobilisation à Paris et promesse d’un « Grenelle des violences conjugales » Lors du rassemblement pour demander aux pouvoirs publics de prendre « cinq mesures immédiates » pour mieux protéger les femmes des violences de leurs conjoints ou de leurs ex-conjoints. MARTIN BUREAU / AFP Samedi, un rassemblement parisien est venu appuyer cette demande. Deux mille personnes selon les organisateurs, 1 200 d’après la police, ont exigé des mesures immédiates contre les féminicides, à l’initiative des collectifs Osez le Féminisme, Nous Toutes ou encore la Fondation pour les femmes. Le gouvernement lancera en septembre à Matignon un « Grenelle des violences conjugales » afin d’enrayer le phénomène des féminicides, annonce la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, dans un entretien au Journal du dimanche (JDD) du 7 juillet. Sur BFMTV, Nicole Belloubet, la ministre de la justice, a annoncé une mission d’inspection pour revenir sur les éventuelles défaillances dans les dossiers « classés des années 2015, 2016, 2017 pour voir là où nous aurions dû mieux faire ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Féminicides : l’urgence nationale pour mettre fin au « massacre » Coupe du monde féminine : les Etats-Unis conservent leur titre en battant (2-0) les Pays-Bas Megan Rapinoe à Lyon, le 6 juillet, à la veille du match face aux Pays-Bas. Francois Mori / AP Les Etats-Unis ont battu les Néerlandaises 2-0 lors de la finale de la Coupe du monde féminine, dimanche 7 juillet, au terme d’un match contrôlé, grâce à un penalty de Megan Rapinoe et un but de Rose Lavelle. Les Américaines remportent donc leur deuxième titre de suite, le quatrième de leur histoire après ceux de 1991, 1999 et 2015. La capitaine Megan Rapinoe et Alex Morgan finissent toutes les deux meilleures buteuses de la compétition, à égalité avec l’Anglaise Ellen White (six buts). Revivez le match ici : Les Américaines ont remporté leur quatrième victoire en Coupe du monde Législatives en Grèce : Alexis Tsipras reconnaît sa défaite face à la droite de Mitsotakis Fin de partie pour Alexis Tsipras. Les conservateurs grecs de Kyriakos Mitsotakis ont écrasé, dimanche 7 juillet, la formation de gauche du premier ministre sortant, lors des premières législatives depuis que la Grèce a échappé à la faillite. Alexis Tsipras a reconnu sa défaite face à son adversaire et a appelé au téléphone Kyriakos Mitsotakis pour le féliciter de sa victoire. Trois ans après avoir pris les rênes du parti conservateur, Kyriakos Mitsotakis, perçu comme un réformateur, proche des milieux d’affaires, a promis de « relancer l’économie » et de « laisser la crise derrière nous ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’urne ou la plage ? Jour de vote en Grèce pour les élections législatives anticipées Bras de fer en Méditerranée avec des ONG de secours en mer Les migrants recueillis par l’« Alex » ont débarqué à Lampedusa, dimanche 7 juillet. ELIO DESIDERIO / AP Une semaine après le Sea-Watch 3, un nouveau navire humanitaire, l’Alex, a accosté de force, samedi 6 juillet, dans le port italien de Lampedusa avec 41 migrants, finalement, autorisés à débarquer dimanche au petit matin. D’autre part, les forces armées de Malte ont acheminé dans un de ses ports les 65 migrants se trouvant à bord d’un navire d’une ONG allemande, l’Alan Kurdi, dimanche 7 juillet. Malte, qui a tenu des discussions dimanche avec l’Union européenne et l’Allemagne, précise toutefois qu’aucun de ces migrants ne restera sur son territoire « étant donné que ce cas n’était pas de la responsabilité des autorités maltaises ». Ils seront immédiatement acheminés vers différents pays européens. A Hongkong, les manifestants visent une gare « chinoise » Un manifestant brandit l’Union Jack, le drapeau du Royaume-Uni, à Hongkong, le 7 juillet. Vincent Yu / AP Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté dimanche à Hongkong pour maintenir la pression sur le gouvernement local pro-Pékin devant une gare controversée d’où partent des trains à grande vitesse pour la Chine continentale. En fin de soirée, la police anti-émeutes a chargé des protestataires dans le quartier de Mongkok dans le nord de la ville, après un face-à-face tendu d’une vingtaine de minutes avec un groupe d’environ 300 manifestants, la plupart jeunes et masqués. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Face au mouvement de contestation, la Chine perd patience à Hongkong La stratégie du dérapage contrôlé de l’Iran sur le nucléaire Donald Trump a lancé une nouvelle série de sanctions « pour mettre une pression maximale » sur Téhéran. WANA NEWS AGENCY / REUTERS Téhéran a annoncé mettre à exécution dimanche sa menace d’enrichir l’uranium à un degré prohibé par l’accord de 2015. Cette posture, essentiellement politique, ne change néanmoins pas la donne à court terme sur le plan militaire. Lors d’un entretien téléphonique avec son homologue iranien Hassan Rohani, le président français Emmanuel Macron a affirmé sa volonté de relancer un dialogue général avant le 15 juillet pour apaiser les tensions. De son coté, le président américain Donald Trump a appelé l’Iran à la « prudence ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Nucléaire iranien : la marge de manœuvre limitée de la France Du côté de l’actu sportive Tour de France. Moins d’une minute, c’est la fourchette qui a séparé la quasi-totalité des favoris du Tour de France dans le contre-la-montre par équipes gagné dimanche à Bruxelles par la formation Jumbo du maillot jaune, le Néerlandais Mike Teunissen. Basket. La Serbie a décroché la médaille de bronze de l’Euro féminin en écrasant la Grande-Bretagne 81 à 55 dimanche devant son public à Belgrade. La Grande-Bretagne a créé la surprise en se qualifiant pour la première fois pour le dernier carré. L’Espagne, tenante du titre, a battu la France 86 à 66 en finale de l’Euro.
Vous n’avez pas suivi l’actualité ce week-end ? Voici les principaux titres à retenir du samedi 6 et du dimanche 7 juillet.
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/07/07/feminicides-secours-de-migrants-en-mediterranee-coupe-du-monde-feminine-les-cinq-infos-a-retenir-du-week-end_5486610_4355770.html
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En 2010, leur Atlas des fractures scolaires en France (Autrement, 2010) avait mis en avant les disparités territoriales de l’éducation nationale en matière de répartition des moyens humains et financiers, de carte des formations proposées et d’inégalités sociales des élèves qui fréquentent les établissements publics. Avec le site Fractures scolaires en France, Rémi Rouault et Patrice Caro, professeurs de géographie à l’université Caen-Normandie proposent une reprise actualisée de leur ouvrage sous forme de pages thématiques concises (encore en développement pour certaines) : « apprentissage », « carte scolaire », « handicap », « soutien scolaire », etc. Neuf ans plus tard, ils constatent que « pour une large part les inégalités en matière scolaire n’ont pas beaucoup changé ». Parmi les principaux phénomènes que cette mise à jour de votre atlas met en avant, il y aurait en France une accélération de la « scolarisation à la carte ». C’est-à-dire ? Patrice Caro : Cette scolarisation à la carte était déjà un élément marquant en 2010, mais le phénomène s’est accentué depuis. Nous avons en effet l’impression que le service public de l’éducation, constitué initialement dans une optique de transmission des valeurs républicaines à toute une génération, est en train de se transformer en service à la personne où l’entre-soi est de mise. Cela passe d’abord par un processus de plus en plus fort d’évitement de la carte scolaire par les familles grâce au jeu des dérogations, des options et du recours au privé. Selon nos estimations, aujourd’hui au moins un cinquième des élèves de collège sont inscrits en dérogation ou évitement de la carte scolaire. Rémi Rouault : Dans l’agglomération de Caen par exemple, à l’école élémentaire, plus de 4 000 élèves ne sont pas scolarisés dans leur école publique de secteur. Les familles défavorisées sont les moins informées de ces possibilités, elles contournent donc moins cette carte scolaire, ce qui renforce l’entre-soi. Cette fracture est aggravée par le soutien scolaire qui, selon les rares chiffres dont nous disposons, concerne avant tout les familles favorisées. Il est important de rappeler que ce soutien scolaire est souvent rémunéré en chèques emploi-service universel (CESU), dispositif permettant une déduction fiscale. L’Etat n’est donc pas seulement spectateur de ce phénomène mais accepte une affectation de fonds publics sur initiative privée.
A l’occasion de la mise à jour de leur « Atlas des fractures scolaires en France » publié en 2010, les géographes Rémi Rouault et Patrice Caro reviennent sur la fragmentation et les inégalités territoriales du système éducatif
https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/06/03/le-service-public-de-l-education-est-en-train-de-se-transformer-en-service-a-la-personne_5470868_3224.html
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Editorial du « Monde ». Donald Trump, on ne saurait le lui reprocher, a à cœur de tenir ses promesses de campagne. Il a une autre obsession : se démarquer de ses prédécesseurs, qui, à ses yeux, ont tous failli. L’annonce du retrait des troupes américaines d’Afghanistan, alors qu’il est déjà en campagne pour l’élection présidentielle de 2020, devait lui permettre de cocher les deux cases : « ramener les gars à la maison », comme promis, et réussir là où Barack Obama avait échoué. Un plan de paix pour sortir du bourbier afghan, dix-huit ans après s’y être fourvoyé pour en chasser les talibans et Al-Qaida au lendemain des attentats du 11-Septembre, qui n’en rêverait pas ? M. Trump, lui, a pensé y être arrivé. Il s’est même vu si près du but qu’il avait prévu une mise en scène à la mesure de son ambition, de son goût du spectacle et de son penchant pour la transgression. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Afghanistan : récit du pari diplomatique raté de Donald Trump La signature aurait lieu à Camp David, villégiature dont il goûte peu la rusticité, mais lieu iconique des hauts faits diplomatiques américains, où Jimmy Carter avait réuni l’Israélien Menahem Begin et l’Egyptien Anouar El-Sadate en 1978 ; elle se tiendrait autour de la date hautement symbolique du 11 septembre ; elle rassemblerait autour de lui des leaders talibans – oui, des talibans, à Camp David – et le président afghan Ashraf Ghani. Divisions et confusion Le processus lui paraissait bien engagé. Après neuf rounds de négociations menées au Qatar avec des représentants talibans, l’émissaire américain, l’ambassadeur Zalmay Khalilzad, lui-même d’origine afghane, disait être au seuil d’un accord de principe. Cet accord portait notamment sur le retrait progressif des 14 000 soldats américains encore stationnés en Afghanistan, un premier contingent de 5 000 d’entre eux quittant le pays rapidement. En échange, les talibans s’engageaient à lutter contre le terrorisme et à participer à des pourparlers de réconciliation inter-afghans. De toute évidence, le président américain a vendu la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Compter sur l’approbation du président afghan alors que son gouvernement avait été écarté des négociations de Doha, à la demande des talibans, était sans doute prématuré. Considérer les talibans comme des partenaires fiables était probablement naïf : l’annonce d’un accord de principe par l’ambassadeur Khalilzad, le 2 septembre, à la télévision afghane, avait été saluée par l’explosion d’une bombe visant un complexe fortifié occupé par des étrangers à Kaboul, attentat aussitôt revendiqué par les talibans et qui a fait 16 morts. Mais, surtout, M. Trump semble avoir sous-estimé les divisions et la confusion au sein de sa propre équipe sur le sujet ; selon le New York Times, le conseiller à la sécurité nationale John Bolton s’est battu contre le projet d’accord, qui était en revanche activement soutenu par le chef de la diplomatie, le secrétaire d’Etat, Mike Pompeo. Lire aussi Trump rompt les négociations de paix engagées en Afghanistan avec les talibans Fidèle à ses habitudes théâtrales, Donald Trump a donc tout annulé sur Twitter samedi 7 septembre, en justifiant cette décision par un second attentat, jeudi, au cours duquel deux soldats de l’OTAN, un Américain et un Roumain (M. Trump n’a d’ailleurs mentionné que l’Américain), ont été tués. M. Pompeo n’a plus eu qu’à tenter d’expliquer ensuite dans les médias que les talibans, en effet, n’avaient pas tenu parole, mais que ce n’était pas la fin de l’histoire. L’histoire, elle, retiendra surtout que la diplomatie trumpienne sort affaiblie de cet échec, pour avoir voulu privilégier le spectacle sur un dossier notoirement difficile. Une fois de plus. Le Monde
Editorial. En un Tweet, samedi 7 septembre, le président américain a rompu les négociations sur le retrait de ses troupes du pays. C’est un échec majeur pour Washington.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/09/09/afghanistan-les-talibans-rappellent-trump-a-la-realite_5508154_3232.html
mlsum-fr-28
Une photo de Jagendra Singh, dans la maison de sa famille, à Khutar, dans l’Uttar Pradesh. FORBIDDEN STORIES A 200 kilomètres de Lucknow, la capitale de l’Uttar Pradesh, dans le nord-est de l’Inde, la ville de Shahjahanpur inflige à tout visiteur le prodigieux chaos de la rue indienne. Il faut zigzaguer entre motocyclistes nerveux, vaches errantes et camions brinquebalants avant de trouver une petite place de quartier étonnamment paisible, bordée d’un rectangle de petites maisons de brique. Celle que louait le journaliste Jagendra Singh, 46 ans, est un simple rez-de-chaussée, ouvrant sur une petite cour. C’est là qu’il travaillait, quand il n’était pas auprès de sa femme et de ses enfants, dans un village des alentours. C’est là aussi qu’une descente de la police, le 1er juin 2015, a tourné à la catastrophe : Jagendra Singh a été emmené à l’hôpital, avec des brûlures sur 60 % du corps. Sa famille a recueilli son témoignage en vidéo et l’a diffusé. Enduit de pommade, les chairs à vif, les doigts fondus, le journaliste désigne ses agresseurs : des policiers locaux menés par un inspecteur, accompagnés d’hommes en civil, liés au puissant ministre du gouvernement provincial, Ram Murti Verma, dont il dénonce la corruption depuis des semaines. « Ils ont escaladé le mur et sont entrés. Ils m’ont battu et m’ont aspergé d’essence », dit-il haletant. La famille a également filmé une femme que le journaliste avait interviewée dans le cadre d’une affaire de viol impliquant cet homme. Cette femme confirme que les agresseurs ont tenté de les immoler. Les policiers, eux, ont une autre une version : Jagandra aurait refusé de leur ouvrir à leur arrivée. Après avoir aperçu de la fumée, ils auraient sauté le mur et découvert l’incendie. Jagendra est mort sept jours plus tard d’une septicémie, à l’hôpital de Lucknow, la capitale. Le « triangle de fer » L’histoire de Jagendra Singh, le journaliste brûlé vif, a provoqué un électrochoc en Inde : la presse du pays en a fait le symbole des reporters victimes de la collusion de la police avec les hommes d’affaires et les politiciens corrompus. « C’est un triangle de fer. Un journaliste peut dénoncer le premier ministre. Mais s’il écrit sur des affaires très locales, il est vite neutralisé, très peu osent », explique, à Lucknow, Suman Gupta, membre d’un comité d’enquête de journalistes, formé après la mort du reporter. Jagendra Singh s’est d’ailleurs vu décerner un prix, à titre posthume, par l’association de la presse de Bombay. Mais les enfants du journaliste ont ensuite retiré leur demande d’enquête auprès du Bureau central d’enquête, l’équivalent indien du FBI, en assurant être convaincus que leur père s’était suicidé. L’affaire a été classée, au grand dam des journalistes et militants des droits de l’homme. L’équipe de Forbidden Stories a repris l’enquête sur la mort de Jagendra Singh, qui accusait notamment Ram Murti Verma d’appartenir à la mafia du sable, une nébuleuse qui alimente le secteur des bâtiments et travaux publics, et corrompt les administrations. Elle a assassiné trois autres journalistes depuis 2015 et attaqué une foule de policiers, de journalistes ou de lanceurs d’alerte.
Le journaliste indien s’était engagé dans une bataille sans merci contre un responsable politique corrompu et dénonçait la puissante « mafia du sable ». Il est mort brûlé, en 2015. Troisième épisode de notre série « Green Blood ».
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/06/20/l-histoire-tragique-de-jagendra-singh-le-reporter-facebook-de-l-uttar-pradesh_5479232_3210.html
mlsum-fr-29
Vainqueur de Rafael Nadal vendredi 12 juillet, Roger Federer, 37 ans et onze mois, disputera dimanche sa douzième finale à Wimbledon pour tenter d’accrocher sa 21e couronne en Grand Chelem. Andy Couldridge / AP Il y a un mois, après sa demi-finale à Roland-Garros, Roger Federer avait rendu un hommage appuyé à son rival majorquin (vainqueur 6-3, 6-4, 6-2), expliquant à quel point Rafael Nadal est seul au monde sur terre battue. Vendredi 12 juillet, ce fut au tour de l’Espagnol de lui rendre la politesse, après la revanche du Suisse au même stade, à Wimbledon (7-6, 1-6, 6-3, 6-4). « Il se déplace à l’intérieur du court plus rapidement que n’importe quel autre joueur, il a cette capacité à prendre la balle plus tôt que n’importe qui, il ne vous donne pas le temps de vous organiser pour vous ouvrir le court, aujourd’hui, il était dans sa zone de confort, je n’ai pas réussi à l’en déloger », a résumé l’Espagnol, marqué par cette défaite. Dès l’entrée des deux joueurs, il régnait une effervescence inhabituelle sur le vénérable Centre Court où l’on entend d’ordinaire les mouches voler. Onze ans que le public londonien n’avait pas eu le droit à cette affiche. La Royal Box était pleine : Jude Law, David Beckham, Hugh Grant ou encore Sir Alex Ferguson ne voulaient manquer l’événement. Personne n’avait oublié le chef-d’œuvre des deux hommes le 6 juillet 2008, lors d’un match que beaucoup considèrent comme l’un, sinon le plus mémorable de l’histoire du jeu. Une finale en cinq sets, où les interruptions dues à la pluie et les derniers coups délivrés presque à la bougie avaient apporté leur lot de dramaturgie. Et les spectateurs mirent de côté la bienséance… Ce jour-là, Nadal avait eu le dernier mot (6-4, 6-4, 6-7, 6-7, 9-7). L’Espagnol avait 22 ans et « seulement » quatre Roland-Garros à son palmarès, le Suisse 26 ans et 12 Majeurs. Novak Djokovic, lui, ne comptait encore qu’un titre du Grand Chelem, et Cori Gauff – révélation de ce tournoi – était au jardin d’enfants… Onze ans plus tard, l’Espagnol a désormais le cheveu plus ras que le Suisse mais les deux n’ont rien perdu de leur hargne. Le mois dernier, le vent avait gâché le rendez-vous tant attendu. Cette fois, une petite brise rafraîchissait le Centre Court mais rien à voir avec les rafales qui avaient transformé le court Philippe-Chatrier en « bac à sable », pour reprendre les mots de Federer. Et le match, sans atteindre les sommets ni la dramaturgie de 2008, tint cette fois ses promesses. D’entrée de jeu, les deux hommes se rendent coup pour coup. Dans cet écrin où il a déjà été sacré huit fois, Roger Federer est dans son élément : jamais inquiété sur son service, impérial à la volée, très mobile et agressif, il ne se laisse pas piéger en fond de court par l’Espagnol. Les deux joueurs sont contraints de se départager au jeu décisif : le Suisse finit par prendre son adversaire de vitesse, lisant parfaitement son service.
Battu par l’Espagnol à Roland-Garros, le Suisse l’a fait à son tour chuter dans son jardin (7-6, 1-6, 6-3, 6-4). Il retrouvera dimanche en finale Novak Djokovic.
https://www.lemonde.fr/sport/article/2019/07/12/a-wimbledon-federer-prend-sa-revanche-sur-nadal_5488860_3242.html
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Faire d’une pierre deux coups. Lors du sommet du G7 à Biarritz, qui devait se terminer lundi après-midi, Emmanuel Macron a singulièrement fortifié sa stature d’homme d’Etat, en faisant avancer de manière spectaculaire les négociations sur l’Iran. Mais il en a aussi profité pour rafraîchir son costume de héraut de l’écologie, sensiblement terni depuis la démission de Nicolas Hulot il y a tout juste un an. Alors que tout le monde s’attendait à ce que les questions géostratégiques occupent l’essentiel des discussions, le chef de l’Etat a focalisé une partie de l’attention sur les incendies qui ravagent la forêt amazonienne. « Nous devons répondre à l’appel de l’océan et de la forêt qui brûle », a-t-il déclaré en préambule du sommet, promettant des avancées en matière de lutte contre les feux en cours mais aussi de préservation de la biodiversité. Article réservé à nos abonnés Lire aussi G7 : Emmanuel Macron à la manœuvre sur l’Iran et les autres dossiers brûlants Signe d’une action réfléchie, Emmanuel Macron avait lancé l’offensive dès jeudi soir, en publiant un Tweet dans lequel il fustige l’inaction face aux incendies en Amazonie. « Notre maison brûle. Littéralement », a-t-il écrit en français et en anglais, reprenant une formule déjà utilisée par Jacques Chirac lors d’un sommet climatique à Johannesburg en 2002, ajoutant : « C’est une crise internationale. » Surtout, le chef de l’Etat a mis en scène un affrontement avec Jair Bolsonaro et annoncé qu’il suspendait son soutien à l’accord commercial du Mercosur, accusant le président brésilien de lui avoir « menti » sur les actions menées par Brasilia pour lutter contre la déforestation. « La France ne signera aucun accord commercial avec un pays qui ne respecte pas l’accord de Paris et ne s’engage pas concrètement dans la préservation du climat et de la biodiversité », justifie-t-on à l’Elysée. L’offensive climatique du chef de l’Etat ne s’est pas limitée à l’Amazonie. Dans un entretien accordé vendredi au site Konbini, Emmanuel Macron a dit soutenir « dans ses intentions » le maire de Langouët, une commune bretonne qui a interdit l’utilisation de pesticides à moins de 150 mètres des habitations ou des locaux professionnels et qui est poursuivi en justice par le préfet d’Ille-et-Vilaine. « Il faut arrêter de dire des bêtises » Le glyphosate « a des conséquences pour la santé publique, il faut arrêter de dire des bêtises », y défend le chef de l’Etat, se disant prêt à « changer la loi » pour permettre aux élus locaux de prendre des mesures de protection. En juin, le Conseil d’Etat avait annulé une partie de l’arrêté interministériel de 2017 qui régit l’usage des pesticides en France, estimant qu’il ne protégeait pas suffisamment la santé des citoyens et l’environnement. Un nouvel arrêté est attendu cet automne.
Amazonie, glyphosate, accord de Paris… au G7, à Biarritz, le chef de l’Etat a raffermi son discours sur l’urgence écologique.
https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/08/26/sous-la-pression-ecologiste-emmanuel-macron-repasse-au-vert_5502921_823448.html
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Nathalie de Vries et Dominique Perrault lors de la conférence « Quels rêves pour la ville de demain ? », animée par Isabelle Regnier, le samedi 5 octobre, dans le cadre du Monde Festival, à l’Opéra Bastille, à Paris. KAMIL ZIHNIOGLU POUR « LE MONDE » En apparence, tout semble opposer ces deux stars de l’architecture, la Néerlandaise Nathalie de Vries et le Français Dominique Perrault, qui étaient invités, samedi 5 octobre, au Monde Festival, à échanger sur leurs rêves « pour la ville de demain ». A la première, une esthétique pop décomplexée faite de géométries explosées et d’effusions colorées. Au second, une élégance rayonnante, alliant une géométrie épurée et un goût prononcé pour la monumentalité. Deux esthétiques identifiables, deux langages architecturaux qui ont en commun de puiser dans l’imaginaire, de s’inspirer de la matière onirique. Pour Dominique Perrault justement, l’architecture a cette « capacité de créer des possibles ». Et l’architecte d’évoquer, devant le public captivé de l’amphithéâtre de l’Opéra Bastille, le caractère visionnaire, il y a trente ans, de la bibliothèque François-Mitterrand, « bâtiment le plus durable de tout Paris », qui, avec « plus d’un hectare d’îlot de fraîcheur » et « 200 000 m2 en sous-sol », correspond aux modèles « après lesquels courent aujourd’hui tous les concours Réinventer Paris. » Son seul regret : ne pas avoir pu, à l’époque, utiliser sur les tours des verres photochromies qui se teintent selon l’ensoleillement. Le futur siège de BNP Paribas Real Estate, à Boulogne, va pouvoir en être équipé. Silodam, construit à Amsterdam en 2002, ressemble au premier coup d’œil à un alignement de conteneurs de différentes couleurs Comme en écho, Nathalie de Vries évoque à son tour le « rôle de l’architecte », tenu « d’essayer de nouveaux matériaux, d’avancer, de poser des jalons. » Elle raconte comment, avec ses acolytes cofondateurs de l’agence Winy Maas et Jacob van Rijs (MVRDV), elle a rêvé et réalisé – bien avant que la mixité des usages devienne une valeur montante – le bâtiment multifonctionnel de Silodam, construit à Amsterdam en 2002. Erigé au bout d’un quai tel un bateau amarré, le projet, qui compte 157 logements ainsi que des bureaux, des commerces et des espaces communs, ressemble au premier coup d’œil à un alignement de conteneurs de différentes couleurs. « L’idée était de montrer que l’on peut introduire de la variété au sein d’un même bâtiment, pour répondre à des personnes différentes, des besoins différents », explique l’architecte néerlandaise. Mêler des populations et des usages Pour l’un comme pour l’autre, la ville de demain est une ville où il fait bon vivre, où il y a « de la joie », « où l’on s’épargne de longs trajets pour aller travailler »… Une ville qui ne compte plus de quartiers-dortoirs, de quartiers de simple passage, mais favorise « l’inscription d’une vie dans chaque lieu ». A l’instar du rêve de Dominique Perrault de transformer l’île de la Cité, à Paris. Un espace qui, souligne l’architecte, « a perdu, avant même l’incendie de Notre-Dame, toute visibilité, où l’on ne fait que passer. Il faut faire revivre cet espace public et mutualiser tous les éléments de l’extraordinaire patrimoine architectural qu’il offre : le Palais de justice, l’hôpital et une cathédrale ». Pour lui, la reconstruction de Notre-Dame est une formidable occasion « de faire réapparaître l’île de la Cité comme un lieu de vie. » « La frugalité, c’est bien, mais il ne s’agit pas de construire bio bobo vegan ! », Dominique Perrault La ville de demain, c’est une ville où se mêlent les populations et les usages, insiste Nathalie de Vries. Pune, dans l’Etat de Maharashtra (Inde), a ainsi vu naître en 2018 les Future Towers, un complexe de plus de 1 000 logements réalisé par MVRDV et conçu en un seul et unique bâtiment. Une structure singulière avec des hauteurs variables qui ressemble à une chaîne de montagnes. Comprenant des logements de 45 à 450 m2, l’ensemble favorise un mélange non discriminatoire entre différentes catégories d’habitants. Et, dans les façades, on trouve des ouvertures aux couleurs vives, espaces où sont proposées des activités communes (yoga, minigolf, aires de jeux pour enfant, etc.). « Nous avons vraiment voulu créer des espaces collectifs à l’intérieur même du bâtiment », souligne Nathalie de Vries. Pour l’une comme pour l’autre, la ville de demain sera faite avec de nouveaux matériaux, mais elle n’est certainement pas une ville frugale en matériaux. « La frugalité, c’est bien, mais il ne s’agit pas de construire bio bobo vegan ! lâche Dominique Perrault. Il faut développer de nouveaux matériaux, mais il s’agit aussi de repenser leur mise en œuvre de façon beaucoup plus écologique et économe. Et là, l’industrie de la construction est en retard. » Et Nathalie de Vries d’abonder : « Notre façon de construire doit changer. L’idée n’est pas forcément d’utiliser moins de matériaux mais de penser recyclage, réutilisation, bâtiment adaptable. Penser des bâtiments qui peuvent se transformer, être multi-usages… »
Les deux architectes étaient invités, samedi 5 octobre, au Monde Festival à exposer leur vision de la ville du futur.
https://www.lemonde.fr/festival/article/2019/10/08/au-monde-festival-nathalie-de-vries-et-dominique-perrault-ont-reve-la-ville-de-demain_6014691_4415198.html
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🙌@FranckRibery È NOSTRO! 📰➡️https://t.co/8f1EYAxb9H 💜 #WelcomeLegend #ForzaViola #QuestaÈFirenze ⚜️ https://t.co/Idquh2K6E9 — acffiorentina (@ACF Fiorentina) Le Français Franck Ribéry a été accueilli comme une rock star à l’aéroport de Florence, mercredi, acclamé par les supporteurs de la Fiorentina, club où il s’est engagé pour deux saisons. « Bienvenue légende », a écrit sur Twitter le club toscan de Série A, montrant une photo de l’ailier français âgé de 36 ans, polo et écharpe de la Fiorentina sur le dos, avec la mention « Il est des nôtres ». L’ancienne gloire du Bayern Munich était libre de tout contrat depuis son départ de Bavière, cet été, après y avoir passé 12 saisons et remporté 23 titres. Après s’être dit « prêt pour un nouveau défi » lundi sur Instagram, Ribéry a mis en scène mercredi sur ce réseau social son voyage en avion privé puis son arrivée sur le sol italien. On le voit sous ses nouvelles couleurs violettes, signant des autographes et acclamé par des dizaines de tifosi, puis découvrant un panorama de sa nouvelle ville, Florence, en compagnie de dirigeants florentins. « J’aime aussi l’italien » A l’aéroport, il s’est même permis quelques phrases en italien : « Je suis heureux, je suis là avec ma famille. J’ai parlé pendant une semaine avec la Fiorentina, j’ai parlé aussi avec Luca Toni (son ex-coéquipier au Bayern, passé par Florence). Il m’a dit que la Fiorentina était un grand club et que la ville était belle », a t-il affirmé, enthousiaste, dans une vidéo postée par son futur club (toujours sur les réseaux sociaux). « J’aime aussi l’italien, je le parle un peu, même s’il faut que je m’améliore. » Ribéry se balade déjà en italien 👌 https://t.co/v02slLSgBC — DailyMercato (@Daily Mercato) « Pour moi, il était crucial que je signe un contrat pour deux ans », avait-il confié à la chaîne allemande de Sky Sports. « Un autre facteur important est de pouvoir avoir ma famille avec moi. Je suis très heureux de pouvoir jouer au football de haut niveau pendant encore deux ans ». L’ancien joueur de Metz, Galatasaray et Marseille, finaliste de la Coupe du monde 2006 avec la France (81 sélections, 16 buts), était devenu en mai dernier le joueur le plus titré de l’histoire de la Bundesliga, avec neuf sacres, faisant honneur à son surnom : « Kaiser Franck ».
Libre après avoir passé 12 saisons au Bayern Munich, le Français s’est engagé à 36 ans avec la Fiorentina, en Serie A.
https://www.lemonde.fr/sport/article/2019/08/21/football-franck-ribery-voit-la-vie-en-violet_5501345_3242.html
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Renee Soutendijk, marchande de frites dans « Spetters ». PROD DB / ENDEMOL ENTERTAINMENT / VSE FILM Son retour fracassant en France avec Elle (2016) l’a prouvé une nouvelle fois : le cinéaste néerlandais Paul Verhoeven, qui a connu plus d’une vie entre l’Europe et les Etats-Unis, offre aux observateurs l’exemple type du cinéaste palingénésique, toujours capable de se régénérer. Avant de tourner à Hollywood une poignée de blockbusters retors (RoboCop, Total Recall, Starship Troopers) qui l’ont rendu célèbre, sa première carrière hollandaise (1971-1985) avait bien failli voler en éclats après le scandale qu’avait déclenché Spetters (1980), resté depuis injustement méconnu. Lire la critique d’« Elle » : De victime à mythe, l’ultime mutation du professeur Verhoeven Sa réédition en « version intégrale non censurée » et en copie Blu-ray haute définition donne l’occasion de revenir sur ce film ahurissant, accusé en son temps de tous les maux et apparaissant aujourd’hui comme un sommet caché de son œuvre. Bien plus qu’une comédie grivoise Après l’élégant Soldier of Orange (1977) qui racontait l’engagement de l’élite étudiante dans la résistance, Verhoeven et son scénariste Gerard Soeteman ont voulu se pencher sur la jeunesse populaire et ont puisé leurs personnages loin de la capitale, dans la banlieue de Rotterdam, parmi les bandes qui pratiquaient le motocross comme une forme d’exutoire. Rien (Hans Van Tongeren), Eef (Toon Agterberg) et Hans (Maarten Spanjer), trois amis inséparables, fils d’agriculteurs ou de petits commerçants, écument les compétitions de motocross dans l’espoir d’atteindre un jour la notoriété de leur idole, le champion national Gerrit Witkamp (Rutger Hauer, alors âgé de 36 ans). Le reste du temps se dilapide pour eux entre petits boulots, sorties en boîte et rodomontades hormonales. Un beau jour arrive en ville une banale baraque à frites avec à son bord la belle Fientje (Renee Soutendijk), une vendeuse bien résolue à quitter son étroite roulotte. Parmi les trois camarades qui se disputent ses faveurs, elle cherche lequel sera le plus susceptible de l’embarquer dans sa réussite. Spetters, terme qui en néerlandais désigne tout autant les « beaux gosses » motards que les « éclaboussures » de leurs virées à moto, commence ainsi comme une simple comédie grivoise, pour ne cesser ensuite d’approfondir la situation, d’explorer ses composantes sociales et basculer peu à peu dans une dimension amère, voire tragique, de l’existence de ses personnages. Le tableau d’abord potache de cette jeunesse avide de vitesse s’ouvre en une perspective plus large, pour la montrer finalement se fracassant dans le mur du passage à l’âge adulte. Les ombres du handicap, du désespoir, de la délinquance, du viol la guettent au détour du chemin extrême qu’elle s’est choisi.
Sorti en 1980, accusé en son temps de tous les maux, le film du Néerlandais qui s’intéresse aux classes populaires de la Hollande périphérique, ressort en version non censurée.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/09/11/dvd-spetters-un-verhoeven-reste-cache_5508970_3246.html
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A quelques semaines du retour des étudiants sur les bancs des amphithéâtres, le gouvernement veut donner une tonalité sociale à la rentrée universitaire. Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, a annoncé le 20 août une revalorisation des bourses sur critères sociaux de + 1,1 %, soit une enveloppe de 46 millions d’euros. Un coup de pouce salué par les organisations étudiantes. Même s’il est jugé insuffisant, au regard de l’évolution du coût de la rentrée (+ 1,96 % d’après l’enquête de la FAGE) et de la vie étudiante (+ 2,83 % d’après l’UNEF). Mais, au-delà de cette annonce, c’est un chantier bien plus vaste qu’a décidé d’ouvrir le gouvernement cette année : celui de l’ensemble des aides destinées aux étudiants, dont les bourses ne sont qu’une partie. Elles représentent 2,1 des 5,7 milliards d’euros d’aides de l’Etat au titre de l’action sociale en faveur des étudiants, le reste allant pour une large part aux aides personnalisées au logement (APL). Les bourses étudiantes existeront-elles encore demain sous cette forme ? Une fusion avec les APL est-elle possible, alors que ces dernières, contrairement aux bourses, ne reposent pas sur le revenu de la famille mais sur celui de l’étudiant ? Un soutien financier universel – la revendication historique des syndicats étudiants – est-il envisageable ? Les questions techniques sont nombreuses. Et sensibles. Une aide « universelle » L’une est désormais tranchée : la réflexion autour de cette refonte des aides propres aux étudiants va intervenir dans le cadre de la concertation autour du futur revenu universel d’activité (RUA), le projet de prestation unique regroupant les différents minimas sociaux lancé par Emmanuel Macron dans le cadre du « plan pauvreté ». Ouverte par le gouvernement en juin, celle-ci doit s’achever d’ici à la fin de l’année – avec un projet de loi promis à l’horizon 2020. Depuis son arrivée au ministère de l’enseignement supérieur, en 2017, Frédérique Vidal s’est à plusieurs reprises prononcée en faveur d’une « aide globale d’autonomie » pour les étudiants, sans en définir les contours – les premières années du quinquennat avaient été concentrées sur le rattachement des étudiants au régime général de sécurité sociale, avec la suppression des frais de 217 euros qu’ils versaient auparavant. Une ligne directrice est néanmoins avancée : celle de la simplification. « Il existe une multitude d’aides et de guichets, avec parfois un effet d’éviction, des étudiants qui n’ont pas recours à des aides qu’ils pourraient avoir, explique-t-on au ministère de l’enseignement supérieur. Il s’agit de rendre le système plus lisible et d’améliorer l’accès à ces aides. » Pour le reste, « rien n’est tranché », assure-t-on.
Le projet d’une « aide globale d’autonomie » sera examiné dans le cadre de la concertation sur le revenu universel d’activité. Beaucoup de questions restent à trancher.
https://www.lemonde.fr/campus/article/2019/08/31/rentree-universitaire-le-gouvernement-face-au-chantier-des-aides-sociales-aux-etudiants_5504783_4401467.html
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Le bloc-feuillet des TAAF émis lors du Salon philatélique d’automne est mis en page par Aurélie Baras. Petit tirage de 13 500 exemplaires. DR/La Poste « Le service philatélique a un projet « inédit » pour l’inscription des terres et mers australes au patrimoine mondial de l’Unesco », annonce Marc Boukebza, le directeur de la philatélie du territoire des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). Car les vingt et un Etats membres du Comité du patrimoine mondial, réunis à Bakou le 5 juillet, en Azerbaïdjan, ont décidé, à l’unanimité, d’inscrire les terres et mers australes françaises, dans le sud de l’océan Indien, à plus de 2 000 kilomètres de tout continent, au Patrimoine mondial de l’Unesco, au titre du patrimoine naturel. Lire aussi 1,74 million de dollars pour un timbre américain de 1918 Il s’agit d’un carnet de timbres de « prestige », dont la sortie est prévue lors de ParisPhilex 2020, manifestation organisée à Paris en juin prochain. Sa mise en page est signée Aurélie Baras, à partir de photos inédites fournies par la Réserve naturelle des Terres australes. Dans un plus proche avenir, les TAAF participeront au Salon philatélique d’automne, organisé à l’Espace Champerret, à Paris, du 7 au 9 novembre. La poste des TAAF émettra un feuillet souvenir avec deux timbres intitulé « Postes du bout du monde 2 », tiré à 13 500 exemplaires accompagné d’une carte, au prix de 5 euros. Un petit prix pour un petit tirage qui mériteront l’attention des collectionneurs… Les visiteurs auront la possibilité d’envoyer du courrier à destination des bases, courrier qui ensuite pourra leur être retourné avec timbres et oblitérations locales. Bloc-feuillet des TAAF en vente lors de la prochaine exposition Monacophil du 28 au 30 novembre à Monaco, dessiné par Julien Norwood. DR/TAAF Trois semaines plus tard, le territoire diffusera un bloc feuillet sur les manchots royaux à l’occasion de l’exposition Monacophil 2019 organisée à Monaco du 28 au 30 novembre. Ce bloc est l’œuvre de Julien Norwood, illustrateur au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN), qui a proposé plusieurs croquis avant que le territoire n’arrête son choix et procède à quelques essais : « Il manque des éléments, notamment les poissons, qui vont jouer un rôle important dans l’équilibre et le dynamisme de la mise en page », explique Julien Norwood dans ses explications qui accompagnent l’un d’entre eux. Dessin préparatoire signé Julien Norwood du bloc-feuillet émis par les TAAF pour Monacophil. DR/TAAF Au cours d’un échange avec M. Boukebza, l’artiste explique ses choix pour un autre essai : « J’ai écarté les pattes et affiné le manchot vue ventrale au premier plan (…). J’ai entre-ouvert le bec de celui de dessous pour y ajouter un poisson lanterne (…). J’ai placé ici et là quelques bancs de poisson lanterne. Après plusieurs essais, celui-ci me paraît le plus équilibré »… Histoire postale Les bases des TAAF ont été créées en 1949 (à la base de Port-aux-Français), en 1950 (à Martin-de-Viviès), le 1er janvier 1956 (à Dumont d’Urville) et en 1961 (à Alfred Faure). L’ouverture de l’agence postale aux îles Kerguelen remonte au 12 janvier 1950. A Crozet une agence postale fonctionna du 20 décembre 1961 au 4 février 1962, pendant la mission exploratoire, avant que son activité ne s’établisse définitivement. Pour Saint-Paul et Amsterdam, du courrier a été oblitéré dès 1948 à bord du navire de pêche Cancalais et de la frégate Tonkinois. Une agence postale à terre fonctionna à Amsterdam à partir du 10 janvier 1950. Timbre dessiné par Jean-Michel Folon. DR/TAAF Les premiers timbres propres aux Terres australes et antarctiques françaises ont vu le jour le 17 octobre 1955. Depuis, plus de 900 timbres ont été émis par les TAAF, année de leur autonomie administrative. Cette relative rareté explique la fascination des collectionneurs pour des pièces qui privilégient la taille-douce comme mode d’impression, leur conférant un statut d’œuvre d’art. D’autant plus que l’on relève, parmi les créateurs de timbres du territoire les signatures de Trémois, Folon, Bernard Buffet, Georges Mathieu, Raymond Moretti, Jean-Claude Mézières, Garouste, Michel Granger ou encore C215… Timbre des TAAF signé Trémois. Près de 99 % du courrier qui arrive aux TAAF émane de philatélistes, amateurs de ces régions lointaines et qui se jettent sur chaque nouveau timbre. Des timbres qui participent à l’équilibre du budget du territoire des TAAF, puisque la philatélie rapporte au territoire près de un million d’euros par an. Mais en fait, raconte Pierre Couesnon dans une étude publiée dans « Opus 4 », édité en 2004 par l’Académie européenne de philatélie, « les premiers plis connus des îles Kerguelen sont allemands ». Des expéditions scientifiques allemandes qui séjournèrent aux Kerguelen de 1901 à 1903 suscitèrent un rare courrier, affranchi de timbres « Germania », précurseur de toute collection spécialisée consacrée à ces régions. Une carte postale des Kerguelen transportée par le « Gauss » en 1901: 17 000 dollars. DR/Harmers Une carte postale de 1899 revêtue d’un tampon de la Valdivia (« Dampfschiff-Valdivia/Deutsche Tiefsee-Expedition »), estimée à 4 000 francs suisses, fut mise en vente par la maison Feldman, en Suisse, en 1990. Une carte postale oblitérée en 1901 du Gauss a atteint 17 000 dollars chez Harmer (New York) en 2016. Ces pièces constituent le « must » dont rêvent les amateurs de philatélie polaire… Timbre non-émis sur le Concorde, une des pièces les plus coûteuses de la collection des TAAF. DR/TAAF Pour ce qui est des timbres les plus récents, le dossier de « candidature à l’inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco » relève (page 113) que « le timbre Albatros à sourcils noirs de 1968, réalisé en taille-douce (technique de gravure), est le plus recherché par les philatélistes : il est coté à 555 euros »… Pas faux mais le non émis Concorde dont la faciale affiche 87 francs (au lieu de 85 francs, la valeur du timbre finalement paru) vaut dans les 5 000 euros neuf, et 1 500 euros oblitéré…
Petits tirages, artistes de renom, exotisme : la philatélie des Terres australes et antarctiques françaises ne manque pas d’atouts.
https://www.lemonde.fr/argent/article/2019/10/12/timbres-des-terres-australes-et-antarctiques-francaises-du-beau-et-du-cher_6015244_1657007.html
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Le niveau « Route de la mort », référence voilée à un massacre commis par les armées occidentales lors de la guerre en Irak, a suscité la polémique. Capture d'écran « Réécriture de l’histoire », « révisionnisme », « propagande volontaire »… Les critiques pleuvent sur Call of Duty : Modern Warfare, jeu vidéo commercialisé depuis le vendredi 26 octobre. Officiellement, Modern Warfare n’a rien à voir avec la réalité. Deux jours avant sa sortie, ses porte-parole David Hodgson et James Mattone ont même assuré sur le blog de leur éditeur qu’il s’agit d’« une histoire fictive qui ne représente pas des événements du monde réel ». Mais, depuis sa sortie, de nombreux joueurs relèvent que les inspirations sont en réalité omniprésentes, parfois à peine voilées, et, parfois, réécrites de manière à exonérer les Etats-Unis. Inspirations appuyées L’organisation terroriste que l’on combat s’appelle ainsi Al-Qatala. Officiellement, elle est fictive, et présentée comme « sans religiosité ». Mais elle a un drapeau de la même couleur que l’Etat Islamique, n’hésite pas à pratiquer comme ses membres la taqîya (la dissimulation) et l’inghimasi (attaque kamikaze), et ses soldats hurlent parfois « mort aux infidèles ! ». Le drapeau de l’organisation terroriste Al-Qatala dans « Call of Duty : Modern Warfare ». Capture d'écran Plus surprenant, les différents niveaux puisent parfois dans des événements historiques tragiques bien précis, comme l’attaque de l’organisation djihadiste Ansar Al-Charia contre le consulat américain en Libye, en 2012, ou l’attaque au gaz sarin contre la population civile de la Ghouta, en Syrie. Sans jamais citer ces événements de manière explicite. Une question de tact, en partie. « Si j’ai le choix entre utiliser des vrais noms et des vrais lieux et en choisir qui soient fictifs, surtout s’il s’agit d’un moment historique sensible, je conseille d’utiliser des noms fictifs pour offrir la distance que procure l’allégorie », dédouane Kate Edwards, consultante en géopolitique pour l’industrie du jeu vidéo. Une question commerciale, aussi. Des distributeurs américains avaient refusé en 2009 de vendre le jeu Six Days in Fallujah, référence explicite à une bataille de 2004, alors que la guerre d’Irak était encore en cours. « L’autoroute de la mort » Le problème c’est qu’Activision ne s’est pas contenté de choisir des noms imaginaires, il a parfois conservé ceux-ci en réécrivant l’histoire. C’est le cas du niveau du jeu au cœur de la polémique principale ayant entouré la sortie de Modern Warfare. Baptisé « Route de la mort » en français, il s’appelle « Highway of Death » en anglais. Soit le nom donné à l’autoroute entre le Koweit et Bassora bombardée par les Etats-Unis, le Canada, la France et le Royaume-Uni lors de la guerre du Golfe, en février 1991. Et ce alors que les forces irakiennes battaient en retrait, en violation de la convention de Genève. L’autoroute 80, aussi appelée « autoroute de la mort », entre le Koweït et l’Irak. Wikipedia Parfois présentée comme un crime de guerre, l’attaque est attribuée dans Modern Warfare à un tout autre responsable. « Les Russes l’ont bombardée lors de l’invasion, tuant les gens qui s’échappaient », y explique Farah, la meneuse de la résistance. Cette réécriture de l’histoire a rendu furieux les joueurs russes, dont certains ont appelé au boycott du jeu. Zoom sur l’« autoroute de la mort« dans « Modern Warfare », depuis le point de vue d’un sniper. Capture d'écran « Il aurait été mieux que le jeu n’utilise pas l’expression “autoroute de la mort”, mais autre chose, comme “route de la dévastation”, suggère Kate Edwards. Je ne vois pas du révisionnisme ici, mais plutôt une allégorie qui ne va pas jusqu’au bout de sa démarche. » « C’est le retour du soft power américain et de la guerre froide, estime de son côté Olivier Mauco, game designer et enseignant en sciences politiques et jeu vidéo à Sciences Po. Les développeurs rejouent le mythe du grand méchant russe, ils le réinterprètent, et la Syrie [dont semble s’inspirer en grande partie le jeu] est un excellent terrain de jeu narratif pour cela. Elle permet de réintroduire l’opposition entre le bloc de l’Est et le bloc de l’Ouest. » Pour Mehdi Derfoufi, chercheur associé à l’Institut de recherche sur le cinéma et l’audiovisuel à l’université Sorbonne Nouvelle - Paris-III, cela sert notamment à simplifier le récit : « Dans un contexte de prolifération de conflits asymétriques mouvants, complexes et difficiles à saisir, la Russie, c’est facile à identifier, c’est un autre Etat, avec des frontières claires. Et c’est un ennemi perçu comme nous, on peut imaginer les Anglais ou les Allemands : un ennemi héréditaire. » Le studio Infinity Ward prend en effet peu de risques en renouant avec un cliché narratif vieux comme la guerre froide. « La pertinence de cette représentation peut être débattue, mais les créateurs américains ne sont pas les seuls dans ce cas, explique par ailleurs Kate Edwards. Il y a eu plein de jeux, films, séries TV faits en Chine, Russie, etc., montrant les Américains et ses alliés comme des antagonistes, pour satisfaire les inclinations politiques de la majorité de leurs consommateurs. » L’Urzikistan, retour à l’orientalisme Ironiquement, si Modern Warfare n’hésite pas à nommer la Russie, il esquive les références explicites au monde arabe et au Moyen-Orient dont, à l’évidence, il s’inspire pour son pays imaginaire, l’Urzikistan. Il mélange des éléments empruntés à la Syrie, la Libye, l’Irak ou encore l’Afghanistan. « On reconstruit un Orient fantasmé, un peu comme Les Mille et une nuits, ce mélange de traits arabes, perses et musulmans dans une imbrication fantasmatique, analyse Mehdi Derfoufi. C’est un Orient reconfigurable à l’envie, sans avoir à trop se préoccuper de l’authenticité de ce qu’on montre, tout en nourrissant l’efficacité de l’immersion et de la fiction. Le territoire n’a même pas besoin d’être cohérent. » Dans le jeu, l’Urzikistan est ainsi située en pleine mer Noire, au large de la Géorgie, où le climat n’a rien de sec et de désertique : Première apparition du pays, l’Urzikistan, dans le jeu. Capture d'écran Si les coordonnées de l’Urzikistan présentées dans le jeu étaient pointées sur une carte réelle, il serait situé dans la mer Noire, au large des côtes verdoyantes de la Géorgie. Google Maps D’un point de vue linguistique, Modern Warfare navigue aussi dans le flou. D’un niveau à l’autre, les panneaux de signalisation et les drapeaux en Urzikistan sont écrits en russe, quand il s’agit de dénoncer la propagande étatique, en anglais, quand le joueur doit pouvoir se repérer, et en arabe, dans les niveaux centrés sur la menace terroriste. Fausses citations et citations erronées Peu soucieux de rigueur, Modern Warfare mêle même parfois à mauvais escient réel et fictif. Par exemple, à chaque mort du joueur, une citation d’une personnalité historique s’affiche : on y trouve Winston Churchill, Musashi Miyamoto, Anne Frank, Bob Marley (!), Khalil Gibran, mais aussi Hadir Karim et Omar Salaman, deux personnages imaginaires du jeu. Pour ne rien arranger, même les citations « historiques » sont souvent sorties de leur contexte, déformées, voire inventées, à l’image du très va-t-en-guerre « la victoire est réservée à ceux prêts à en payer le prix », attribuée à Sun Tzu…, qui n’est pas dans son œuvre phare, L’Art de la guerre. Il y a au moins une réalité historique sur laquelle Activision s’appuie explicitement : Farah, leadeuse d’une milice armée féminine résistante, une première dans la série, s’inspire des YPJ, les combattantes kurdes, avait expliqué un développeur au Washington Post, en mai. Une combattante kurde de l’YPG, l’Unité de défense du peuple. DELIL SOULEIMAN/AFP Farah, femme combattante, s’inspire des YPG. Capture d'écran « D’un point de vue narratif, les Kurdes, minorité féminine oppressée, résistante, c’est une jolie histoire, a fortiori dans un contexte post-GamerGate », un mouvement néoconservateur s’opposant à l’introduction d’héroïnes féministes dans les jeux vidéo, explique Olivier Mauco. « La référence permet par ailleurs de coller à l’actualité. Cela permet de rentrer dans l’imaginaire global. Les news créent une communauté autour de l’actualité. Or les Call of Duty, leur référentiel, c’est la télévision. »
Le jeu vidéo d’Activision fait l’objet de vives critiques : sous couvert de fiction, il s’inspire de crimes de guerre existants, parfois en réécrivant l’histoire.
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2019/10/30/call-of-duty-modern-warfare-une-reecriture-suspecte-des-conflits-au-moyen-orient_6017482_4408996.html
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« Boléro », de Mats Ek à l’Opéra Garnier, le 20 juin. ANN RAY Un livre s’ouvre et se referme. Le programme Mats Ek, électrisant, à l’affiche jusqu’au 14 juillet, au Palais Garnier, à Paris, met en miroir deux œuvres mythiques et consistantes. Carmen (1992), et Boléro, une création. Narration d’un côté, abstraction de l’autre. Au milieu, une reliure fragile, précieuse, un trait d’union emblématique : un pas de deux intitulé Another Place, dialogue de couple comme sait les camper impeccablement, entre la chambre et la cuisine, sexe et sentiment, le chorégraphe suédois. Mats Ek, le retour ! En 2016, l’un des maîtres incontesté de la danse aujourd’hui avait dressé un programme d’adieu intitulé From Black to Blue, présenté dans le cadre du festival Transcendanses, au Théâtre des Champs-Elysées. Il y soldait le compte de cinquante ans de chorégraphies majeures avec, entre autres, Yxa, un duo entre lui, saisi la hache à la main en train de jouer les bûcherons, et sa femme, Ana Laguna. Et le revoilà, fonceur, brillant, regardant dans le rétro sa Carmen à succès tout en se payant à 74 ans cet énorme morceau qu’est Boléro ! Et la soirée, acclamée par le public samedi 22 juin, a la saveur profonde d’une somme artistique, épatante, solide, réservant encore et toujours sa dose de mystère et de surprise, qui dit mieux ! Pour chorégraphier l’attirance sexuelle, les trajets du désir, Mats Ek est expert Carmen, d’abord ! Vieillie ? Datée ? Périmée ? En pleine forme ! Le décor d’éventail à gros pois blancs sur fond noir, le gros ballon sur lequel on s’arc-boute ou reste prostré en attendant la mort, les robes bonbons à volants, le foulard rouge que Carmen extirpe de la veste de don José en lui volant son cœur, tous les repères restent imparables. Sur la musique de Georges Bizet et de Rodion Chtchedrine, la chorégraphie en rafales scande la montée tragique comme on cavale pour échapper au drame. Mais aussi solide soit l’armature de ce ballet que nombre d’interprètes ont testé dont Sylvie Guillem, encore faut-il que les interprètes soient raccord avec la méchante fièvre de cet amour à mort. La danseuse étoile Amandine Albisson mord à fond dans le cigare ; le premier danseur Florian Magnenet tient la corde de son don José trahi par son désir. La première danseuse Muriel Zusperreguy, boule de douleur, affirme sa puissance de jeu dramatique dans le rôle de M, la femme trompée, et l’étoile Hugo Marchand fouette la silhouette cambrée de son Escamillo. Incarnation explicite et stylée
Avec « Carmen », « Boléro » et « Another Place », le chorégraphe suédois offre une nouvelle leçon d’écriture.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/07/01/danse-mats-ek-trois-pieces-pour-une-meme-enigme_5483659_3246.html
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François de Rugy, ministre de la transition écologique, pendant le défilé militaire à l’occasion du 14 juillet 2019. JEAN-CLAUDE COUTAUSSE POUR « LE MONDE » Au centre d’une polémique sur des dépenses excessives et la location d’un appartement à vocation sociale, François de Rugy a annoncé avoir présenté sa démission mardi 16 juillet de son poste de ministre de la transition écologique. Une « décision personnelle » que le président Emmanuel Macron « respecte, pour qu’il puisse se défendre pleinement et librement », a indiqué l’Elysée à l’Agence France-Presse (AFP). S’estimant victime d’un « lynchage médiatique », le ministre a également déclaré avoir déposé une plainte en diffamation contre le site d’informations Mediapart. Dans un communiqué, il explique les raisons qui le conduisent à démissionner : « Les attaques et le lynchage médiatique dont ma famille fait l’objet me conduisent aujourd’hui à prendre le recul nécessaire – ce que chacun comprendra. La mobilisation nécessaire pour me défendre fait que je ne suis pas en mesure d’assumer sereinement et efficacement la mission que m’ont confiée le président de la République et le premier ministre. » Le numéro deux du gouvernement, qui devait présenter mardi au Sénat le projet de loi énergie et climat, s’est entretenu dans la matinée avec Edouard Philippe. Son passage devant les députés lors des questions au gouvernement à 15 heures s’annonçait difficile. Lire aussi Démission de François de Rugy : suivez en direct les réactions politiques Cette démission intervient alors que Mediapart s’apprêtait à publier une nouvelle enquête sur l’utilisation, par François de Rugy, de ses frais professionnels en tant que député. Selon le site d’information, l’ex-numéro 2 du gouvernement a utilisé son indemnité représentative de frais de mandat (IRFM) pour payer une partie de ses cotisations à Europe Ecologie-Les Verts (EELV) en 2013 et 2014. Or l’IRFM n’a pas vocation à être utilisée pour financer un parti politique. De plus, « cette indemnité étant défiscalisée, François de Rugy a déduit ces versements du calcul de son impôt sur le revenu 2015, ce qui interroge sur le plan fiscal, l’IRFM étant défiscalisée », souligne Mediapart. Les révélations par le journal en ligne de dîners fastueux organisés quand il présidait l’Assemblée nationale, de travaux dans son logement de fonction au ministère ou de son appartement près de Nantes avaient sérieusement fragilisé le ministre, qui s’était défendu tout le week-end sur ces informations en cascade. M. de Rugy estime que « depuis le début de la semaine dernière, Mediapart (l’)attaque sur la base de photos volées, de ragots, d’approximations, d’éléments extérieurs à ma fonction ». « La volonté de nuire, de salir, de démolir, ne fait pas de doute. Je suis soumis à un feu roulant de questions nouvelles et contraint de parer sans cesse à de nouvelles attaques. » Homards et grands crus Mercredi 10 juillet, Mediapart avait recensé une dizaine de repas, avec homards et grands crus, qui ont eu lieu entre octobre 2017 et juin 2018 et où étaient reçus à chaque fois entre dix et trente invités appartenant au cercle amical et relationnel de Séverine de Rugy, l’épouse de l’ex-écologiste. Parmi les convives identifiés par le site figuraient aussi des membres de la famille de l’ancien président de l’Assemblée et des amis de son épouse. Les photos montrant Mme de Rugy poser devant une bouteille de Mouton Rothschild 2004 ou M. de Rugy devant une table de Saint-Valentin ornée de pétales de rose ont été abondamment relayées sur les réseaux sociaux et ont fait aussitôt scandale. Le ministre de la transition écologique avait d’abord dénoncé « des propos mensongers » et un « parti pris militant qui est l’habitude de ce site Internet ». S’il avait dit « comprendre » que de telles révélations « suscitent des réactions, et même des incompréhensions, des interrogations » chez les Français, il avait assuré qu’il « n’y a pas eu de dîners entre amis (…) qui auraient été financés par l’Assemblée nationale », préférant parler de « dîners de travail informels » avec « un paléontologue », « un directeur d’études à Sciences Po » ou encore « des chefs d’entreprise ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le gouvernement embarrassé par les dîners fastueux de François de Rugy à l’Assemblée nationale Ces révélations sont mal passées, neuf mois après le début du mouvement des « gilets jaunes », et alors que le gouvernement veut resserrer le budget. La polémique a fait des vagues au sein même du parti présidentiel. Sous couvert d’anonymat, un cadre de La République en marche (LRM) déplorait « l’effet dévastateur » dans l’opinion publique. « C’est scandaleux, cette histoire. C’est précisément ce que nous ont reproché les “gilets jaunes” ! Cela risque d’accréditer l’idée que les ministres sont pleins aux as et se gavent en profitant de l’argent public. Symboliquement, c’est très lourd », jugeait ce responsable national de la formation macroniste, en ne cachant pas sa colère contre « une vraie connerie ». De son côté, la députée et ancienne ministre de l’écologie Delphine Batho estimait que « sa démission s’impose ». Logement social La polémique a enflé encore davantage le lendemain après de nouvelles révélations. Selon Mediapart jeudi 11 juillet, le ministre a fait réaliser plus de 63 000 euros de travaux, payés par le contribuable, dans les appartements privés du ministère de l’écologie. Parmi ces travaux figurait l’installation d’un dressing à près de 17 000 euros. Le ministre s’était défendu sur Facebook : « Les services en charge de la gestion des bâtiments du ministère ont fait le constat partagé de la nécessité d’effectuer des travaux de rénovation dans l’appartement de fonction du ministère, qualifié, je cite, de “vétuste” ». Le montant des travaux serait lié selon lui « au caractère très particulier des lieux », puisque « l’hôtel de Roquelaure, comme d’autres ministères, est un élément du patrimoine français, construit au début du XVIIIe siècle ». Ce même 11 juillet, Mediapart poursuivait ses révélations en accusant François de Rugy de bénéficier lui-même un logement social, tout comme sa directrice de cabinet (limogée le 10 juillet). Selon le journal en ligne, le ministre d’Etat loue depuis juillet 2016 un appartement dans la commune d’Orvault, en Loire-Atlantique, pour 531 euros par mois, alors que ses revenus seraient bien au-dessus du plafond défini pour ce type de logement. De plus, il ne s’agit pas de sa résidence principale ce qui contrevient aux règles des logements à vocation sociale. Depuis ces révélations, le ministre avait assuré ne pas vouloir démissionner tout en s’engageant à soumettre ses frais de réception aux autorités de contrôle de l’Assemblée nationale et à rembourser si nécessaire « chaque euro contesté ». Concernant les travaux au ministère, le premier ministre avait demandé au secrétariat général du gouvernement de diligenter « une inspection » afin de vérifier que les travaux entrepris se conformaient au « respect des règles » et « au principe d’exemplarité » voulu par le gouvernement. Lundi, M. de Rugy avait nommé son nouveau directeur de cabinet, Jack Azoulay, malgré la polémique. François de Rugy avait été nommé en septembre au gouvernement après la démission surprise de Nicolas Hulot, imposant un style autrement plus politique, pragmatique et policé, avec l’ambition de durer au « ministère de l’impossible ». « Je suis ici pour agir pour l’écologie avec méthode, détermination et persévérance dans le temps », avait-il lancé lors de sa prise de fonction au ministère.
Fragilisé par des révélations de « Mediapart » sur des dépenses au ministère de la transition écologique et à la présidence de l’Assemblée nationale, M. de Rugy annonce avoir déposé une plainte pour diffamation.
https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/07/16/le-ministre-de-la-transition-ecologique-francois-de-rugy-a-presente-sa-demission_5490012_823448.html
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Jaroslaw Kaczynski, le chef de fil du Parti droit et justice (PiS) en campagne à Stalowa Wola, en Pologne, le 18 août. KACPER PEMPEL / REUTERS Les Polonais ont une expression pour désigner les généreux transferts sociaux promis par le gouvernement ultraconservateur en pole position pour remporter les élections législatives dimanche 13 octobre : « Kielbasa wyborcza », le « saucisson électoral ». Semaine après semaine, Jaroslaw Kaczynski, le président du parti au pouvoir Droit et Justice (PiS), en débite plusieurs tranches. Dernières en date : le relèvement du salaire brut minimum de 2 250 zlotys à 3 000 (518 à 690 euros) d’ici à 2020, et jusqu’à 4 000 zlotys (912 euros) en 2023, l’instauration d’un 13e et d’un 14e mois pour les retraités, ou bien encore une aide accrue aux agriculteurs. Cette stratégie, couronnée par l’annonce d’un « Etat-providence à la polonaise » formulée par M. Kaczynski le 7 septembre à Lublin, en Pologne orientale, a déjà été éprouvée. Installé au pouvoir depuis 2015, le PiS a mis en œuvre, deux ans plus tard, le programme 500 +, une allocation de 125 euros pour tous, sans condition de ressource, dès le 2e enfant. Fort du succès de cette mesure-phare – qui a permis de réduire le niveau de pauvreté – le PiS a déjà promis de l’étendre dès le premier enfant pendant la campagne des élections européennes de mai. Tout comme il a annoncé l’exonération d’impôts pour les moins de 26 ans au travail. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Pologne, l’opposition libérale démunie face au PiS La conjoncture s’y prête. La Pologne, 7e économie de l’Union européenne – mais qui ne fait pas partie de la zone euro – connaît une croissance ininterrompue depuis 1992. Le taux de chômage, 5,1 % de la population active en septembre, est tombé au plus bas depuis trente ans. L’inflation, quoique repartie à la hausse, reste pour le moment contenue. « Le PiS a choisi la voie populiste et ça marche », constate l’économiste Witold Orlowski, professeur à l’University ofTechnology Business School de Varsovie. En privilégiant la « Pologne B », version locale de la « France d’en-bas », explique-t-il en substance, les ultraconservateurs sont parvenus à s’inféoder des pans entiers de la population. Le risque : « un ralentissement de la croissance » Ce programme ciblé, toujours accompagné d’un calendrier, a littéralement laissé sur le carreau l’opposition démocrate-libérale réduite à proclamer qu’elle ne remettra pas en cause ce qui a été ainsi donné. Les critiques des experts ne sont guère plus audibles. « Le risque de cette politique c’est un ralentissement de la croissance, une augmentation de l’inflation et des déficits publics, relève Witold Orlowski. Nous voyons déjà, en dépit d’un contexte général plutôt bon une baisse des investissements qui a atteint son plus bas niveau depuis des années. » « Mais, concède-t-il, nous ne sommes pas la Grèce et nous ne risquons pas la banqueroute. »
Favori des élections législatives, dimanche, le PiS multiplie les promesses sociales pour écraser ses concurrents libéraux-démocrates, et s’inféoder des pans entiers de la population.
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/10/12/la-strategie-payante-du-saucisson-electoral-des-ultraconservateurs-polonais_6015290_3210.html
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Une vue de Bonifacio, dans le sud de la Corse, la région la plus chère pour louer un logement l’été. Hans Mitterer/Westend61 / Photononstop En période estivale, les tarifs d’une location saisonnière varient du simple au quadruple selon la destination, le mois et le type de logement, révèle une étude réalisée par SeLoger à partir des données compilées par les sites SeLoger Vacances et Amivac. Selon un sondage réalisé par Ipsos pour Europe Assistance, 44 % des Français auraient l’intention de louer un logement pour leurs vacances. Sans surprise, c’est en Corse qu’il coûte le plus cher de louer une maison en été. Louer une maison sur l’Île de Beauté revient, en moyenne, à 1 630 euros par semaine en « haute saison » (à la mi-juillet). Et si vous optez pour la « très haute saison », c’est-à-dire pour la deuxième semaine du mois d’août, la facture passe à 1 835 euros. Article réservé à nos abonnés Lire aussi A Bordeaux, le quartier Saint-Michel promet des rendements élevés A titre de comparaison, le tarif hebdomadaire moyen pour une maison de vacances en France à la mi-août se monte à 1 133 euros en très haute saison. Il ressort à 696 euros pour un appartement. Pour faire des économies, optez plutôt pour la Bretagne, qui reste l’une des régions les moins chères, surtout les Côtes-d’Armor et le Finistère. Par exemple, louer un appartement la deuxième semaine d’août ne coûte que 688 euros, un tarif qui grimpe à 738 euros sur la Côte d’Azur. De façon générale, les tarifs pratiqués sur la côte atlantique sont systématiquement inférieurs à ceux de la côte méditerranéenne. Lire aussi Airbnb dans le collimateur des municipalités Autre option, privilégier la montagne, nettement plus abordable que le littoral. En moyenne, louer un appartement dans les Alpes revient environ à 600 euros par semaine et un peu moins de 1 000 euros pour une maison. Et les Pyrénées coûtent beaucoup moins cher : jusqu’à 469 euros pour un appartement et 644 euros pour une maison. Mais la montagne peut aussi être une destination de luxe : la location d’un chalet revient en moyenne à 1 267 euros par semaine en très haute saison, avec un record de 1 931 euros dans les Alpes ! Pour un mobil-home, les données auxquelles SeLoger a accès font état d’un tarif hebdomadaire moyen avoisinant 726 euros par semaine en très haute saison. Sur la même période, les prix atteignent 857 euros par semaine en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, 787 euros en Corse et 748 euros sur la côte atlantique.
La Corse est, de loin, la région la plus coûteuse pour louer un logement pendant les vacances d’été. En montagne, les Alpes sont beaucoup plus chères que les Pyrénées.
https://www.lemonde.fr/argent/article/2019/06/18/locations-d-ete-quelle-region-choisir-pour-ne-pas-se-ruiner_5478055_1657007.html
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La police scientifique à Sartene, en Corse le 15 juin 2019, après le meutre d’un homme en lien avec la mafia corse. PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP Entretien Jean-Toussaint Plasenzotti, enseignant de langue corse, est à l’origine de la création, début octobre, du collectif antimafia Massimu Susini, du nom de son neveu, un nationaliste assassiné le 12 septembre à Cargèse. Il expose, au Monde, la gravité de l’emprise mafieuse sur la société corse. Les membres de ce collectif devaient se réunir, samedi 26 octobre, pour interpeller l’Etat et les élus de l’île sur leur inaction face à ce fléau. Dans la nuit du dimanche 20 octobre, des graffitis associant le nom de votre famille aux « indicateurs de police » sont apparus à Ajaccio. Cela a une signification particulière ? En Corse, quand on vous désigne comme une « balance », cela équivaut à un arrêt de mort. C’est la pire des insultes et elle sert à justifier, à l’avance, de funestes projets en laissant croire que vous méritez ce qui peut vous arriver. Ces menaces de mort existaient avant l’apparition de ces graffitis. On sait qu’il y a une liste de personnes à tuer. Le premier était mon neveu, Maxime Susini, mon fils est le second. Il a, depuis la mort de son cousin, dû abandonner son travail pour échapper aux tueurs. Tout cela parce qu’ils ont ouvertement refusé l’emprise mafieuse sur notre microrégion de Cargèse-Sagone. Ces tags révèlent aussi l’impatience des mafieux. Ils ne pensaient pas que la mort de Maxime susciterait une telle émotion dans la société corse. Ils n’imaginaient pas que nous créerions ce collectif. Et ils ne supportent sans doute pas l’idée que l’on soit présent dans le débat public pour dénoncer leur emprise. Ce pouvoir occulte agit dans l’ombre et il peut tuer alors que nous agissons au grand jour sans arme. Cette parole publique anti­mafia, qui apparaît pour la première fois en Corse, vous met en danger. Avez-vous reçu un soutien ou une protection de la part des autorités ? Non, nous sommes confrontés au silence de l’Etat et de la préfète de la région corse, Josiane Chevalier. On m’a dit que la situation en Corse n’avait rien à voir avec l’Italie. C’est une erreur, liée à de l’indifférence ou de l’ignorance. Car, demain, si je suis tué, ici, personne ne sera surpris. Depuis notre prise de parole, de nombreuses personnes me conseillent de faire attention. En portant cette résistance, je dérange aussi bien les assassins que les services de l’Etat qui laissent faire. On assiste, depuis quatre ans, au renforcement de l’emprise mafieuse sur notre île par le rapprochement de plusieurs bandes dont l’influence pèse sur la vie économique et politique de la Corse au point de devenir un contre-pouvoir défiant celui de l’Etat et celui des élus.
Jean-Toussaint Plasenzotti a créé un collectif antimafia, après l’assassinat de son neveu, Maxime Susini, en septembre. Il dénonce le silence de l’Etat et de la préfète de la région, Josiane Chevalier, sur la montée en puissance des activités mafieuses sur l’île.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/10/27/jean-toussaint-plasenzotti-la-mafia-corse-c-est-la-violence-mais-aussi-la-porosite-et-la-corruption_6017111_3224.html
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Matteo Salvini prend un bain de foule lors d’un rassemblement de l’opposition de droite, à Rome, le 19 octobre. REMO CASILLI / REUTERS La clameur a résonné sur la façade en marbre de Saint-Jean-de-Latran quand il est monté sur la scène, devant une marée de drapeaux et d’écrans géants. Devant l’imposante basilique du cœur de Rome, le dirigeant de la Ligue (extrême droite) Matteo Salvini a rassemblé ses troupes, samedi 19 octobre dans l’après-midi, et plus largement l’opposition de droite au gouvernement de Giuseppe Conte. Un mois et demi après la formation de l’alliance entre le Parti démocrate (PD, centre gauche) et le Mouvement 5 étoiles (M5S, populiste, antisystème), celui qui est devenu le chef de l’opposition après la crise politique estivale avait fait de ce grand rendez-vous la première manifestation nationale pour promettre de « renvoyer à la maison » ses anciens alliés au pouvoir tout comme la gauche. Avec plusieurs dizaines de milliers d’Italiens qui ont convergé de toutes les régions de la péninsule – les organisateurs ont annoncé 200 000 personnes –, le pari est réussi pour M. Salvini. Ce meeting organisé sous un beau soleil d’octobre est d’abord le résultat de la puissance d’organisation de la Ligue, qui avait mobilisé plus de 400 cars et une dizaine de trains vers la capitale. Dans la foule, plusieurs générations mêlant les nostalgiques du berlusconisme aux jeunes loups de la Ligue, casquette du « capitaine » (le surnom de Matteo Salvini) vissée sur la tête, jusqu’aux militants de l’ultradroite radicale de CasaPound. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Italie, Matteo Salvini tente le retour aux sources pour rassurer sa base et soigner ses blessures Silvio Berlusconi présent Convoquée autour du slogan « La fierté italienne », cette manifestation populaire avait pour ambition de reformer la coalition de droite rassemblant la Ligue, le parti Forza Italia de Silvio Berlusconi et Fratelli d’Italia, la formation postfasciste de Giorgia Meloni. Avec 37 % des voix, elle avait triomphé aux élections législatives de mars 2018, devant le M5S. « Aujourd’hui c’est la droite qui est plus forte dans ce pays et ce n’est pas elle qui est aux manettes, cherchez l’erreur », souffle Enrico, un ingénieur informaticien. Agitant un drapeau tricolore marqué du logo de Fratelli d’Italia, il a fait le voyage depuis la Calabre avec sa fiancée. Avant de monter sur scène, Matteo Salvini a envoyé ses lieutenants répéter les rengaines du parti d’extrême droite. « Le Parlement ne représente plus le peuple ! », a lancé le sénateur léguiste Alberto Bagnai, déclenchant des appels aux élections dans la foule. Elus locaux, maires et gouverneurs de la Ligue ou de Forza Italia se sont succédé avant que les chefs politiques ne passent derrière le micro.
« Nous reviendrons bientôt au gouvernement, et nous rentrerons par la grande porte », a assuré le chef de file de l’extrême droite devant plusieurs dizaines de milliers de personnes.
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/10/20/a-rome-matteo-salvini-reussit-a-rassembler-toutes-les-droites-derriere-sa-banniere_6016209_3210.html
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A New Delhi, lors du « Friday for future », mobilisation mondiale contre le réchauffement climatique, le 20 septembre 2019. Manish Swaruo / AP Dans un contexte d’augmentation des investissements en énergies fossiles et de rejet de l’accord de Paris par les Etats-Unis, l’Australie et le Brésil, le sommet Action climat, qui se tient aux Nations unies (ONU) lundi 23 septembre, risque d’être décevant et de renforcer le camp des sceptiques. Ce risque résulte du fait que le « temps de cerveau disponible » des responsables politiques est occupé non par le climat, mais par la peur de la récession. On ne peut le conjurer qu’en faisant des politiques climatiques une alternative crédible à la tentation de relancer les économies par une création monétaire généreuse, par des baisses d’impôt sur les profits des entreprises et par diverses formes de protectionnisme. Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’ONU au chevet de la planète lors d’un sommet exceptionnel sur le climat Succomber à cette tentation ne ferait que renforcer la combinaison délétère entre une épargne surabondante et un manque d’investissement productif. Elle est l’effet d’un impératif exportateur qui a fini par déprimer la demande finale par le biais de la pression sur les salaires, d’un sous-investissement en infrastructures, de la frilosité d’entreprises soumises à la « dictature » de la valeur de l’action, et d’un affaiblissement de la protection sociale qui pousse à épargner. Réduire les risques Injecter des liquidités et baisser la fiscalité sur les profits sans corriger ces trois paramètres revient à faciliter le repli des épargnants vers l’immobilier et les produits spéculatifs et à encourager les stratégies de rachat de leurs actions par les entreprises, surtout en cas de turbulences créées par des jeux de mesures et contre-mesures protectionnistes. Cela revient à attendre la prochaine explosion des bulles spéculatives, qui retombera en définitive sur les comptes publics. Or, les politiques climatiques ont tous les atouts pour éviter cette impasse : elles indiquent aux acteurs financiers où investir ; elles réaniment les marchés intérieurs dans des secteurs (énergie, transports, habitat) à grand pouvoir d’entraînement ; elles réduisent les fractures sociales ; elles amorcent des stratégies de développement endogènes et évitent ainsi les dangers de surenchères protectionnistes. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « La politique fiscale sur l’énergie ne joue en rien le rôle d’incitation à la transition qu’elle pourrait avoir » La clé est de réduire le risque des investissements bas carbone à travers des garanties d’Etat qui ne retombent sur le contribuable qu’en cas d’échec des projets et aggravent bien moins les déficits publics qu’une subvention. Cette clé peut libérer l’épargne des pays riches à démographie déclinante, alors que deux tiers des investissements doivent se faire dans des pays où l’épargne est soit insuffisante, soit placée en partie dans les pays riches pour des raisons de sécurité.
Les économistes du climat Dipak Dasgupta et Jean-Charles Hourcade plaident, dans une tribune au « Monde », pour la création d’un fonds mondial de garantie publique des investissements dans les projets bas carbone, afin de débloquer l’épargne en faveur de la transition énergétique
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/09/23/le-temps-de-cerveau-disponible-des-responsables-politiques-est-occupe-non-par-le-climat-mais-par-la-peur-de-la-recession_6012626_3232.html
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AGATHE DAHYOT Huit petites blouses alignées sur des cintres. Des chaises, des tables, des pots à stylos… Vingt-huit ans que La Bussière (Vienne) n’avait pas vu ça. Ce petit village de 320 habitants a vu son école fermer en 1991. Depuis, ses enfants faisaient chaque jour des dizaines de kilomètres pour aller en classe dans ce que l’éducation nationale appelle dans son jargon le regroupement pédagogique intercommunal (RPI). Lundi 2 septembre, la rentrée scolaire a eu lieu, à nouveau, dans ce village qu’Eric Viaud, son maire (sans étiquette), a vu mourir petit à petit. L’école, la boulangerie, l’épicerie… Heureusement, il y a encore le café-restaurant – propriété de la mairie –, quelques artisans, un agriculteur, un électricien et la Sodifrex, une entreprise de mobilier urbain. Chaque année, grâce au tourisme, La Bussière revit aux beaux jours, mais remeurt à l’automne. Alors, vendredi 30 août, cet enfant du village n’était pas peu fier d’inaugurer l’école privée Gilbert-Bécaud (le chanteur avait élu domicile dans la commune). Habitants, voisins des alentours, anciens élèves : ils étaient une centaine et pour rien au monde, ils n’auraient manqué ça. Deux jours plus tard, huit écoliers de 3 à 11 ans passaient le seuil de la classe unique avec Chloé Chevalier. Après trois ans dans le privé, où elle était suppléante, la jeune femme de 25 ans a déjà assuré tous les niveaux, mais jamais en même temps. Un beau « challenge », reconnaît celle que les enfants, qui se sont emparés des gros jeux en bois de kermesse, appellent déjà « maîtresse ». Une « autre » école pour ses enfants A l’heure où les fermetures de classes rythment la vie des campagnes, comment a-t-on réussi à ouvrir une école ? On pourrait résumer ce tour de force à une rencontre. Celle d’Eric Viaud, qui, à peine élu en 2014, avait ce projet en tête, et de Pélagie Boufrioua, néorurale installée à La Bussière en 2016. « Nos amis trouvaient que c’était génial chez nous, mais ils nous disaient : “Mais y a rien ! On viendra pas” », se souvient celle qui habitait il y a encore quelques années à Fontainebleau (Seine-et-Marne). Cette maman de trois enfants souhaitait une « autre » école pour eux et avait opté pour l’enseignement à la maison, quand d’autres scolarisaient les leurs dans les établissements alentour, à Nalliers, Saint-Savin, Chauvigny. En octobre 2018, l’association Villa Scholae – « l’école au cœur du village » en latin – est créée. Pas une association de parents, souligne la trentenaire. Mais une association de gestion professionnelle, qui réunit les compétences d’une dizaine de volontaires du village et des environs, bénévoles – compétences juridiques, commerciales, en gestion, en RH et en communication. Et les réseaux des uns et des autres.
Les défis de l’école 4/5. Une poignée d’habitants de cette petite commune de la Vienne s’est mobilisée pour ouvrir l’établissement. Lundi, huit élèves de 3 à 11 ans ont fait leur rentrée dans la classe unique.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/09/05/a-la-bussiere-un-village-derriere-sa-nouvelle-ecole-privee-hors-contrat_5506557_3224.html
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L’application de Facebook sur un smartphone. Jenny Kane / AP « Portabilité des données ». Cette expression technique prend de plus en plus d’importance dans le domaine numérique : elle symbolise la possibilité pour un utilisateur d’un réseau social de récupérer ses contacts ou ses contenus pour les emmener vers un service concurrent. De plus en plus de pouvoirs publics ou d’associations y voient un moyen de limiter le pouvoir de plates-formes dominantes comme Facebook ou YouTube. Conscient de cette pression, le réseau social de Mark Zuckerberg publie ce mercredi 4 septembre un Livre blanc sur la question. Son but : montrer que la mise en œuvre de cette portabilité soulève des questions juridiques et techniques. « La portabilibité des données est un des domaines qui est mûr pour qu’émergent de nouvelles règles », explique Erin Egan, vice-présidente responsable de la protection de la vie privée chez Facebook. Celle-ci rappelle que le fondateur Mark Zuckerberg avait cité ce thème dans sa tribune de mars, appelant à davantage de « régulation » du numérique. Un moyen d’assurer la concurrence Facebook cherche à faire entendre sa voix alors que la pression monte : le règlement européen de protection des données (RGPD) et la récente loi de protection des consommateurs de l’Etat de Californie, aux Etats-Unis, imposent déjà qu’un utilisateur puisse récupérer les données qu’il a soumises à un réseau social. Avec sa mise à jour de la fonction « téléchargez vos informations », Facebook estime être en conformité avec ces textes. Mais ce processus n’est « pas très pratique et certains voudraient un transfert direct vers d’autres services », reconnaît Mme Egan. En effet, télécharger un gros fichier avec les contenus de ses billets Facebook ne permet pas de quitter sereinement le réseau social pour un autre. Certains veulent instaurer une portabilité plus forte et même une « interopérabilité » qui permettrait de communiquer avec ses contacts sur d’autres réseaux. « Des régimes plus stricts, incluant l’interopérabilité des données, peuvent être imposés par le biais de régulations de secteurs », préconise ainsi un rapport sur « La politique de la concurrence à l’ère numérique » rédigé en mars par des experts de la Commission européenne. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Facebook a induit la Commission européenne en erreur lors du rachat de WhatsApp » En France, La Quadrature du Net, dans une lettre ouverte publiée fin mai avec 74 autres organisations de défense des libertés sur le Web, a demandé au gouvernement de forcer les grands réseaux à être « interopérables » et à permettre la portabilité des données. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Il ne faut pas réguler Facebook ou Google mais s’en libérer » Liste « d’amis » et vie privée « Nous sommes favorables à offrir de meilleurs outils de portabilité. Et beaucoup de voix le réclament. Mais il y a peu de lignes directrices sur la façon de le faire », argumente Mme Egan. Dans son Livre blanc, Facebook estime ainsi qu’exporter la liste de ses « amis » vers un autre service peut poser un problème de respect de la vie privée : « Que se passe-t-il si les personnes concernées ne sont pas d’accord ? » demande Mme Egan. Le texte s’interroge sur la nécessité de demander une forme de « permission » aux contacts concernés. « Et si vous transférez des photos dans lesquels certains de vos amis apparaissent et sont taggés, donc identifiables ? » s’interroge également Mme Egan. Facebook prépare d’ailleurs pour octobre un prototype d’outil de portabilité des photos dans le cadre du Data Transfer Project, un groupe réunissant Google, Apple et d’autres plates-formes. La responsable soulève aussi un autre point : « Qui est responsable en cas d’usage problématique, par un service concurrent, des données transférées ? » Facebook s’appuie ici sur la polémique Cambridge Analytica, au cours de laquelle on lui a reproché d’avoir laissé des données personnelles partir vers des tiers, sans contrôle. L’exemple des télécoms ou des logiciels d’e-mails Ce Livre blanc n’est-il pas un moyen pour Facebook de retarder l’avancée de la portabilité ? « Nous ne ralentissons pas les choses, nous avançons », répond Mme Egan, alors que Facebook va organiser des « ateliers » sur le sujet, avec des experts, à Berlin, Washington ou Singapour, dans les semaines à venir. La Quadrature du Net n’est toutefois pas convaincue : « Voir Facebook donner des leçons sur la vie privée, c’est ironique… L’interopérabilité, c’est justement l’idée que les gens puissent contrôler quelles données ils mettent sur quel réseau social, explique Martin Drago, juriste de l’association. Et l’interopérabilité entre Orange et SFR, pour le téléphone, ou entre Gmail et La Poste, pour les e-mails, cela n’a pas vraiment posé de question de vie privée… » Le volontarisme de Facebook sur la portabilité des données est en tout cas un signe que les débats sur ce thème vont s’animer.
Sommée de rendre possible de quitter le réseau social en emmenant ses contacts et ses contenus, l’entreprise publie un Livre blanc qui soulève des objections.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/09/04/portabilite-des-donnees-sous-pression-facebook-riposte_5506480_3234.html
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« Dix mille pas et plus ». On ne le dira jamais assez, l’activité physique régulière diminue la mortalité, en population générale, d’environ 30 %. Cela se confirme aussi pour les femmes ménopausées, notamment celles âgées de plus de 60 ans. La professeure Martine Duclos, responsable du service de médecine du sport au CHU de Clermont-Ferrand, vient de rédiger, pour la Société française de gynécologie, des recommandations sur les effets de l’activité physique et de la diminution de la sédentarité chez les femmes ménopausées. Elle a passé en revue toute la littérature sur le sujet, pas moins de 100 études. Ces recommandations devraient être publiées dans les prochains mois. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La sédentarité nuit gravement à la santé Rappelons d’abord que la ménopause, qui survient en général vers la cinquantaine, se caractérise par l’arrêt du fonctionnement des ovaires et la chute du taux d’œstrogènes. Cette période peut s’accompagner de symptômes gênants – pour 50 % à 60 % des femmes – tels que bouffées de chaleur, troubles du sommeil ou de la concentration, fatigue, anxiété, sécheresse vaginale… Des symptômes qui peuvent être atténués par l’exercice. La chute du taux d’œstrogènes augmente le risque d’ostéoporose (perte de densité osseuse), une maladie qui n’épargne pas non plus les hommes. Chez la femme ménopausée, « l’activité physique à impact (course, sauts…) augmente la densité minérale osseuse (rachis, col fémoral et trochanter) », souligne une expertise de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale. Des effets retrouvés aussi chez les hommes âgés. Ce sont les activités combinées, mêlant une endurance d’intensité modérée (marche rapide, gymnastique suédoise, jogging, danse…) à des exercices de renforcement musculaire, qui se révèlent les plus efficaces sur la densité osseuse, selon les études passées en revue par Martine Duclos. Un exemple, l’étude anglo-américaine « Nurses health study », portant sur plus de 61 000 femmes ménopausées, a montré que le risque relatif de fracture du col du fémur était réduit de 6 % pour chaque augmentation de la dépense énergétique équivalente à une heure par semaine de marche d’intensité modérée. Et celles qui marchaient au moins 4 heures par semaine voyaient ce risque diminuer de 41 % par rapport à celles marchant moins d’une heure. Le fait de bouger aurait aussi des bénéfices sur l’équilibre, le risque de chute et de fracture…. « Marcher, monter des escaliers, danser, faire des exercices de renforcement musculaire sont un bon traitement préventif des fractures chez les femmes », souligne Martine Duclos.
L’activité physique permet d’atténuer les symptômes de la ménopause tels que les bouffées de chaleur ou les troubles du sommeil.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/09/17/le-sport-permet-de-lutter-contre-les-effets-de-la-menopause_5511446_1650684.html
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Le pianiste et compositeur de jazz Ahmad Jamal à Marciac, en août 2016. REMY GABALDA / AFP Marciac, Gers, dimanche 4 août, 00 h 22, 12 000 oreilles sous un chapiteau survolté, quatre générations, un village hors norme, peu accessible au cœur d’une des plus belles campagnes des mondes habités, moins de 2 000 habitants l’hiver, plus de 250 000 pendant la quinzaine du festival : Ahmad Jamal tire sa dernière révérence. Lire le 6e volet de la série « La boîte de jazz » : Le club sous chapiteau d’Ahmad Jamal Ici, le collège porte le nom d’Aretha Franklin. Son principal honoraire, désormais maire de la commune et responsable de plein de charges, cofondateur du festival de jazz dont il préside la 42e édition, est connu jusqu’aux bas fonds de Pittsburg. Il s’appelle Jean-Louis Guilhaumon. M. Ahmad Jamal, prince de l’improvisation savante, du swing et des élégances, avant-gardiste plus que populaire est venu par amitié pour lui. Il a 89 ans, ce serait son dernier voyage en Europe. 00 h 22, Ahmad Jamal, troisième rappel, fait acclamer Manolo Badrena (percu), Herlin Riley (batteur originaire de La Nouvelle-Orléans), James Cammack (contrebassiste), et rayonnant, svelte, sûr de soi comme sont les enfants : « And me ! » Lire la critique d’un concert à Paris (en juillet) : Ahmad Jamal chamboule la rhétorique du jazz C’est sûrement, au terme d’une prestation aussi maîtrisée que libre, l’annonce la moins narcissique, la moins vaniteuse, la plus orgueilleuse que l’on connaisse. Terrain secret peut-être, où, sans avoir à se le dire, Ahmad Jamal et Jean-Louis Guilhaumon se retrouvent. Un Kamasutra en do dièse Le concert, on n’y reviendra pas : un Kamasutra en do dièse pour musiciens hors du commun, l’histoire des nuages et celle de l’amour. Il paraît que ce sera le dernier en Europe. On n’y croit pas une seconde. On s’y fera. Comme pour en jurer, ou pour conjurer, France Musique l’a diffusé en direct. Dans quarante-deux ans, ils seront un bon demi-million à prétendre qu’ils y étaient. On les connaît. On a la liste. Jazz in Marciac existera toujours malgré les guerres nucléaires et autres catastrophes. Jean-Louis Guilhaumon n’aura pas lâché l’affaire et ce n’est certainement pas à lui que l’on imputera le collapsus planétaire. Affirmant ses prétentions, il aura fait de ses actions éco-responsables la règle de toute manifestation nombreuse. Manu Dibango donnera un concert aussi brillant que le 3 août 2019. Après tout, en 1978, lors de la première édition, il ne serait venu à l’idée de personne de l’inviter… Les pôles fondent, le maïs dépérit, il vous reste une chance d’être de votre temps sans ruiner la planète : le 8 août (date tirée au hasard), grande célébration de Petrucciani avec la fine fleur de la scène actuelle. A L’Astrada, Jean-Philippe Viret (contrebassiste de catégorie) précède Anne Paceo. Clou de la soirée, un discret monument du piano, Keny Barron. Encore s’en tient-on au dixième de ce qui se produit chaque jour à Marciac.
Pléthorique, exhaustif, dosant stars et émergents, le festival du Gers, qui se tient jusqu’au 15 août, renforce ses ambitions citoyennes et prépare l’avenir.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/08/05/le-pianiste-ahmad-jamal-tire-sa-reverence-a-jazz-in-marciac_5496655_3246.html
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alvini. Il peut faire une chaleur infernale à Milan en été. Une chaleur à raser les murs en quête d’un peu d’ombre, et à fuir comme la peste les espaces ensoleillés. En ces moments-là, on se faufile d’un lieu climatisé à un autre. En évitant le plus pos­sible la traversée de la Piazza del Duomo, qui, aux heures les plus chaudes, peut se transformer en fournaise. Pourtant, en cet après-midi étouffant de juin, la large esplanade est noire de monde. On croise des groupes scolaires, des cohortes de visiteurs asiatiques, quelques couples d’amoureux en voyage… A vue d’œil, les habitants de la ville sont très minoritaires. On les distingue à leur tenue – veste obligatoire pour les hommes, même par 40 °C, tenue plus légère pour les femmes –, et parce qu’ils n’ont pas un regard pour cette cathédrale qu’ils connaissent par cœur. Dans n’importe quelle autre ville d’Italie, le phénomène ne mériterait même pas d’être signalé. A Milan, c’est différent. La métropole lombarde se veut le cœur de l’Italie productive, ce pays où l’éthique du travail a ­valeur de principe cardinal ; le contraire de Rome la langoureuse, belle mais invivable, où le temps s’écoule plus doucement et où les problèmes ne sont jamais résolus. Ici, on raconte que les travaux de restauration du théâtre de la Scala, bombardé par les Américains en 1944, avaient commencé avant même la fin de la guerre… « Destination touristique » Naguère, les touristes ne mettaient pas les pieds dans cette ville aux charmes secrets, pas assez méditerranéenne, trop éloignée de la carte postale d’Italie. Mais depuis quelque temps, les choses ont changé. « Cela remonte à une dizaine d’années environ, pas plus », confie l’archiprêtre Gianantonio Borgonovo, qui veille sur la cathédrale depuis le siège de l’évêché, situé lui aussi sur la place. « Et depuis l’Exposition universelle de 2015, Milan est vraiment devenue une destination touristique. » Pour l’heure, le phénomène est si neuf que les habitants semblent encore s’en amuser, tout surpris de découvrir leur ville séduisante. Reste que la place est devenue un « spot » incontournable, et qu’on photographie la cathédrale comme la tour de Pise ou Saint-Marc à Venise. « Comment pourrait-il en être autrement ? Le Duomo, c’est Milan », assure doucement l’archiprêtre. La Galleria Vittorio Emanuele II, le plus ancien centre commercial du monde et la cathédrale de la Piazza del Duomo, dans le centre de Milan, en mars 2018. MIGUEL MEDINA / AFP Il faut dire que les proportions du lieu en imposent : grande de plus d’un hectare et demi, la place est un grand rectangle, dessiné dans les années 1860 pour mettre en valeur cette cathédrale unique en Italie. Face à elle, le Palazzo Carminati, un bâtiment un peu irrégulier, construit au XIXe siècle, longtemps célèbre pour ses immenses enseignes publicitaires lumineuses – les dernières ont été démontées en 1999, à la demande de la mairie. Sur les côtés, les faces nord et sud ont été pensées de façon presque symétrique, avec deux rangées de porches. Le porche nord, situé à gauche lorsqu’on regarde le bâtiment, s’ouvre sur la luxueuse galerie Victor-Emmanuel-II, qui mène à la Scala et à la mairie. Au centre a été posée une statue équestre un peu pompeuse du même Victor-Emmanuel-II, le roi qui fit l’unité italienne.
Places d’Italie (1/6). Des grandes villes aux plus petites, les places italiennes racontent le pays dans toute sa richesse et toute sa complexité. C’est le cas de la Piazza del Duomo, à Milan, capitale économique et fief du ministre de l’intérieur, Matteo Salvini.
https://www.lemonde.fr/festival/article/2019/07/21/a-milan-le-retour-en-grace-du-duomo_5491798_4415198.html
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Le président américain Donald Trump et le leader nord-coréen Kim Jong-un le 28 février 2019 à Hanoï. Evan Vucci / AP A un peu plus d’un an de l’élection présidentielle de 2020, le bilan de l’unilatéralisme musclé prôné par Donald Trump commence à prendre forme. Il reste pour l’instant plutôt maigre. Au nom de l’« America First », le président des Etats-Unis s’est affranchi du jeu des alliances et des contraintes du multilatéralisme. Ce choix constituait l’un des rares points d’entente avec John Bolton, le troisième conseiller à la sécurité nationale du président, limogé mardi 10 septembre, même s’ils divergeaient par ailleurs sur sa finalité. Compte tenu des doutes sur le sérieux du plan de paix israélo-palestinien de l’administration américaine que la démission de son maître d’œuvre, Jason Greenblatt, a alimentés, et de l’impasse qui prévaut au Venezuela, la « pression maximale » est devenue le maître mot de la diplomatie trumpienne. Profitant de sa supériorité liée à la place du dollar dans les échanges mondiaux, Washington multiplie les opérations punitives. Cette « pression maximale » est déployée dans toute sa vigueur contre la Corée du Nord et l’Iran. Dans le premier cas, cette politique s’est appuyée sur des sanctions internationales adoptées par les Nations unies. Elle a produit une indéniable détente à partir de 2018, marquée par la fin des essais nucléaires de Pyongyang puis par une rencontre historique à Singapour entre le président des Etats-Unis et Kim Jong-un. Escalade calculée Depuis, et en dépit de deux nouvelles rencontres au sommet, au Vietnam en février, puis dans la zone démilitarisée qui sépare les deux Corées en juin, les négociations sont au point mort. La définition du terme de « dénucléarisation », qui est au cœur de l’ambition des Etats-Unis, continue de diviser les deux protagonistes. Donald Trump s’efforce pourtant de cultiver la relation personnelle qu’il estime avoir construite avec le dirigeant nord-coréen, quitte à minimiser la portée des essais balistiques auxquels se livre Pyongyang et qui inquiètent les alliés régionaux de Washington. L’arsenal des sanctions imposé à l’Iran pour obliger le pays à accepter un accord plus contraignant dans le domaine nucléaire tout en bridant ses ambitions régionales et son programme de missiles a produit des effets délétères sur l’économie du pays sans pour autant inciter Téhéran à se plier aux injonctions américaines. Donald Trump ne cesse d’assurer que « l’Iran n’est plus le même » depuis son arrivée à la Maison Blanche, mais il est en peine d’en produire la preuve.
Les arsenaux de sanctions imposés à l’Iran, la Corée du Nord ou le Venezuela tardent à produire les effets souhaités par la Maison Blanche
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/09/11/etats-unis-la-diplomatie-de-la-pression-maximale-peine-a-obtenir-des-resultats_5509133_3210.html
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L’équipe de défense de Kevin Spacey, emmenée par l’avocat Alan Jackson, lors de son arrivée au tribunal, à Nantucket (Massachusetts), le 8 juillet. JOSEPH PREZIOSO / AFP Kevin Spacey évitera-t-il un procès pour agression sexuelle ? L’unique dossier pénal contre l’acteur a pris un sérieux coup lundi 8 juillet, après que son accusateur a décidé de ne plus témoigner à la barre de peur de s’incriminer. L’Américain de 59 ans, dont la carrière a implosé depuis les premières accusations d’agressions sexuelles portées contre lui en novembre 2017, n’était pas présent à l’audience qui se déroulait sur l’île de Nantucket, dans le Massachusetts. C’est dans cette station balnéaire très prisée de la jet-set que la vedette de la série House of Cards et du film American Beauty est soupçonnée d’avoir, en juillet 2016, mis la main sur le sexe d’un jeune homme de 18 ans employé dans un bar, après l’avoir fait boire. Sa mise en examen pour attentat à la pudeur et agression dans cette affaire est intervenue à la fin de 2018, après que plusieurs autres allégations d’agressions sur de jeunes hommes ont émergé dans le sillage du mouvement #metoo. Aucune des autres accusations, aux Etats-Unis et à Londres, n’a débouché sur des poursuites pénales pour l’instant. « Tout le dossier est compromis » Dans le dossier du Massachusetts, le téléphone portable de l’accusateur est crucial : le jeune homme l’a utilisé pour filmer l’agression présumée, et la commenter par SMS avec sa petite amie de l’époque et un groupe d’amis. Or ce téléphone, que la défense veut pouvoir examiner, a disparu, ont confirmé lundi l’accusateur et ses parents, tous appelés à témoigner lors de l’audience. Un policier a affirmé leur avoir rendu après en avoir extrait toutes les données, mais a reconnu n’avoir pas demandé de récépissé. La famille, elle, affirme ne l’avoir jamais récupéré. Interrogé longuement sur ce qu’il avait fait du téléphone et des messages, le jeune homme a assuré ne rien avoir effacé. Mais, averti que toute manipulation du téléphone pouvait lui valoir des poursuites, il a ensuite invoqué le 5e amendement de la Constitution américaine, qui permet à un témoin de garder le silence pour ne pas risquer de s’incriminer. La mère du jeune homme, une présentatrice de télévision connue de la région de Boston, Heather Unruh, a, elle, reconnu à la barre avoir effacé certaines images potentiellement embarrassantes du téléphone avant de le remettre à la police. Elle a assuré n’avoir rien effacé qui soit lié à l’agression présumée. L’avocat de Kevin Spacey, Alan Jackson, a, lui, insinué que des SMS dans lesquels le jeune homme – fan de l’acteur – aurait laissé entendre qu’il était consentant avaient été supprimés. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Kevin Spacey, un fantôme à Hollywood Le juge n’a pas pris de décision lundi, mais la défense a prévenu qu’elle allait demander rapidement l’abandon des poursuites. « Tout le dossier est compromis », a affirmé Me Jackson. Le procureur n’a pas exclu un abandon, mais a demandé au juge « une semaine » pour décider.
Le jeune homme qui accuse le comédien américain a décidé, lundi, de ne plus témoigner à la barre de peur de s’incriminer.
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/07/08/le-dossier-d-agression-sexuelle-contre-kevin-spacey-menace-de-s-effondrer_5487031_3210.html
mlsum-fr-51
Histoire d’une notion. Tensions entre l’Iran et les Etats-Unis dans le golfe Persique, incidents entre l’Inde et le Pakistan, différend commercial entre la Chine et les Etats-Unis ou encore crise entre Israël et l’Iran… Un mot revient à chaque fois dans les communiqués des gouvernements : « escalade ». « Escalade dangereuse », « risque d’escalade », « escalade de violence », l’expression fait aussi la « une » des médias. Tiré de l’occitan escalada et du verbe escalar, qui signifie « grimper » ou « escalader », ce terme, aurait été utilisé pour la première fois en 1456, ne relève plus seulement de l’univers montagnard. La diplomatie internationale s’en est emparé en lui conservant cette image d’échelle à gravir. « L’escalade, telle que la définit le politiste Pascal Vennesson, est un processus par lequel les limites antérieures d’une crise ou d’une guerre sont franchies ou risquent de l’être, et où de nouvelles limites sont établies et une situation irréversible est créée. » Cette densification des tensions qui se traduit par le recours éventuel à la force armée ou par l’intensification de la violence dans une situation déjà conflictuelle n’est pas un phénomène nouveau. Il faut remonter au XIXe siècle, avec le théoricien de la guerre Carl von Clausewitz, pour en comprendre le sens stratégique. Dans son analyse, l’officier prussien conceptualise la montée aux extrêmes, que le général Vincent Desportes résume à sa manière : « La guerre est dévoreuse, on y met un doigt, puis le bras et enfin le corps. On sait que l’escalade commence par des mots, mais, dès le premier coup de feu, on ne sait plus où elle s’arrête. » Cette part d’inconnue, marge d’incertitude ou calcul d’anticipation, caractérise la notion d’escalade qui fait intervenir la variable du temps dans sa compréhension La notion d’escalade a pris de l’épaisseur lors de la dissuasion nucléaire dans le cadre de la guerre froide, au milieu des années 1960, rappelle le diplomate Michel Duclos. Depuis, elle n’est jamais sortie de l’agenda diplomatique mais connaît, depuis quelques années, un regain d’intérêt. Pour l’universitaire Frédéric Ramel, spécialiste des conflits, « c’est le contexte actuel de retour du grand jeu entre les grandes puissances – eu égard à la montée d’un néonationalisme, Trump aux Etats-Unis, Poutine en Russie, Xi Jinping en Chine – » qui expliquerait cette vogue car « cela contribue à réactiver la figure de l’Etat ».
Né de l’occitan au Moyen Age, le terme, revenu sur le devant de la scène au sujet des tensions entre Etats-Unis et Iran, implique cette part de bluff qui peut aussi bien résoudre un conflit que l’envenimer
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/06/26/escalade-ou-les-premiers-mots-avant-la-montee-en-puissances_5481522_3232.html
mlsum-fr-52
Abdelfattah Mourou, candidat du parti Ennahdha à l’élection présidentielle, à Tunis, le 25 juillet 2019. FETHI BELAID / AFP En Tunisie, le parti d’inspiration islamiste Ennahda, principale force au Parlement, a présenté, mercredi 7 août, un candidat à la présidentielle anticipée de septembre – une première dans l’histoire de cette formation. L’annonce de la candidature d’Abdelfattah Mourou a été faite dans un communiqué laconique du parti, qui doit tenir une conférence de presse dans l’après-midi. En 2011, neuf mois après la révolution qui avait chassé du pouvoir le président Zine El-Abidine Ben Ali et mis le pays sur la voie de la démocratie, Ennahda avait remporté les législatives, premier scrutin post-révolution. Mais « c’est la première fois de son histoire que le mouvement présente un candidat à la présidentielle », a déclaré à l’AFP le porte-parole d’Ennahda, Imed Khmiri. « Le conseil consultatif du parti a voté à une majorité de 98 voix en faveur de la candidature d’Abdelfattah Mourou à l’élection présidentielle », a indiqué Ennahda dans son communiqué. Lire aussi La mort du président Essebsi en Tunisie laisse un paysage politique morcelé Abdelfattah Mourou, 71 ans, est l’un des membres fondateurs d’Ennahda, au côté de Rached Ghannouchi, en 1981. Connu pour sa modération, il est chef du Parlement par intérim depuis que son prédécesseur, Mohamed Ennaceur, est devenu chef de l’Etat par intérim après le décès, le 25 juillet, du président Béji Caïd Essebsi à l’âge de 92 ans. Faiseur de roi Avant le bouleversement du calendrier électoral, Ennahda était réticent à l’idée de présenter son propre candidat à la présidentielle, pour laquelle il voulait jouer les faiseurs de roi, et misait sur un succès aux législatives, prévues initialement avant la présidentielle. Mais le premier tour de la présidentielle a été avancé au 15 septembre et les législatives sont prévues le 6 octobre. Les candidats à la présidentielle ont commencé à déposer le 2 août leur candidature. Mardi, 27 prétendants avaient déjà soumis leur dossier au siège de l’Instance indépendante chargée des élections (ISIE). Parmi eux, l’homme d’affaires et magnat des médias Nabil Karoui. Inculpé pour blanchiment d’argent, il se présente comme le candidat des plus démunis. M. Karoui est un adversaire de taille pour le premier ministre Youssef Chahed, candidat du parti Tahya Tounes. Abir Moussi, pasionaria de l’ancien régime de Zine El-Abidine Ben Ali, est également en lice. Elle prône, entre autres, l’exclusion des islamistes, dont ceux d’Ennahda. Lire aussi En Tunisie, le vrai faux divorce du président Essebsi avec les islamistes Figurent aussi Hamadi Jebali, ex-numéro deux d’Ennahda, qui se présente en indépendant, et Moncef Marzouki, élu en 2011 par le Parlement premier président après la révolution. « Aujourd’hui, il y a une véritable démocratie et le peuple peut choisir librement », a dit M. Marzouki. Autre candidat notable mercredi, le ministre de la défense, Abdelkarim Zbidi, qui a présenté sa démission avant de faire acte de sa candidature. Les candidats ont jusqu’au 9 août pour déposer leur dossier. Le 31 août, l’ISIE annoncera la liste de ceux qu’elle a retenus et la campagne se déroulera du 2 au 13 septembre. Les résultats préliminaires seront annoncés le 17 septembre. La date du deuxième tour n’a pas été décidée, mais il devrait se tenir avant le 3 novembre, selon l’ISIE. Pour les législatives d’octobre, Rached Ghannouchi est tête de liste dans la circonscription électorale de Tunis. « Oiseau rare » Ennahda reste marqué par sa première expérience au pouvoir, lorsqu’il s’était retrouvé empêtré dans des crises et confronté à une forte opposition politique, après avoir remporté les législatives de 2011. Il avait dû céder la place à un cabinet de technocrates début 2014. Depuis qu’il a pris un peu de recul, le parti s’évertue à policer son image, insistant pour être décrit comme un parti « démocrate musulman » et non « islamiste ». A ce titre, il a dit poursuivre sa transformation – annoncée en 2016 – en force « civile », excluant toute activité de prédication religieuse. Article réservé à nos abonnés Lire aussi A la mairie de Tunis, le nouveau visage du parti islamiste Ennahda En mai, Rached Ghannouchi n’avait pas exclu de présenter « un membre d’Ennahda » à la présidentielle, tout en ajoutant que « le plus important » était de trouver « un candidat consensuel ». « Cet oiseau rare, on ne l’a pas encore trouvé », avait dit M. Ghannouchi, dont le parti avait gagné la majorité des mairies lors des élections locales de 2018. Berceau du printemps arabe, la Tunisie est le seul des pays touchés par les contestations à poursuivre sur la voie de la démocratisation, malgré les soubresauts politiques, la morosité économique et des attaques djihadistes.
C’est la première fois que la formation, principale force au Parlement, concourt pour accéder à la fonction suprême.
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/08/07/tunisie-abdelfattah-mourou-candidat-du-parti-islamiste-ennahda-a-la-presidentielle_5497425_3212.html
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King Princess à Los Angeles, le 7 mai. VINCE MYO M.AUNG On a connu un « King » (du rock’n’roll), une « Queen of pop » (Madonna)… Sous le nom de King Princess, Mikaela Straus, 20 ans, dont le premier album, Cheap Queen, sort le 25 octobre, se rêverait bien un peu les deux. Dans un mélange des genres qui ne serait pas que musical. « Les rock stars et les reines de la pop, façon Madonna, Lady Gaga ou Beyoncé, sont d’importantes sources d’inspiration, insiste l’Américaine, première signature du label Zelig, lancé par le producteur Mark Ronson. J’adore chez les uns et les autres un côté grande folle dans la façon de faire le show, de jouer des personnages. » Sur la pochette, cette « roi princesse » au visage naturellement rieur et délicat s’affuble d’ailleurs d’immenses faux-cils et d’un maquillage outré, en référence à celui des drag-queens. « J’ai appris à être féminine grâce aux travestis », assure Miss Straus, dont le clin d’œil à ces « reines » rappellera l’impact libérateur qu’eut pour la Nantaise Héloïse Letissier la fréquentation du milieu drag-queen londonien, avant qu’elle se réinvente en Christine and the Queens. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Christine and The Queens, monarque absolue « Je ne me reconnaissais pas dans l’image classique de la femme en robe, cherchant à plaire aux hommes, admet l’admiratrice de notre Chris nationale. Par contre, cette mise en scène masculine de la féminité me plaisait car c’était un spectacle, mais aussi une façon drôle et belle de montrer qu’une partie de soi pouvait s’exprimer au-delà de notre nature physique. » Si en quelques mois, cette New-Yorkaise, désormais installée à Los Angeles, s’est affirmée en figure montante de la culture « queer », elle le doit pourtant moins à des artefacts provocateurs, qu’à une manière épanouie d’assumer sa sexualité. Pas, dans Cheap Queen, de frustrations à vif, de visions conflictuelles ni de revendications militantes contre la société patriarcale. Portés par une voix à la tendresse éraflée et une production s’étirant langoureusement entre folk-rock et grooves urbains, les treize titres de ce premier opus s’attachent surtout à parler de plaisir et de spleen amoureux, en préférant les filles de la même façon que d’autres préfèrent les garçons. Une vocation précoce L’Amérique de Donald Trump et de son vice-président, Mike Pence, chrétien évangéliste ayant décrit l’homosexualité comme un « effondrement sociétal », n’aurait-elle pas pu aiguiser un tranchant plus politique ? « Je parle de chatte et d’amour ! Pas de politique… », s’esclaffe la chanteuse, dont l’un des premiers morceaux, cosigné par sa petite amie de l’époque, l’actrice Amandla Stenberg, ne s’appelait pas pour rien Pussy Is God.
A 20 ans, Mikaela Straus publie « Cheap Queen », un premier album marqué par les classiques seventies de la discothèque parentale.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/10/24/king-princess-nouvelle-souveraine-queer-de-la-pop_6016677_3246.html
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Rudi Garcia a dû se contenter contre Dijon d’un résultat nul (0-0) pour son premier match à la tête de l’Olympique lyonnais, le 19 octobre à Lyon. JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP Le grand vainqueur de la soirée est donc… le PSG, qui a joué et gagné vendredi à Nice (4-1) en ouverture de la 10e journée de Ligue 1. Car son toujours dauphin, Nantes, a cédé, samedi 19 octobre, à Metz (1-0). Réduits à 10 après l’exclusion de Molla Wague, les Canaris laissent filer les Parisiens, désormais nantis de cinq points d’avance (24 contre 19). Bien loin de cette balade, Lyon continue son surplace. La bronca qui a accompagné le brouillon nul contre Dijon (0-0) est venue rappeler que Rudi Garcia – l’ex-entraîneur de Marseille, intronisé lundi – va devoir mettre les bouchées doubles pour se faire accepter et surtout redresser la barre d’un club en grandes difficultés en L1. Voici le club de Jean-Michel Aulas à l’arrêt depuis 8 rencontres, 8 matches sans victoire en championnat, du jamais vu depuis 1987 et la prise de pouvoir de l’homme fort de l’OL. Il faut même remonter à 1977 pour trouver trace d’une aussi triste série, qui place Lyon juste au-dessus de la ligne de flottaison (16e avec 10 points). « Les joueurs ont répondu présent », a pourtant estimé Juninho, le directeur sportif adulé pour son passé de joueur, mais dont les premiers pas dans le costume de directeur sportif s’avèrent délicats. « De très bonnes choses ont été vues. Si nous parvenons à enchaîner de telles performances, nous allons parvenir à renverser la situation », a-t-il assuré. « Je suis déçu du résultat mais pas du contenu », a de concert commenté Garcia. « Si nous avions joué tout le match comme après la mi-temps nous aurions gagné ». De fait, c’est la 2e période qui incite à l’optimisme, où le portier de Dijon, Alfred Gomis, a effectivement sauvé les siens. Mais que dire de la première ? En cinq jours, Rudi Garcia ne pouvait évidemment faire de miracle, mais la situation comptable devient critique. Et le spectre de la saison manquée de Monaco, dans les grandes largeurs la saison passée, commence à hanter les traboules lyonnaises. Heureusement, la Ligue des champions arrive, et le déplacement périlleux à Benfica mercredi permettra d’y voir un peu plus clair sur la valeur du renouveau, dans une compétition où l’OL peut s’avancer avec plus de confiance (un nul et une victoire lors des deux premières journées). Le podium pour Reims A Toulouse, l’adversaire était redoutable. Mais Lille, qui recevra Valence en C1 également mercredi, n’était pas dans un grand soir. Antoine Kombouaré, lui aussi nommé lundi sur le banc du TFC, a connu la déveine de deux blessures de joueurs dans la première demi-heure, de quoi gamberger. Antoine Kombouaré délivre ses consignes pour sa première victoire sur le banc de Toulouse, contre Lille, le 19 octobre. REMY GABALDA / AFP Mais la volonté était là, et a été récompensée par Yaya Sanogo (58e) puis Max-Alain Gradel sur penalty (66e) après une main dans la surface de réparation de Jérémy Pied, pour un succès (2-1, réduction de l’écart de José Fonte) qui donne de l’air aux Violets (13e avec 12 points). Gradel a même manqué un autre penalty, de nouveau pour une faute de main de Pied, décidément maladroit. Avec Nantes défait et Angers surpris à domicile par Brest (1-0) malgré une large domination, Reims a profité de la soirée pour prendre place sur le podium. Avec son succès (1-0) contre Montpellier, les joueurs de David Guion ont enfin bonifié à domicile un début de saison clinquant à l’extérieur, avec des succès de prestige à Marseille, Paris et Rennes. Nîmes a lui concédé le nul dans le temps additionnel face à Amiens (1-1) pour un partage des points qui laisse les deux clubs dans l’expectative (12e pour Amiens et 17e pour Nîmes, avec 12 et 10 points). Dimanche, Marseille espère renouer avec le succès contre Strasbourg (21 heures) après 4 matches sans victoire. Auparavant dans l’après-midi, Bordeaux visera la 3e place de Reims en cas de succès contre le Saint-Etienne de Claude Puel et Monaco cherchera de nouveau à se réveiller contre Rennes.
Le nul pour Lyon, la victoire pour Toulouse : les deux clubs, qui ont changé d’entraîneur durant la trêve internationale, ont connu des fortunes diverses lors de la 10e journée.
https://www.lemonde.fr/sport/article/2019/10/20/ligue-1-pas-d-effet-garcia-pour-lyon-mais-un-effet-kombouare-a-toulouse_6016200_3242.html
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Sa combinaison bleu marine semble douce comme un pyjama. Dans sa tenue tout confort, le chorégraphe Akram Khan, 44 ans, silhouette vive comme l’éclair, a investi le Théâtre de Namur (Belgique). Il y répète le spectacle Outwitting the Devil, à l’affiche du 17 au 21 juillet dans la Cour d’honneur du Festival d’Avignon. Une première pour l’artiste britannique, d’origine bangladaise, connu à l’international, célébré sur les scènes du monde entier, et qui s’est même vu confier par Danny Boyle l’organisation de la partie chorégraphique de la cérémonie d’ouverture des JO de Londres, en 2012. Cette présence à Avignon est un événement, tant les hautes murailles du Palais des papes ne font pas de cadeau aux artistes qui y sont programmés. Pour l’heure, en ce début du mois de juin, tout va bien. Les répétitions avec les six interprètes de 25 à 68 ans avancent lentement, tranquillement. « On imagine pour l’instant travailler sur des projections dans la Cour d’honneur, mais pas dans la version qui sera programmée ensuite dans les théâtres », chuchote Céline Gaubert, qui collabore avec Khan depuis sept ans. Dans l’obscurité du plateau, des blocs de bois calcinés de différentes tailles couronnent la scène comme les ruines d’une cité décimée. Une voix d’homme donne le frisson : « Quand j’étais jeune, je n’imaginais pas le vieil homme que je deviendrai. Et aujourd’hui, le vieil homme que je suis peut difficilement imaginer le jeune homme qu’il a été. » Formé à 7 ans au kathak Face à face, deux danseurs à genoux s’observent dans le miroir du temps tandis que des silhouettes pétrifiées surgissent dans la pénombre. Sans fin, la bande-son est rembobinée. L’un des interprètes, le Français Dominique Petit, 68 ans, campe le personnage le plus âgé et impulse le flux global du spectacle. A l’exception de l’actrice Juliette Binoche, avec laquelle Akram Khan a créé le pas de deux In-I (2008), et de Sylvie Guillem, pour Sacred Monsters (2006), le chorégraphe collabore rarement avec des interprètes français. « Il m’a choisi car je crois qu’il s’interroge intimement sur ce que signifie vieillir pour un danseur », glisse Dominique Petit, sélectionné après une audition rassemblant 107 interprètes du monde entier parmi 835 dossiers soumis. Le chorégraphe Akram Khan à Avignon, le 20 juin. YOHANNE LAMOULÈRE POUR « M LE MAGAZINE DU MONDE » Avec Outwitting the Devil, Akram Khan, qui a fondé sa compagnie en 2000, met en scène un fragment, retrouvé en Irak en 2011, des douze tablettes en argile de L’Épopée de Gilgamesh, la plus ancienne histoire de l’humanité. Le vieux Gilgamesh a perdu la mémoire et se souvient peu à peu de sa jeunesse et de la façon dont il a brûlé la forêt et tué les animaux, soulevant la colère des dieux. « Evidemment, la Cour d’honneur a entraîné un désir d’histoire sacrée, précise Akram Khan. Cette épopée est un mythe de tous les temps, de notre époque aussi. Les mythes permettent d’évoquer la condition humaine et sa complexité d’un point de vue métaphorique. »
C’est au plus ancien récit de l’humanité, « L’Épopée de Gilgamesh », que s’intéresse le chorégraphe. La troupe du Britannique présente « Outwitting the Devil » du 17 au 21 juillet, au Festival d’Avignon.
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2019/07/06/akram-khan-le-desir-de-danser-des-histoires_5485990_4500055.html
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t mineur. Cela ressemble à la fin d’une époque. Le Concord Oval de Sydney, théâtre de six matchs de la première Coupe du monde de rugby, en 1987, dont la demi-finale entre la France et l’Australie, est sur le point de disparaître, balayé, dans les semaines à venir, par les bulldozers. A la place du vieux stade devrait être érigé, à l’été 2021, un complexe avec gymnase, tribunes couvertes et nouveau centre d’entraînement pour l’équipe résidente, les treizistes de Wests Tigers. Les quinzistes de West Harbour RFC, engagés dans un championnat régional, devraient continuer à être tolérés sur ce terrain. Mais pour eux, comme pour le rugby à XV en général, il n’y a pas vraiment de projet. Et c’est une histoire qui en dit beaucoup sur le poids réel de ce jeu dans le pays. Un air éternel de prétendant L’Australie a certes débarqué à la Coupe du monde 2019, au Japon, avec deux titres au palmarès (1991, 1999), un statut de finaliste de la dernière édition et son air éternel de prétendant à la couronne. Mais l’envers du décor est moins reluisant. Cette équipe a vécu une année 2018 catastrophique, la pire depuis soixante ans, accusant 9 défaites en 12 tests, et glissant jusqu’à la 6e place mondiale. Lire aussi Coupe du monde de rugby 2019 : groupe D comme délicat Elle a aussi été amputée de celui qui était probablement son meilleur joueur : l’arrière Israel Folau, licencié pour des sermons homophobes sur les réseaux sociaux. Un cas de conscience pour la fédération qui savait perdre là son plus grand talent mais qui devait rendre des comptes aux deux principaux sponsors, Qantas et Asics. Les Wallabies se sont fracturés sur la question entre ceux qui soutenaient Israel Folau, joueurs de religion évangélique nés bien souvent dans les îles du Pacifique et qui comptent pour un tiers de l’effectif des Wallabies, et les autres… Séance d’entraînement des Wallabies, le 8 octobre 2019 à Tokyo. Behrouz Mehri / AFP La seule « bonne nouvelle » dans cette affaire est financière : l’éviction de Folau, qui avait un contrat à 2,4 millions d’euros sur quatre ans, représente une économie pour Rugby Australia, la fédération australienne, qui dû se soumettre à un plan de réduction des coûts en 2018 (plus de 9 millions d’euros) pour faire face au déficit accusé l’année précédente. Et qui a déjà annoncé des pertes pour 2019. Un cercle vicieux Surtout, s’il apparaît toujours comme une grande puissance sur la scène internationale, le rugby australien est un colosse aux pieds d’argile. A domicile, le rugby à XV – essentiellement populaire dans les lycées privés – n’est qu’un parent pauvre, écrasé par le football australien, le XIII, le cricket et même le football. Cette concurrence plonge la fédération dans un cercle vicieux : moins de spectateurs, moins d’audience, moins de sponsors, moins de dollars pour retenir les meilleurs, moins d’attrait… « Dans toutes les entreprises, si vous ne comprenez pas votre marché, vous êtes en difficulté. La fédération ne comprend pas sa base ni ce qui motive les gens à jouer au rugby. » Bob Dwyer, ancien sélectionneur Ue ville permet de mesurer la problématique : Melbourne. Alors que le Cricket Ground (MCG), le grand stade, est plein chaque semaine pour les matchs de « footy » (football australien), le plus modeste AAMI Park sonne creux à chaque rencontre de Super Rugby, la compétition qui oppose des franchises australiennes, néo-zélandaises, sud-africaines, argentines et japonaises. Pour l’heure, rien ne paraît pouvoir inverser les courbes. Bob Dwyer, entraîneur des champions du monde 1991, avait résumé la problématique dans le Daily Telegraph en 2018 : « Dans toutes les entreprises, si vous ne comprenez pas votre marché, vous êtes en difficulté. La fédération ne comprend pas sa base ni ce qui motive les gens à jouer au rugby. Avant de faire autre chose, ils doivent retrouver cette connexion. Ensuite, nous pourrons nous préoccuper des autres problèmes. » Dans l’ombre des All Blacks Remettre en cause son fonctionnement, la fédération l’avait fait dans les années 1970. Après une défaite contre les Tonga, un groupe d’hommes d’affaires avait financé, en 1973, une mission d’enquête au Pays de Galles (quatre fois vainqueur du Tournoi des cinq nations entre 1969 et 1973), à l’origine de la création d’une direction technique nationale. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Coupe du monde de rugby 2019 : depuis douze ans, un All Black à la baguette chez les Gallois Le projet avait permis à l’Australie d’asseoir une réputation de nation innovante avec un jeu très organisé et des entraîneurs à la pointe. Mais, au fil des ans, les autres nations ont comblé leur retard et le rugby australien n’a pas su se réinventer. Un indicateur : en 2019, ils ne sont que deux Australiens à être sélectionneurs d’une équipe nationale – Michael Cheika à la tête des Wallabies et Eddie Jones (Angleterre) –, soit moins que les Gallois (3) et surtout que les Néo-Zélandais (7). Les Wallabies sont d’ailleurs plus que jamais dans l’ombre du rival régional. L’ascendant des Néo-Zélandais est évident partout : chez les moins de 20 ans, où l’Australie n’a atteint le dernier carré mondial qu’à une seule reprise depuis 2012 contre six pour les « Baby Blacks », ou en Super Rugby, où les franchises néo-zélandaises ont remporté 40 victoires d’affilée contre l’opposition australienne entre 2016 et 2018. Le sélectionneur australien Michael Cheika, le 5 octobre 2019 au stade Oita. Christophe Simon / AFP C’est la défaite d’un modèle. En Nouvelle-Zélande, où le rugby est roi, le système est centralisé, pensé au service des All Blacks. En Australie, l’organisation est fédérale. Une tentative de copier le système des voisins a échoué en 2012, les fédérations régionales s’étant unies pour sauver leur indépendance. En 2018, la fédération a tenté un autre pari : contrainte de sacrifier une franchise en Super Rugby, elle a condamné la Western Force (Perth, ouest du pays) au profit des Melbourne Rebels, terre historiquement hermétique au XV, mais deuxième ville économique du pays. Entre résultats décevants et stade vide, les Rebels sont loin de faire la publicité du rugby australien. Surtout, Rugby Australia pourrait voir le boomerang lui revenir en plein visage. Pour combler le vide créé par cette décision visant Perth, le milliardaire Andrew Forrest, qui a fait fortune dans les mines, a lancé un projet de nouvelle ligue, Global Rapid Rugby, pensée pour partir à la conquête des économies asiatiques, avec l’ambition d’attirer les meilleurs joueurs du monde. Au Japon, les Wallabies sont en mission, pour bien plus qu’un titre mondial.
Deux fois champions du monde dans les années 1990, les Wallabies sont en déclin depuis leur dernière finale en 2015. Conséquences d’une crise structurelle dans un pays où le rugby est un sport mineur.
https://www.lemonde.fr/sport/article/2019/10/18/coupe-du-monde-de-rugby-2019-l-australie-colosse-aux-pieds-d-argile_6016066_3242.html
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Le projet du premier téléphérique urbain francilien, baptisé Câble A par Ile-de-France Mobilités, devrait relier les villes de Villeneuve-Saint-Georges à Créteil, dans le Val-de-Marne. Île-de-France Mobilités Un nouveau venu pourrait faire son apparition dans le paysage des transports du Grand Paris. Attendu et débattu depuis des années, le premier téléphérique urbain francilien est en passe d’obtenir son dernier feu vert : la commission d’enquête publique doit rendre son avis dans les jours qui viennent, prélude à une déclaration d’utilité publique. Cette liaison de 4,5 kilomètres et cinq stations doit relier Villeneuve-Saint-Georges à Créteil, dans le Val-de-Marne, où elle sera connectée à la ligne 8 du métro. Un trajet aérien de vingt minutes dans des cabines de dix places accessibles aux vélos, suspendues entre 25 et 45 mètres au-dessus du sol et circulant toutes les trente secondes aux heures de pointe, pour un trafic estimé à 11 000 voyageurs chaque jour. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En France, le téléphérique urbain connaît un décollage difficile D’un coût de 132 millions d’euros, ce projet de Téléval a été rebaptisé Câble A par Ile-de-France Mobilités (IDFM). Manière de suggérer qu’il pourrait y avoir, un jour, des lignes B, C, etc. Mais si les envies de téléphérique ne manquent pas dans le Grand Paris, il n’est pas sûr que d’autres liaisons voient le jour rapidement. IDFM a douché les espoirs des élus franciliens en leur présentant, ces derniers mois, les conclusions de l’audit mené avec un bureau d’études spécialisé sur douze projets de téléphériques urbains recensés dans la métropole. « Le câble est pertinent quand on doit franchir des obstacles qui imposent de gros détours par la route », explique Elodie Hanen, directrice générale adjointe chargée du développement chez IDFM « Peu de projets tiennent vraiment la route », constate Elodie Hanen, directrice générale adjointe chargée du développement chez IDFM. Tous affichent un taux de rentabilité nettement inférieur à 8 % – à partir duquel un projet devient envisageable –, quand celui du Câble A monte à 11 %. « Le câble est pertinent quand on doit franchir des obstacles qui imposent de gros détours par la route, comme des faisceaux ferroviaires, mais il présente aussi des difficultés », avertit Mme Hanen. Les règles de sécurité imposent de passer à plus de 20 mètres au-dessus des habitations, ce qui rend presque impossible le survol d’immeubles de plus de trois étages. Et passer au-dessus de zones boisées oblige à défricher des corridors. Deuxième obstacle : l’acceptabilité de ces téléphériques. A Créteil, les riverains du quartier des Sarrazins ne sont pas ravis de l’arrivée de ces cabines avec vue plongeante chez eux. Contourner les difficultés
Le Câble A devrait relier Villeneuve-Saint-Georges à Créteil, dans le Val-de-Marne, mais peu d’autres projets sont considérés comme viables par Ile-de-France Mobilités.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/06/25/le-telepherique-urbain-s-invite-dans-le-ciel-du-grand-paris_5481175_3234.html
mlsum-fr-58
Esther Joly-Petit, Française, étudiante en master à l’UdM, à Montréal, le 5 octobre. ARTHUR GAUTHIER / HANS LUCAS POUR LE MONDE « Si l’héroïne du film est folle, alors nous sommes toutes folles », lance une étudiante. Quelques rires fusent dans l’amphithéâtre. Dans ce cours sur « le féminisme et la santé mentale » qui se tient ce jour-là à l’université du Québec à Montréal (UQAM), les étudiants – en grande majorité des femmes – y vont tous de leur interprétation du film de Cassavetes, Une femme sous influence (1974), sur lequel s’appuie la séance. Jusqu’à aborder leur propre intimité, comme cette autre élève pour qui le film fait écho à « l’injonction quotidienne à devoir se tenir droite, être une bonne fille, sous peine de sortir des cases ». « Les études féministes sont aujourd’hui à la mode un peu partout, mais nous, cela fait trente ans qu’on fait ça. » Alice van der Klei, Institut de recherches et d’études féministes de Montréal Etudier le genre à Montréal : de plus en plus de jeunes Françaises et Français font ce choix, attirés par les cursus et les cours francophones proposés dans les universités de la ville, par la multiplicité des événements autour de ces questions et par le large réseau de chercheurs spécialisés. « Depuis trois ans, on a noté une recrudescence de l’intérêt des étudiants internationaux, énonce Alice van der Klei, adjointe à la formation de l’Institut de recherches et d’études féministes (IREF), rattaché à l’UQAM, qui propose des cours sur les rapports sociaux entre les sexes en complément ou au travers de cursus spécialisés. Près de 500 étudiants suivent, en 2019, les cours de cet institut. Parmi eux, une trentaine de Français – il n’y en avait pratiquement aucun il y a dix ans. « Les études féministes sont aujourd’hui à la mode un peu partout, mais nous, cela fait trente ans qu’on fait ça. » Quand elle a intégré un cours sur les médias, le sexe et le genre à l’université de Montréal (UdeM), Esther Joly-Petit, Française de 21 ans, s’est sentie « très en retard ». « Les Québécois de ce cours avaient tous déjà eu des sessions sur le féminisme ou les questions queer pendant leur licence, se souvient l’étudiante en maîtrise (équivalent du master français) de communication. Avec les autres Français, on voyait bien qu’on n’avait aucune notion. » Ce cours lui a « ouvert l’esprit », explique-t-elle, notamment sur la représentation des personnes transgenres – c’est-à-dire qui ont une identité non conforme à leur sexe de naissance. « D’ailleurs, au début de la session, le professeur nous a demandé à chacun : “Par quel pronom aimeriez-vous qu’on s’adresse à vous ?” Cela m’a beaucoup surprise, c’était très nouveau », témoigne-t-elle.
A Montréal, l’étude des rapports sociaux entre les sexes est proposée dans les universités depuis une trentaine d’années, offrant une grille d’analyse nouvelle, dont les étudiants français sont de plus en plus demandeurs.
https://www.lemonde.fr/campus/article/2019/10/14/au-quebec-les-etudes-de-genre-attirent-des-jeunes-francais-en-quete-de-boite-a-outils_6015365_4401467.html
mlsum-fr-59
Le sélectionneur Florent Ibenge après la qualification de la RDC pour les huitièmes de finale de la CAN, au Caire, le 30 juin 2019. MOHAMED ABD EL GHANY / REUTERS En République démocratique du Congo (RDC), le football est une affaire sérieuse. Florent Ibenge le sait bien. Avant d’être sélectionneur de l’équipe nationale des Léopards, le technicien a entraîné l’AS Vita Club de Kinshasa, l’un des clubs les plus titrés du pays avec le Tout Puissant Mazembe de Lubumbashi et le DC Motema Pembe de Kinshasa. C’est là qu’il a pris la mesure de cet engouement populaire puisqu’il n’était pas rare d’avoir « jusqu’à 5 000 spectateurs rien que pour assister à un entraînement ». Il faut dire que le club kinois, dix-huit fois champion de RDC et vainqueur de la Ligue des champions en 1973, est une équipe phare du pays. Rien d’étonnant donc à ce que Constant Omari, le puissant président de la Fédération congolaise de football (Fecofa), par ailleurs vice-président de la Confédération africaine de football (CAF) et de la FIFA (Fédération internationale de football association), ait repéré là l’actuel coach des Léopards. « Florent était en poste au Vita Club depuis quelques mois et il avait qualifié son équipe pour la finale de la Ligue des champions 2014. Notre volonté, à la Fecofa, était de faire confiance à un technicien local. Qu’il soit parallèlement le coach du Vita Club n’était pas un problème », explique Constant Omari. « Aller le plus loin possible » Né à Kinshasa, dans le quartier de Fikine, l’homme s’est deux fois exilé en début de carrière. En 1974, d’abord, il part pour la France, où il acquiert la double nationalité, joue dans des clubs amateurs ou semi-professionnels, entraîne des petites formations. Puis il opte pour la Chine et s’installe à Shanghaï, aux côtés de Nicolas Anelka, alors entraîneur joueur, avant de revenir. La Fecofa a choisi Florent Ibenge pour ses compétences, sa connaissance du football africain et européen, et sa capacité à s’engager sur le long terme. De tous les sélectionneurs en Afrique, il est celui qui dure le plus. Sa longévité sur le banc du Vita (six ans), un club réputé pour son instabilité technique, et avec qui il a remporté deux fois le championnat (2015 et 2018), fait de lui un homme de projets. « Quand on décide de l’engager, ce n’est pas pour un ou deux ans, mais pour travailler sur la durée. Malgré les soubresauts, comme l’élimination en qualifications pour la Coupe du monde 2018, il a l’assise pour aller au bout de ce cycle de cinq ans et dresser le bilan, après la CAN en Egypte et cela quel que soit le résultat », ajoute Constat Omari. Reste qu’aujourd’hui la pression que Florent Ibenge a sur les épaules est lourde. Depuis 1974 et le titre ramené d’Egypte, la RDC n’a plus jamais remporté la Coupe d’Afrique des nations. L’objectif des Congolais est clairement de succéder au Cameroun, champion d’Afrique en titre : « On m’a demandé d’aller le plus loin possible, de faire le meilleur résultat possible. Et ce ne sera pas facile face à Madagascar dimanche… » Florent Ibenge a déjà terminé à la troisième place de la CAN en 2015 et en quarts de finale de l’édition 2017. En partie parce qu’il a renouvelé son équipe, convainquant plusieurs joueurs nés en Europe (Bakambu, Kakuta, Imbula…) d’évoluer pour leur pays d’origine. Entraîner un jour une équipe en Europe Inévitablement, la nomination à la tête de la sélection nationale de l’entraîneur du Vita Club a généré des débats en RDC. Florent Ibenge, avant même d’avoir débuté sa carrière de sélectionneur, a été la cible de premières attaques liées à de supposés conflits d’intérêt et à des soupçons de favoritisme, au bénéfice des joueurs du Vita Club. Mais l’homme a rapidement fait taire les ragots, ne retenant que trois, un et deux joueurs de son club lors des CAN 2015, 2017 et 2019. « Avant de signer au Vita, j’ai eu une longue conversation avec Papa Kazadi, un des dirigeants les plus influents, aujourd’hui décédé. Il m’a exposé la situation et m’a dit de ne jamais venir le voir pour me plaindre. Il m’a dit de me battre », sourit Florent Ibenge. Lire aussi CAN 2019 : ce moment si particulier où les Requins bleus croisent des Antilopes noires Formé à l’école des entraîneurs français, très au fait des nouvelles technologies, il connaîtra son avenir après la CAN : « Que ce soit avec la sélection ou au Vita Club, on prendra le temps de parler, de faire le point. Il y a peut-être encore de belles choses à faire. Mais comme je suis là depuis longtemps, certaines personnes en ont peut-être assez de voir ma tête… » Il n’a jamais fait mystère d’entraîner, un jour, une équipe professionnelle en Europe, tout en reconnaissant que peu de postes étaient occupés, sur le Vieux Continent, par des techniciens non européens. « Il est né en RDC et il y est revenu après avoir obtenu ses diplômes. La compétence, il l’a. Ce n’est pas la couleur de la peau qui doit être prise en compte, mais le niveau », regrette Constant Omari. Avec « Le Monde Afrique », suivez la CAN 2019 sur WhatsApp
Le sélectionneur de la RDC, qui affronte ce dimanche Madagascar en huitièmes de finale du tournoi continental, est également l’entraîneur de l’AS Vita Club de Kinshasa.
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/07/07/can-2019-florent-ibenge-l-homme-aux-deux-casquettes_5486540_3212.html
mlsum-fr-60
Le four de Nimpoui, village du Centre-Nord du Burkina, a été « découvert » il a une dizaine d’années par l’un des premiers archéologues ouest-africains, Jean-Baptiste Kiéthéga. Sophie Douce Longtemps, les terres de Nimpoui ont caché un trésor. Perché au sommet d’une colline rouge, dissimulé entre les acacias d’une forêt où se baladerait un python sacré selon la légende, s’érige un vestige métallurgique très ancien du Burkina Faso. « Nous n’avions pas réalisé la valeur de ce site avant que des chercheurs ne commencent leurs fouilles il y a quelques années », regrette le roi du village Sibiri Ouedraogo, en posant la paume de sa main sur la paroi d’un grand dôme en terre cuite, abîmé par l’épreuve du temps et de la vie humaine. Il y a plus de six siècles, ce fourneau de 2,10 mètres de haut était utilisé pour fabriquer du fer. « On le remplissait de minerais de latérite et de charbon, il fallait attendre plus d’une dizaine d’heures à haute température avant d’obtenir une loupe de fer », explique un forgeron de Nimpoui, situé dans la région du Centre-Nord, à 60 km de la capitale. Dans le four, où le mercure dépassait les 1 000 °C, une réaction chimique libérait alors les particules de fer de la roche. Sous ses pieds, une multitude de scories noires – les résidus issus de la fusion – tapissent encore le sol, preuve de l’activité métallurgique intense qui se déroulait ici il y a des centaines d’années. Lire aussi Au Burkina, un premier lâcher de moustiques génétiquement modifiés crée la polémique Grande victoire pour le continent, l’Etat burkinabé vient d’obtenir, vendredi 5 juillet, l’inscription de cinq de ses sites de métallurgie ancienne au patrimoine mondial de l’Unesco. Seul pays africain en lice cette année, le Burkina a été choisi par le Comité du patrimoine mondial, réuni jusqu’au 10 juillet à Bakou, en Azerbaïdjan pour sa 43e session. Cette inscription va permettre « de mettre la lumière sur la richesse culturelle burkinabée, au moment où notre pays est considéré comme infréquentable à cause de l’insécurité, et cela nous aiderait à protéger ces biens fragiles et menacés de dégradation », soutient Léonce Ki, le directeur des sites classés patrimoine mondial du Burkina Faso, qui compte deux sites distingués par l’Unesco, les ruines de Loropéni et la réserve naturelle d’Arly. Mystère « On a grandi avec ces ruines en se demandant ce que c’était. On sait seulement que pendant les guerres ethniques nos ancêtres s’étaient réfugiés sur cette colline et avaient cohabité un temps avec des familles de forgerons, qui sont ensuite reparties et ont laissé ces fours derrière eux », raconte Sibiri Ouedraogo, en boubou traditionnel et chapeau coloré des chefs coutumiers sur la tête. Depuis la découverte du site dans les années 1980 par le professeur Jean-Baptiste Kiéthéga, l’un des premiers archéologues d’Afrique de l’Ouest, ces mystérieuses constructions fascinent les spécialistes du pays. Lire aussi Au Burkina Faso, des serviettes hygiéniques lavables pour faciliter la vie des femmes Sur ce site, « les premiers fourneaux dateraient des XIIIe et XIVe siècle, ils auraient été bâtis par les Ninsi, un peuple de métallurgistes qui fabriquaient des armes, tels que des couteaux et des pointes de flèche, des outils et des bijoux, mais beaucoup de choses nous échappent encore », indique Elise F. Thiombiano Ilboudo, qui a participé en 2011 aux premières fouilles sur le site comptant deux hauts fourneaux et plusieurs bases d’anciennes structures. « Ils ont été conservés grâce à leurs parois en terre cuite très épaisses. Après chaque utilisation, les hommes repassaient une couche d’argile sur les murs pour les renforcer », poursuit l’archéologue. Anciennes mines d’extraction de minerai, ateliers de réduction, déchets de fer, plus d’un millier de sites métallurgiques auraient été recensés au Burkina Faso, où l’un des plus anciens fourneaux d’Afrique de l’Ouest a été enregistré. Celui du village de Douroula, dans le nord-ouest du pays, remonte, selon les experts, au VIIIe siècle avant notre ère. Résidus de scories au pied des fours de Nimpoui, village de la région Centre-Nord du Burkina Faso, à une soixantaine de kilomètres de la capitale, Ouagadougou, fin juin 2019. Sophie Douce Au Burkina, comme sur le reste du continent africain, la métallurgie est un savoir-faire millénaire, qui continue de se transmettre de génération en génération dans la plupart des villages. Si, depuis la période coloniale, la fabrication du fer, longue et fastidieuse, a peu à peu été remplacée par la récupération des métaux, des pièces automobiles par exemple, les techniques ancestrales de la transformation, elles, perdurent. Ce matin-là, au village de Nimpoui, le bruit métallique du marteau et de l’enclume résonne. Assis sur un petit tabouret, devant sa case au toit de chaume, Jacques Bamogo peaufine une daba, la pioche traditionnelle utilisée pour labourer la terre. « Dans la famille, nous sommes forgerons de père en fils, à 6 ans j’activais déjà le feu avec un soufflet, à 12 ans je fabriquais mes premiers couteaux, j’ai ça dans le sang », glisse cet artisan qui forme maintenant ses deux fils de 11 et 8 ans. « Je leur apprends ce métier, mais ils seront libres de choisir ce qu’ils veulent faire plus tard », précise-t-il. Traditionnellement, le forgeron, « maître du feu et du fer », occupe une place centrale dans les sociétés. « On m’appelle pour jouer le rôle de médiateur dans les conflits, pour soigner certaines maladies et pour aller désenvoûter un lieu touché par la foudre », explique Jacques Bamogo. « Cet artisan avait une fonction capitale, sans lui les habitants ne pouvaient ni chasser ni pêcher, on lui confère des pouvoirs mystiques aussi, il reste très respecté et craint », souligne Lassina Koté, docteur en archéologie et en préhistoire africaine. Aujourd’hui encore, ce métier séduit les jeunes, et même de plus en plus, attirés par la perspective d’un emploi rémunérateur. Dans les villages et les villes du pays, les ateliers de forge se sont multipliés. On y fabrique des marmites, des portes ou encore du mobilier. « L’Afrique sous-représentée » Au village de Nimpoui, Jacques Bamogo, forgeron de son état, peaufine une « daba », la pioche traditionnelle utilisée pour labourer la terre, fin juin 2019. Sophie Douce Dans la forêt de Nimpoui, où les femmes viennent couper du bois de chauffe, la nature a depuis longtemps repris ses droits. Un des fourneaux a même été fissuré par les racines d’un arbre voisin et un des pans de la paroi s’est effondré. « A chaque saison, les jeunes viennent arracher les nouvelles pousses autour des structures, et depuis que l’on a sensibilisé les habitants et dit aux enfants que des génies vivaient ici, tout le monde fait plus attention ! », se réjouit le chef qui espère un jour accueillir des touristes chez lui. « Ce serait une fierté que le nom de notre village soit connu du monde entier, et cela donnerait du travail aux habitants qui vivent difficilement des cultures et de l’élevage ou préfèrent partir à l’orpaillage. Les jeunes pourraient devenir guides par exemple », propose Sibiri Ouedraogo. Lire aussi Au Burkina Faso, des tablettes pour améliorer le diagnostic des enfants malades Désormais, le classement de ces cinq sites burkinabés vient s’ajouter aux 95 autres trésors africains inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. Ce qui porte à moins de 10 % de l’ensemble (1 092) : « L’Afrique est le berceau de l’humanité, mais elle reste sous-représentée, nous avons encore des terra incognita scientifiques sur le continent, notre sol est très riche pourtant et il reste beaucoup de choses à découvrir », martèle Lassina Koté. Les terres de feu du Burkina Faso n’ont pas fini de livrer leurs secrets.
Reportage à Nimpoui, dans le centre du pays, où un four de plus de six siècles fait la fierté des habitants du village.
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/07/05/sur-les-traces-des-forges-seculaires-du-burkina_5485882_3212.html
mlsum-fr-61
Son déguisement est fin prêt. Après avoir été un directeur d’école, en 2009, puis un maréchal d’Empire, en 2014, Marc Dorcel a choisi cette année une tenue de maharaja. « Avec un turban et des couleurs chamarrées », précise-t-il. Vendredi 18 octobre, le groupe Dorcel organise son traditionnel bal masqué quinquennal. Plus de 2 000 invités dans un lieu prestigieux de l’Ouest parisien, encore tenu secret. Il fallait bien cela pour fêter les 40 ans de la plus célèbre marque française de films pour adultes. Un label connu de tous, un nom passé dans le langage commun. Et, surtout, une entreprise presque comme les autres, qui vient de s’installer au cœur d’un pôle média, à deux pas de Radio France, dans le 16e arrondissement de Paris, dans un immeuble avec open spaces et salles de réunion vitrées où une cinquantaine d’employés se répartissent entre les services de distribution de programmes adultes, de marketing ou de commerce de détail. Parmi ses activités, la plus rentable est la VOD (vidéo à la demande), qui représenterait à elle seule entre 60 % et 70 % du chiffre d’affaires, le reste étant réparti entre les six chaînes de télévision et une griffe de sextoys. Tapisseries rococo et dorures L’univers du porno a vu des labels émerger et disparaître, des nababs devenir richissimes puis ruinés, des cinémas X remplis tous les soirs puis fermer les uns après les autres, remplacés par des vidéoclubs, eux-mêmes délaissés quand Internet est arrivé… Et aujourd’hui, en dépit des plates-formes de vidéos pornographiques en ligne qui rendent les films X accessibles en quelques clics, Dorcel est toujours là, une entreprise familiale qui subsiste à toutes les révolutions du secteur, et qui fait aujourd’hui 37 millions d’euros de chiffre d’affaires annuels avec de la pornographie hétéro, gay et trans. « Nous sommes un acteur global d’entertainment, un peu comme Disney ou Warner », se félicite Grégory Dorcel, directeur général arrivé dans l’entreprise de son père en 1998, après un diplôme obtenu dans une école de commerce. Lire aussi Le porno en quête d’une nouvelle vigueur Pour promouvoir la marque, les rôles sont bien rodés entre le père et le fils, actionnaires quasi uniques de la société. Grégory, quadragénaire imposant, est prompt à célébrer la bonne santé économique de l’entreprise quand le père, Marc, 85 ans, président du conseil de surveillance, raconte la légende. Une histoire qui a démarré en 1979, avec Jolies petites garces, le premier porno de France tourné pour la VHS.
La marque Dorcel fête ses 40 ans. Derrière son image chic savamment entretenue se cache une autre réalité, faite de films au rabais, d’actrices mal payées et de montages financiers.
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2019/10/13/les-dessous-pas-si-chics-du-label-x-marc-dorcel_6015299_4500055.html
mlsum-fr-62
Une des soirées organisées, le dimanche soir, par Alexander Kühne au Club Extrem à Lugau (RDA). WILDE.STEIN MEDIENAGENTUR ARTE - LUNDI 12 AOÛT À 0 H 40 - DOCUMENTAIRE C’est un trou paumé, entre Prusse et Saxe. Un bled de quelques centaines d’habitants, relié au reste du monde par une petite gare située à 2 km. Lugau, ses champs et sa jeunesse, qui s’ennuie ferme. C’est pourtant dans ce décor figé qu’au cœur des années 1980, dans ce qui était le village d’un pays aujourd’hui disparu (la République démocratique allemande), un groupe de copains décide de bousculer les habitudes et, de fait, de braver la Stasi – la police politique – pour s’amuser sur de la musique peu appréciée des autorités officielles. Durant quelques années, Lugau deviendra l’épicentre est-allemand d’une musique libre et festive. L’endroit où toute sa jeunesse se donnait rendez-vous, en dépit des dangers, pour s’amuser. Venant de Berlin, de Leipzig, de Dresde, de Cottbus, après un long voyage en train ou en Trabant, la voiture emblématique du pays, les jeunes Est-Allemands débarquaient le dimanche à Lugau sous les regards suspicieux des locaux. Direction l’auberge, rebaptisée « Club Extrem ». Alexander Kühne et ses potes Cet émouvant documentaire, mêlant archives familiales, vidéos d’époque, extraits de concerts et témoignages, raconte l’histoire d’Alexander Kühne, jeune ouvrier réfractaire aux pesanteurs locales, et de ses potes. A l’époque, le seul endroit du village un peu joyeux était l’auberge, disposant d’une salle où des soirées dansantes étaient organisées, avec l’autorisation obligatoire de la police du peuple veillant aux bonnes mœurs. Grâce à la détermination et au culot de la bande d’Alex, cette banale auberge deviendra un lieu mythique de la scène underground. Nés dans les années 1960, Alex, Henri, Liane et d’autres jeunes de Lugau écoutent les radios de l’Ouest, rêvent de rock, de soirées folles à la londonienne et, parfois, se procurent des disques de glam rock – Bowie est leur idole. En RDA, les discothèques n’avaient pas le droit de passer plus de 40 % de tubes venant de l’Ouest. Mais tous les dimanches soirs au Club Extrem, les autorités locales, croyant avoir affaire à un club de jeunesse socialiste bien comme il faut, laissent faire. Alex et ses amis se moquent de la loi, programment 100 % de musique de l’Ouest et invitent même des groupes punk peu représentatifs d’une saine jeunesse prolétaire… En RDA, les discothèques n’avaient pas le droit de passer plus de 40 % de tubes venant de l’Ouest Le 4 mai 1984, une première soirée va faire basculer les dimanches soirs de Lugau dans la folie. S’inspirant du célèbre Blitz Club londonien, Alex et ses amis organisent un événement inhabituel. Tout le monde arrive maquillé, déguisé. Au lieu des quarante invités autorisés, ils sont plus de 500 à venir à Lugau ! Le rapport d’inspection de la police du peuple parle de « gens peints de manière décadente ». Des jeunes qui, à partir de 21 h 30, se déchaînent lors d’un concert punk. C’est le début d’une aventure aussi excitante que risquée. Durant des années, jusqu’à la chute du Mur, les dimanches soirs de Lugau vont voir débarquer des groupes qui attirent les foules. Parmi eux, les Berlinois de Feeling B qui viennent y donner un concert en 1987. Trente ans plus tard, Paul Landers et Flake Lorenz, deux des musiciens du groupe, reviennent saluer Alex à Lugau. Petit détail : ces deux gaillards sont aujourd’hui mondialement célèbres, membres de Rammstein, le groupe aux millions d’albums vendus ! Les retrouvailles sont émouvantes. Aucun musicien ayant joué dans la salle bondée, miteuse et surchauffée de l’auberge de Lugau n’oubliera cette expérience. Lugau City Lights, documentaire de Tim Evers (All., 2017, 52 min). www.arte.tv/fr/videos/091561-000-A/lugau-city-lights
Au milieu des années 1980, chaque dimanche, le petit village de RDA est devenu l’épicentre d’une musique libre et festive.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/08/12/lugau-city-lights-un-voyage-au-pays-du-punk-rock-et-de-la-stasi_5498818_3246.html
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Des barils de l’usine Lubrizol, le 8 octobre, après qu’un feu a ravagé l’usine. LOU BENOIST / AFP Près de quatre semaines après le gigantesque incendie qui a ravagé l’usine chimique Lubrizol, à Rouen, jeudi 26 septembre, on ne sait toujours pas comment un tel feu a pu se déclarer sur un site classé Seveso seuil haut censé être surveillé comme le lait sur le feu en raison de la dangerosité et de la quantité des substances stockées. Ouverte pour « mise en danger d’autrui », l’enquête préliminaire du parquet de Paris devra identifier ce qui a dysfonctionné en termes de sécurité. Lire les dernières informations : Un mois après l’incendie de Lubrizol, début des auditions à l’Assemblée et au Sénat Tableau apocalyptique Lubrizol assure se « conformer à toutes les normes applicables » et affirme que ses employés sont « formés aux risques de sécurité ». Et à l’instar des sept autres établissements Seveso implantés près de Rouen, la firme américaine a recours à des sous-traitants. Elle fait ainsi appel à la société normande Netman pour les activités de stockage et d’enfûtage – mise des produits chimiques dans des fûts. Plusieurs centaines de ces fûts étaient également conservées au sein de l’entreprise voisine Normandie Logistique, dont les entrepôts ont aussi partiellement brûlé. « Nous travaillons avec nos sous-traitants afin de nous assurer qu’ils mettent en œuvre des politiques de sécurité équivalentes », indique Lubrizol. Un rapport que Le Monde a pu consulter révèle pourtant une situation alarmante parmi les sous-traitants qui interviennent sur les sites industriels de la région normande. Cette étude a été commanditée en 2010 par le Club Maintenance Normandie, une structure issue de la chambre régionale du commerce et de l’industrie qui réunit les professionnels de la maintenance industrielle, pour faire le point sur les questions de sécurité. Elle a été menée auprès de « plus de 500 contacts » (entreprises utilisatrices et sous-traitants) et de 1 400 salariés de société de sous-traitance. Le tableau est apocalyptique. La moitié des entreprises utilisatrices reconnaissent ne pas en faire assez en termes de sécurité et un quart des sociétés sous-traitantes admettent taire des dysfonctionnements par crainte de sanctions. Article réservé à nos abonnés Lire aussi A Rouen, après l’incendie de Lubrizol, « il y a un sentiment de trahison » 92 % n’ont pas été formés au maniement d’un extincteur Les salariés de la sous-traitance ont été soumis à des tests de connaissance. Les résultats font froid dans le dos ; 98 % ne connaissent pas les principes généraux de la prévention ; 92 % ne savent pas ce qu’est le « document unique », qui recense les risques liés à l’activité d’un site et les mesures mises en place pour les prévenir ; 99 % ignorent la liste des travaux dangereux ; 95 % sont incapables de dire ce que contient une « fiche de données de sécurité », pourtant indispensable pour connaître la dangerosité d’une substance chimique (explosive, inflammable, toxique, cancérogène…). Les quelque 5 000 tonnes de produits partis en fumée chez Lubrizol correspondaient à pas moins de 479 fiches.
Comme les autres sites Seveso de la région, l’usine chimique avait recours à des sous-traitants. En 2010, un quart d’entre eux reconnaissait taire des dysfonctionnements par crainte de sanctions.
https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/10/22/lubrizol-des-2010-une-etude-sur-la-securite-pointait-les-lacunes-alarmantes-des-sous-traitants_6016389_3244.html
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Entraînement de l’US Aulnay «walking football», mardi 28 mai. PAUL MOIR Dribbleurs du dimanche, ailiers virevoltants, défenseurs de devoir, adeptes du une-deux et du petit pont, l’avenir est radieux : jouer au ballon, en équipe, sera toujours possible, à l’âge où l’on raccroche habituellement les crampons. Une révolution arrive d’Angleterre : le football en marchant. Destiné aux seniors, mais pas seulement, ce pied-de-nez à l’arthrose et aux rhumatismes propose une pratique adoucie du sport roi, sans course ni contact entre les joueurs. Frapper le ballon avec la tête y est proscrit ; lui donner une trajectoire aérienne également ; dès qu’un joueur tombe au sol, le jeu est arrêté. Cet ancien patron de société financière buvait un verre avec un ami, quand un picotement cardiaque lui a fait doublement jurer de réduire la consommation de houblon et de reprendre le football. Né au milieu des années 2000 au Royaume-Uni, où l’on compte actuellement plus de 800 clubs, le walking football commence à s’implanter en France, dans les régions à forte population britannique, comme autour d’Aulnay-de-Saintonge (Charente-Maritime), où un club a été créé en 2017, à l’initiative de Ted Sellwood, 68 ans. Cet ancien patron de société financière buvait un verre avec un ami dans un bar du village (1 400 habitants), quand un picotement cardiaque lui a fait doublement jurer de réduire la consommation de houblon et de reprendre le football. « Tout est parti d’une blague », en rit aujourd’hui celui qui n’avait pas foulé un terrain depuis plus de quarante ans. Ted Sellwood est alors allé voir le président de l’US Aulnay, qui a donné son accord pour la création d’une équipe de supervétérans sous ses couleurs. Deux ans plus tard, la section aulnaysienne est la plus importante de France, avec une trentaine de licenciés – des sujets de sa Gracieuse Majesté pour l’essentiel, âgés de 50 ans à 86 ans. Bière locale et nuits au camping Et parce que rien n’est plus triste, dans le foot, que de toujours jouer entre soi, Ted et ses amis organisent, lundi 3 et mardi 4 juin, au stade municipal, le premier tournoi international de football en marchant de France. Douze équipes, dont cinq venues du Royaume-Uni, y sont conviées. Hamburgers préparés par les épouses, bière locale et nuits au camping figurent au programme de l’événement, placé sous le signe de la « convivialité ». Ted Sellwood, devant le terrain synthétique de l’US Aulnay-de-Saintonge. FP C’est le maître-mot pour Ted Sellwood, moustache en forme de fer à cheval, façon Tarass Boulba. Il y a quelque temps, celui-ci s’est fait poser quatre stents au niveau des artères coronaires. Obtenir un certificat médical pour la pratique du football ne fut pas simple, reconnaît-il : « Au-delà d’un certain âge, on vous demande généralement de passer un test chez le cardiologue. Heureusement, notre médecin généraliste a vite compris que ce type de football se jouait à un rythme lent. Ce qui n’empêche pas de produire une certaine adrénaline. » Mais améliorer sa santé par le sport n’est pas la seule motivation. « Le but est aussi de partager des moments entre amis, ce qui n’est pas évident après 60 ans, poursuit l’ancien financier des Midlands de l’Ouest. Dès lors que vous arrêtez de travailler et que vous n’avez plus d’activité collective, comme le sport en propose, l’isolement peut venir vite. » A Aulnay-de-Saintonge, la section walking football a prouvé l’inverse. Ses membres sont systématiquement invités à se mêler aux événements organisés par le club : le loto, les tournois de jeunes, les soirées paella et jambon à l’os… En plus de deux créneaux hebdomadaires d’entraînement sur le terrain synthétique, les dirigeants de l’US Aulnay ont également offert à l’équipe un jeu de maillots – tailles XL et XXL majoritairement. Manière de rendre la monnaie de la pièce, les marcheurs-footballeurs ont empoigné bénévolement des pinceaux, il y a dix jours, pour repeindre aux couleurs du club la petite tribune du stade Roger-Chapeaud. Entraînement de l’US Aulnay «walking football», mardi 28 mai. Paul Moir Article réservé à nos abonnés Lire aussi Plus de loisirs et moins de travail, la clé de la performance
Le football en marchant s’implante en France. Comme à Aulnay-de-Saintonge, où s’entraîne une équipe d’une trentaine de licenciés âgés de 50 ans à 86 ans.
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2019/06/03/en-charente-maritime-le-walking-football-des-superveterans_5470571_4497916.html
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Gaëtane Thiney lors d’un entraînement avec l’équipe de France féminine à Clairefontaine (Yvelines), le 29 mai. AP/François Mori S’il est prématuré de juger de l’engouement que va susciter la huitième édition de la Coupe du monde féminine de football, qui se jouera du 7 juin au 7 juillet en France, ses organisateurs sont déjà rassurés par une chose : les stades seront pleins, la billetterie fonctionnant d’ores et déjà au-delà de leurs attentes. Deux jours avant le match d’ouverture entre la France et la Corée du Sud, le taux de remplissage dépasse les 70 %, avec près de 940 000 billets vendus sur le 1,3 million proposé. En 2011, le Mondial en Allemagne avait attiré 845 711 spectateurs, tandis que, il y a quatre ans, au Canada, 1 353 506 visiteurs s’étaient rendus dans les stades, record à battre. De quoi ravir le responsable du comité local d’organisation : « Il y a encore un mois, on vendait entre 2 000 et 4 000 billets par semaine. Depuis quinze jours, ce rythme est devenu quotidien, avec même 6 300 billets vendus avant-hier [lundi], et 6 700 hier [mardi], confie Erwan Le Prévost. On reste prudent, mais si on applique cette logique mathématique, on franchira le cap du million. Chaque jour amène de nouveaux spectateurs, des familles. C’est un bonheur que cette Coupe ait un vrai public familial et populaire. » Neuf rencontres sur les 52 du tournoi se joueront à guichets fermés, dont le match d’ouverture, le quart de finale à Paris, qui pourrait opposer les Bleues aux Américaines, les demi-finales et la finale à Lyon. Pour le deuxième match des Bleues, programmé le 12 juin à Nice, il restait, mercredi 5 juin, 7 000 billets sur 35 161. « Il s’agit du troisième plus grand stade du tournoi, et même avec, pour le moment, quasiment 30 000 spectateurs, on est déjà ravis », confie Erwan Le Prévost. Explosion du montant des droits TV Pour la première fois de leur courte histoire en Coupe du monde, les Bleues pourront non seulement profiter de l’avantage d’évoluer à domicile, mais surtout devant des gradins remplis. « Pour nous, c’est génial. Le partage avec le public, j’en parlais avec Blaise Matuidi [champion du monde 2018], je lui disais que ce que je leur envie le plus, c’est de rentrer tout le temps dans des stades pleins », s’est réjouie la meneuse de jeu des Tricolores, Gaëtane Thiney. Ce nouveau pouvoir d’attractivité du football au féminin se confirme, au-delà des tribunes, au niveau médiatique et économique. En 1991, lors de la première Coupe du monde, organisée en Chine, seuls les téléspectateurs locaux avaient pu suivre la compétition. Cette année, la FIFA espère franchir la barre du milliard de téléspectateurs en direct. En France, les montants des droits TV ont explosé, profitant aussi de la tenue de la compétition à domicile. En 2015, W9 avait payé 850 000 euros pour les droits de diffusion. Pour l’édition 2019, TF1 a investi 10 millions d’euros. « Evidemment, si l’on prend comme référentiel le Mondial des hommes l’an passé [130 millions payés par TF1 et BeIN Sports], ça peut paraître mineur. Mais pour le Mondial féminin, c’est clairement le signe d’une montée en puissance », explique Nicolas Scelles, économiste du sport à la Manchester Metropolitan University. En février, la secrétaire générale de la FIFA, Fatma Samoura, s’était montrée offensive pour défendre le potentiel de la pratique féminine. « Sur la manne financière que représentent les droits télévisés dans le football mondial, seulement 1 % revient au football féminin. C’est inacceptable, avait asséné la Sénégalaise. Je n’ai qu’un regret, c’est que les dirigeants hommes ne se rendent pas compte de cette manne qui est devant eux et qui ne demande qu’à être exploitée. » « Un cercle vertueux peut se mettre en place » Longtemps sceptique quant au développement de la pratique féminine, la FIFA commence à en saisir l’importance stratégique. Premier effet concret, les primes prévues pour les sélections participant au Mondial ont doublé, avec une enveloppe globale de 26,6 millions d’euros, dont 3,5 millions d’euros pour les futures championnes. Encore loin, cependant, des 32 millions d’euros (sur 354 millions d’euros) reçus l’an passé par les Bleus de Didier Deschamps pour leur titre de champions du monde. A l’image de la France, où les licenciées sont désormais 180 000, le réservoir de futures footballeuses est énorme, notamment en Amérique du Sud ou en Afrique. « Un cercle vertueux peut se mettre en place : plus de pratiquantes, meilleure qualité du spectacle, plus de monde dans les stades et devant la télé… La croissance peut être durable pendant des années. Le potentiel est énorme, d’autant que la progression a été freinée pendant cinquante ans, à cause des interdictions [de pratiquer le football pour les femmes] entre 1920 et 1970 », prédit Nicolas Scelles. Les annonceurs ne s’y trompent pas. « Les marques se positionnent sur un produit à fort potentiel et avec un ticket d’entrée relativement faible », explique Loïc Ravenel, économiste au Centre international d’études du sport à Neuchâtel (Suisse). Elles utilisent l’idée d’un football des origines, où les joueuses ne gagnent pas les millions des footballeurs, pour valoriser ce produit. » A quelques jours du Mondial, le clip publicitaire d’un célèbre équipementier a été remarqué. Y défilent quelques-unes des meilleures joueuses du monde, sur le terrain, fêtant une victoire, ou entraînant les garçons du FC Barcelone. Et puis, subrepticement, une autre vedette fait son apparition, le Brésilien Neymar Jr, dans son canapé, marquant des buts virtuels dans la version féminine d’un jeu vidéo de foot. Comme une étrange vision d’avenir ?
Longtemps sous-exploitée, la pratique du ballon rond chez les femmes attire de plus en plus. En tête de gondole, le Mondial, dont la huitième édition débute vendredi 7 juin en France.
https://www.lemonde.fr/football/article/2019/06/06/la-coupe-du-monde-feminine-de-football-nouvel-eldorado-economique_5472060_1616938.html
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La ville de Baton Rouge n’offre guère plus de deux opportunités à ses habitants : l’industrie pétrolière avec son immense raffinerie, la quatrième plus importante des Etats-Unis, et l’université Louisiana State University (LSU), qui regroupe environ 30 000 étudiants au sein d’un impressionnant campus. Ses athlètes, que l’on appelle les Tigers, portent haut et fort les couleurs mauve et jaune d’une des vingt-et-une équipes sportives de cette vénérable institution fondée en 1860. A presque 20 ans, Armand Duplantis, l’un des ultrafavoris de la finale mondiale du saut à la perche prévue mardi 1er octobre à Doha, était l’un d’entre eux jusqu’à cet été. Mi-juillet, il a choisi de passer professionnel et, de ce fait, a dit adieu aux compétitions universitaires, tout en poursuivant ses études en management du sport. Natif de Lafayette, au cœur du pays cajun, il concourt pour la Suède grâce à la double nationalité transmise par sa mère. Un concours étourdissant En 2018 à Berlin, le jeune homme est devenu champion d’Europe au terme d’un concours étourdissant conclu par un saut extraordinaire à 6,05 m. « Mondo » est un phénomène de précocité. Au même âge, Renaud Lavillenie, éliminé samedi 28 septembre lors des qualifications des championnats du monde, ne sautait que 4,81 m et la légende Sergueï Bubka « seulement » 5,40 m. Armand Duplantis et son père Greg au stade de la Louisiana State University, le 20 avril 2019 à Baton Rouge, en Louisiane. Annie Flanagan pour «Le Monde» Depuis l’exploit berlinois, Duplantis n’a pas chômé et a même confirmé son immense talent. Cette saison, il a franchi à nouveau deux fois la barre des 6 mètres : le 11 mai à Fayetteville (Arkansas), lors d’un meeting universitaire, et le 24 août lors d’un meeting en Suède. Il considère ce pays comme « sa deuxième maison » et rend visite chaque été à sa famille maternelle. Le 27 avril, LSU organisait un meeting universitaire au Bernie Moore Track Stadium, à l’ombre du gigantesque Tigers Stadium dans lequel 102 000 spectateurs peuvent s’entasser pour applaudir les exploits des joueurs locaux de football américain. Au milieu de la foule des jeunes athlètes, « Mondo » trimballait nonchalamment ce jour-là sa dégaine d’adolescent dans cette enceinte ouverte de 5 680 places, rénovée en 2011 pour 5 millions de dollars grâce à l’argent généré par les stars universitaires du football US. 🚨 NCAA RECORD 🚨 @LSUTrackField’s Mondo Duplantis sets the collegiate pole vaulting record by clearing 19 feet, 8 1… https://t.co/wOmcJLaVME — SECNetwork (@SEC Network) A domicile, il passait, dans un relatif anonymat, une barre à 5,94 m, une performance de niveau mondial. Il faut dire qu’aux Etats-Unis, l’athlétisme est un sport mineur qui n’existe réellement que tous les quatre ans lors des Jeux olympiques. Une vidéo de l’un de ses entraînements avait d’ailleurs fait le buzz : lors d’une séquence hallucinante, le perchiste, plus cool que jamais, prépare un saut alors qu’une armée de footballeurs casqués s’élancent vers lui sans lui prêter le moins du monde attention. « Dès que j’ai saisi une perche, ça a tout de suite été naturel. J’ai grandi avec un sautoir. Il était disponible à n’importe quel moment. Pour moi, c’était fun et je pouvais m’amuser avec comme un enfant. » Armand Duplantis Comme Renaud Lavillenie, qui l’a pris en affection dès son éclosion sur le circuit, la vocation du plus jeune perchiste de l’histoire à avoir été finaliste des Mondiaux − c’était à 17 ans en 2017 − est en rapport avec son histoire personnelle. A l’image de son aîné, elle trouve également sa genèse dans le jardin de la maison familiale. Son père Greg, ex-perchiste doté d’un record à 5,80 m, y a installé le sautoir qui a accueilli les premiers jeux d’acrobate d’Armand. Sur des vidéos montrées par son père, on voit le jeune garçon de 4 ans tenter d’imiter son frère Andreas, lui aussi perchiste. « Si tu n’as pas de sautoir chez toi, c’est difficile de faire de la perche aux Etats-Unis. A l’école, tu n’as accès que trois mois aux installations monopolisées par les sports majeurs », explique sa mère. « Dès que j’ai saisi une perche, ça a tout de suite été naturel. J’ai grandi avec un sautoir. Il était disponible à n’importe quel moment. Pour moi, c’était fun et je pouvais m’amuser avec comme un enfant. », se souvient le jeune champion. Patrimoine génétique Transmission culturelle mais aussi patrimoine génétique, tant il semble la parfaite combinaison entre son perchiste de père et son heptathlète de mère. « Il a mes longues jambes et mes longs bras mais il tient sa rapidité et sa mentalité de son papa », lance la longiligne Helena Duplantis. Armand Duplantis s’entraîne sur la piste de la Louisiana State University, le 20 avril 2019 à Baton Rouge, en Louisiane. Annie Flanagan pour «Le Monde» « Je suis assez petit [1,68 m] et la taille est un facteur qui limite dans ce sport. Je pouvais prédire très jeune qu’Armand serait doué mais restait l’incertitude quant à son développement physique [1,81 m]. Finalement, il m’a surpris de par ses qualités athlétiques. Il est vraiment très rapide et très à l’aise pour sauter », se félicite Greg Duplantis, qui entraîne sa progéniture. « 6,20 m, ça me semble raisonnable si tous les facteurs nécessaires se combinent bien comme à Berlin. » Armand Duplantis Sûr de lui, Armand Duplantis épouse de ce côté parfaitement la culture américaine. Il ne craint pas d’afficher ses ambitions. « L’été dernier, un journaliste a demandé : “Vous préférez le titre européen junior, celui des seniors ou sauter 6 mètres pour la première fois ?” Il a répondu : “Pourquoi ne pourrais-je pas faire les trois ?” Et il a réussi… », raconte Helena. Quand on l’interroge sur son aptitude à s’emparer un jour du record du monde de Lavillenie (6,16 m), « Mondo » lâche sans ciller : « 6,20 m, ça me semble raisonnable si tous les facteurs nécessaires se combinent bien comme à Berlin. » Le jeune homme est un passionné qui passe des heures à regarder les vidéos de ses perchistes préférés, une véritable éponge qui s’en inspire pour créer sa propre technique. « Renaud m’a pris dans les bras dès le premier jour. Il me souhaite le meilleur, je le sens. Tous ses conseils, je les prends et je les absorbe, livre-t-il, Un jour, il m’a dit : “Si tu veux sauter haut, tu dois commencer par passer 5,80 m à tous les meetings. C’est cette régularité qui te permet ensuite de franchir 6 mètres.” C’est ce qui s’est produit l’été dernier. » Ultime confidence de ses parents, le prodige n’a vraiment saisi l’importance d’une préparation physique que depuis trois ans. Jusqu’aux Mondiaux juniors en Pologne en 2016, il ne sautait que sur la base de son exceptionnel talent. Un talent qu’il aura encore l’occasion de démontrer lors de la finale des Mondiaux, peut-être la plus spectaculaire de l’histoire, grâce à l’émulation avec deux autres perchistes, l’Américain Sam Kendricks et le Polonais Piotr Lisek, qui ont aussi sauté 6 mètres cette année.
A 19 ans, le champion, né au pays cajun d’un père américain et d’une mère suédoise, saute à plus de 6 mètres et rêve, mardi, d’un titre mondial.
https://www.lemonde.fr/sport/article/2019/10/01/mondiaux-d-athletisme-armand-duplantis-l-etudiant-perchiste-qui-bat-des-records-de-precocite_6013777_3242.html
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Pour Edouard Piely, journaliste à Sciences critiques, « les crises économiques, sociales, financières et écologiques rendent la nécessité de créer une communauté technocritique radicale de plus en plus vitale ». Mais radicale ne signifie pas jusqu’au-boutiste ou extrémiste, se défend-il, « radicale consiste à revenir à la racine, à la source des problèmes ». À l’heure où les technoprophéties et les technopromesses sont omniprésentes, il nous faut plus que jamais rompre avec l’imaginaire de la croissance et du productivisme technique. Il nous faut trouver des pistes de résistance concrètes, de luttes, permettant de nous opposer aux dérives et à l’expansion technicienne, allant des mots de la décroissance jusqu’aux formes les plus poussées d’autogestion comme les ZAD. Et ce alors que depuis plus de 6 mois, il y a en France un mouvement social inédit, d’ampleur, contre lequel on déploie tout l’appareillage répressif du système technicien… De la société de contrôle à la startup nation comment s’opposer à l’expansion technicienne, comment proposer d’autres imaginaires, à l’image de celui qu’avance l’ingénieur Philippe Bihouix qui nous invite à ralentir pour rendre la société technique plus durable, à passer de la high-tech à la low tech. Image : sur la scène de la conférence de Sciences critiques, avec de gauche à droite, Joël Decarsin, Edouard Piely, Célia Izoard et Cédric Biagini. Image via la page Facebook de Sciences critiques. Avons-nous besoin d’une « communauté » technocritique ? Pour Joël Decarsin, coordinateur de l’association Technologos, si « la technique était l’enjeu du XXe siècle, elle est devenue la fatalité du XXIe siècle ». Depuis des années, la contestation s’en est pris successivement ou simultanément au nucléaire, aux OGM, à la télésurveillance ou aux puces RFID… Mais cette contestation « ne vise que « les » techniques, jamais « la » technique dans son ensemble », expliquait-il dans une tribune pour Sciences critiques. Une tribune où il concluait par la nécessité de faire émerger une « communauté technocritique », au sens d’une communauté de pensée. Le terme technocritique forgé en 1975 par Jean-Pierre Dupuy est rapidement entré dans les sphères militantes. Mais que signifie-t-il ? Que veut dire « critiquer la technologie » ? Pour Decarsin, la technocritique est une mouvance hétérogène, où on ne s’accorde même pas forcément sur le vocabulaire. D’où l’importance de trouver un langage commun. La technocritique, pour Joël Decarsin, c’est la critique d’une façon collective de penser et de vivre la technologie, c’est la critique d’une idéologie. Mais cette critique demeure militante, engagée, marginale, minoritaire et inaperçue. La critique militante qui domine, c’est la critique marxiste, la critique du capitalisme. Si depuis l’écroulement du bloc soviétique elle ne se dit plus marxiste, la grille de lecture qu’elle propose perdure et focalise son action sur la lutte contre la concentration du capital et les inégalités. Le problème, souligne Joël Decarsin, est que cette dénonciation des inégalités s’inscrit encore trop souvent dans une conception du monde qui reste matérialiste. Or, c’est cette aporie qui doit trouver consensus dans la pensée technocritique : il ne peut y avoir de pensée technocritique qu’en dénonçant ce matérialisme ! Pour Decarsin, l’obstacle majeur à la constitution d’une communauté technocritique repose sur l’absence de consensus sur les liens entre l’idéologie technicienne et le capitalisme. Pourtant, constate-t-il désabusé, le capitalisme a encore de beaux jours devant lui. Le confort matériel qu’il assure avec l’aide du progrès technique demeure infiniment séducteur. Les anticapitalistes posent le problème en terme d’inégalités et de domination pour montrer que l’injustice est au coeur du problème… C’est oublier bien vite que nous sommes aussi confrontés à une explosion de non-sens, à une économie irréelle qui, des transactions à haute fréquence sur les marchés financiers aux derniers services abscons de la startup Nation, fonctionne pour elle-même. C’est aussi oublier combien aujourd’hui, sans l’IA, sans le système technique, le capitalisme ne serait rien. « L’efficacité du capitalisme repose sur sa capacité à s’autoréguler et sur sa réactivité ». Et les algorithmes sont meilleurs que nos cerveaux en terme de réactivité et d’adaptation. Ils sont désormais au coeur de la modélisation qui préside à l’efficience des marchés. L’autre obstacle à la constitution d’une communauté technocritique repose sur l’idée que les techniques sont neutres et dépendent de leur usage. Ce préjugé énorme sonne comme la tragédie de la technocritique, constate Joël Decarsin, alors que l’idéologie capitaliste et technicienne sont intimement liées et imbriquées. L’investissement sert la production technique et inversement. Et la production est engagée dans une course à l’efficience technique sans fin. Jacques Ellul, dans la Technique ou l’enjeu du siècle définissait la technique comme « la préoccupation de rechercher en toute chose la méthode la plus efficace ». Et c’est dans cette quête de l’efficacité que se rejoignent l’idéologie technicienne et l’idéologie capitaliste. Avec l’automatisation, l’IA et l’apprentissage profond, la technique devient un processus autonome ne répondant plus au contrôle de l’homme. Avec l’automatisation et les réseaux de neurones, on arrête encore moins le progrès puisqu’on en est désormais incapable… Un autre obstacle encore repose sur la difficulté à penser globalement la technique et à la concevoir comme un processus idéologique s’inscrivant dans le temps long. « On a trop souvent l’habitude d’approcher la technique comme la somme des techniques… Techniques qui ne seraient que des moyens matériels servant des objectifs et finalités distincts. C’est oublier que les techniques ne sont pas que des objets, mais aussi des méthodes (allant de la publicité à la division du travail…). La technique est la finalité des finalités. » Elle est un milieu ambiant comme le pointait le sociologue Georges Friedmann dans ses Sept études sur l’homme et la technique. Or, il est dans la nature de l’homme de sacraliser son milieu, comme le disait Jacques Ellul dans Les nouveaux possédés : « Ce n’est pas la technique qui nous asservit, c’est le sacré transféré à la technique qui nous empêche d’exercer notre esprit critique sur le développement humain ». Nous avons reporté la sacralisation de la nature sur la technique. Sacraliser n’est pas tant adorer religieusement que surestimer la technique, que la croire indispensable et vitale. La difficulté que nous avons à penser la technique sur le temps long… nécessite d’y porter un regard anthropologique. L’idéologie technicienne n’est pourtant pas née avec l’industrialisation… La technique est depuis toujours liée à la chute, comme le rappelle le mythe de Prométhée. L’idéologie technicienne est consubstantielle à l’homme et s’est développée peu à peu, au fil du temps, palier par palier… Pour Joël Decarsin, on ne peut pas s’improviser technocritique. C’est un travail d’ascèse intellectuelle, qui nécessite de faire des rapprochements entre des choses qui semblent ne pas avoir de rapports entre eux. Faire naître une communauté technocritique suppose de vaincre nos déterminismes. De la révolte contre la technique Traductrice, journaliste, philosophe, chercheuse, activiste… Célia Izoard est une des meilleures spécialistes de la critique technologique. Traductrice de Noam Chomsky, de Howard Zinn ou de David Noble pour les éditions Agone, militante notamment dans feu le groupe Oblomoff, un collectif critique du rôle de la recherche scientifique dans la société, on lui doit des dizaines d’articles sur l’activisme et la rébellion, qu’elle regarde à la fois dans une perspective historique et sur le terrain des luttes. Dans son intervention sur la scène de la conférence Sciences critiques, Célia Izoard tente de faire un état des lieux de la résistance à l’emprise de la technologie et du capitalisme : à quels alliés s’associer ? « L’informatisation de nos sociétés nous a longtemps été présentée comme un dépassement du capitalisme industriel, alors qu’il l’a surtout réenchanté, notamment avec la nouvelle économie ». L’économie immatérielle a accéléré les pires tendances du système capitaliste : la pollution, l’extractivisme, la marchandisation de la vie quotidienne, la surveillance, la spoliation des plus pauvres par les plus riches… Le numérique et la numérisation du monde sont le chantier industriel du siècle. « Mais pourquoi ne casse-t-on pas les machines aujourd’hui ? », interroge celle qui a été inculpée pour la destruction de machines biométriques à la cantine du lycée de Gif-sur-Yvette en 2005. Pour l’activiste, la bataille a été perdue… Nous avons incorporé les machines dans nos vies affectives, professionnelles, administratives… Le numérique est devenu un fait social, et il est désormais « aussi difficile de casser un ordinateur que de brûler un billet de banque », constate-t-elle en soulignant la faiblesse de la diffusion de la critique face à l’ampleur de la propagande commerciale de la technique. Pourtant, s’attaquer aux machines reste le moyen pour interrompre les processus en cours, freiner l’extension du filet numérique et les grands projets industriels que sont la robotisation, l’automatisation, l’intelligence artificielle, la 5G, les véhicules autonomes, les objets connectés ou la relance de la conquête spatiale… S’opposer demeure un moyen de briser les monopoles de propositions que font les acteurs de la technologie. S’opposer n’est pas seulement un moyen de donner voix à une critique, c’est aussi un moyen de faire une autre proposition… et de contester celles qui arrivent, comme le projet de loi d’orientation des mobilités qui promeut pour demain le véhicule autonome, cette « catastrophe écologique ». Sur le chemin de la contestation, nous ne sommes pas sans alliés, car la critique technique est plus vive qu’on ne veut le voir, estime Célia Izoard, qui prend l’exemple des compteurs Linky en remerciant ironiquement l’État d’avoir rendu ces nouveaux compteurs obligatoires. La fronde à l’encontre du compteur a été spectaculaire et inattendue. L’objet a cristallisé une très vive critique, multiple. Il est à la fois le symbole du lien entre l’informatisation et la précarisation (notamment des agents chargés du relevé). Il est aussi celui de l’obsolescence des nouveaux objets techniques (par rapport aux anciens compteurs), comme de la surconsommation ou de la pollution. Il est bien sûr également le symbole des nouvelles formes de surveillance et du profilage marketing, voire policier, qui s’inscrit jusqu’au coeur des pratiques intimes des familles et des individus. À ce jour, plus de 800 communes ont délibéré contre l’obligation à s’équiper de compteurs (voir la liste sur la plateforme opérationnelle anti-linky ou sur le site de refus de tout type de nouveaux compteurs de surveillance). À travers toute la France, des gens, avec des appartenances politiques et sociales très variées, refusent l’installation des nouveaux compteurs malgré les lettres de menace, se forment politiquement et s’organisent collectivement via des pétitions, des attaques en justice… mais aussi des actions, allant d’incendie de véhicules d’installateurs à des manifestations au siège d’Enedis à Toulouse. Le PDG d’Enedis se vantait que le compteur Linky devienne le premier objet connecté massivement diffusé : il a été surtout le plus largement contesté ! Pour Célia Izoard, un autre sujet est en train de faire monter la contestation : le déploiement de la 5G. Or, la 5G est l’infrastructure du monde numérique de demain, c’est le réseau de l’internet des objets à venir. Dernièrement, un appel international de scientifiques et d’associations écologistes a donné le premier relai d’une critique contre l’inutilité d’une telle puissance de rayonnement. Reste à savoir si cette contestation sur des principes sanitaires saura s’étendre à d’autres enjeux, comme l’évoquait récemment Irénée Régnauld sur Mais où va le web ? En attendant que cette contestation prenne de l’ampleur, l’organisation de la contestation contre les compteurs Linky a été efficace. À Albi quelque 450 personnes ont empêché 1/4 des installations prévues. Les activistes sont mêmes venus tancer le député Cédric Villani lors d’une visite à Albi en s’en prenant à quelques symboles : « Compteurs Linky, 5G, Véhicules autonomes : c’est pas bientôt fini les conneries ! » Ces manifestations sont un moyen d’envoyer des signaux forts au milieu d’affaires qui promeuvent ces projets. Dans la région d’Albi, des groupes mènent des actions et organisent des moments d’information sur des sujets au croisement des technologies et de l’écologie et mènent des actions à l’encontre de la dématérialisation des services publics. Pour Célia Izoard, ces exemples parmi d’autres montrent que la technocritique a des alliés. Que si cette lutte semble dérisoire, car inégale, le constat qu’elle dresse est tragique. Il y a d’autres alliés encore… Que ce soit les jeunes ingénieurs et chercheurs qui s’interrogent, se révoltent ou désertent, à l’image du manifeste d’étudiants de grandes écoles pour un réveil écologique, qui sonne comme une dissonance cognitive chez les jeunes appelés à faire tourner la machinerie technologique à l’heure de sa critique. En décembre 2018, à Toulouse, lors du forum de robotique agricole qui promeut, comme son nom l’indique, la robotisation de l’agriculture, afin que la terre ne voie plus jamais une main humaine, un des responsables du groupe John Deere a été interrompu par des paysans, se revendiquant comme d’anciens ingénieurs et informaticiens, venus expliqué pourquoi ils ont déserté ces métiers et leur refus de voir l’agriculture colonisée par des techniques qu’ils ont rejetés (lire leur tribune sur Reporterre et une autre sur Information anti autoritaire Toulouse et alentours ). Ces paysans qui se sont opposés au puçage électronique des animaux (notamment via le collectif « faux pas pucer » qui s’élève contre cette obligation) évoquent l’artificialisation et l’électronisation de la vie malgré les menaces et les sanctions qui pèsent sur eux. Le puçage n’est que le premier pas d’une agriculture toujours plus productiviste et industrialisée, répètent-ils, et la robotisation son aboutissement. D’autres collectifs encore organisent des formes de dissidence, comme l’atelier d’écologie politique, le collectif Osef (opposition à la startupisation de l’économie française) ou encore le collectif Ingénieurs sans frontières – Systèmes extractifs, des ingénieurs miniers qui dénoncent l’extractivisme du secteur, en montrent les impacts (par exemple via la cartographie des mines, PanoraMine) et organisent la résistance des géologues et ingénieurs (voir leur interview dans le dernier numéro de l’excellente revue Z, une revue à laquelle participe Célia Izoard et dans laquelle elle signe des articles sur les liens entre l’extractivisme minier et le productivisme, un reportage sur la contestation du projet Montagne d’Or – « Les multinationales n’ont jamais affranchi aucun peuple de la domination coloniale » ou encore une passionnante enquête sur les liens entre le Centre spatial et la colonisation). L’enjeu pour ces derniers consiste à dénoncer l’impact des grands chantiers miniers et leurs ravages en terme environnementaux afin de mettre en visibilité l’un des principaux problèmes à la source de la production de technologie. Pour Célia Izoard, il est plus que nécessaire de faire converger tous les aspects de la critique technologique : écologique, énergétique, sociale, politique… comme le pointait plus tôt François Jarrige. Documenter et construire la résistance à la technique Cédric Biagini est le cofondateur des éditions de l’Echappée… et confesse, étrangement, vu leurs publications : « On ne s’est jamais dit éditeur technocritique ». La maison d’édition se revendique plutôt d’une « critique sociale ». Pourtant le qualificatif lui sied, s’amuse l’éditeur, même si elle pourrait s’appliquer à bien d’autres éditeurs, des précurseurs de l’Encyclopédie des nuisances aux éditions la Lenteur, le monde à l’envers, le passager clandestin, Agone… ou à la collection « Anthropocène » du Seuil… Cédric Biagini revient longuement sur les publications des éditions de l’Echappée depuis 2005, comme si leurs publications faisaient écho à l’évolution de la prise de conscience de la critique du système technicien. C’est en 2007 avec La tyrannie technologique que s’ouvre vraiment la critique de la société numérique. À l’époque, rappelle l’éditeur, l’oeuvre de Jacques Ellul était connue mais indisponible, l’histoire de la critique des techniques n’avait pas été encore très rééditée, et Philippe Breton, professeur en sciences de la communication, et auteur du Culte de l’internet (2000), restait l’un des auteurs les plus visibles de ce courant critique, malgré sa longue histoire. En 2007, ce titre sonnait comme un manifeste exalté et rageur, à une époque où les milieux libertaires regardaient plutôt de manière bienveillante le développement des technologies qui facilitait leur militance et qui semblait encore promettre l’avènement d’un Nouveau Monde qui promettait de briser les hiérarchies et de s’affranchir des pesanteurs du réel. Dans ce livre collectif, on trouvait surtout, outre Cédric Biagini et Célia Izoard, le collectif Pièces et main d’oeuvre qui menait depuis le début des années 2000 un combat constant contre la technologie : notamment contre les nanotechnologies, les puces RFID, les grandes consultations nationales sur des enjeux technologiques (voir notre article « Technosciences : de la démocratie des chimères… aux chimères de la démocratie ») et contre le développement de Minatec. PMO a d’ailleurs dirigé la collection « négatif » aux éditions de l’Echappée, publiant une douzaine de titres pour montrer « l’envers de la réalité » technique… Cédric Biagini égraine le riche catalogue de l’Echappée. Avec la publication du Groupe Oblomoff, Un futur sans avenir : pourquoi il ne faut pas sauver la recherche scientifique ; ou encore plusieurs retours sur la révolte luddite avec La révolte luddite ou Les luddites en France mais également sur l’histoire des mouvements critiques via les livres collectifs de la collection « Frankenstein » comme l’ouvrage sur les penseurs de la radicalité critique (2013) qui revenait sur des chercheurs comme Gunters, Illitch, Charbonneau, Mumford ou Ellul… Ou encore avec la collection « le pas de côté » dirigée par le journaliste Pierre Thiesset de La décroissance, l’un des rares journaux radicaux sur la technologie et l’écologie, qui a consacré l’un de ses titres Aux origines de la décroissance. Autant de titres qui soulignent que « les mouvements qu’on tente de faire vivre aujourd’hui ne viennent pas de nulle part », qu’ils ont une histoire. Mais l’Echappée est surtout connue pour ses titres critiques de l’économie numérique et des ravages environnementaux, comme le livre La face cachée du numérique, ceux d’Eric Sadin et d’Américains comme la psychologue Sherry Turkle, Nicholas Carr ou Mark O’Connell. L’Echappée s’est également intéressée à d’autres sujets comme la question de la destruction du monde paysan, la dématérialisation du livre et de la lecture, ou encore la critique de l’école numérique. Autant d’exemples qui oeuvrent à un « catalogue de résistance » à la domination technique. Ce n’est pas le moindre de leur apport ! Comment résister ? « Comment résister au déploiement des technologies, notamment dans l’éducation nationale ? », interroge un professeur et militant syndical, lors des questions du public. « Ne peut-on résister qu’en désertant ? », c’est-à-dire que par le refus, quelque soit ses conséquences ? Célia Izoard rappelle qu’elle n’a pas lancé un appel à la désertion, mais au contraire, qu’il est plus que jamais nécessaire de défendre des métiers et des pratiques. Pour elle, il y a un enjeu à parvenir à fédérer les luttes, comme celle des enseignants et des parents d’élèves contre la numérisation et la marchandisation de l’école, à l’image du travail du collectif Écran Total qui a lancé en 2016 un appel contre la numérisation de l’école. Joël Decarsin, par ailleurs professeur, souligne qu’il a pu s’opposer aux outils qui s’imposent dans l’éducation nationale comme le cahier de texte en ligne ou Pronote, parce qu’il est en fin de carrière. Mais il concède que ces ruses individuelles sont devenues impossibles pour un professeur qui débute. Une personne dans le public, rappelle qu’être critique ce n’est pas nécessairement être contre, c’est plutôt parvenir à discerner si une technologie ou une innovation apporte un bienfait ou pas. Or, bien des technologies qu’on pourrait qualifier avec le recul de positives ont été au début critiquées, comme le métro ou le train… Comment faire un calcul entre les avantages et les inconvénients d’une technique ? Comment débattre ? Comment se faire une opinion sur des enjeux à venir ? Peser le pour et le contre ? Nous faut-il comme les amish débattre collectivement des technologies ? Les intervenants bottent un peu en touche sur cette question épineuse de l’évaluation des technologies, de leur usage et mésusage. Pour Edouard Piely, entre le besoin de machines plus efficaces et le besoin de moins de machines, la réponse s’impose : il nous en faut moins ! Pour Joël Decarsin, encore faudrait-il qu’il y ait une volonté ou une possibilité de débat autour des technologies à venir, ce qui n’est pas le cas. On ne peut arrêter le progrès si on ne peut le discuter. Le risque, souligne-t-il, désabusé, c’est que la technocritique demeure dans l’entre-soi, peine à convaincre d’autres que les convaincus… et ce alors que la technique a fondamentalement changé de statut. Pour Célia Izoard, la technologie a été rendue programmatique par la recherche de productivité, la recherche militaire et l’investissement qui ont programmé le déferlement technologique. Dans la Silicon Valley, le capitalisme excédentaire irrigue la technologie : c’est l’ensemble du capital désormais qui favorise la montée en puissance des technologies numériques et électroniques. Pour Izoard, nous sommes confrontés à une force sociale et financière tendue vers un but : « le coeur du capitalisme aujourd’hui, c’est l’avènement des nouvelles technologies ». Une autre personne du public interroge : peut-on extraire la technologie de son milieu, à l’exemple de ce qu’envisage le mouvement des low-techs ? On entend bien que pour contrecarrer l’effondrement écologique, il nous faut contrecarrer la technologie. Mais la technologie nous apporte aussi des outils essentiels à notre compréhension, notamment la mesure, la capacité à chiffrer ce qu’il se passe, questionne une autre personne du public. Vincent Devictor dans la revue Terrestres, pointait récemment les limites de la quantification des ravages écologiques, un déluge de chiffre qui, plus que remettre en cause le problème, instrumentalise le système terre, que nous pourrions, du moment qu’on le comprend, traiter et contrôler… Pour Cédric Biagini, cette accumulation de chiffre souligne surtout la marginalisation de notre rapport au monde sensible. Pour lui, cela pose une question plus globale sur l’échelle et la taille de la rationalisation technicienne. Il y a un lien entre la taille des sociétés et le niveau de déploiement et de puissance de la circulation de l’information. Il nous faut recréer des rapports de force, assure l’éditeur. « Le problème est que la gauche croit encore au mythe progressiste, c’est-à-dire à la croyance que le progrès social découle du progrès technique. » Or, ils se sont déliés. Nous ne sommes pas tous en train de lire des livres depuis de confortables hamacs parce que l’automatisation et l’informatisation l’ont emporté ! Nous avons plus que jamais besoin de relier la question sociale à la question technique ! Et revaloriser l’expérience sensible du monde ! Pour Célia Izoard, nous avons besoin de mieux formuler la question technique, d’amener ces questions dans le débat public, et ce encore plus vivement à l’heure où partout les gens sont malmenés dans leur vie et dans leur travail par les technologies. Face à la numérisation de l’éducation par exemple, nous pourrions réclamer des choses simples afin que les sommes qui y sont affectées soient réaffectées à des personnels supplémentaires. Il ne nous faut pas des années de méditation pour critiquer la technologie, s’énerve-t-elle. La critique est là et nous avons plutôt besoin d’actions concrètes, comme le font les opposants au projet d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure qui cherchent à bloquer l’arrivée des déchets. Ou comme le font les blocages des entrepôts d’Amazon et plus généralement dans le secteur de la logistique où le déferlement technique joue à plein… Il est plus que jamais nécessaire de relier les questions technologiques et les questions sociales, comme le fait par exemple la plateforme d’enquêtes militantes (voir cet entretien qui permet de comprendre les enjeux de cette méthode). « S’emparer d’un sujet est le seul moyen pour en dérouler la pelote… » On n’a jamais autant réfléchi à ce que l’on mange depuis la montée des contestations autour des OGM et de l’utilisation des pesticides dans l’agriculture… Et cette contestation fait bouger les lignes de la production et des pratiques. Dans l’agriculture, la contestation technique est plus avancée que bien d’autres fronts. Incontestablement parce que la lutte y est réelle ! C’est à l’essor et à la coordination des luttes qu’il faut oeuvrer afin de passer de la question technique à la contestation politique et sociale ! Hubert Guillaud
Alors que les remises en cause face aux nouvelles technologies peuvent être vives dans les sciences sociales, la question des moyens d’action concrets reste posée, rapporte le blog « Internet Actu ».
http://internetactu.blog.lemonde.fr/2019/06/19/de-la-technocritique-aux-technoluttes/
mlsum-fr-68
Mr Money Moustache (alias Peter Adeney), ex-ingénieur, a quitté le monde du travail à 31 ans. MrMoneyMustache.com Aux dernières nouvelles, Mr Money Moustache aurait troqué ses ­bacchantes pour une barbe de trois jours. Mais pour ses fans, l’aura de « MMM » ne tient pas à la longueur de ses poils. Pendant longtemps, le gourou américain de l’indépendance financière a préféré prospérer anonymement à l’ombre de son blog et de son avatar à la dégaine de cow-boy. Le succès faisant – MrMoneyMustache.com revendique 1,5 million de pages vues par mois –, il s’est peu à peu dévoilé. Derrière le « jeune » retraité – il a quitté le monde du travail en 2005, soit neuf ans seulement après y être entré et à la veille de son 31e anniversaire –, se cache Peter Adeney, 45 ans, un ex-ingénieur en informatique, canadien d’origine, installé dans la ville résidentielle de Longmont, à une demi-heure de Boulder, capitale du Colorado (Etats-Unis). Pendant leur courte vie active, Peter et sa femme, elle aussi ex-ingénieure en informatique, ont gagné en moyenne autour de 120 000 dollars par an chacun. Soit un peu moins de 10 000 euros par mois, un revenu très confortable, mais qui n’a rien d’exceptionnel dans le secteur de la high-tech. Dividendes et loyers Au fil des années, le couple – tous deux sont issus de familles de la classe moyenne et sans patrimoine – a économisé en réduisant son train de vie. Pas de voiture, ­remplacée par des déplacements à vélo, peu de restaurants ou de ­sorties onéreuses, beaucoup de fait-maison, de recyclage et de seconde main, quelques rares voyages… Résultat : le couple d’écureuils a épargné, chaque année travaillée, les deux tiers de ses revenus, placés dans un plan d’épargne-retraite et des actions, et ce malgré un crédit immobilier pour sa résidence principale et une assurance médicale. Au bout de neuf ans, en 2005, ils décident de partir à la retraite avec 600 000 dollars d’investissements de côté, et leur maison de 200 000 dollars mise en location, après l’achat d’un autre domicile plus petit et moins cher. Dividendes et loyers leur permettent de mener depuis une vie modeste. La famille, qui s’est agrandie d’un enfant, ne dépense que 24 000 dollars par an (22 000 euros environ). 400 000 dollars par an de revenus publicitaires Cette success story faite de discipline, de renoncement matériel et d’un goût très prononcé pour les chiffres, est devenue une source de revenus supplémentaire pour un Mr Money Moustache paradoxalement de plus en plus riche. Lancé en 2011, son blog génère au dire de l’intéressé près de 400 000 dollars par an en revenus publicitaires de ses partenaires, banques et autres services ­financiers. S’il en reverse un quart à des œuvres caritatives, le frugaliste réinvestit le reste pour développer des activités annexes, centre de formation, école, conférences pour dispenser sa bonne parole, mais aussi un atelier de céramique, une des passions du couple à la fibre plus entrepreneuriale que rentière.
Cet ex-ingénieur informatique qui vit dans le Colorado est l’apôtre de la méthode Fire. Son blog a donné des idées à tous ceux qui aspirent à la vie de néo-rentier.
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2019/10/18/mr-money-moustache-le-gourou-de-la-retraite-precoce_6016084_4497916.html
mlsum-fr-69
Des manifestants en faveur de la démocratie à Hongkong et des partisans de Pékin, à Paris, le 17 août. GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP Quelques dizaines de personnes s’étaient réunies, samedi 17 août, place Saint-Michel à Paris, en soutien au mouvement de protestation à Hongkong contre la mainmise croissante du pouvoir central chinois. « Nous sommes tous Hongkong ! », ont-ils lancé. Rapidement, ce groupe s’est retrouvé face à un autre, qui s’était mobilisé via par l’application de messagerie WeChat mais n’avait pas déposé de demande de manifestation à la préfecture : des jeunes Chinois brandissant le drapeau de la République populaire et lançant « Vive la Chine, vive Hongkong ! », avant d’entonner la Marche des volontaires, l’hymne national chinois. Les échanges ont été tendus. Les mêmes scènes se sont produites simultanément à travers le monde, en particulier dans les villes où la diaspora chinoise est fortement présente. A Londres, les soutiens du mouvement en faveur de la démocratie dans l’ancienne colonie britannique se sont retrouvés sur Trafalgar Square, avant de rejoindre Parliament Square où ils sont tombés sur des nationalistes chinois criant « Une seule Chine ! », ce à quoi les critiques de Pékin ont répondu « Deux systèmes ! », référence à la formule « Un pays, deux systèmes », censée garantir, depuis la rétrocession de 1997 et pour un demi-siècle, un haut degré d’autonomie du « Port des parfums » vis-à-vis de Pékin. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Hongkong continue de défier Pékin avec une nouvelle manifestation géante Des face-à-face similaires se sont déroulés à New York, Vancouver ou encore dans le parc Belmore à Sydney, où un partisan de la démocratie a dû être éloigné par les policiers après avoir été encerclé et insulté par des jeunes de Chine continentale. A la fin de la manifestation, un homme ayant sorti un drapeau taïwanais a été attrapé par le cou et mis au sol, selon le Sydney Morning Herald. Quelques jours plus tôt, ce même journal avait révélé comment la mère d’un étudiant chinois à Brisbane, qui vit en Chine continentale, avait été mise en garde après qu’il avait participé à une manifestation à l’université du Queensland en soutien au mouvement prodémocratique à Hongkong. Elle avait reçu la visite d’un « invité », ce qui suggère que Pékin s’intéresse de près à ceux qui participent aux mobilisations à l’étranger. Elle avait assuré les autorités de la loyauté indéfectible de son fils au Parti communiste chinois, et lui avait aussitôt intimé l’ordre de se tenir à l’écart des rassemblements et de la « rhétorique anti-chinoise », pour sa sécurité et celle de sa famille en Chine. Au sein de la communauté chinoise en France, le sujet est particulièrement sensible, alors que Pékin dispose, par le biais d’associations patriotiques, de puissants relais d’influence. « Les associations se sont mises à s’exprimer en faveur de la police de Hongkong ces derniers jours, à dire que les manifestants sont de dangereux indépendantistes, qu’ils sont manipulés par la CIA », dit un jeune Français d’origine chinoise impliqué dans la vie de la communauté, qui déplore que « dès lors qu’une personne de la communauté émet une opinion favorable à la mobilisation à Hongkong, la pression est énorme, on l’accuse d’être un traître, de briser l’union sacrée des Chinois ».
Des échanges tendus ont été rapportés dans de nombreuses villes dont Paris, New York, Londres, Vancouver et Syndey.
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/08/19/hongkong-manifestants-prodemocratie-et-pro-chine-face-a-face-a-l-etranger_5500643_3210.html
mlsum-fr-70
La violence de l’explosion a été telle que la voiture a été scindée en deux. ESAM OMRAN AL-FETORI / REUTERS La mission des Nations unies (ONU) en Libye est en « état de choc », selon une source interne à l’organisation, après l’attentat qui a coûté la vie samedi 10 août à trois de ses membres à Benghazi, une première depuis la révolution de 2011. Une voiture piégée a explosé à proximité d’un convoi de véhicules de l’ONU garé devant un centre commercial de la région orientale de la Cyrénaïque, très fréquenté à la veille de la fête musulmane de l’Aïd el-Adha. Cinq personnes ont été tuées, dont trois officiers de sécurité des Nations unies – un Libyen, un Fidjien et un Jamaïcain – tandis que deux autres membres de la mission onusienne ont été blessés (un Soudanais chargé des droits de l’homme et un chauffeur libyen). La violence de l’explosion a été telle que la voiture a été scindée en deux. « L’onde de choc de l’émotion va bien au-delà de la Libye, car ces personnels de sécurité étaient connus dans d’autres pays où ils avaient servi, notamment l’Irak et la Syrie », ajoute la source. Cet attentat de Benghazi, aussitôt condamné par le Conseil de sécurité des Nations unies réuni à New York, survient dans un contexte d’aggravation du conflit ouvert au début d’avril par l’offensive sur Tripoli de l’Armée nationale libyenne (ANL) du maréchal Khalifa Haftar. La « bataille de Tripoli », qui a connu des prolongements ces dernières semaines à Juffrah (sud-est) et à Mourzouk (sud-ouest), a causé la mort de plus de 1 100 personnes, dont 106 civils, et le déplacement d’environ 100 000 résidents. Les deux camps rivaux, le gouvernement d’accord national (GAN) de Sarraj siégeant à Tripoli et les forces assaillantes de l’ANL d’Haftar, avaient conclu une trêve à la veille de l’Aïd, mais aucune perspective de règlement politique n’est en vue. Lire aussi Comment le maréchal Haftar a pris le contrôle de l’économie de la Cyrénaïque en Libye « Climat de haine » L’attentat de samedi contre le convoi des Nations unies n’a pas été revendiqué et ses mobiles demeurent à ce stade mystérieux. « Nous ne savons pas si nous étions directement visés ou si une attaque déjà prévue devant le centre commercial a plutôt été accélérée de manière opportuniste lorsque notre convoi s’est garé », précise la source onusienne. Quoi qu’il en soit, l’attentat survient dans un « climat de haine », selon cette source, visant l’action en Libye de l’ONU de la part des belligérants. Le dernier discours, le 29 juillet, devant le Conseil de sécurité de l’ONU de Ghassan Salamé, le chef de la mission libyenne, lui a valu des diatribes des franges les plus radicales des deux parties. M. Salamé y dénonçait le fait que « les appels à la désescalade » avaient été « ignorés » par « les deux parties », qui avaient plutôt « intensifié leurs campagnes aériennes ». « La Libye est devenue un terrain d’expérimentation de nouvelles technologies militaires et de recyclage d’anciennes armes », avait-il précisé en regrettant que les deux camps rivaux, acceptant les livraisons d’armes d’Etats étrangers en violation de l’embargo décrété par l’ONU, « menaient la guerre d’autres [pays] ». En Tripolitaine, le discours avait été fraîchement reçu par le camp de Sarraj, qui lui a reproché de placer les deux belligérants sur un pied d’égalité et de « ne pas nommer l’agresseur », Haftar.
Trois membres de la mission des Nations unies en Libye ont été tués samedi lors d’un attentat à la voiture piégée, la première attaque meurtrière visant l’organisation depuis la révolution de 2011.
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/08/13/en-libye-les-nations-unies-en-etat-de-choc-a-la-suite-d-un-attentat-a-benghazi_5499152_3210.html
mlsum-fr-71
L’Iran a prévenu, dimanche 21 juillet, que le sort du pétrolier battant pavillon britannique qu’il a arraisonné dépendrait de la bonne collaboration de l’équipage à l’enquête. Après avoir été « confisqué » dans le détroit d’Ormuz pour « non-respect du code maritime international », le Stena Impero, tanker de 183 mètres de long, est désormais ancré au port de Bandar Abbas, dans le sud du pays, ont annoncé les autorités portuaires. L’Iran avait annoncé, la veille, l’ouverture d’une enquête. Elle « dépend de la coopération des membres d’équipage du vaisseau et aussi de notre accès aux preuves nécessaires pour examiner l’affaire », a déclaré Allah-Morad Afifipour, directeur général de l’Autorité portuaire et maritime locale. Les gardiens de la révolution ont déclaré, samedi, avoir arraisonné le tanker après une collision avec un bateau de pêche. Le directeur général de l’organisation portuaire et maritime de la province de Hormozgan a affirmé que « conformément à la loi, après un accident il est nécessaire d’enquêter sur les causes ». Les vingt-trois membres d’équipage du Stena Impero sont tous à bord et « en bonne santé », selon Stena Bulk, le propriétaire suédois du pétrolier. Dix-huit d’entre eux, dont le capitaine, sont de nationalité indienne et les cinq autres sont de nationalité philippine, lettone ou russe. Une version récusée par Londres Au travers de la voix de l’ambassadeur adjoint du Royaume-Uni aux Nations unies (ONU), Jonathan Allen, Londres a récusé dimanche la version de l’incident de Téhéran, dans un courrier. L’Iran « prétend » que le pétrolier « est entré dans le détroit d’Ormuz par la sortie et qu’il ne répondait pas aux messages d’avertissement », écrit l’ambassadeur adjoint. « Il n’y a aucune preuve en ce sens et même si c’est arrivé, la localisation du Stena Impera dans les eaux territoriales d’Oman signifie que l’Iran n’avait pas le droit de l’intercepter. » Outre la lettre, la première ministre britannique Theresa May présidera lundi matin une réunion interministérielle de crise consacrée à cette affaire, a annoncé Downing Street dimanche soir. Quant au chef de la diplomatie britannique Jeremy Hunt, il s’est entretenu dimanche avec ses homologues français et allemand, avec qui il a convenu que « la sécurité du passage des navires dans le détroit d’Ormuz est une priorité absolue pour les pays européens, tout en évitant toute escalade possible dans la région », selon ses services. Il avait déjà annoncé plus tôt que l’exécutif informerait lundi le Parlement des « mesures supplémentaires » que le Royaume-Uni compte prendre. « Nous allons examiner une série d’options », a déclaré dimanche le secrétaire d’Etat à la défense britannique Tobias Ellwood, sans plus de précisions. « C’est œil pour œil, dent pour dent » Cette saisie est survenue quelques heures après la décision de la Cour suprême de Gibraltar de prolonger de 30 jours la détention d’un pétrolier iranien arraisonné le 4 juillet par les autorités de ce territoire britannique, et soupçonné de vouloir livrer du brut à la Syrie en violation des sanctions européennes contre Damas. L’Iran a nié cette accusation et dit qu’il riposterait à cet acte de « piraterie ». Pour le chef de la diplomatie britannique, Jeremy Hunt, la saisie du Stena Impero est ainsi une mesure de représailles à celle du Grace 1. « C’est œil pour œil, dent pour dent », a-t-il déclaré, assurant que les situations des deux pétroliers n’avaient rien à voir. « Le Grace 1 a été (saisi) légalement dans les eaux de Gibraltar (…) en violation des sanctions de l’UE. (…) Le Stena Impero a été saisi dans les eaux omanaises en violation flagrante du droit international ». « Contrairement à la piraterie dans le détroit de Gibraltar, notre action dans le Golfe persique est de faire respecter les lois maritimes internationales », a affirmé pour sa part sur Twitter le chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif, pour défendre l’arraisonnement du tanker battant pavillon britannique. « La Grande-Bretagne doit cesser d’être un auxiliaire du terrorisme économique des Etats-Unis », a ajouté M. Zarif, en allusion aux sanctions économiques rétablies par Washington après son retrait unilatéral de l’accord nucléaire en 2018. Unlike the piracy in the Strait of Gibraltar, our action in the Persian Gulf is to uphold int'l maritime rules. As… https://t.co/YsZDqc3O1D — JZarif (@Javad Zarif) Les Gardiens de la Révolution ont diffusé une vidéo censée montrer l’arraisonnement du Stena Impero : sur ces images, le navire est cerné par plusieurs vedettes, tandis que des hommes en tenue militaire, encagoulés, descendent en rappel sur le pétrolier. Londres recommande à ses navires d’éviter la zone Le Royaume-Uni a officiellement recommandé, samedi, aux navires britanniques de rester « en dehors de la zone » du détroit d’Ormuz pour une « période provisoire ». Le chargé d’affaires iranien à Londres a par ailleurs été, samedi, convoqué au ministère des affaires étrangères. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La difficile médiation de Paris sur le nucléaire iranien Plusieurs pays et institutions, qui partagent le contrôle du détroit d’Ormuz avec l’Iran, ont sommé Téhéran de relâcher le Stena Impero. En France, le ministère des affaires étrangères a ainsi fait part de sa « grande préoccupation » face à cette situation : « Nous appelons les autorités iraniennes à libérer dans les meilleurs délais le bâtiment et son équipage, et à respecter les principes de liberté de navigation dans le Golf. » Un appel également émis par l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) qui « soutient tous les efforts diplomatiques pour résoudre cette situation ». « Nous exigeons de l’Iran la libération sans délai » du navire britannique et de son équipage, a pareillement déclaré le ministère allemand des affaires étrangères dans un communiqué, jugeant l’intervention iranienne « injustifiable ». « Une nouvelle escalade serait très dangereuse pour la région », a averti le cabinet d’Heiko Maas. « Elle saperait tous les efforts en cours pour trouver une solution à la crise actuelle » entre les Etats-Unis et l’Iran. Lire aussi : le détroit d’Ormuz, au centre du monde Des soldats américains en Arabie saoudite Les Etats-Unis ont dénoncé la « surenchère de violence » de l’Iran. Donald Trump a assuré que les Etats-Unis avaient été « informés » des événements dans le Golfe et qu’ils « échangeront » et « travailleront avec le Royaume-Uni » à ce sujet. L’incident intervient, autre signe des tensions, après vingt-quatre heures de polémiques avec Washington à propos d’un drone iranien que les Américains disent avoir abattu – affirmation rapidement démentie par l’Iran, qui assure n’avoir perdu aucun drone. Peu après, l’Arabie saoudite a annoncé que des forces armées américaines allaient prendre position sur son sol « afin d’accroître le niveau mutuel de coopération pour défendre la sécurité de la région et sa stabilité, et garantir la paix », a précisé un porte-parole du ministère saoudien de la défense, cité par l’agence d’Etat SPA. Riyad n’avait plus hébergé de soldats américains depuis 2003 et le retrait de ces derniers à la fin de la guerre contre l’Irak A Caracas, Javad Zarif dénonce l’« unilatéralisme » et le « terrorisme économique » des Etats-Unis Le président vénézuélien, Nicolas Maduro, et le ministre iranien Javad Zarif, au palais de Miraflores à Caracas, le samedi 20 juillet. HANDOUT / REUTERS Lors d’une réunion ministérielle du Mouvement des non-alignés à Caracas (Venezuela), le chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif, a dénoncé samedi 20 juillet l’« aventurisme unilatéral extrême » de l’administration de Donald Trump qui « sape l’Etat de droit au plan international ». « Mon pays (…) est à l’avant-poste de la résistance aux nouvelles tendances unilatérales des Etats-Unis », a-t-il ajouté dans son discours, lors de cette réunion ministérielle. « Le gouvernement américain, pour atteindre ses objectifs illégitimes, a recours à une forme de pression que nous appelons terrorisme économique », a ajouté M. Zarif à la presse, selon la traduction simultanée officielle, en marge de la réunion. Selon lui, Cuba, la Syrie, le Venezuela et l’Iran « souffrent » de ce « terrorisme économique » mis notamment en place au moyen de sanctions. Washington a ainsi rétabli ses sanctions à l’encontre de Téhéran après son retrait unilatéral de l’accord nucléaire en 2018. Au cours de ces deux interventions, M. Zarif n’a pas évoqué le pétrolier battant pavillon britannique arraisonné par l’Iran dans le détroit d’Ormuz.
L’Iran a déclaré avoir arraisonné le tanker « Stena Impero » après un accrochage avec un bateau de pêche. Londres récuse cette version de l’incident.
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/07/19/iran-les-gardiens-de-la-revolution-disent-avoir-confisque-un-tanker-britannique_5491366_3210.html
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Une volontaire devant l’hôpital de Sonipat dans l’Haryana tente de détecter des malades de la tuberculose dans la file des admissions, en septembre. The Global Fund / Atul Loke / Panos L’homme est maigre comme une brindille, mais il assure qu’il « va mieux ». Au début de l’année, il souffrait de fièvre continuelle, d’une immense fatigue et d’une toux persistante. Ce chef de famille installé à Bega, un village rural de l’Haryana, à une soixantaine de kilomètres de New Delhi, a ignoré durant des mois les raisons de son état d’épuisement. Jusqu’à la rencontre avec Maher Singh, un « volontaire » chargé par une ONG d’arpenter les villages pour tenter d’enrayer la tuberculose. Maher Singh, qui marche avec difficulté pour avoir contracté la poliomyélite lorsqu’il était enfant, pousse chaque porte du village pour traquer la maladie. Muni d’un questionnaire, il interroge les familles, enregistre nom, adresse et téléphone. A la moindre toux, il effectue des prélèvements. Les échantillons d’expectoration seront acheminés au centre spécialisé le plus proche, où les malades n’ont ni la force ni les moyens de se rendre. La visite terminée, Maher Singh laisse quelques prospectus d’information sur la maladie puis marque à la craie sur la porte de la maison la date de son passage. Il reviendra bientôt. Plus de 200 ONG, une communauté de 2 000 volontaires, sont impliquées dans ce défi L’ancien professeur est un pilier du programme Axshya (« sans tuberculose ») financé par l’Union internationale contre la tuberculose et le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, qui s’appuie sur la société civile indienne pour tenter d’améliorer l’accès au diagnostic et au traitement. Le projet cible en priorité les personnes vulnérables. Plus de 200 ONG, une communauté de 2 000 volontaires, sont impliquées dans ce défi. Entre 2018 et 2019, 3 millions de foyers indiens ont ainsi pu être visités chaque mois grâce à ces volunteers, et des milliers de malades ont pu être identifiés. L’enjeu est considérable : « Sans doute que 1 million de tuberculeux ne sont pas détectés en Inde et risquent de propager la maladie », explique un des responsables du programme. Maher Singh (au centre), un « volontaire » chargé par une ONG d’arpenter les villages pour tenter d’enrayer la tuberculose, notamment dans l’Etat de l’Haryana. The Global Fund / Atul Loke / Panos Le sous-continent, qui recense un quart des cas de tuberculose de la planète, est le pays le plus touché par le fléau, devant l’Indonésie, la Chine, les Philippines, le Nigeria, le Pakistan et l’Afrique du Sud. Les chiffres sont effrayants : chaque année, 2,7 millions de nouveaux cas sont répertoriés dans le pays et plus de 420 000 personnes ont succombé à la maladie en 2019. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), un quart de la population mondiale est porteuse d’une tuberculose latente, infectée par le bacille mais pas encore malade. Le risque de développer la maladie est particulièrement élevé chez les personnes dont le système immunitaire est déficient, comme les personnes vivant avec le VIH, les personnes en état de malnutrition ou souffrant de diabète. La tuberculose reste avant tout la maladie de l’homme pauvre.
Le sous-continent compte un quart des cas de tuberculose répertoriés dans le monde et doit faire face au problème majeur de résistance aux antibiotiques traditionnels.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/10/14/en-inde-une-communaute-de-volontaires-pour-traquer-la-tuberculose_6015383_1650684.html
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M LE MAGAZINE DU MONDE Êtes-vous pour ou contre la publication posthume de romans ou autres nouvelles ? Arguments et contre-arguments juridiques, littéraires et fétichistes. POUR L’argument juridique Comme le rappelle Emmanuel Pierrat, avocat spécialisé dans le droit de la culture et de l’information, dans sa chronique pour Livres Hebdo : « Le droit de divulgation constitue l’un des attributs moraux de tout auteur ». Or ce droit passe ensuite entre les mains de ses héritiers ou de ses exécuteurs testamentaires. L’argument littéraire Un auteur est-il le meilleur juge de son œuvre ? Mort en 1924, Franz Kafka charge son ami Max Brod de « brûler » tous ses manuscrits. Ce dernier ne s’y résout pas. C’est ainsi que grâce à lui seront publiés Le Château, Le Procès… Les héritiers de Michel Foucault passeront aussi outre son oukase – « Pas de publication posthume » – en faisant paraître Les Aveux de la chair. Article réservé à nos abonnés Lire aussi A la rencontre des fous de Proust L’argument fétichiste Critique du XIXe siècle, Sainte-Beuve soutenait que la connaissance de l’auteur était indispensable à la compréhension de ses livres. En ce sens, la publication, en octobre, de nouvelles que Proust ne voulait pas diffuser par crainte de laisser deviner son homosexualité nous renseigne plus sur sa personnalité qu’elle n’ajoute à la notoriété de son œuvre. CONTRE Le contre-argument juridique En passant entre les mains des exécuteurs testamentaires le « droit de divulgation » peut être perverti par d’autres intérêts. Notamment pécuniaires. Seuls les grands auteurs ont droit à ces résurrections littéraires. Donc les gros vendeurs. Ainsi, les arrière-pensées financières des héritiers (et des éditeurs) priment-elles parfois sur la nécessité littéraire de telle ou telle impression posthume. Le contre-argument littéraire Une publication posthume réjouit les fans mais ne rend pas toujours service à l’écrivain. « Le nouveau Sagan », qui a dormi plusieurs années dans un tiroir où l’auteure de Bonjour tristesse l’avait abandonné, est-il vraiment du Sagan ? Selon le témoignage du fils de la romancière, le manuscrit, difficilement publiable en l’état, a bénéficié d’un important travail de réécriture. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Denis Westhoff: « C’est tout à fait la voix de Sagan que l’on entend » Le contre-argument fétichiste Seule l’œuvre publiée, validée par l’auteur devrait avoir droit de citer. Un tel corpus se suffit à lui-même révélant la cohérence d’un projet, la trajectoire d’une idée. Défendue par la critique structuraliste des années 1960 et 1970 (Barthes, Genette, etc.), cette thèse rejette au rayon des accessoires sans intérêt les publications de rogatons et de notes de blanchisserie.
Les publications posthumes d’un roman inachevé de Françoise Sagan et de nouvelles inédites de Marcel Proust réjouissent autant qu’elles divisent les lecteurs. Ces quelques arguments devraient vous permettre de choisir votre camp. Ou d’en changer.
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2019/09/27/faut-il-publier-les-fonds-de-tiroir-des-ecrivains_6013331_4500055.html
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Tribune. La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel adoptée durant l’été 2018 réforme l’organisation de l’apprentissage et de la formation professionnelle. C’est une loi portée par le ministère du travail mais qui a des effets au sein de l’éducation nationale, notamment en ce qui concerne l’orientation scolaire. L’Etat conserve en effet la définition de la politique nationale de l’orientation scolaire, mais les régions sont chargées de l’organisation des actions d’information sur les métiers et les formations. Si un décret datant du 7 août 2019 acte cette nouvelle répartition en transférant les délégations régionales de l’Onisep aux régions, reste des interrogations sur l’évolution des rôles des acteurs internes à l’éducation nationale. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « L’Etat français considère-t-il encore l’orientation scolaire comme relevant de sa responsabilité ? » Le professeur principal : premier acteur de l’orientation Historiquement, la France avait fait le choix, curieusement, de donner à deux acteurs différents l’expertise en matière d’orientation au sein de l’éducation nationale : le professeur principal et le conseiller d’orientation. Deux expertises qui vont se trouver sans doute remises en cause par l’intervention de la région dans le champ de l’orientation. Depuis la fin des épreuves trimestrielles en 1969 qui déterminaient, depuis 1880, le passage des élèves dans le supérieur, la décision d’orientation ne dépend plus que du jugement des enseignants réunis en conseil de classe. La réforme Berthoin en 1959 a créé la fonction de professeur principal, très mal acceptée dans les premières années par les enseignants sous prétexte qu’elle portait atteinte à l’égalité entre eux. Cette fonction va pourtant prendre une importance capitale dans le fonctionnement des établissements, les procédures d’orientation et d’affectation se complexifiant et rendant toujours plus nécessaire leur rôle d’accompagnateur des élèves et des familles, en plus de leur mission de coordination et d’animation de l’équipe pédagogique. Des experts en orientation, non décideurs Mais, en plus du professeur principal, la France a fait le choix de développer au sein même de l’éducation nationale des personnels spécifiquement chargés de l’orientation : les « conseillers d’orientation » – aujourd’hui devenus psychologues de l’éducation nationale, PsyEN –, des experts en orientation mais non décideurs du parcours des élèves, rattachés à un centre d’information et d’orientation (CIO), un organisme extérieur aux établissements depuis 1970. Alors qu’ils étaient initialement uniquement chargés de l’orientation professionnelle apparue au début du XXe siècle, ils sont intégrés à l’éducation nationale en 1959 pour devenir fonctionnaires et conseillers d’orientation scolaire et professionnelle.
La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel adoptée en 2018 fait des conseillers d’orientation des acteurs « parmi d’autres » de l’orientation des élèves, explique Bernard Desclaux, ancien directeur de centre d’information et d’orientation, dans une tribune au « Monde ».
https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/09/24/quel-avenir-pour-les-conseillers-d-orientation_6012783_3224.html
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David Gourion, en 2016. BRUNO LEVY « Tout le monde est un peu fou. Moi le premier !, lance le psychiatre. Mais t’en fais pas, c’est pas contagieux ! », ajoute-t-il, bon prince. Face à lui, un adolescent qui vient le consulter pour la première fois. Plutôt nerveux, cet ado. Et pas franchement ravi d’être là : « C’est ma mère qui s’inquiète pour moi », grince-t-il. La partie n’est pas gagnée. Sauf que… Le psychiatre, c’est David Gourion, alias « Docteur Feel Good ». Le voici croqué par le dessinateur Muzo dans l’ouvrage du même nom qu’ils cosignent, une BD consacrée aux ados (Odile Jacob, 136 p., 15,90 €). « L’adolescence est une période de transition très particulière. La mienne n’a pas été simple », confie le psychiatre. Ces années charnière sont « celles des apprentissages de l’intégration sociale, sur lesquels on n’est pas tellement guidé dans la société contemporaine. Les rites d’intégration ont à peu près disparu. Les ados sont très souvent livrés à eux-mêmes. » Qui est celui qui fait face au « Docteur Feel Good », dans la BD ? « J’ai dessiné un profil aux traits flous, explique Muzo, pour que tous les ados puissent s’identifier à lui. » D’une plume et d’un crayon inspirés, le livre met en scène leurs échanges, « comme une conversation où l’on passerait d’un sujet à l’autre », observe Muzo. A cet âge tiraillé par des vents contraires, déchiré par le doute, il parle avec tact et humour de problèmes graves : addictions diverses, dépression, harcèlement, identité sexuelle, anorexie… C’est drôle, et ça fait mouche. Le « Docteur Feel Good » livre aussi aux ados quelques « trucs et astuces » concrets. Comment réguler ses émotions et gérer son stress ? Désamorcer les conflits avec ses parents ? Bien choisir ses amis ? Oser dire non et s’affirmer ? Comment trouver sa voie dans le dédale des métiers possibles ? En découdre avec des questions existentielles ? « J’ai aussi montré des ados qui sont harceleurs, sans même en avoir conscience. J’ai voulu les responsabiliser, sans les stigmatiser. » Rare autodérision « David est très habile à porter sur la place publique les enjeux de santé mentale », souligne le professeur Raphaël Gaillard, qui dirige le pôle universitaire de l’hôpital Sainte-Anne, à Paris. Quitte à casser les codes. Avec son complice Muzo, il a déjà « commis » un autre livre illustré, Cinquante puissantes raisons de ne pas aller chez le psy (JCLattès, 2016). De l’art de manier l’antiphrase, en remède aux idées reçues. Bref aperçu : « La plupart des psys ont une écoute flottante. Dans leur jargon, cela veut dire un état de conscience altéré proche de celui d’un début de sieste. Dès qu’ils se sentent à l’aise avec un patient qu’ils ont apprivoisé et jugent inoffensif, ils s’endorment en toute discrétion. » Une autodérision plutôt rare, dans le monde de la psychiatrie.
Le psychiatre, qui exerce en libéral à Paris, n’hésite pas à manier l’humour et l’autodérision pour alerter sur les grands enjeux de santé mentale. Avec une tendresse particulière pour les adolescents et les jeunes adultes.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/09/28/david-gourion-alias-docteur-feel-good_6013469_1650684.html
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Allocution télévisée du président de la République Jacques Chirac, le 11 mars 2007. Philippe Wojazer / AP « Live », éditions spéciales, bouleversement des grilles… Voici une sélection de programmes télévisés et audio consacrés à l’ancien président de la République, mort jeudi 26 septembre, à Paris, à l’âge de 86 ans. Les hommages Emmanuel Macron prononcera une allocution en l’hommage de l’ancien président à 20 heures, qui sera diffusée par France Télévisions (France 2, France 3, Franceinfo) et France Inter. De son côté, La Chaîne parlementaire propose, à 20 h 30, la rediffusion du documentaire Mon Chirac, portrait très hagiographique du président par son ami Jean-Louis Debré. La chaîne Paris Première lui consacre par ailleurs deux soirées : jeudi à 20 h 50 sera diffusé Chirac, documentaire de François-Xavier Dupouy, Jean-Marie Goix et Claire Oudinot ; les débatteurs de « Zemmour et Naulleau » évoqueront, quant à eux, l’ancien président vendredi soir. L’héritage en question « Quelle place pour Jacques Chirac dans l’histoire ? » C’est la question que posera Emmanuel Laurentin, jeudi, à 18 h 20, dans « Le Temps du débat », sur France Culture. Les matins de Guillaume Erner accueilleront par ailleurs, vendredi, l’historien et spécialiste d’histoire politique Jean Garrigues. Le numéro de « Politique ! », produit par Hervé Gardette, sera samedi consacré aux « chiraquiens ». Sur France Inter, Augustin Trapenard recevra, vendredi à 9 heures, Bettina Rheims, qui a photographié Jacques Chirac dans la dernière ligne droite de l’élection présidentielle de 1995 et réalisé son portrait officiel. Sur France 2, qui a basculé en édition spéciale depuis l’annonce du décès, Jeune Loup puis Vieux Lion, documentaire en deux parties de Patrick Rotman, sera rediffusé jeudi à 21 h 10. Le lendemain, France 3 propose, à 20 h 55, Chirac, la bio, le documentaire de Franz-Olivier Giesbert et Laurent Portes. Samedi, à partir de 20 h 55, France Ô diffusera le documentaire Chirac, l’ultramarin, de Lysiane Le Mercier et Thomas Gernigon. Tous ces programmes seront disponibles en replay pendant sept jours sur France.tv. De son côté, Canal+ diffuse à 19 h30 un documentaire inédit de Mouloud Achour, « Jacques Chirac, sacré Français ». Le lendemain, dans son magazine « Clique », une « rétrospective des meilleurs moments de la marionnette des “Guignols” de Jacques Chirac » sera proposée. Public Sénat consacre une journée spéciale à Jacques Chirac ce vendredi 27 septembre et diffusera des documentaires tout au long de la journée, dont à 17 h 20 « Balladur-Chirac, mensonges et trahisons », du journaliste Jean-Charles Deniau, puis, à 22 heures, « Jacques Chirac, autoportrait » du psychanalyste Ali Magoudi et du réalisateur Pierre Jouve, qui ont tenté de cerner la personnalité de celui qui n’est alors « que » maire de Paris. Affaires et « trahisons » Plusieurs épisodes d’« Affaires sensibles », sur France Inter, ont été consacrés à Jacques Chirac : « Chirac-Assad » revient sur une décennie de diplomatie avec la Syrie, de 1996 à 2006, pendant laquelle le président français avait placé ce pays au centre de sa politique au Proche-Orient. L’épisode « Chirac-Balladur : la bataille de l’Elysée » revient sur la première élection présidentielle qu’il remporte en 1995. Enfin, un numéro de la série « Trahisons politiques » est consacré à sa relation avec Nicolas Sarkozy. Dans « L’Œil de la République », sur RTL, le journaliste politique Alain Duhamel revenait sur un épisode plus ancien : la démission fracassante de Jacques Chirac en 1976 et son duel avec le président d’alors, Valéry Giscard d’Estaing.
L’ancien président de la République est mort jeudi, à 86 ans. Plusieurs chaînes et stations ont modifié leur programmation pour lui rendre hommage ou retracer son parcours politique.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/09/26/jacques-chirac-raconte-par-la-television-et-la-radio_6013189_3246.html
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L’écrivaine Annie Ernaux, à Cologne, en 2013. DPA/Photononstop « Retour à Yvetot », d’Annie Ernaux, lu par Dominique Blanc, « post-scriptum inédit par l’autrice », Des femmes-Antoinettte Fouque, « La Bibliothèque des voix », 19 €. TOPOGRAPHIES INTIMES Avec Retour à Yvetot (Mauconduit, 2013), Annie Ernaux offre un extraordinaire livre-univers qui nous plonge en plein dans les années 1940 et au cœur de notre humanité. Grâce à une sorte de génial ­ « Google Maps littéraire », le lecteur est entraîné dans une exploration des plus libératrices. Il découvre la vie, le quotidien d’une enfance à Yvetot, et bien plus. Il entre dans l’épicerie-mercerie parentale, entend la 4CV paternelle, se glisse sur les bancs d’école, rencontre une mère devant son café, se laisse enseigner par cet être exceptionnel, cette féministe en qui vibre une constante et profonde empathie envers les démunis. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Annie Ernaux, portrait d’une romancière sociale La version audio rassemble avec ­bonheur le texte lu par Dominique Blanc et de savoureuses interviews ­d’Annie ­Ernaux, qui ressuscitent pour nous la musique des jeunes années, les échos d’une adolescence, les rumeurs d’une heureuse rébellion. Que retenons-nous au fond du passé ? Cette magistrale visite guidée décentre, remue et interroge ce que nous rejetons à la périphérie de nos vies. Le corps, l’appartenance, l’éducation qui, si elle ­libère, peut exclure, enfermer un être dans de redoutables déterminismes, voilà ce qui est en jeu. Quelles influences fondent une vie ? Qu’est-ce qui ­façonne une trajectoire sociale ? Honte sociale De ce temple de la mémoire et du réel – les deux s’unissent en une mystérieuse étreinte – surgit un magnifique éloge de la littérature, véritable « mode d’emploi de la vie ». Mais qu’est-ce qu’écrire ? Qui écrit ? Et comment éviter « la langue de l’ennemi », pour le dire dans les mots de Jean Genet ? Annie ­Ernaux dit sa vocation : « D’une manière générale, mon souhait est d’écrire litté­rairement dans la langue de tous. C’est un choix qu’on pourrait qualifier de politique, puisque c’est une façon de détruire des hiérarchies, d’accorder la même importance de signification aux paroles, aux gestes des gens, quelle que soit leur place dans la société. » Article réservé à nos abonnés Lire aussi Annie Ernaux, « fille de rien », grand écrivain Dans la société ? L’auteure dissèque aussi cette honte sociale. Car il faut non seulement nous coltiner nos blessures, notre condition, mais aussi, sans cesse, vivre sous le regard de l’autre. « “Ça pue l’eau de Javel !” Et : “Qui est-ce qui sent l’eau de Javel ? Je ne SUPPORTE pas l’odeur d’eau de Javel !” Je voudrais rentrer sous terre, je cache mes mains sous le ­bureau, peut-être dans les poches de ma blouse. Je suis affolée de honte, terrorisée à l’idée d’être désignée par l’une ou l’autre de mes voisines. » La moquerie d’une ­camarade de classe fait écrire à l’auteure : « En cet instant, la fille de quatrième que je suis saisit tout très bien, que l’odeur de “la Javel” ainsi dit-on chez moi, et non “eau de Javel” – qui était jusqu’ici le signe même de la propreté, celle des blouses de ma mère, des draps, du carrelage frotté et du seau de nuit, une odeur ne dérangeant personne, bien au contraire − est une odeur sociale, l’odeur de la femme de ménage de Jeanne D., le ­signe d’appartenance à un milieu “très simple” – comme disent les profs, c’est-à-dire, inférieur. A ce moment, je hais Jeanne D. Je me hais encore plus. »
Le philosophe conclut sa saison de chroniqueur pour « Le Monde des livres » avec une magnifique leçon d’humanité d’Annie Ernaux.
https://www.lemonde.fr/livres/article/2019/07/12/retour-a-yvetot-d-annie-ernaux-la-chronique-livre-audio-d-alexandre-jollien_5488461_3260.html
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Miles Davis lors d’un concert donné le 1er juin 1987 à Tel Aviv, Israël. AP Le 20 août 2002 devait paraître un coffret consacré aux dernières années de la production phonographique du trompettiste Miles Davis (1926-1991) pour Warner Music. Avec quelques inédits. Fin juillet, sa sortie est annulée. Quelques exemplaires de présentation ont déjà été envoyés à la presse et à des détaillants. Parmi les inédits, trois compositions tirées de séances enregistrées par Miles Davis entre septembre 1985 et janvier 1986, Maze, See I See et Rubber Band. Après trente ans en contrat avec Columbia, Miles Davis venait de signer chez Warner Music. Tommy LiPuma (1936-2017), producteur qui a fait venir Davis chez Warner, n’est pas convaincu du résultat des séances, de cette ambiance funky-pop déjà explorée dans le disque You’re Under Arrest, chez Columbia, sorti en avril 1985. Les bandes sont mises de côté. Et Miles Davis concocte avec le bassiste Marcus Miller l’album Tutu. LiPuma apprécie. Enorme succès en 1986. Lire la critique (2018) : Miles Davis et John Coltrane, le printemps d’une révolution Les trois compositions se sont retrouvées, elles, dès 2003, sur des publications pirates. Avant d’avoir une existence officielle dans une anthologie publiée en 2011, Miles Davis 1986-1991 The Warner Years. Et voici qu’arrive l’album Rubberband – cette fois en un seul mot. Annoncé à l’été 2019, il permettrait enfin de découvrir ce qui avait été joué lors de ces séances. A la production, Randy Hall, chanteur et guitariste, Attala Zane Giles, bassiste et guitariste, et Vince Wilburn Jr., batteur et neveu de Miles Davis. Tous trois ayant participé aux séances, avec une poignée d’autres musiciens. Le trio a mis de l’ordre dans ces documents, les a arrangés par ajouts instrumentaux et programmations, et a transformé quatre thèmes en chansons. On sent, de la part des producteurs, une envie de R’n’B sans les moyens des millionnaires du genre Le tout, comme martelé dans divers entretiens (dossier spécial de Jazz Magazine dans son numéro de septembre, Record Collector d’octobre, Billboard…) pour que cela ne sonne pas « daté ». Donc, on en est là. Pour nos trois compères, la musique de Miles Davis a besoin d’être mise au goût – lequel ? – du jour. On sent une envie de R’n’B sans les moyens des millionnaires du genre. Lire le récit (2018) : Dernière rencontre avec Miles Davis La comparaison entre les thèmes déjà connus n’est pas en faveur des versions 2019. Maze, séance de septembre 1985 avec le groupe de scène de Miles Davis alors, passe de ses 9 minutes initiales à un peu plus de 4 minutes. Sa longue introduction avec solo du saxophoniste Bob Berg a disparu. See I See est aussi raccourci, sans nappes de claviers au début, sans son final avec la trompette seule de Miles Davis. A l’inverse Rubberband gagne une inutile répétition de sa coda. Le volume général a été gonflé, des ajouts rythmiques n’apportent rien. Ce qui laisse supposer qu’un même traitement a été donné aux autres thèmes du disque, avec montage, suppression de parties ou répétitions d’autres.
Des séances d’enregistrement de fin 1985 et début 1986 ont servi de matériau à un « nouvel » album du trompettiste mort en 1991.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/09/19/jazz-miles-davis-coupe-au-montage_5512207_3246.html
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Isabelle Huppert au Festival de Toronto, le 9 septembre. VALERIE MACON / AFP Des globe-trotteurs en perpétuelle transhumance. Chaque année, ils se retrouvent dans les grands festivals de cinéma du monde entier. Jusqu’au 15 septembre, tout se joue au Canada, au Toronto International Film Festival (TIFF), avant Los Angeles pour l’American Film Market en novembre, puis aux Rendez-vous d’UniFrance en janvier à Paris, au festival de Berlin en février, à Cannes en mai… A quoi s’ajoutent, en option, des festivals plus mineurs pour le marché des films comme Busan, Tokyo, Rome ou Locarno. Les vendeurs français de films occupent une part singulière et méconnue sur l’échiquier mondial du septième art. Lire aussi Les films français, chouchous des grands festivals Tout d’abord, leur nombre est élevé : l’Hexagone compte à lui seul une quarantaine de structures, des entreprises indépendantes, comme Wild Bunch, Le Pacte, EuropaCorp, Kinology, Playtime, Pyramide International, Bac Films, Celluloid Dreams ou Memento Films International… ainsi que des filiales de groupes audiovisuels ou cinématographiques, comme Gaumont, MK2 ou encore M6, TF1, France Télévisions ou Studio Canal. Si on dénombre davantage d’exportateurs de films en France que dans toute l’Europe, leurs forces resteront toujours bien inégales face à l’hégémonie des studios américains qui produisent et distribuent leurs blockbusters dans le monde entier, sans l’intermédiaire des vendeurs internationaux. Ce rôle est dévolu à leurs propres filiales intégrées dans tous les pays. Les Français commercialisent aussi des longs-métrages étrangers L’autre principale caractéristique de ce petit club des VRP français tient au fait qu’ils ne commercialisent pas uniquement des films français mais aussi beaucoup de longs-métrages étrangers. En 2018, par exemple, sur les neuf longs-métrages en présélection aux Oscars, la moitié étaient soutenus par des exportateurs hexagonaux. « On représente 90 % du cinéma d’auteur mondial », assure ainsi Juliette Schrameck, directrice générale de MK2 Films, qui commercialise aussi bien les longs-métrages des Japonais Naomi Kawase et Ryusuke Hamaguchi, du Roumain Corneliu Porumboiu, du Chinois Jia Zhangke que des Françaises Céline Sciamma, Mati Diop et Justine Triet. Les vendeurs internationaux investissent eux-mêmes d’abord un « minimum garanti » dans les films. Une fois que les recettes de ces longs-métrages à l’étranger ont remboursé leur mise initiale, ils partagent le surplus avec le ou les producteurs. « Nous avons pris l’habitude d’entrer plus tôt dans le processus de financement du film », affirme Daniela Elstner, PDG de Doc & Film International, qui prendra la direction d’UniFrance mi-octobre.
Les vendeurs hexagonaux de films arpentent les festivals du monde entier afin de décrocher des débouchés pour les œuvres qu’ils représentent.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/09/12/a-toronto-au-c-ur-du-club-des-vrp-francais-du-cinema_5509528_3234.html
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Tribune. Enfin ! Voilà le premier mot qui nous vient aujourd’hui à l’esprit. Il aura fallu plus de cinq longues années pour que Vladimir Poutine libère enfin notre collègue, notre ami, le cinéaste ukrainien Oleg Sentsov, lors d’un échange de prisonniers avec l’Ukraine, samedi 7 septembre. Avec lui, ont aussi été « échangés » son co-accusé Oleksandr Kolchenko, le journaliste Roman Sushchenko, le paysan criméen Volodymyr Balukh, Yevhen Panov, Stanislav Klykh, Mykola Karpyuk, Pavlo Hryb, Oleksiy Syzonovych, Artur Panov, Edem Bekirov et les vingt-quatre marins ukrainiens dont les navires ont été arraisonnés en novembre 2018 par la marine russe, dans le détroit de Kertch. Pour mémoire, un peu après l’annexion de sa Crimée natale par la Russie, qu’Oleg Sentsov se refusait à accepter, il a été enlevé par le FSB, les services secrets russes, le 11 mai 2014, alors qu’il préparait le tournage de son deuxième long-métrage Rhino. Torturé et nationalisé russe contre son gré, il a été jugé un an plus tard, après une parodie de procès puis condamné pour « terrorisme » à vingt ans d’emprisonnement dans la colonie pénitentiaire de Labytnangui, au-delà du cercle arctique. Grève de la faim Depuis lors, Oleg Sentsov n’a cessé de clamer son innocence et de se battre comme il le pouvait, avec la seule arme à sa disposition : son corps. Le 14 mai 2018, devant le silence assourdissant et l’inertie des démocraties, Oleg a entamé une grève de la faim illimitée, pas pour demander sa propre liberté, mais celle des soixante-dix autres prisonniers politiques ukrainiens enfermés, comme lui, pour des raisons aussi diverses que fantaisistes. Cette grève de la faim, il l’a poursuivie pendant 145 jours, au péril de sa santé, de sa vie. Il n’y a mis fin que contraint et forcé, sous la menace d’être nourri de force, à l’aide d’un tuyau enfoncé directement dans son estomac. Mais son but était en partie atteint. Personne ne pouvait plus ignorer le nom d’Oleg Sentsov, ni l’existence brisée de ses soixante-dix co-détenus ukrainiens. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Oleg Sentsov en danger de mort après trois mois de grève de la faim Il aura pourtant fallu encore presque un an et demi pour qu’Oleg, devenu entre-temps citoyen d’honneur de la ville de Paris, Prix Sakharov 2018 et lauréat du Magnitsky Award, soit enfin libéré et rendu à sa mère, à ses enfants et à son infatigable cousine Natalya Kaplan, toute dévouée à sa cause. Aujourd’hui, nous nous réjouissons de savoir que Sentsov, Kolchenko, Balukh et les autres sont libres et, nous l’espérons, tous en bonne santé. Nous sommes heureux de savoir qu’ils vont pouvoir reprendre le cours de leur vie, que Balukh va se remettre à labourer ses champs et Oleg se remettre à écrire et à filmer. Nous remercions le président de la République M. Macron, l’ambassadeur pour les droits de l’homme François Croquette, et les services diplomatiques français pour les efforts qu’ils ont accomplis pour aboutir à cette libération.
Dans une tribune au « Monde », une centaine de personnalités, parmi lesquels Jean-Luc Godard, Jean-Pierre Dardenne, ou encore Slavoj Zizek, se félicitent de la libération du cinéaste ukrainien intervenue samedi.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/09/08/liberation-d-oleg-sentsov-nous-nous-rejouissons-qu-il-se-remette-a-ecrire-et-a-filmer_5507864_3232.html
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Trente-deux magasins Conforama fermés, auxquels il faut ajouter dix magasins à l’enseigne Maison Dépôt, 1 900 postes supprimés l’an prochain… Les salariés du numéro 3 de l’ameublement ont été surpris par l’ampleur du plan social annoncé par l’entreprise lundi 1er juillet. Quasiment dans le même temps, le géant américain du commerce en ligne, Amazon, indiquait mardi 2 juillet qu’il allait recruter 1 800 personnes dans l’hexagone. De là à y voir l’illustration de la bataille perdue entre le commerce physique et la vente sur Internet… Un point de vue que ne partage pas Yves Marin, associé chez Bartle Business Consulting, un cabinet de conseil en transformation d’entreprise. Lire aussi Les salariés de Conforama sous le choc après la suppression de 1 900 postes en France Faut-il voir dans ces annonces simultanées le triomphe d’Internet dans la guerre qui l’oppose au commerce spécialisé traditionnel ? On ne peut pas vraiment parler de guerre ouverte entre le commerce traditionnel et l’e-commerce. Je pense qu’il est nécessaire de rappeler que le commerce traditionnel concerne encore neuf euros sur dix des dépenses des Français. Ce n’est pas rien. De plus la situation de Conforama n’est pas seulement une question de digital à mon avis. Quelles sont les autres difficultés de Conforama ? Sur le marché français du meuble depuis quelques années, Conforama a perdu du terrain. Il s’est fait dépasser en premier lieu par les enseignes physiques. Parmi elles, But, devenue numéro 2 en 2018 derrière Ikea. Dans l’e-commerce, Conformama est devancé par des marques comme Made.com et Miliboo. Mais il faut relativiser l’importance de cette concurrence puisque aujourd’hui les ventes en ligne ne représentent que 15 % du marché du meuble. La situation difficile de Conforama s’explique aussi par le fait que la maison-mère est mal gérée. Steinhoff a enregistré une perte de 1,2 milliard d’euros en 2018. Et c’est sans compter sur le scandale financier dans lequel le groupe est englué depuis 2017. Il faut rappeler que Conforama est une des marques historiques du paysage français du marché du meuble, depuis sa création en 1967. Ce nouveau plan social illustre bien que l’ancienne économie du magasin, qui n’a pas réussi à prendre le virage digital, essaye de s’en sortir comme il peut. Le modèle de la grande distribution en France est à bout de souffle, comment le réinventer ? Les choses seront plus claires quand on arrêtera de faire une opposition entre le traditionnel et le digital. Aujourd’hui, tous les commerçants sont multicanaux. Les grands acteurs ont tous évolué vers des modèles d’alliances ou de conglomérats à la coréenne, pour développer leurs compétences. Avec la crise, on a eu une espèce de sélection naturelle : les entreprises les plus faibles ont disparu. Les autres, celles qui, comme Fnac-Darty, ont subi de plein fouet, la concurrence d’Amazon, ont réussi à opérer cette bascule de développement (R&D(. Enfin, en France, il y a encore beaucoup de progrès à faire sur la recherche et le développement. C’est comme ça que nous pourrons développer notre compétitivité. Quand on sait que les GAFA (Google Amazon Facebook Apple) investissent 15 % de leur chiffre d’affaires dans la R&D et que les commerces traditionnels n’en investissent que 0,5 %, tout de suite on comprend mieux pourquoi le marché Français est à la traîne. Propos recueillis par Anne-Cécile Kirry
Yves Marin, associé chez Bartle Business Consulting, un cabinet de conseil en transformation d’entreprise, revient sur la crise du commerce physique en France, après l’annonce par Conforama d’un plan social en 2020. Pour lui, les difficultés du numéro 3 de l’ameublement, ne sont pas liées principalement à la concurrence des GAFA.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/07/02/conforama-l-ancienne-economie-du-magasin-n-a-pas-reussi-a-prendre-le-virage-digital_5484303_3234.html
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Le ministre saoudien de l’énergie, Khaled Al-Faleh (à gauche) lors d’une réunion de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), à Vienne, le 1er juillet. JOE KLAMAR / AFP A nouveaux dirigeants, nouvel élan. C’est le message qu’a voulu envoyer l’Arabie saoudite en réorganisant, la semaine dernière, la gouvernance de son industrie pétrolière, la corne d’abondance du royaume. Les deux postes-clés de ministre de l’énergie et de président du conseil d’administration de Saudi Aramco, la compagnie pétrolière nationale, occupés jusque-là par un technocrate de haut rang, Khaled Al-Faleh, ont été réaffectés à des proches du roi Salman et de son fils, le très puissant prince héritier Mohammed Ben Salman, surnommé « MBS ». Ce regain de centralisation accroît encore un peu plus l’emprise du clan Salman sur les rouages de l’Etat Le premier a été confié au prince Abdelaziz Ben Salman, fils du souverain et demi-frère du dauphin, jusque-là ministre d’Etat à l’énergie et qui devient le premier membre de la famille royale à détenir ce portefeuille dans l’histoire de la monarchie saoudienne. Le second a été attribué à Yasser Al-Roumayyan, bras droit de « MBS » dans le monde de la finance, qui cumulera cette nouvelle casquette avec la direction du fonds souverain saoudien, le PIF (Public Investment Fund). Ce regain de centralisation, qui accroît encore un peu plus l’emprise du clan Salman sur les rouages de l’Etat, vise à remettre sur les rails le projet phare du prince héritier : l’introduction en Bourse de 5 % du capital d’Aramco, l’entreprise la plus rentable au monde. Ce mégachantier, dévoilé en 2016, mais ensablé depuis, est censé apporter 100 milliards de dollars (environ 91 milliards d’euros) dans les caisses du PIF. Une manne destinée à financer la diversification de l’économie nationale, dont Mohammed Ben Salman a fait sa priorité. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La compagnie pétrolière Saudi Aramco, l’entreprise la plus bénéficiaire au monde « Ce remaniement pourrait accélérer l’entrée en Bourse d’Aramco, prédit Robin Mills, spécialiste des questions énergétiques dans la péninsule Arabique. Khaled Al-Faleh n’était pas très enthousiaste vis-à-vis de ce projet. Son remplacement par Rumayyan, dont les vues reflètent parfaitement celles de MBS, va accentuer la pression sur l’entreprise pour qu’elle se conforme au plan du prince héritier. » La privatisation partielle d’Aramco, qui trône sur les plus importantes réserves d’or noir du monde, a été suspendue au second semestre 2018, au moment même où elle devait être mise en œuvre. Le prix du baril avait été alors jugé insuffisant pour que le navire amiral de l’économie saoudienne atteigne la valorisation espérée par MBS : 2 000 milliards de dollars, une estimation supérieure à celle de Google et Apple réunis.
Le ministre de l’énergie et patron du géant saoudien, perçu comme peu favorable à son introduction en Bourse, a été remplacé par des fidèles du pouvoir.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/09/12/petrole-riyad-relance-le-projet-de-privatisation-d-aramco_5509450_3234.html
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Le timbre-annonce émis à l’occasion de la réouverture, le 23 novembre, du Musée de La Poste de Paris. DR/La Poste Le 73e Salon philatélique d’automne organisé à Paris par la Chambre syndicale des experts et négociants en philatélie (CNEP), présidée par François Farcigny, à l’Espace Champerret, a fermé ses portes le samedi 9 novembre. Le jour de l’inauguration du Salon, autour du PDG de La Poste, Philippe Wahl.On peut reconnaître Pascale de Mézamat (Phil@poste), Danièle Dutertre, André Borey (CNEP), Ségolène Godeluck (Phil@poste), Anne Nicolas (Le Musée de La Poste), Claude Désareménien (FFAP), François Farcigny (CNEP), Gilles Livchitz (Phil@poste), Gauthier Toulemonde (« Timbres magazine »), etc. DR/La Poste La Poste a profité de l’événement pour mettre en vente, en avant-première, plusieurs timbres. Dévoilement du timbre sur Le Musée de La Poste, avec Anne Nicolas (directrice du Musée) et Philippe Wahl (PDG du Groupe La Poste). DR/La Poste Parmi lesquels le timbre annonce de la réouverture du Musée de La Poste de Paris rénové, le 23 novembre, dévoilé en présence du PDG du Groupe La Poste, Philippe Wahl, et de sa nouvelle directrice, Anne Nicolas, qui a succédé à Mauricette Feuillas. Gilles Livchitz, directeur de Phil@poste, et le timbre collector du ballon d’or en prévente au Salon. DR/Pierre Jullien Phil@poste était venue en force, avec son directeur, Gilles Livchitz… Frédéric Morin, directeur adjoint de Phil@poste. DR/Pierre Jullien … son sous-directeur, Frédéric Morin… Frédéric Morin et Frédéric Meunier (Phil@poste). DR/Pierre Jullien Ségolène Godeluck, directrice de la communication de Phil@poste, qui pose avec humour. DR … Ségolène Godeluck, Pascale de Mézamat, Frédéric Meunier, etc. Benoît Gervais, PDG des éditions Yvert et Tellier, et sa fille Mathilde, sur leur stand, au Salon philatélique. DR/Pierre Jullien La presse et le négoce étaient bien sûr présents, parmi lesquels Yvert et Tellier, venus en famille… L’équipe de « Timbres magazine », avec, de droite à gauche: Carole Gerothwohl, Gauthier Toulemonde et Laurent Giot. DR/Pierre Jullien … le mensuel Timbres magazine… De gauche à droite: Bernard, Pascal et Louis-Edouard Behr. DR/Pierre Jullien … et la prestigieuse maison Behr – qui fêtera son centenaire en 2020 –, représentés par trois générations – Bernard, Pascal et Louis-Edouard, et dont la dernière vente sur offres vient de s’achever. A noter que ses invendus sont proposés pour la plupart au prix de départ moins 20 %. Claude Désarménien, président de la FFAP, et Brigitte Abensur, membre de l’Académie de philatélie. DR/Pierre Jullien On pouvait croiser le président de la Fédération française des associations philatéliques (FFAP), Claude Désarménien. Marc Boukebza, directeur de la philatélie des TAAF, présente la gravure annuelle éditée par le territoire, signée Elsa Catelin. DR/Pierre Jullien Les collectionneurs n’ont pas manqué de se presser au stand des Terres australes et antarctiques françaises, en présence du directeur de la philatélie du territoire, Marc Boukebza, pour se procurer le bloc émis pour le Salon qui bénéficiait d’un conditionnement spécial, tiré à 1 000 petits exemplaires. Les amateurs de petits tirages pouvaient aussi reporter leurs achats sur la gravure annuelle éditée par les TAAF : 300 exemplaires pour une œuvre en taille-douce originale (380 x 290 mm), au prix de 50 euros. La dernière production est inspirée par le site de Laboureur, aux Kerguelen, d’après un triptyque signé Elsa Catelin. Les collectionneurs se sont pressés aux séances de dédicaces proposées par les artistes du timbre : De gauche à droite: Marie-Noëlle Goffin et Claude Perchat. DR/Pierre Jullien Marie-Noëlle Goffin et Claude Perchat (qui sera présente à Vélizy-Villacoublay, les 30 novembre et 1er décembre, à l’occasion du championnat interdépartemental d’Ile-de-France de philatélie) ; Les artistes saint-perraise, Marie-Laure Drillet et Raphaële Goineau. DR/Pierre Jullien Marie-Laure Drillet et Raphaële Goineau, dont les sites Internet et les pages Facebook méritent un détour, Raphaële Goineau exposant actuellement à Niort jusqu’au 1er décembre ; Thierry Mordant. DR/Pierre Jullien et Thierry Mordant, toujours très actif sur Facebook. (A suivre) Pierre Jullien
Le Salon philatélique d’automne est l’occasion pour les collectionneurs de rencontrer les acteurs de la philatélie – éditeurs, médias, « postiers », etc. – ainsi que dessinateurs et graveurs afin d’obtenir d’eux des dédicaces.
https://www.lemonde.fr/mondephilatelique/article/2019/11/11/les-artistes-du-timbre-au-73e-salon-philatelique-d-automne-1re-partie_6018791_5470897.html
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Un déploiement inédit. Le président de la République, le premier ministre et pas moins de huit ministres devaient participer, lundi 8 juillet, à la signature des premiers contrats de convergence et de transformation entre l’Etat et les outre-mer. Jamais autant de bonnes fées ne se seront penchées sur le berceau des ultramarins. Il est vrai que l’onde de choc des élections européennes est passée par là. Le 26 mai, la liste du Rassemblement national est arrivée en tête dans la quasi-totalité des collectivités ultramarines en rassemblant 27,4 % des suffrages. Un signal qui ne pouvait rester sans réponse. « C’est l’accusé de réception des élections européennes, reconnaît l’Elysée. C’est important qu’il y ait un message politique. » Lors de cette manifestation, sept contrats de convergence vont être signés avec les collectivités de Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, La Réunion, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna. C’est l’aboutissement d’un processus lancé le 28 juin 2018 à l’Elysée en clôture des assises des outre-mer. A la suite de ces assises, la ministre des outre-mer, Annick Girardin, lançait, le 8 avril, la « trajectoire outre-mer 5.0 », soit cinq objectifs : zéro carbone, zéro déchet, zéro polluant agricole, zéro exclusion, zéro vulnérabilité. « C’est un défi que nous nous lançons collectivement, indiquait alors Emmanuel Macron. Cette stratégie 5.0 est une stratégie globale. J’ai entendu l’impatience de nos concitoyens et la lassitude des discours de rattrapage. Trop souvent, nous nous sommes engagés sans que l’action suive les mots. C’est pourquoi je rajouterais un sixième objectif : zéro lâcheté, zéro déni de responsabilité, zéro refus de voir. » Des propos qui se nourrissaient des remontées – et des remontrances – qu’il avait pu enregistrer le 1er février lorsque, dans le cadre du grand débat, il avait reçu les élus d’outre-mer à l’Elysée, du moins ceux qui avaient répondu présent. Sur les cent trente invités, à peine la moitié avaient fait le déplacement. Les échanges avaient été vifs, et le chef de l’Etat avait pu mesurer les risques de rupture dans ces territoires qui, pour certains, connaissent une situation explosive. Urgences sociales Le malaise est profond, et les politiques publiques en direction des outre-mer mal identifiées, avec le sentiment que l’Etat ne réagit qu’en cas de crise sociale aiguë et qu’il ne tient pas ses engagements. D’où l’ampleur de la mobilisation pour tenter de rétablir des liens passablement distendus. « Le président de la République veut affirmer qu’il ne lâchera pas les outre-mer, souligne l’Elysée. Il s’agit de montrer la mobilisation du gouvernement. Nous avons défini les objectifs, maintenant on entre dans le concret. C’est l’idée du dernier kilomètre, souvent le plus difficile à franchir, celui de la mise en œuvre qui se concrétise aux yeux des citoyens. »
Lors des européennes, le RN est arrivé en tête dans la quasi-totalité des collectivités ultramarines. Lundi, Macron devait adresser un message politique pour apaiser les tensions.
https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/07/08/l-executif-tente-de-reconquerir-les-outre-mer-avec-la-signature-des-premiers-contrats-de-convergence_5486893_823448.html
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La présidente des Verts, Regula Rytz (au centre), après l’annonce des premiers résultats des élections législatives suisses, à Berne, le 20 octobre. FABRICE COFFRINI / AFP A l’échelle de la Suisse – connue pour la stabilité de son paysage politique –, c’est un tremblement de terre. Les formations écologistes Verts (gauche) et Vert’libéraux (droite) se sont imposées comme une force politique de premier plan aux élections fédérales, dimanche 20 octobre. Il s’agissait de renouveler les 200 conseillers nationaux (Chambre basse) et les 46 conseillers aux Etats (Chambre haute). L’Union démocratique du centre (UDC, populistes de droite) reste le premier parti de Suisse, mais accuse un recul, avec 26 %, contre près de 30 % en 2015. « Ce vote est en adéquation avec les préoccupations majeures des Suisses concernant le climat », note Pascal Sciarini, professeur de sciences politiques à l’université de Genève. Dans ce pays alpin durement touché par le dérèglement climatique, la jeunesse s’était activement mobilisée lors des manifestations à l’appel de la militante suédoise Greta Thunberg. Cette inquiétude semble s’être transposée dans les urnes. Les Verts obtiennent 13 % des voix (+ 6 points) et les Vert’libéraux 7,9 % (+ 3,3 points). Cette poussée de l’écologie se fait au détriment du Parti socialiste, qui passe de 18,8 % à 16,6 %, et des libéraux-radicaux qui perdent 1,1 point, à 15,3 %. Le Parti démocrate-chrétien (PDC) resterait stable, à 11,8 %. Lire aussi Armes : les Suisses approuvent un durcissement de leur législation La percée des écologistes va rebattre les cartes politiques au Parlement, où ils disposeront de 28 sièges, contre 54 pour l’UDC, et permettre de donner une plus grande impulsion aux dossiers environnementaux. La Suisse s’est ainsi engagée à réduire ses émissions de carbone à zéro d’ici à 2050, et les élus devraient se pencher sur une proposition de loi visant à taxer les transports aériens. « L’UDC n’a pas réussi à mobiliser son électorat comme en 2015, où il avait surfé sur la crise des réfugiés en Europe pour mettre au premier plan les questions de sécurité et d’immigration », analyse M. Sciarini. Mais ce recul ne signe en aucun cas un effondrement de la droite populiste suisse. « Le parti ne va pas bien, mais il a déjà eu des résultats en dents de scie », poursuit le professeur. « Renverser » la « formule magique » Connue pour ses affiches de campagne controversées – un mouton blanc boutant hors de Suisse un mouton noir en 2007 –, l’UDC avait choisi cette année de concentrer sa campagne contre l’Europe. Sur son poster, une belle pomme rouge suisse rongée par des vers est accompagnée de ce slogan : « Allons-nous laisser la Suisse se faire dévorer par les gauchistes, les bien-pensants et les proeuropéens ? » Lire aussi En Suisse, on encourage les hackers à pirater le système de vote électronique L’UDC aura d’ailleurs l’occasion de sonder à nouveau son assise électorale en mai 2020, lorsque les Suisses vont se prononcer sur l’abandon de la libre circulation des personnes avec l’UE. Une consultation organisée à son initiative. L’avenir politique des forces écologistes reste toutefois en suspens au niveau gouvernemental. Si les Verts et les Vert’libéraux ont annoncé vouloir présenter un candidat commun lors de la désignation du nouveau gouvernement par les élus des deux chambres parlementaires en décembre, les obstacles seront nombreux. A commencer par le système politique suisse, qui repose sur la règle dite de la « formule magique » depuis 1959, et qui octroie deux ministres au PS, deux aux libéraux, deux à l’UDC et un aux chrétiens-démocrates. Si les écologistes ont bousculé le paysage politique, il semble toutefois difficile « de renverser cette formule », prédit une source proche des Verts à Zurich : « La politique suisse repose sur le compromis. On va nous dire d’attendre quatre ans de plus pour confirmer notre progression. »
Même si les populistes de l’Union démocratique du centre restent la première force du pays, les écolos de droite et de gauche se sont imposés comme une force politique de premier plan.
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/10/20/les-suisses-votent-ce-week-end-pour-elire-leur-parlement_6016214_3210.html
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Ce texte est paru dans « Le Monde de l’éducation ». Si vous êtes abonné au Monde, vous pouvez vous inscrire à cette nouvelle newsletter hebdomadaire en suivant ce lien. « Votre mission, si vous l’acceptez… », « Nos dix meilleures astuces d’entrée dans le métier ! » « Réussir son premier jour en tant que professeur : notre tuto ». Telles pourraient être « les accroches » d’un tel billet. Mais sache, chèr-e collègue, que le premier, et sans doute le principal, conseil pour « bien » entrer dans l’éducation nationale est celui-ci : se faire sa propre idée. Il n’y a pas de vérité à révéler pour être un bon professeur, c’est la liberté de ce métier : pouvoir faire ses propres choix pour conduire au savoir. Le deuxième est d’ordre protocolaire, ici, comme en salle des professeurs, on s’honore du tutoiement entre collègues. Je n’ai jamais compris pourquoi, cela m’a heurté, moi aussi, au départ, et puis j’ai fini par tutoyer, « comme les vieux ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Le corps du professeur est un instrument de travail » « Tu n’es pas là par hasard » Il y a bien des embûches entre une réussite au concours qui s’étale entre mai et juillet, l’affectation, et la scène tant redoutée de la prérentrée. Il est parfois difficile de connaître bien à l’avance son établissement, la réalité de son service. La première image du métier est cruelle : si tu ne vas pas chercher l’information, elle ne viendra pas à toi. La liste des manuels utilisés dans ton bahut, la demande de prime d’entrée dans le métier, etc. Tout nécessite d’aller à la pêche. Cela dit aussi ce que nous sommes, une administration qui sait gérer les grandes masses mais ne sait pas accueillir, guider au-delà d’une première formation de quelques jours qui peut sembler bien légère. Il ne faut pas croire cependant que tu seras « balancé » au milieu des élèves. Lutter contre cette impression est déjà le premier réflexe professoral. Tu as une formation universitaire, disciplinaire. Tu as triomphé d’un concours où tu as été sélectionné parmi des centaines de candidats. Tu n’es pas là par hasard. Aucune formation ne remplacera ton expérience acquise, ton propre cheminement. Alors, comment survivre, comme on dirait dans un épisode de « Koh Lanta » ? Tout simplement en pensant le métier de professeur comme un métier d’anticipation et de gestion de l’incertitude. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Les épreuves d’histoire-géographie du bac 2021 deviennent un ensemble incohérent, à l’image de la réforme » Je m’explique. Nous arriverons, nous les « vieux » (« les titulaires »), avec les mêmes doutes que toi. Nous devrons gérer un « brouillard tactique » de plusieurs semaines, qui ne sera pas de ta responsabilité, mais notre lot commun. Le niveau des classes, la cadence de progression, la disponibilité des esprits sur les créneaux de cours (avant/après le sport, avant/après les frites à la cantine), le niveau pratique de la salle de classe : tu vas découvrir cela comme nous au fil de l’avancée. Le risque, c’est que cette incertitude se transforme en angoisse. A aucun moment, ce métier ne devra devenir une souffrance pour toi, parce que tu n’auras pas su gérer une heure ou un événement imprévu. Il faut apprendre à dédramatiser les misères ordinaires, les demi-succès ne sont pas à vivre comme des échecs personnels. On ne réussit pas son entrée dans le métier sur un seul cours, sur un exercice, sur un devoir. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Les épreuves d’histoire-géographie du bac 2021 deviennent un ensemble incohérent, à l’image de la réforme » Ne jamais se fier à la technique Il n’y a aucune entrée dans le métier qui soit identique. Mais il y a des commandements techniques, humains et symboliques. D’abord, il ne faudra jamais te fier à la technique. L’ordinateur, la connexion Internet, la photocopieuse, celle-là dont tu as besoin après ta journée à l’Inspe (institut supérieur national du professorat) [ex-ESPE et ex-IUFM], après avoir dormi cinq heures et préparé un cours, finiront par te lâcher au pire moment. Il faut savoir ne pas tout faire reposer sur l’activité dont on aurait absolument besoin. Tu pourras télécharger les vidéos des sites à l’avance (celles du Monde, par exemple). Bref, enseigner c’est prévoir et improviser. J’ai l’air de décrire le professeur comme un « collapsologue » serein : c’est à peu près ça. Sache que le vieux briscard a souvent dans son casier son aspirine, sa clé USB de rechange, de quoi affronter une gastro-entérite fulgurante, ses biscuits, ses 2 ou 3 euros de réserve pour la machine à café. Tu devras toi aussi gérer le coup de fatigue, le physique qui flanche, la voix qui déraille à 17 h 35. Se présenter et socialiser Mais le professeur est aussi un animal sociable. Tout le monde va te regarder pendant plusieurs semaines comme le petit nouveau ou le petit jeune. On a tendance parfois à le prendre mal. Mais c’est une tentative maladroite de tes futurs collègues d’enclencher la discussion. La politesse professionnelle est de se présenter. En échange, ceux-là te rendront la tâche beaucoup plus facile, en te donnant ou te répétant des informations essentielles. CPE, secrétaires, collègues doivent pouvoir t’identifier. Parce qu’il faut parfois arriver à entrer dans une routine administrative où on ne se dit plus les choses par automatisme. « Bah quoi, t’as pas pensé à la sortie orientation des terminales comme tous les ans ? » Cette socialisation professionnelle ne signifie pas de dire amen à tout : à ton tuteur, au principal/proviseur, à l’inspecteur. Encore moins aux collègues. Tu tomberas sur de vieux grognards qui te diront par exemple que « si tu ne t’es pas imposé dès les dix premières secondes de ton premier cours en punissant trois gamins, c’est fichu pour le reste de l’année ». Dans ce métier, on trouve aussi des amis, des équipes et des ambiances qui honorent ce métier. L’ami avec qui tu feras le bilan en fin de journée et avec qui tu iras boire un pot pour décompresser, l’équipe qui jouera d’une solidarité sans faille, les collègues d’une discipline qui te passent un conseil professionnel précieux en quelques minutes de récréation. Ces situations existent bien plus qu’on ne le croit, et elles font l’honneur de ce métier. Ecouter les « anciens » (mais on devient rapidement un ancien dans ce métier), c’est apprendre à dédramatiser un échec a priori insurmontable. C’est rigoler, au bout d’un moment, des 4e B « qui n’ont pas du tout accroché à ma comparaison des Essais de Montaigne avec les gravures des guerres de religion ce vendredi à 16 heures ». C’est donc rire de soi-même. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Il faut imaginer les correcteurs du bac heureux » Savoir perdre du temps pour en gagner ensuite En classe, on connaît aussi des moments de grâce, quand la question innocente d’un élève ouvre la plus intense des discussions sur la nature du régime de Vichy, l’égalité des territoires, la loi ou le droit. Apprendre à connaître ses élèves, c’est souvent accepter de « perdre du temps » avec eux. Perdre dix minutes de cours pour sortir du chemin tracé, c’est souvent en gagner sur la suite. Le bon enseignant n’est pas celui qui continue vaille que vaille. C’est parfois celui qui sait s’arrêter et regarder où en est sa classe. Enseigner enfin, c’est savoir rester modeste dans son action. On hésite, on doute. Parfois on bricole, et cela fonctionne. Parfois on y met le meilleur de soi, et cela échoue. On te vendra bien des modèles. La réalité en matière d’enseignement est à peu près la définition de l’art militaire par de Gaulle : le pire ennemi est l’esprit de système. Ce qui a marché pour une classe, pour ton formateur, ne marchera pas forcément dans un autre contexte d’enseignement. Le contexte d’enseignement prime tout. N’essaye en rien de ressembler à des modèles, à des collègues, encore moins à tes anciens professeurs. Rappelle-toi toujours qu’il y a une demi-génération entre toi et des élèves. Faire son miel des expériences tout en conservant sa liberté et son indépendance de jugement, voilà la dignité de ce métier. J’y suis pour ma part entré avec la phrase de mon vieux maître Bernard Phan qui, le jour de sa retraite, nous révéla ces trois mots : « Ne jamais rien lâcher sur l’exigence, ne jamais rien lâcher sur l’excellence, ne jamais douter que les élèves sont capables du meilleur. » Après, tout le reste s’apprend.
Il faut savoir se faire confiance, apprendre à tutoyer ses collègues, ne jamais faire confiance à la technique, ou encore savoir perdre du temps pour en gagner plus tard, explique le professeur d’histoire-géographie Thibaut Poirot.
https://www.lemonde.fr/education/article/2019/09/03/conseils-de-rentree-scolaire-a-un-professeur-stagiaire_5505682_1473685.html
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Kalen Hollomon pour M Le magazine du Monde Là, l’acteur Mahershala Ali regarde pensivement une anémone qu’il tient entre les mains ; ici, il s’appuie contre un miroir avec nonchalance. Sur ces clichés publicitaires du tailleur italien Ermenegildo Zegna, une gestuelle sensible, moins « classiquement virile » a remplacé les postures affirmées qui campent habituellement l’imagerie masculine. L’acteur, oscarisé pour sa prestation dans le film Moonlight, de Barry Jenkins (2016), est le premier ambassadeur de cette campagne baptisée #whatmakesaman (« ce qui fait un homme ») qui questionne la masculinité. « Évidemment qu’il est important de parler de mode et de nos produits, mais avec ce projet, nous avions envie d’entamer une conversation, explique Alessandro Sartori, directeur artistique de la marque. Il ne s’agit pas d’imposer une vision de la masculinité mais plutôt de dire que chacun a sa sensibilité. » L’opération est accompagnée d’un manifeste de quelques lignes où l’on peut lire : « Masculinity is a state of mind. » (« la masculinité est un état d’esprit »). Questionner la représentation Alessandro Sartori assume le parti pris. « Nous voulions présenter notre pensée d’une façon institutionnelle. Il nous semblait plus important d’être audacieux que polis. » Alors que la vague post-#metoo et le néoféminisme ont remis en question les trop lisses canons de beauté féminins prônés par l’industrie de la mode, que les marques de lingerie ont bousculé leurs castings en incluant des filles rondes, à petite poitrine, handicapées… les acteurs de la mode homme se sont encore peu hasardés à questionner la représentation de la masculinité. Il suffit de feuilleter les magazines pour s’en rendre compte. La marque italienne de luxe Zegna a recruté l’acteur Mahershala Ali pour sa nouvelle campagne. Josh Olins/Alessandro Sartori Même si certaines publicités présentent des vêtements plus androgynes, la gestuelle reste la même : bandes de copains à la silhouette parfaite et au sourire Ultra Brite, éphèbes sûrs d’eux… Et pourtant, cette redéfinition de la masculinité agite la société, comme en témoigne la médiatisation du dernier ouvrage de l’historien Ivan Jablonka, Des hommes justes, du patriarcat aux nouvelles masculinités, paru aux Éditions du Seuil en septembre dernier. Est-ce « l’affaire » Gillette qui refroidit l’industrie de la mode ? En janvier dernier, la marque de rasoirs qui a longtemps prôné « la perfection au masculin » a transformé son slogan en « The best men can be », que l’on pourrait traduire par « le meilleur des hommes », et diffusé aux États-Unis une publicité qui a fait grand bruit. On y voit des hommes de tous âges s’interposer devant leur copain qui siffle une fille, celui qui en harcèle une autre, un groupe de garçons qui se bagarrent… Visionnée plus de 32 millions de fois sur YouTube, la vidéo, qui évoque le sujet sensible de la « masculinité toxique » a été « likée » 800 000 fois… mais détestée par plus du double, par des gens qui n’ont pas hésité à poster sur les réseaux sociaux des photos de rasoirs et de mousses à raser Gillette jetés à la poubelle. Alessandro Sartori de Zegna en a conscience : « Évidemment que notre message peut être clivant. Nous avons reçu quelques réactions négatives mais la plupart des retours sont enthousiastes, les gens « repostent » notre message, posent des questions. Nous savons bien qu’ouvrir le débat peut engendrer des risques. » Mais il crée aussi le buzz. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La masculinité devient plus sensible, plus fragile, loin de la caricature du cow-boy Marlboro Bousculer au risque de froisser Alors que Gucci célébrait au début des années 2000 le mâle alpha dans des campagnes porno-chic, son actuel directeur artistique, Alessandro Michele, a fait parler de lui avec ses mannequins gender fluid, habillés de son vestiaire rococo baroque. Et chez Saint Laurent, en 2013, époque Hedi Slimane, la très androgyne Saskia de Brauw, vêtue de la collection masculine et recroquevillée sur elle-même, n’était pas passée inaperçue. « La représentation du masculin dans la mode est critiquée, discutée, redéfinie depuis plus de vingt-cinq ans. » Benjamin Simmenauer, professeur à l’Institut français de la mode Benjamin Simmenauer, professeur à l’Institut français de la mode, estime qu’aujourd’hui « on voit certaines marques emprunter des identités alternatives à des figures des années 1970 comme Andy Warhol et David Bowie ». « Je ne pense pas que ce soit une réaction au mouvement #metoo, la représentation du masculin dans la mode est critiquée, discutée, redéfinie depuis plus de vingt-cinq ans, explique-t-il. Mais il faut reconnaître que la majorité des marques grand public continuent de véhiculer des stéréotypes très genrés et on voit rarement des mannequins hommes petits, chauves ou bedonnants. » Si un mastodonte de la fast fashion ne peut se risquer à froisser une partie de sa clientèle, les jeunes créateurs ont, eux, plus d’aisance à bousculer les codes. Auréolé du prix du label créatif de l’Andam (l’Association nationale pour le développement des arts de la mode) en 2008 pour sa mode qui découvre le corps des hommes, Ludovic de Saint Sernin vient de présenter sa dernière campagne avec le photographe Willy Vanderperre. La collection Gucci Tailoring Pre-Fall 2019 avec Harry Styles, portant les pièces rococo d’Alessandro Michele. Harmony Korine « On y voit des hommes effondrés, allongés sur un rocher comme des anges arrivés sur Terre, dans des poses lascives ou soumises qui peuvent sûrement en choquer certains, note le créateur français. Quand on est jeune, on a plus de liberté pour exprimer ses opinions. Cela me semble incroyable que la plupart des hommes dans la mode soient homosexuels et qu’ils ne réalisent que rarement des images homo-érotiques. » Politique du « ni-ni » T, le magazine hebdomadaire du New York Times, a publié mi-septembre dans son Spécial mode homme une série mettant en scène l’histoire d’amour d’un couple homosexuel. « Lentement et laborieusement, les définitions de la masculinité se diversifient aujourd’hui et deviennent même complètement obsolètes pour les plus courageux d’entre nous », écrit ainsi Hanya Yanagihara, rédactrice en chef du magazine, dans son éditorial. « La représentation de l’homme a évolué dans toutes les industries, la mode, le parfum, l’automobile. » Raffaello Napoleone, directeur général du Pitti Dans un genre totalement différent mais avec au fond, une même volonté d’éviter les représentations trop lisses de l’homme, Figaret vient de révéler sa nouvelle égérie : JoeyStarr, choisi selon la PDG Éléonore Baudry, pour « son charisme, sa masculinité affirmée mais aussi ses failles, qu’il assume, et son parcours sinueux ». « La représentation de l’homme a évolué dans toutes les industries, la mode, le parfum, l’automobile… Mais ses nouvelles formes sont propres à chaque pays, à chaque culture. Ce qui est certain, c’est qu’on ne donne plus à l’homme le rôle dominant et si une marque véhicule une image trop macho dans ses campagnes, elle est vite critiquée sur les réseaux sociaux », note Raffaello Napoleone, directeur général du Pitti, salon bisannuel consacré à la mode masculine. Des campagnes aux mannequins ni machos ni féminins ? Ni virils ni trop sensibles ? La politique du « ni-ni » a encore de beaux jours devant elle.
Poussés par l’évolution de la notion de virilité dans la société, certains créateurs osent enfin casser les stéréotypes masculins. Une audace plus difficile à assumer pour les marques grand public.
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2019/10/03/la-mode-bouscule-les-codes-de-la-masculinite_6014118_4500055.html
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John Bercow a dit non a un nouveau vote lundi 21 octobre sur l’accord de Brexit. HO / AFP « La motion ne sera pas débattue. » Le président de la Chambre des communes britannique, John Bercow, a refusé de soumettre au vote des députés lundi 21 octobre l’accord de Brexit conclu entre Londres et l’Union européenne, expliquant que la motion avait déjà été examinée samedi. Il faudra donc attendre l’étude - et le vote - des textes d’application, plus complexes, pour savoir si le Parlement britannique donne son feu vert au compromis. Ces textes doivent être examinés par les députés à partir de mardi. Tout cela devrait compliquer la tâche des Européens, qui doivent pendant ce temps se prononcer sur un possible nouveau report du divorce. Ce « withdrawal agreement bill » (projet de loi sur l’accord de retrait) débattu par les élus britanniques ne sera a priori pas soumis au vote avant mardi. Pour éviter un « no deal » le 31 octobre, Londres a décroché un nouvel accord de divorce avec l’Union européenne la semaine dernière mais n’est pas parvenu à obtenir le soutien du Parlement britannique samedi. Les députés ont adopté, par une majorité de 16 voix, un amendement qui reporte l’approbation du Parlement, le temps que soit adoptée toute la législation nécessaire à la mise en œuvre de l’accord de Brexit négocié par le premier ministre Boris Johnson. Cet amendement avait pour but d’empêcher une sortie sans accord « accidentelle » si ces textes complexes n’étaient pas votés et promulgués à temps, selon son auteur, Oliver Letwin. Retrouver : le suivi en direct de la séance de samedi à la Chambre des communes La question du report en cours d’examen à Bruxelles Le premier ministre a par conséquent été contraint de demander un report de trois mois de la date de sortie, pour l’heure prévue au 31 octobre, une requête en cours d’examen à Bruxelles. Mais le dirigeant conservateur, farouchement opposé à tout nouveau report du Brexit, prévu d’abord le 29 mars et déjà repoussé deux fois, a accompagné cette demande d’une lettre expliquant pourquoi il ne veut pas de nouveau délai. Si le gouvernement ne parvient pas à faire ratifier le texte dans les temps, « un court report technique » est possible, a déclaré lundi à Berlin le ministre des affaires étrangères allemand, Heiko Maas. Paris a répété qu’un « délai supplémentaire » ne « serait dans l’intérêt de personne ». Un report plus long pourrait permettre l’organisation d’élections, voire d’un nouveau référendum. La décision devra être prise à l’unanimité par les dirigeants européens. Déterminé malgré tout à tenir sa promesse d’un Brexit le 31 octobre, le gouvernement de Boris Johnson compte faire passer au Parlement le plus rapidement possible les textes de loi nécessaires à l’entrée en vigueur de l’accord, quitte à faire siéger les parlementaires le soir ou le week-end. Il estime avoir une majorité pour soutenir son accord, qui règle les conditions du divorce après quarante-six ans de vie commune, permettant une sortie en douceur accompagnée d’une période de transition courant au moins jusqu’à fin 2020. Plus de trois ans après le référendum de 2016 qui a vu 52 % des Britanniques soutenir le camp du « leave », l’opinion et les parlementaires restent cependant très divisés, même au sein du Parti conservateur de M. Johnson. Notre sélection d’articles pour comprendre le Brexit Six mois après le refus du Parlement britannique de ratifier l’accord entre Theresa May et l’Union européenne sur le Brexit, un nouvel accord a été négocié par le premier ministre Boris Johnson. Ce texte, qui reprend l’essentiel de l’« accord de retrait » en novembre 2018, supprime notamment l’existence du « backstop » à la frontière entre les deux Irlandes. En voici les points-clés. Comprendre : le schéma qui résume les options possibles (daté d’octobre 2019), alors que les parlementaires doivent valider l’accord de Boris Johnson pour officialiser le divorce entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Retrouvez tous nos articles sur le Brexit dans cette rubrique.
Le président de la Chambre des communes souhaite que les élus finissent d’abord d’examiner le texte sur les modalités d’application de l’accord.
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/10/21/le-parlement-britannique-ne-votera-pas-l-accord-de-brexit-lundi_6016356_3210.html
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Marche en hommage à Zineb Redouane, le 2 mars 2019. DAVID ROSSI / PQR / MAXPPP Sept mois après le décès de l’Algérienne Zineb Redouane, 80 ans, atteinte au visage par une grenade lacrymogène à la fenêtre de son appartement lors d’une manifestation de « gilets jaunes » à Marseille, ses proches déplorent que le policier qui a tiré ne soit toujours pas identifié. Mme Redouane est morte à l’hôpital, le 3 décembre 2018, deux jours après avoir été grièvement blessée par une grenade alors qu’elle fermait les volets de son appartement situé au 4e étage d’un immeuble rue des Feuillants (1er arrondissement). En bas de son immeuble, de violents incidents avaient éclaté après des manifestations de « gilets jaunes », mais aussi contre l’habitat insalubre et pour le climat. Fin janvier, les enquêteurs de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), la « police des polices », ont entendu les cinq CRS dotés de lanceurs de grenade qui se trouvaient sur les lieux, ainsi que le capitaine qui les dirigeait. Après avoir regardé les images de vidéosurveillance, aucun n’a désigné le tireur ou n’a reconnu avoir tiré. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Vie et mort de « Mama Zina », l’octogénaire atteinte par une grenade lacrymogène à Marseille Au total, 200 grenades ont été tirées ce samedi 1er décembre, a relaté leur chef au cours de ces auditions, dévoilées par Mediapart mardi 2 juillet, et dont l’Agence France-Presse (AFP) a eu connaissance. Sur les images, un CRS fait un tir « en cloche », en direction de l’immeuble de Zineb Redouane à l’angle de la Canebière, puis quelques secondes après prend du recul et regarde à plusieurs reprises en hauteur, face à lui. Trois policiers ont récusé apparaître – dont l’un car il portait une barbe et un autre une cagoule et des lunettes, alors que le CRS n’en a pas sur les images – et deux ne se prononcent ni dans un sens ni dans l’autre. « Ces policiers, qui n’ont même pas été placés en garde à vue contrairement à l’usage, savent qui a tiré et font preuve d’une mauvaise foi évidente », a déclaré à l’AFP l’un des avocats de la famille Redouane, Me Yassine Bouzrou. Le numéro de la grenade qui a touché Mme Redouane, retrouvée dans l’appartement, ne permet pas non plus d’identifier le tireur, car il s’agit d’une munition « de remplacement », après l’épuisement d’un premier stock, selon ces auditions. Dépaysement des investigations Les fonctionnaires, expérimentés, ont assuré s’être abstenus de tout tir tendu, conformément à la législation. Selon la fille de Zineb Redouane, rapportant des propos de sa mère au téléphone au moment de l’impact, un policier l’aurait, au contraire, regardée et visée. De leur côté, les CRS ont insisté sur le climat particulièrement violent ce soir-là à Marseille : « C’est l’un des maintiens de l’ordre les plus durs que j’ai eu à gérer », explique l’un, tandis qu’un autre se rappelle qu’il n’était « pas sûr [d’en] sortir indemne ». Les proches des victimes attendent désormais le dépaysement des investigations, sur lequel la Cour de cassation doit se prononcer rapidement. En cause, notamment, la présence d’un vice-procureur de Marseille sur le terrain, aux côtés des policiers, le soir du drame. Cette présence a été signalée par les policiers lors de leurs auditions et est donc « connue de l’autorité judiciaire depuis le 25 janvier », a souligné Me Bouzrou. Ce vice-procureur a été chargé du début de l’enquête, et le procureur général n’a accepté d’enclencher le dépaysement de l’enquête qu’en juin, s’indigne-t-il. Un écueil judiciaire de plus selon l’avocat, qui met en cause « l’impartialité » de la justice marseillaise dans cette affaire sensible, depuis la première enquête, ouverte par le parquet pour « recherche des causes de la mort », jusqu’au traitement de sa plainte pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donnée », déposée au nom de la fille de Mme Redouane pour faire avancer l’enquête. Mardi, un autre élément s’est ajouté au puzzle : une autopsie réalisée par la justice algérienne, le pays d’origine de Mme Redouane. Ses conclusions, dévoilées par Le Média, établissent que le « traumatisme [facial] est directement responsable de la mort par aggravation de l’état antérieur […], malgré les soins ». « J’espère que cette expertise va faire bouger les choses », a commenté Brice Grazzini, autre avocat des proches, qui va la faire verser à l’instruction. Selon lui, la première autopsie à Marseille, qui s’abstenait de trancher l’origine du décès de Mme Redouane, faute d’éléments suffisants notamment sur ses antécédents médicaux, témoignait d’un « manque de diligence ».
Une seconde autopsie, réalisée par la justice algérienne, conclut que l’octogénaire a bien été tuée en décembre 2018 par une grenade lacrymogène.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/07/02/mort-de-zineb-redouane-a-marseille-l-enquete-pietine_5484410_3224.html
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Une étude allemande, publiée le 22 août 2019 dans le Journal of Sexual Medicine, décrit les circonstances de décès liés à une activité sexuelle mais ne relevant d’une pathologie préexistante, ce que les auteurs appellent des « morts non naturelles ». Dans un contexte sexuel, ces décès correspondent généralement à des actes auto-érotiques qui tournent au drame ou à des homicides sexuels (meurtres). Des accidents mortels peuvent cependant également survenir lors de certaines pratiques visant à augmenter le plaisir. Des médecins de l’Institut de médecine légale de l’hôpital universitaire de Francfort ont utilisé les données d’autopsie pratiquées sur une période de 25 ans afin de déterminer les causes et circonstances des morts non naturelles associés à une activité sexuelle. Des informations ont également été recueillies par les analyses toxicologiques, le recueil du sperme, les rapports de police, les enquêtes judiciaires et parfois les déclarations des partenaires sexuels. Trois grandes catégories Sur les 16.437 autopsies réalisées entre 1993 et 2017, 74 morts non naturelles (0,45 %) liées à une activité sexuelle ont été identifiées impliquant 43 hommes (âge moyen : 43 ans) et 31 femmes (âge moyen : 38 ans). Les victimes sont moins âgées que celles qui meurent de causes naturelles souvent liées à une maladie cardiovasculaire lors d’une activité sexuelle. Age en effet estimé à 51 ans. Les médecins légistes ont classé les décès associés à une activité sexuelle en trois groupes. Le groupe I comprend les morts accidentelles auto-érotiques, c’est-à-dire que les décès n’impliquent pas la participation d’une tierce personne. Ce groupe est très majoritairement composé de sujets de sexe masculin (21 hommes, 1 femme). L’âge moyen des victimes est de 45 ans. La principale cause de la mort est un accident par strangulation, la victime ayant utilisé une ceintures, une corde ou une chaîne pour comprimer leur propre cou. Le but recherché est en effet de provoquer un manque d’oxygénation du cerveau, l’hypoxie cérébrale renforçant le plaisir sexuel chez certains individus. Selon le dispositif utilisé, le décès est dû à un étranglement ou à une pendaison. Quinze des 21 hommes ont été découverts entièrement nus ou le pantalon baissé. Objets divers Un homme est cependant décédé des complications (défaillance multiviscérale) d’une lésion grave du rectum liée à l’introduction d’un corps étranger, un gros radis en l’occurrence. L’utilisation de corps étrangers a principalement été enregistrée dans le groupe I (auto-érotisme). Ont été utilisés : un vibromasseur, un sextoy, un plug anal, un poing en caoutchouc (rubber fists), des légumes (gros radis, aubergine), mais également des fils électriques ou encore le manche d’une ventouse pour déboucher les toilettes. Le groupe II (9 hommes, 14 femmes) est constitué de personnes décédées lors d’une activité sexuelle avec un partenaire et dans un contexte de consentement mutuel. Deux hommes et une femme sont morts lors d’une séance de sadomasochisme. Ces trois personnes étaient pourtant expérimentées dans ce domaine. Dans le cadre de ces rapports sexuels consentis, une femme est morte par étranglement, une autre par noyade. L’âge moyen des victimes est de 40 ans. Le groupe III (13 hommes, 16 femmes, âge moyen 39 ans) est composé de personnes décédées lors d’une activité sexuelle avec au moins un partenaire mais réalisée sans consentement. On compte dans ce groupe un plus grand nombre de femmes. L’une d’entre elles a été victime d’un tueur en série sadique, suspecté d’être le meurtrier d’au moins six autres femmes. Violence sexuelle Les légistes ont également observé que la violence (le plus souvent exercée avec un couteau de cuisine) est la principale cause de décès dans ce groupe. Une femme sous ecstasy est décédée d’une hémorragie provoquée par des lacérations rectales et vaginales causées par l’introduction d’un corps étranger (plug anal, goulot de bouteille). Deux garçons de 13 ans et une fillette de 9 ans ont été étranglés par leurs agresseurs sexuels. Enfin, une enfant et deux femmes ont subi des mutilations post-mortem des organes génitaux. Le décès est le plus souvent survenu dans l’appartement de la victime, en particulier dans les groupes I (auto-érotisme) et III (sans consentement). La mort est parfois intervenue dans un lieu public. Ainsi, dans le groupe II (avec consentement mutuel), des victimes ont été découvertes à l’arrière d’une maison, dans une voiture, un champ, aux abords d’un lac. Dans plusieurs cas relevant du groupe III (sans consentement), le corps de la victime a été déplacé par l’agresseur. Le cadavre a ainsi été retrouvé dans une forêt, un dépôt de marchandises, près d’une gare. Certains objets retrouvés sur le lieu du décès (bouteilles de liqueur, produits chimiques, emballages vides de médicaments, sacs contenant des substances illicites), de même que les déclarations des partenaires sexuels ou des agresseurs, laissent à penser que certaines victimes ont consommé de l’alcool ou de la drogue (héroïne, cocaïne, amphétamines, ecstasy) avant de mourir. Eduquer les jeunes Dans le groupe II (avec consentement mutuel), les intoxications et les accidents de strangulation sont les principales causes du décès. Cette étude montre ainsi que la consommation de substances psychoactives dans le cadre de relations sexuelles (Chemsex), le plus souvent rapportée chez les homosexuels masculins, existe également chez les femmes lors de relations hétérosexuelles. « Étant donné que la compression du cou est une pratique souvent visible sur des sites web pornographiques facilement accessibles, le personnel médical se doit d’être informé que ces activités sont potentiellement mortelles. Il ne faut pas oublier qu’un effet d’imitation pourrait concerner non seulement des adultes mais également des adolescents et de jeunes adultes inexpérimentés à la recherche de sensations fortes. À notre avis, la prévention de ces décès pourrait être facilitée si on incluait cette thématique dans l’éducation sexuelle des jeunes, au même titre que les maladies sexuellement transmissibles ou le risque de grossesse. Le personnel médical, notamment les médecins généralistes, les pédiatres et les urgentistes, devrait aborder ouvertement ce sujet lorsqu’ils ont affaire à des patients ayant des problèmes de santé sexuelle ou lorsqu’ils traitent des personnes ayant possiblement survécues à de telles pratiques », concluent Lena Bunzel et ses collègues légistes de l’hôpital de l’université Goethe de Francfort. Marc Gozlan (Suivez-moi sur Twitter, sur Facebook) Toute reproduction interdite. Toutes les informations reproduites sur cette page sont protégées par des droits de propriété intellectuelle. Pour en savoir plus : Bunzel L, Koelzer SC, Zedler B, Verhoff MA, Parzeller M. Non-Natural Death Associated with Sexual Activity: Results of a 25-Year Medicolegal Postmortem Study. J Sex Med. 2019 Aug 22. pii: S1743-6095(19)31285-8. doi: 10.1016/j.jsxm.2019.07.008 Lange L, Zedler B, Verhoff MA, Parzeller M. Love Death-A Retrospective and Prospective Follow-Up Mortality Study Over 45 Years. J Sex Med. 2017 Oct;14(10):1226-1231. doi: 10.1016/j.jsxm.2017.08.007 Sauvageau A. Autoerotic deaths: a 25-year retrospective epidemiological study. Am J Forensic Med Pathol. 2012 Jun;33(2):143-6. doi: 10.1097/PAF.0b013e3182186a03 Chan HC, Heide KM. Sexual homicide: a synthesis of the literature. Trauma Violence Abuse. 2009 Jan;10(1):31-54. doi: 10.1177/1524838008326478 LIRE aussi : Quand le sexe est responsable de mort subite Quand l’activité sexuelle solitaire tourne au drame « Chemsex » : quand drogues et sexe forment un duo fatal
Des médecins légistes allemands rapportent les circonstances de décès liés à la sexualité et ne relevant d’aucune pathologie préexistante.
https://www.lemonde.fr/blog/realitesbiomedicales/2019/09/17/ces-accidents-mortels-liees-a-lactivite-sexuelle/
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Une image du film « Bacurau », de Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles. CINEMASCOPIO L’AVIS DU « MONDE » - À VOIR Venu de la critique de cinéma, le Brésilien Kleber Mendonça Filho est entré à plus de 40 ans dans la carrière de long-métragiste où il s’est imposé d’emblée comme un auteur de premier plan. Les Bruits de Recife en 2012 (sorti en France en 2014), puis Aquarius en 2016, témoignent ainsi pour un cinéaste à la fois subtil et engagé, qui parvient à faire d’une situation parfaitement triviale liée aux enjeux de l’habitat (une entreprise de sécurité ici, un promoteur immobilier là) une puissante métaphore des rapports de force sociaux. Les artistes, par les fibres particulièrement sensibles qui les relient au réel, sont souvent annonciateurs de phénomènes qui y sont à l’œuvre de manière plus ou moins latente. Entrepris avant l’arrivée au pouvoir de Jair Bolsonaro, Bacurau – troisième long-métrage réalisé avec son chef décorateur Juliano Dornelles – semble ainsi au diapason de la nouvelle donne politique. La subtilité en prend logiquement un petit coup, au profit d’un engagement qui n’a d’autre choix que celui de la frontalité et de l’affrontement mythologique, ne nous embarrassons pas non plus de mots, entre le bien et le mal. Lire l’entretien avec Kleber Mendonça Filho : « Le Brésil est mûr pour inspirer un film d’horreur » Il se passe des choses étranges Ce que Glauber Rocha, grand sorcier et grand poète du Cinema Novo, allait chercher dans le passé (la tradition des bandits d’honneur, la lutte sanglante contre l’autocratie, la dignité et la cruauté folklorique du Nordeste déshérité…), Filho s’essaie à le trouver dans une fable futuriste. Soit Bacurau, village imaginaire du Sertao, situé dans ce polygone de la sécheresse qui rend ses habitants d’autant plus solidaires entre eux, mais d’autant plus dépendants aussi, eu égard à leur faiblesse, des manipulations d’un gouverneur pourri jusqu’à la moelle, qui semble davantage relever du barnum consumériste que de la fonction publique. Lire l’entretien avec Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles : « Au Brésil, notre film “Bacurau” agit comme une catharsis » Or précisément, il se passe des choses étranges à Bacurau. Le camion citerne se fait canarder, des individus sont assassinés sans explication, des motards plus que suspects repèrent les lieux, le village lui-même semble avoir disparu des cartes sur Internet. Progressivement, la raison nous en apparaît. Un groupe d’Américains suprématistes et surarmés – dirigés de surcroît par un psychopathe d’origine allemande (Udo Kier en puissant vecteur de réminiscence nazie) – disposant d’une technologie avancée et de connexions politiques locales, a choisi Bacurau comme terrain de chasse. Une atmosphère de western surchauffé Mais au village, bientôt informé du danger qui le menace, la résistance s’organise sous la houlette de quelques hautes figures de la délinquance locale, tels le braqueur homicide Pacote et le cangaçeiro (bandit) sanglant Lunga. Conférant à leur film une dynamique et une atmosphère de western surchauffé, Filho et Dornelles s’installent sur un territoire cinématographique où semblent se toiser Les Chasses du comte Zaroff (Ernest B. Schoedsack et Irving Pichel, 1932), Antonio das Mortes (Glauber Rocha, 1969) et Mad Max (George Miller, 1979). Le primitivisme villageois (enfouissement terrestre, camouflage, art de la machette et du tromblon, sauvagerie du corps-à-corps) y défie la sophistication technologique (drone de surveillance panoptique, manipulation des données, armes de haute précision).
Ce film de Kleber Mendonça Filho est dans l’air du temps brésilien : violent, manichéen. Mais infiniment plus subtil et intelligent que le pouvoir de Jair Bolsonaro dénoncé en filigrane.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/09/25/cinema-bacurau-une-fable-futuriste-qui-fait-echo-a-l-actualite-bresilienne_6012945_3246.html
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Ce texte est paru dans « Le Monde de l’éducation ». Si vous êtes abonné au Monde, vous pouvez vous inscrire à cette nouvelle newsletter hebdomadaire en suivant ce lien. Tribune. Le baccalauréat va être fortement renouvelé à partir de 2021. Les élèves qui ont fait il y a quelques semaines leur rentrée en classe de 1re auront, à l’occasion du bac 2021, un nombre d’épreuves terminales drastiquement réduit, ce qui était nécessaire pour que le sens de l’examen ne soit pas noyé sous le nombre. Ils auront aussi affaire avec un objet pédagogique encore mal identifié, sous la forme d’une épreuve où on évaluerait (et donc en y formant en amont les élèves) les capacités orales des candidats. Le rapport « Faire du grand oral un levier d’égalité des chances » que Cyril Delhay, professeur d’art oratoire à l’Institut d’études politiques de Paris, a remis en juin au ministre de l’éducation nationale explique en quoi pourrait consister cette épreuve. Ce document rappelle de façon plus générale que son « objectif est que tout élève issu du système scolaire français sache non seulement parler en public mais s’y exerce avec plaisir ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Peut-on faire du « grand oral » du bac un levier d’égalité des chances ? Cette nouveauté est à juste titre présentée comme un défi. Mais mesure-t-on bien ce qu’elle signifie ? Que l’école de France s’apprêterait enfin à préparer des élèves à une des compétences majeures de la vie ? Voit-on bien la force de la nouveauté ? Que ce fondamental qu’est « parler » serait promis à rejoindre les « lire, écrire, compter » dont tant d’acteurs rabâchent pourtant le caractère indépassable ? L’affaire n’est pas simple, car la place de l’oral à l’école en France est riche d’une histoire bigarrée. Le difficile passage des Alpes Cette épreuve a été inspirée du « colloquio » de la maturità italienne, l’équivalent du baccalauréat français. L’original italien vise moins la performance orale en tant que telle que l’approche par l’oral de la culture du candidat. Un emprunt qui a été distordu au passage de la frontière, en recevant à son entrée en Gaule transalpine le nom éloquent de « grand oral ». Les comparatistes internationaux savent bien qu’on n’importe jamais tel quel un concept étranger. Mais pourquoi a-t-il fallu que journalistes et opinion se réfèrent aussitôt à ce rituel-là, à ce « grand oral », épreuve mythique des concours d’entrée, notamment à l’Ecole nationale d’administration ? Résultat : tout le monde a en tête une épreuve formelle, intimidante, discriminante ! Est-ce ce que l’on veut ?
Le nouveau baccalauréat comportera une épreuve orale terminale. « Voit-on bien la force de la nouveauté ? » s’interroge dans une tribune au « Monde » Roger-François Gauthier, expert international en éducation et ancien inspecteur général.
https://www.lemonde.fr/education/article/2019/10/15/oral-du-bac-l-ecole-s-apprete-enfin-a-preparer-des-eleves-a-une-des-competences-majeures-de-la-vie_6015529_1473685.html
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Le président camerounais Paul Biya à Maroua, dans le nord du pays, le 29 septembre 2018. ALEXIS HUGUET / AFP Le président camerounais Paul Biya a annoncé mardi 10 septembre la convocation fin septembre d’un « grand dialogue national » sur le conflit meurtrier entre des groupes séparatistes de la minorité anglophone et les forces de sécurité dans l’ouest, au moment où son régime fait juger pour « insurrection » des leaders de l’opposition. « J’ai décidé de convoquer, dès la fin du mois en cours, un grand dialogue national qui nous permettra (…) d’examiner les voies et moyens de répondre aux aspirations profondes des populations du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, mais aussi de toutes les autres composantes de notre nation », a déclaré le chef de l’Etat, 86 ans et au pouvoir depuis près de trente-sept ans, dans une « adresse à la nation » retransmise sur les antennes de la radio et la télévision nationale. Lire aussi Les régions anglophones du Cameroun sont au bord de la faillite Une annonce saluée par le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qui « encourage le gouvernement camerounais à veiller à ce que le processus soit inclusif et réponde aux défis auxquels le pays est confronté », a déclaré mardi dans un communiqué son porte-parole, Stéphane Dujarric. Plus de 530 000 déplacés depuis début 2017 Le dialogue sera présidé par le premier ministre Joseph Dion Nguté et rassemblera les différentes composantes sociales, y compris des représentants des forces de défense et de sécurité, ainsi que ceux des groupes armés, a assuré M. Biya. En prélude aux assises dont le lieu n’a pas été annoncé, le premier ministre mènera de « larges consultations » et « des délégations [iront] dans les prochains jours à la rencontre de la diaspora », a indiqué le président camerounais. Depuis novembre 2016, les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest sont confrontées à une grave crise sociopolitique, les populations originaires de ces zones s’estimant marginalisées. Il y a plus d’un an, celle-ci a dégénéré en conflit armé entre soldats et séparatistes en lutte pour la création d’un État anglophone indépendant. Les combats et les exactions de part et d’autre ont fait plus de 2 000 morts depuis début 2017, selon Human Rights Watch, et forcé plus de 530 000 personnes à fuir leur domicile, selon l’ONU, dans ces régions peuplées majoritairement par la minorité anglophone qui représente un peu plus de 16 % de la population du Cameroun. Une offre de « pardon » Dans son discours, M. Biya a réitéré son offre de « pardon » aux séparatistes armés qui « déposent volontairement les armes », mais promis à ceux qui s’y refuseraient de subir « toute la rigueur de la loi » et de « faire face aux forces de sécurité et de défense ». Le leader des séparatistes anglophones, Julius Ayuk Tabe, et neuf de ses partisans ont été condamnés à la prison à vie le 20 août. De nombreux observateurs avaient alors estimé que cette condamnation n’était pas de nature à favoriser le dialogue, puisque les séparatistes réclament notamment la libération des prisonniers. Les indépendantistes ont appelé à deux semaines de blocus dans les régions anglophones après ce jugement. « La propagande des sécessionnistes a voulu présenter les décisions de justice récemment rendues à l’encontre d’un certain nombre de nos compatriotes, dans le contexte de cette crise, comme un obstacle au dialogue envisagé. Il n’en est rien », a réagi M. Biya. Bien avant sa condamnation, M. Ayuk Tabe s’est dit ouvert au dialogue, tout en posant comme préalable sa libération, ainsi que celle des autres des prisonniers anglophones. Il a aussi exigé le retrait de l’armée des régions anglophones, une option que Yaoundé n’envisage pas. Le discours de M. Biya a été prononcé alors que son pays est aussi confronté à une autre crise politique. Son opposant à la présidentielle d’octobre 2018, Maurice Kamto, a été arrêté en janvier et est écroué depuis lors. Lui et environ quatre-vingt-dix de ses alliés et partisans sont poursuivis devant le tribunal militaire de Yaoundé pour « insurrection » et outrage au chef de l’Etat notamment. M. Biya n’en a pas parlé dans son adresse à la nation.
Le conflit qui sévit depuis début 2017 dans les provinces anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest a fait plus de 2 000 morts.
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/09/11/crise-separatiste-au-cameroun-paul-biya-convoque-un-grand-dialogue-national_5509043_3212.html
mlsum-fr-94
« The Casketeers », téléréalité diffusée sur Netflix. Netflix, à la demande, série documentaire Quand Six Feet Under (2001-2005) fut annoncée, rares étaient ceux à parier sur le succès d’une série dont le propos était la vie d’une famille de Los Angeles exerçant dans les pompes funèbres. On sait ce que l’avenir a réservé à la création d’Alan Ball, devenue une référence sériephilique. Voici que Netflix propose une série de télé-réalité néo-zélandaise, The Casketeers, qui suit le quotidien de Tipene Funerals, une entreprise funéraire d’Auckland gérée par une famille d’origine maori. Produite et d’abord diffusée par la chaîne nationale Television New Zealand, elle a connu un immense succès là-bas, que le réseau international de Netflix devrait notablement conforter. Cependant, cette immersion dans ce monde réel de la thanatopraxie et de l’équipement funéraire pourra gêner certains, même si les corps des défunts sont filmés avec respect et pudeur – et avec l’accord des familles, pour beaucoup originaires des peuples autochtones du Pacifique (Maoris, Samoans, Tongiens, etc.). Merveilleux sens de l’autodérision « The Casketeers » constitue un cocktail, surprenant mais très réussi, qui mêle la vie assez burlesque et piquante du couple Tipene et de leurs employés à un propos sérieusement documentaire sur ce métier, sur les coutumes et les cérémonies funèbres maories, illustrées par des cas poignants. Comme ceux de jeunes femmes suicidées ou assassinées, de jeunes garçons jumeaux épileptiques morts à deux ans d’intervalle mais aussi d’anciens, parfois illustres (que tout le monde appelle « Tonton » ou « Tata ») dont la mort est saluée de manière aussi vivante qu’éplorée. Ces situations difficiles sont contrepointées par des moments hilarants et par les commentaires de l’irrésistible Francis Tipene. Constamment à la chasse du détail qui tue, il s’exprime avec la componction d’un majordome britannique stylé et autosatisfait mais témoigne cependant d’un merveilleux sens de l’autodérision. Les bisbilles, les incidents (« Ce n’est pas le bon corps ! », « Sa bouche ne ferme pas », etc.) et les commentaires moqueurs dans le dos de Francis constituent des scènes qu’on pourra juger parfois à la limite du mauvais goût (le modèle de cercueil avec lumières clignotantes !) ou de l’humour noir. Mais, ainsi que le glisse Francis, « Si l’on ne rit pas dans ce métier, on devient fou… » « The Casketeers », saisons 1 et 2, série documentaire créée par Annabelle Lee-Harris (NZ, 2018-2019, 6 et 8 x 22 min).
La télé-réalité néo-zélandaise « The Casketeers » fait une plongée dans le monde d’une maison funéraire d’Auckland où règnent la plus grande fantaisie et le plus grand respect pour les défunts.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/07/03/the-casketeers-la-mort-leur-va-si-bien_5484966_3246.html
mlsum-fr-95
Le président de la Réserve fédérale américaine Jerome Powell à Chicago, le 4 juin. Kiichiro Sato / AP « Voyons ce qu’il fera. » C’était la menace à peine voilée lancée mardi 18 juin sur la pelouse de la Maison Blanche par Donald Trump au président de la Fed Jerome Powell. L’agence Bloomberg venait de révéler que le président des Etats-Unis avait réfléchi, cet hiver, à le limoger de son poste à la tête de la Réserve fédérale, M. Powell étant accusé de ne pas baisser le loyer de l’argent aux Etats-unis. On a vu : mercredi 19 juin, Jay Powell n’a pas baissé ses taux d’intérêt lors de la réunion du comité de politique monétaire de la banque centrale, qui restent compris entre 2,25 % et 2,5 %. Et il entend bien rester à son poste. « La loi est claire. J’ai un mandat de quatre ans que j’entends accomplir complètement », a-t-il expliqué en conférence de presse. Donald Trump ne cesse de multiplier les attaques contre celui qu’il a nommé il y a dix-huit mois, mais aussi contre les autres banquiers centraux de la planète. Il s’en est ainsi pris à Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne, qui devrait prendre de nouvelles mesures de soutien de l’économie et a ainsi contribué à la faiblesse de l’euro face au dollar (qui cote 1,13 dollar). Article réservé à nos abonnés Lire aussi Depuis Sintra, passe d’armes inédite entre Mario Draghi et Donald Trump Un renforcement du billet vert qui pénalise les exportations américaines dans le monde, selon Donald Trump – la réalité est plus complexe, les variations de devises ont moins d’impact. Bref, le président américain reproche à M. Draghi de faire pour l’Europe ce qu’il voudrait que M. Powell fît aux Etats-Unis, quitte à oublier que l’Europe n’en finit pas de stagner tandis que les Etats-Unis fêtent leurs dix années de croissance ininterrompues. De « solide » à « modéré » Sur les changes, M. Powell a refusé de prendre position. « C’est le Trésor américain qui est responsable du cours du dollar. Nous n’avons pas d’objectif de cours », a expliqué le président de la Fed, rappelant la mission de son institution : le plein-emploi et la stabilité des prix. Sur le premier objectif, tout va bien, avec un taux de chômage au plus bas depuis 1969, le retour à l’emploi des communautés défavorisées et des salaires en hausse équivalant aux gains de productivité et de l’inflation. En revanche, rien ne tourne comme prévu du côté de l’inflation, qui reste trop basse, bien en deçà des 2 % de moyenne ciblés par la banque centrale américaine. Les prix à la consommation hors alimentation et énergie ont progressé de seulement 1,6 % sur un an en avril, et les membres de la Réserve fédérale n’espèrent pas un rebond au-delà de 1,8 % à moyen terme. Pis, s’ajoutent la baisse du moral des entreprises et un investissement médiocre.
Le président de la banque centrale américaine a toutefois ouvert la voie à de possibles ajustements d’ici à la fin de l’année, face à un environnement économique de plus en plus incertain.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/06/19/attaquee-par-trump-la-fed-ne-baisse-pas-ses-taux-immediatement_5478727_3234.html
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Tribune. Nous observons depuis quelque temps une véritable avalanche de livres et d’articles sur la crise du capitalisme, annonçant sa disparition ou son dépassement. Ceux qui sont assez âgés pour se souvenir des années 1990 ne manqueront pas de relever l’étrange similarité de cette vague récente avec la littérature de l’époque soutenant que nous étions parvenus à la fin hégélienne de l’histoire. Les analyses d’alors se sont révélées erronées. Je pense que la littérature actuelle sur la question commet une erreur sur les faits et établit un diagnostic inexact du problème. « Le capitalisme a créé des marchés totalement nouveaux et marchandisé des choses qui n’avaient jusque-là jamais fait l’objet de transactions » Les faits ne pointent en rien vers une crise, mais révèlent au contraire un capitalisme d’une puissance jamais atteinte jusqu’ici, tant en termes de son ampleur géographique que de son expansion dans des secteurs (comme les loisirs ou les médias sociaux) où il a créé des marchés totalement nouveaux et marchandisé des choses qui n’avaient jusque-là jamais fait l’objet de transactions. Géographiquement, le capitalisme est désormais le mode de production dominant (et même le seul) sur toute la planète, que ce soit en Suède, où le secteur privé emploie plus de 70 % de la main-d’œuvre, aux Etats-Unis, où il en emploie 85 %, ou en Chine, où le secteur privé (structuré de façon capitaliste) produit 80 % de la valeur ajoutée. Cela n’était manifestement pas le cas avant la chute du communisme en Europe orientale et en Russie, ni avant que la Chine ne s’embarque dans ce que l’on a appelé par euphémisme une « transformation », mais qui était en réalité un remplacement du socialisme par les rapports capitalistes de production. Nouvelle expansion capitaliste Par ailleurs, grâce à la mondialisation et aux révolutions technologiques, des marchés jusqu’alors inexistants ont vu le jour : données personnelles, location des véhicules et logements privés (dont aucun ne fonctionnait comme un capital personnel avant que la naissance d’Uber, Lyft et autres Airbnb ne leur permette de générer des revenus), location de bureaux à destination des travailleurs indépendants (marché qui n’existait pas avant WeWork, et se perpétue au-delà des difficultés de cette entreprise), soins aux personnes âgées, aux enfants, aux animaux domestiques, préparation et livraison de plats cuisinés, livraison de courses à domicile, etc. L’importance sociale de ces nouveaux marchés réside en ce qu’ils créent de nouveaux capitaux, et au fait qu’en mettant un prix sur des choses qui n’en avaient pas auparavant ils transforment de simples biens (valeur d’usage) en marchandises (valeur d’échange).
La crise actuelle provient du fait que les Occidentaux profitent moins du capitalisme que précédemment, ainsi que de l’extension de celui-ci à la sphère politique, analyse l’économiste Branko Milanovic dans une tribune au « Monde ».
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/10/11/le-capitalisme-est-devenu-trop-puissant_6015151_3232.html
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Virimi Vakatawa à Tokyo, le 19 septembre. FRANCK FIFE / AFP Une petite boutade du sélectionneur, pour commencer. Jacques Brunel a annoncé « la compo pour ceux qui ne l’ont pas encore eue. » Soit jeudi 19 septembre, au surlendemain d’un article de L’Equipe indiquant l’agencement du XV de France qui disputera son premier match de la Coupe du monde, samedi 21 septembre à Tokyo, contre l’Argentine. Entre autres enseignements : la présence de Virimi Vakatawa dans l’équipe de départ. Quelque chose d’impensable il y a encore peu de temps. Le joueur du Racing a fait son apparition dans le groupe en toute fin de préparation, le 21 août, alors qu’il ne faisait même pas partie des réservistes et que certains Bleus se rodaient déjà ensemble depuis la dernière semaine de juin. Le nouvel appelé remplaçait alors Geoffrey Doumayrou, forfait pour la suite. On l’a vu s’avancer timidement, jeudi, dans la salle du palace tokyoïte où les Bleus donnent leurs interviews. Sweat noué à la taille, le joueur d’origine fidjienne (quoique né en Nouvelle-Zélande il y a 27 ans) a parlé aux chaînes de télévision, attendant patiemment son tour. Pas forcément l’exercice qu’il affectionne le plus. Lire aussi XV de France : Brunel choisit de titulariser Ntamack et Vakatawa pour lancer la Coupe du monde Mais c’est ainsi : le voilà maintenant titulaire, et donc exposé au pensum médiatique. Cette fois, il doit sa place sur le terrain à la blessure de Wesley Fofana, toujours touché à une cuisse et ménagé contre l’Argentine. La blessure de ce dernier ayant eu une « complication », la titularisation de Vakatawa allait de soi, selon Brunel. « Il a montré beaucoup de qualités, beaucoup de présence depuis son arrivée. » L’entraîneur cite les « entraînements », comme le match amical contre l’équipe japonaise des Yamaha Jubilo, la semaine passée : une victoire « douze essais à trois », selon le décompte du capitaine Guilhem Guirado, sans davantage de précision sur les marqueurs d’essais. Ce sont peut-être ses coéquipiers qui en parlent le mieux. Ils évoquent d’abord un homme plutôt en retrait dans le vestiaire. « Virimi, on le connaît. Il se sent déjà gêné d’être ici, plaisante Yoann Huget. Il dit’’bonjour’’, ’’excuse-moi’’, toujours en train de se faire pardonner. C’est quelqu’un qui est très discret. » Un joueur qui a aussi « des qualités hors normes », poursuit ce même Huget : « C’est un joueur derrière lequel nous, en tant qu’ailiers, on peut se mettre. On sait qu’il est à tout moment capable de faire une passe qui sort de derrière les fagots, donc à nous de rester vigilants pour avoir un maximum de ballons derrière Virimi. » Egalement à Rio de Janeiro Jacques Brunel s’appuie aussi sur le test-match d’il y a trois semaines contre l’Italie, malgré la faiblesse de l’adversaire (47-19). « Sur ce match, vu ce que Virimi a montré, on a préféré le mettre sur cette première rencontre » contre l’Argentine. Une autre alternative à Fofana existait pourtant, avec Sofiane Guitoune, finalement remplaçant. Avant ce récent match contre l’Italie, la dernière apparition de Vakatawa en équipe de France remontait à fort longtemps. Il avait été aperçu sur le terrain en Ecosse, au mois de février 2018. Encore que. C’est à se le demander, tant il avait alors semblé en difficulté… L’international (18 capes) rebondit au moment où ne l’attendait plus. Comme souvent avec lui. Pendant trois saisons, le trois-quarts (qui peut aussi jouer à l’aile) n’a connu aucun club. De 2014 à 2017, il faisait partie des rares joueurs sous contrat fédéral avec l’équipe de France à VII. Le temps de disputer les Jeux olympiques 2016 de Rio, sans médaille à l’arrivée. Mais aussi d’effectuer ses débuts avec l’équipe de France de rugby à XV, quelques mois plus tôt, à l’initiative de Guy Novès, alors sélectionneur : déjà une victoire sur l’Italie, avec un essai en prime. En ce temps-là, la présence de Vakatawa avec les Bleus du XV relevait presque du symbole : l’homme s’entraînait toute l’année au Centre national du rugby, à Marcoussis, avec ses camarades du VII. De quoi plaider pour l’extension des contrats fédéraux aux quinzistes ? Ce projet reste aujourd’hui encore chimérique, face à l’opposition des clubs.
Le trois-quarts centre sera titulaire samedi contre l’Argentine pour les débuts des Bleus dans le Mondial, au Japon. L’ancien joueur de l’équipe de France à 7 revient de loin.
https://www.lemonde.fr/rugby/article/2019/09/19/coupe-du-monde-de-rugby-2019-virimi-vakatawa-un-retour-surprise-au-sein-du-xv-de-france_5512224_1616937.html
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Ce guide a été rédigé par la rédaction de Wirecutter (groupe New York Times) et traduit par Le Monde. Les produits sont sélectionnés de manière indépendante. Le Monde et Wirecutter perçoivent une rémunération lorsqu’un de nos lecteurs procède à leur achat en ligne. En savoir plus Ce test a été réalisé aux États-Unis et a été initialement publié en anglais sur le site Wirecutter. Vous pouvez le lire ici en version originale. Nous avons consacré une cinquantaine d’heures à tester treize modèles de gourdes pour enfants, qu’ils soient tout petits ou préadolescents. Résultats : pour les modèles en acier inoxydable, nous recommandons la Thermos Funtainer dotée d’une paille (35 cl), pour la version plastique, nous conseillons la CamelBak Eddy Kids (35 cl également). La Takeya Actives Kids isotherme, avec un capuchon à paille et une contenance de 40 cl, est également un excellent choix en acier inoxydable pour les enfants un peu plus grands (et, pourquoi pas, les adultes). Ces trois modèles sont particulièrement pratiques à utiliser pour les enfants, et plus faciles à nettoyer que les autres gourdes que nous avons examinées. Soit autant d’obstacles en moins pour une bonne hydratation de vos bambins. La Thermos Funtainer avec paille est notre modèle favori pour les enfants, parce qu’elle est la plus facile à utiliser. Nos testeurs les plus jeunes sont parvenus à l’ouvrir et la fermer tout seuls et son capuchon à bouton-poussoir permet d’éviter d’avoir à poser de petits doigts sales sur sa paille. Il empêche aussi les fuites et limite le risque de salir la paille lorsque la bouteille tombe au sol, par comparaison avec d’autres modèles que nous avons testés. La Thermos Funtainer n’est composée que de quatre pièces, ce qui en fait l’une des gourdes les plus simples à démonter pour le nettoyage. De surcroît, elle peut être mise au lave-vaisselle dans le panier supérieur. La technologie d’isolation sous vide permet de conserver une boisson fraîche pendant une douzaine d’heures et ce modèle coûte généralement bien moins cher que d’autres gourdes isothermes. La Takeya Actives Kids avec capuchon à paille (40 cl) est une gourde isotherme, avec un bec que les enfants peuvent ouvrir et fermer en toute sécurité. Tout comme la Thermos, elle ne comporte que quatre pièces, faciles à démonter puis à ré-assembler après nettoyage. Ceci dit, seul le couvercle en plastique peut être passé au lave-vaisselle. La double paroi de la Takeya Actives Kids conserve les boissons au frais pendant des heures. Ce modèle est plus onéreux que nos autres premiers choix, mais il nous semble que sa capacité légèrement supérieure, son débit plus rapide et le choix de coloris vifs sans être enfantins plairont aux préadolescents, voire aux adultes qui voudraient une gourde de petite taille. D’ailleurs, ce modèle figure parmi nos premiers choix dans notre guide d’achat de gourdes pour adultes, dans une version plus grande (71 cl). La CamelBak Eddy Kids (35 cl) est résistante. Étant en plastique, elle est la plus légère de nos recommandations. Son bec est facile à ouvrir et fermer et, grâce à la valve qu’il faut pincer entre les lèvres pour boire, c’est le seul modèle qui ne fuit pas même quand il est tenu à l’envers avec le bec ouvert. Toutefois, si l’on tire sur la valve, si on la décale, on s’expose à un risque de fuites. En outre, cette valve ne résistera pas à un enfant qui la mâchouillerait à répétition (mais elle est remplaçable). Cette gourde peut passer au lave-vaisselle et elle se démonte facilement pour être nettoyée, quoique les stries à l’intérieur de la valve nécessitent d’être un peu plus méticuleux qu’avec la paille du modèle Thermos. Si votre enfant est du genre à jouer avec le bec, mieux vaut privilégier la Thermos Funtainer ou la Takeya Actives Kids. Le test complet Pourquoi nous faire confiance À qui s’adressent ces gourdes ? Comment nous avons fait nos choix Comment nous avons fait nos essais Notre premier choix : la gourde Thermos Funtainer en acier avec paille (35 cl) Les défauts non rédhibitoires de notre premier choix en acier On recommande aussi : la gourde Takeya Actives Kids isotherme à paille (40 cl) Notre premier choix de gourde en plastique pour enfant : la CamelBak Eddy Kids (35 cl) Les défauts non rédhibitoires de notre premier choix en plastique Comment en prendre soin La concurrence Sources Pourquoi nous faire confiance Pour préparer ce guide, je me suis appuyée sur les recherches et conclusions du guide des gourdes pour adultes de Wirecutter. J’ai passé en revue les dernières critiques en ligne de bouteilles réutilisables pour enfants et pour adultes publiées sur les sites BabyGearLab, OutdoorGearLab et d’autres encore. J’ai également lu les rapports de santé concernant le bisphénol A, Tritan et autres plastiques, ainsi que ceux sur les besoins d’hydratation des enfants. J’ai consulté un panel de trente parents et professionnels de l’enfance, via des communautés locales sur les réseaux sociaux et en personne, pour comprendre leurs doléances, leurs besoins et leurs conseils. J’ai aussi parlé avec les premiers concernés, les enfants, de leurs bouteilles et de celles de leurs copains. J’ai été publiée par le San Francisco Chronicle et d’autres grands journaux, et j’ai écrit de nombreux articles sur la famille et l’éducation pour des sites tels que Family Circle, Working Mother et Salon. Je suis également l’auteure des guides Wirecutter sur les sacs à langer et sur les applis pour garder la main sur le smartphone de votre enfant (en anglais). Je suis mère de trois enfants âgés de 3, 9 et 11 ans. À nous tous, nous avons acheté, perdu et remplacé un certain nombre de gourdes… Il faut dire que nous nous en servons tous les jours pour l’école, les activités sportives et les sorties au terrain de jeux. À qui s’adressent ces gourdes ? Ce guide couvre les bouteilles réutilisables pour enfants, depuis les bambins qui quittent tout juste biberons et tasses antifuites, aux élèves d’école primaire. Ces gourdes sont plus que de simples versions en taille réduite de notre sélection pour les adultes : elles sont conçues pour que les petits puissent s’en servir sans assistance, elles sont suffisamment compactes pour les cartables et assez solides pour résister à de nombreuses chutes, tout en étant faciles à nettoyer pour les parents et à prix raisonnable s’il faut les remplacer. Les adultes en quête d’une bouteille plus petite et plus facile à transporter pourraient bien également trouver leur bonheur ici. À partir de l’âge de dix ans environ, les enfants ont besoin de consommer davantage d’eau et vous pourriez vouloir opter pour une gourde à plus grande contenance, surtout s’ils pratiquent une activité sportive. Pour cela, rendez-vous dans notre guide d’achat des meilleures gourdes pour remplacer les bouteilles jetables. WIRECUTTER / ROZETTE RAGO La bouteille d’eau est un indispensable pour les enfants, que ce soit pour l’école, le centre aéré, le sport, une sortie en plein air, la voiture ou tout simplement la table de chevet. Les plus petits peuvent être amenés à en emporter une aussi à la crèche ou à l’école maternelle, ce qui nécessite qu’ils parviennent à l’ouvrir et la fermer tout seuls. Nous avons passé en revue les gourdes en nous fondant sur les critères suivants : Facilité de nettoyage : Les gourdes des enfants se salissent vite et accumulent la crasse. Il faut donc un modèle composé de peu de pièces, facile à démonter et à laver à la main. Nous avons écarté les flacons avec des stries étroites, qui tendent à favoriser l’installation de moisissure, et nous avons estimé que la possibilité de les passer au lave-vaisselle était un bonus non négligeable, mais pas une condition sine qua non. Facilité d’utilisation : Nous avons étudié des contenants de 32 à 47 cl, suffisamment compacts pour tenir dans un sac à pique-nique pour enfants, comme entre de petites mains. Un bambin de deux ou trois ans devrait être en mesure d’ouvrir la gourde, de boire dedans et de la refermer tout seul. Nous avons privilégié les becs à paille, qui sont les plus simples d’utilisation pour les petits. Résistance aux fuites : Il n’existe pas de gourde 100 % antifuite ou parfaitement immunisée contre les renversements. Nous avons donc recherché les modèles qui coulent le moins. Matériau : Nous avons pris en compte les gourdes en plastique et en acier inoxydable. Celles en plastique étant plus légères, les enfants risquent moins de les laisser échapper ou de se plaindre qu’elles sont trop lourdes. Elles permettent également de voir plus facilement la quantité de liquide restant à l’intérieur et sont généralement moins chères. D’aucuns s’interrogent sur l’impact des bouteilles en plastique sur la santé (en anglais). Il n’y a pas de preuve concluante de leur nocivité à ce jour, mais l’acier inoxydable demeure une autre bonne option au besoin. D’autant que les gourdes en acier sont souvent plus solides que celles en plastique : certes, elles se cabossent et s’éraflent plus facilement, mais elles durent des années. Nombre de ces modèles, dont les derniers que nous avons testés, sont isothermes et conservent la fraîcheur des boissons pendant plusieurs heures. Nous n’avons pas étudié les bouteilles réutilisables en verre, qui sont dans l’ensemble plus lourdes et plus fragiles. La plupart des couvercles que nous avons vus sont faits d’une combinaison de plastique, d’acier et de silicone, ce qui leur permet d’être mis au lave-vaisselle. Étant donné que beaucoup d’enfants aiment à mâchouiller la paille et sont généralement peu tendres avec leur gourde, nous avons accordé des points en sus à celles dont les pièces sont remplaçables. Prix : Les risques que votre enfant perde sa gourde (voire deux ou trois gourdes) sont très élevés. Nous avons donc privilégié des modèles à 25 euros ou moins. Nous avons constaté, au cours de nos recherches, que les modèles coûtant plus n’étaient pas particulièrement meilleurs ni plus pratiques que ceux dans notre gamme de prix. Enfin, nous avons réduit la liste des possibles en consultant nos collègues de Wirecutter qui ont des enfants et en privilégiant les recommandations les plus populaires pour notre première série de tests, à savoir : • La CamelBak Eddy Kids (35 cl ; plastique et acier), • La Contigo Gizmo Flip à bec automatique et paille (41 cl ; plastique et acier), • La Klean Kanteen Kid Classique Sport (35 cl ; acier), • La Thermos Funtainer avec paille (35 cl ; acier). Pour la mise à jour 2019 de ce guide, nous avons testé sept nouvelles gourdes en plastique et en acier : • La Hydro Flask Kids à large goulot (35 cl ; acier), • La Nalgene OTF Kids (35 cl ; plastique), • La Pura Sport Mini (27 cl ; acier), • La Simple Modern Summit (41 cl ; acier), • La Takeya Actives avec couvercle à paille (41 cl ; acier), • La Zulu Chase (41 cl ; acier), • La Zulu Torque (47 cl ; plastique). WIRECUTTER / ELLEN LEE Nous avons utilisé ces gourdes pendant plus de dix heures, les avons laissées dans une voiture au soleil, trimballées à travers le métro dans un sac et baladées au parc. Cette dernière année, nos enfants ont aussi emporté les « premiers choix » du guide 2018 avec eux à l’école tous les jours. Nous nous en sommes tenus à l’eau, même si certains parents remplissent les gourdes de lait ou autre. Pour notre test initial, à maintes reprises, nous avons fait tomber les gourdes dans un bac à sable, depuis une hauteur d’environ soixante centimètres. Le but : observer si le bec s’ouvre facilement et à quel point il se salit (verdict : c’est répugnant). Pour notre récente série d’essais, nous avons également lâché les gourdes sur du parquet, pour noter leur résistance aux accidents entre de petites mains maladroites. Nous avons aussi testé la facilité d’entretien, en désassemblant les parties de la gourde pour les nettoyer à la main. Nous avons passé au lave-vaisselle les modèles qui l’autorisent, pour vérifier que chaleur et pression ne causaient pas de dégâts. Pour ce qui est du test antifuite, nous avons rempli chaque contenant avec environ 200 ml d’eau teintée de colorant alimentaire. Nous avons mis les gourdes dans des pochettes à pique-nique en néoprène et les avons poussées du bord de notre plan de travail dans la cuisine, d’une hauteur d’à peu près 90 cm. Puis, nous avons couché les bouteilles horizontalement sur une feuille de papier absorbant le temps d’une nuit, guettant les traces de fuite au petit matin. Nous avons rempli les gourdes avec de l’eau teintée de colorant alimentaire. Puis, nous les avons couchées sur du papier absorbant le temps d’une nuit, pour voir si du liquide s’en échappait. WIRECUTTER / ELLEN LEE Nous avons testé l’ouverture et la fermeture des gourdes grâce aux services de quinze enfants âgés de 2 à 10 ans. Nous avons rempli les modèles isothermes de 20 cl d’eau avec trois glaçons avant de les placer au soleil à la mi-journée, à une température d’environ 27 °C. Nous avons contrôlé la température de l’eau à intervalles réguliers, tout au long de la période de maintien au frais revendiquée par les marques. (À noter : certains fabricants affirment que leurs gourdes conservent aussi la chaleur des liquides, mais nous n’avons pas mené de test à cet effet.) Trois rédacteurs de Wirecutter ont également fait tester les modèles en lice à leurs enfants pendant plusieurs semaines avant de nous rendre compte de leur expérience. Notre premier choix : la gourde Thermos Funtainer en acier inoxydable avec paille (35 cl) WIRECUTTER / ROZETTE RAGO La Thermos Funtainer en acier inoxydable, dotée d’une paille et d’une capacité de 35 cl, figure en tête de notre classement des gourdes pour enfants tout simplement parce qu’elle coûte moins cher que des modèles du même acabit, tout en offrant plus d’atouts : elle est plus facile à nettoyer que nombre d’autres gourdes à paille, elle est la plus maniable pour de petites mains et elle est la moins sujette aux fuites. De surcroît, son capuchon attaché protège mieux les parties où l’on met la bouche — de la crasse comme des mains sales — que les couvercles d’autres flacons. Et la Thermos Funtainer garde l’eau au frais, tout aussi bien que les modèles isothermes plus coûteux. Elle existe en une variété de couleurs et motifs sympathiques, de Hello Kitty à Star Wars, en passant par des options plus sobres. Parmi les modèles en acier que nous avons testés, la Thermos est l’une des plus faciles à démonter et à nettoyer. Il faut employer une petite brosse en forme de tige, mais le bec transparent et amovible permet de vérifier visuellement que l’on a bien ôté toute la saleté. De plus, il n’y a pas de petites stries difficiles à atteindre sur ce modèle, ce qui limite le risque de moisissure (un problème récurrent avec d’autres références testées). Thermos conseille de laver la gourde à la main, tout en notant qu’elle peut parfaitement passer au lave-vaisselle. D’ailleurs, de nombreux parents (dont certains membres de l’équipe Wirecutter) affirment n’avoir rencontré aucun inconvénient à ne laver la bouteille qu’en machine. La Thermos Funtainer est composée de quatre pièces, qui passent toutes au lave-vaisselle dans le panier supérieur. Mais le fabricant recommande de les nettoyer à la main. WIRECUTTER / ROZETTE RAGO Contrairement aux becs de la CamelBak et de la Takeya Kids, la paille en silicone du modèle Thermos est protégée par un couvercle. Il faut appuyer sur un bouton pour qu’il s’ouvre sur ressort ; l’abaisser et le clipser pour le fermer. Cela se fait sans avoir à toucher la paille. Nos testeurs âgés de deux et trois ans ont trouvé que la Funtainer était la plus facile à ouvrir et à fermer tout seuls et nous avons constaté qu’il y avait moins de risques qu’ils la laissent ouverte par inadvertance. Nos plus petits examinateurs ont rencontré des difficultés avec les capuchons de certains autres modèles, mais ils n’ont guère eu besoin de force ou d’agilité pour ouvrir et fermer celui de la Funtainer. Grâce à ce capuchon bien ajusté, la Thermos Funtainer est la moins sujette au risque de fuite de toutes les gourdes que nous avons testées. Pas d’écoulement lorsque nous l’avons laissée à l’horizontale toute une nuit, ni lorsque nous l’avons fourrée dans un sac pour partir en vadrouille. Même quand nous avons réitéré ces tests en 2019 avec une Funtainer bien utilisée depuis déjà un an, le capuchon est demeuré complètement étanche. Le capuchon de la Thermos Funtainer lui vaut la palme de la gourde la plus facile à ouvrir et à fermer par les enfants. Il évite aussi les fuites et garde les petits doigts sales à distance de la paille. CRÉDIT : WIRECUTTER/ROZETTE RAGO Le capuchon permet aussi que la paille de la Thermos demeure plus propre que les becs d’autres gourdes testées. Quand nous sommes allés au parc, le bouchon est resté fermé malgré huit chutes dans la terre. Et pas un grain de sable n’est venu se coller autour de la paille, contrairement aux CamelBak et Takeya, qui n’ont pas de capuchon protecteur. Même quand la Thermos Funtainer tombe bouchon ouvert, sa paille a moins de chances de toucher le sol que les autres. En effet, la paille est placée plus au centre de la gourde que celles de la CamelBak et de la Takeya, situées près du bord. L’isolation sous vide de la Funtainer garantit un maintien au frais aussi efficace (voire meilleur) qu’avec des modèles isothermes plus onéreux. Nous avons rempli la Thermos Funtainer d’eau avec trois glaçons et l’avons laissée dehors au soleil, à la mi-journée, par une température avoisinant les 27 °C. Sa performance égale celle de la Takeya ou de la Hydro Flask, plus chères. Après cinq heures passées au soleil, l’eau dans la Thermos était encore à quelque 15 °C, ce qui correspond aux résultats des autres gourdes. Après douze heures (durée pendant laquelle la marque garantit la fraîcheur), l’eau était à 18 °C, soit plus fraîche qu’avec d’autres modèles isothermes. Après plus d’un an d’utilisation, nous pouvons dire que le flacon et les différentes parties de la Thermos sont résistants. De nombreux utilisateurs ont noté en ligne que la paille peut endurer des mois de maltraitance et de mâchouillage, mais qu’elle est facile à remplacer (commentaires en anglais) quand elle finit par succomber (nous vous conseillons tout de même de vérifier le numéro de série de votre modèle pour vous assurer de la compatibilité des pièces vendues séparément). Les défauts non rédhibitoires de notre premier choix en acier Si on ne ferme pas complètement le bouchon de la Funtainer et que la bouteille se renverse ou se retourne, l’eau s’écoule librement de la paille, comme relevé par de nombreux utilisateurs (en anglais). Cependant, c’est un problème qui survient assez peu puisque le couvercle est facile à clipser, même pour les enfants. En moins d’une semaine (et à force de malmener la gourde), nous avons observé des éraflures sur la Thermos. Elles sont certes superficielles, mais aucune autre bouteille n’a été aussi visiblement abîmée en aussi peu de temps. Les consommateurs sur Internet et un rédacteur de Wirecutter ont également signalé que les dessins imprimés sur le métal s’égratignent facilement. C’est le cas aussi sur la nôtre après un an d’utilisation. D’aucuns se plaignent de moisissures qui apparaissent dans la paille ou ailleurs. Ceci ne semble être le cas que si l’on conserve des liquides dans la Thermos plus longtemps que la durée maximale recommandée (qui est de vingt-quatre heures), si on ne nettoie pas la paille suffisamment vite après usage ou si l’on ne démonte pas les deux morceaux de la paille pour le nettoyage. Certains modèles de Thermos Funtainer ont une poignée accrochée au couvercle par une charnière, pour transporter plus facilement la gourde, ou l’accrocher à un sac à dos. Cette poignée s’est cassée facilement selon certains utilisateurs, dont un éditeur de Wirecutter qui a testé la gourde avec ses trois enfants. On recommande aussi : la gourde Takeya Actives Kids isotherme avec capuchon à paille (40 cl) WIRECUTTER / ROZETTE RAGO Pour les enfants plus grands (ou les adultes) à la recherche d’une gourde solide et isotherme avec une contenance un peu plus élevée, un bec au débit plus rapide et une allure un peu plus « adulte », la Takeya Actives Kids avec couvercle à paille (40 cl) est un excellent choix. Ceci étant, elle vaut en général deux fois plus cher que nos autres recommandations. Elle convient donc mieux aux enfants qui ne risquent pas de la perdre. Le format plus grand de la Takeya et ses couleurs pop (lilas, pastèque et bleu ciel notamment ; vous ne trouverez pas ici de personnages Disney ou autres imprimés) plairont sans doute davantage aux préadolescents et adultes. Nous conseillons d’ailleurs un modèle Takeya semblable dans notre principal guide d’achat de bouteilles réutilisables. Le couvercle à bec de la Takeya est facile à ouvrir et fermer pour un enfant, mais requiert tout de même un peu plus d’habileté que le bouton-poussoir du modèle Thermos. Quand le bec est abaissé, la Takeya ne fuit pas. CRÉDIT : WIRECUTTER/ROZETTE RAGO Le bec de la Takeya se lève depuis le couvercle, mais il est fait d’un plastique rigide et non de silicone souple comme celui de la CamelBak Eddy Kids, notre modèle préféré dans la catégorie gourdes en plastique pour les enfants. Certains enfants (et adultes soit dit en passant) préfèrent boire au bec rigide de la Takeya comparé à la Thermos Funtainer ou la CamelBak, parce que l’eau coule plus librement. La Takeya se prête donc mieux aux enfants qui contrôlent déjà bien le fait de boire à la bouteille, car s’ils la penchent trop, elle pourrait se renverser. Ce bec requiert un peu plus de dextérité, lorsqu’il s’agit de lever et abaisser son ouverture, que le bouton-poussoir de la Thermos. Contrairement à la CamelBak, le bec de la Takeya doit être abaissé pour ne pas fuir et est donc adapté aux petits qui savent le fermer par eux-mêmes (et qui pensent à le faire). Avec le bec bien fermé, la Takeya a réussi notre nuit de test antifuite. La Takeya se démonte en quatre pièces principales : le couvercle, le joint d’étanchéité, la paille et le flacon. On peut aussi retirer le pare-choc en silicone à la base de la bouteille si on souhaite nettoyer en-dessous. WIRECUTTER / ROZETTE RAGO La Takeya (à gauche) est équipée d’un couvercle à bec, plutôt que d’une paille comme la gourde Thermos. L’eau coule ainsi plus vite et plus librement. Elle se prête donc mieux aux enfants un peu plus grands. WIRECUTTER / ROZETTE RAGO La Takeya est facile à nettoyer et est composée de quatre pièces principales : le couvercle en plastique, le joint d’étanchéité, la paille et le flacon (qui est doté d’un pare-chocs en silicone amovible à sa base, pour un meilleur nettoyage si besoin). Son bec inclinable rencontre les mêmes soucis de propreté que la CamelBak : la poussière, le sable et la crasse peuvent s’accrocher et s’agglomérer dans la zone autour du bec. Heureusement, on peut placer le couvercle en plastique dans le panier supérieur du lave-vaisselle, mais il faut laver le flacon lui-même à la main. L’intérieur du bec peut être un peu délicat à nettoyer. Comme avec la Thermos, il faut une petite brossette fine pour atteindre l’intérieur. L’isolation sous vide à double paroi conserve l’eau glacée aussi fraîche que la Thermos et son large goulot permet d’y glisser des glaçons aisément. Notre premier choix de gourde en plastique pour enfant : la CamelBak Eddy Kids (35 cl) WIRECUTTER / ROZETTE RAGO Si vous préférez une gourde en plastique légère, la CamelBak Eddy Kids (35 cl) est notre premier choix. Elle est plus facile à démonter pour le nettoyage que la Thermos Funtainer en acier. Elle ne comporte que quatre pièces (une valve à pincer, une paille, un couvercle et le flacon). Nous avons ôté la valve facilement et l’avons remise en quelques secondes, ce qui est pratique dans la mesure où l’intérieur de la valve nécessite un récurage rigoureux. La gourde entière peut être mise dans le panier supérieur du lave-vaisselle sans contre-indications, contrairement à la Thermos ou la Takeya. Grâce à sa valve souple, la CamelBak Eddy Kids est le seul modèle testé qui n’a pas fui lorsque nous l’avons penché, ni quand les enfants l’ont tenu à l’envers, même avec le bec ouvert. Pour faire couler l’eau lorsque l’on boit, il faut légèrement mordre la valve. Sinon, elle reste close. (Certes, un enfant déterminé pourrait la pincer avec ses doigts pour en faire sortir l’eau, mais ce n’est pas si facile à faire.) La feuille de papier absorbant sur laquelle a reposé la CamelBak couchée pour notre test antifuite était parfaitement sèche au petit matin. Selon les parents qui l’utilisent, la valve en silicone de qualité médicale résiste aux mâchouilleurs et plusieurs estiment que cela encourage même les enfants à boire davantage d’eau (avis d’utilisateurs en anglais), peut-être parce que les enfants peuvent contrôler la quantité d’eau qui en sort. La CamelBak Eddy Kids se démonte facilement et compte quatre morceaux, qui peuvent se placer dans le panier supérieur du lave-vaisselle. WIRECUTTER / ROZETTE RAGO La CamelBak Eddy Kids est simple aussi à utiliser pour les enfants en bas âge. Grâce à sa charnière en plastique parfaitement dimensionnée, nos testeurs sont aisément parvenus à lever le bec, large et souple, pour l’ouvrir et boire quelques gorgées. Contrairement à la Thermos Funtainer cependant, tous nos testeurs de deux ou trois ans n’ont pas réussi à fermer la CamelBak Eddy Kids du premier coup… il leur aura fallu deux ou trois essais. Mais, sachant que la CamelBak ne fuit pas quand son bec est ouvert, cela ne nous inquiète pas outre mesure. Et certains utilisateurs précisent que leurs enfants, parfois de moins de deux ans, n’ont eu aucun problème à comprendre comment utiliser la valve à mordre. Légende : Au cours de nos essais, la CamelBak Eddy Kids n’a pas fui, même lorsqu’on la tenait à l’envers. CRÉDIT : WIRECUTTER/ROZETTE RAGO Initialement, lorsque nous avons pratiqué le test antifuite sur la CamelBak en la tenant à l’envers, un petit filet d’eau s’est échappé de l’arrière du bec. Nous avons contacté CamelBak : leurs gourdes étant garanties à vie et ce problème relevant du défaut de fabrication, nous leur avons renvoyé notre exemplaire et en avons reçu un nouveau. Ni le deuxième modèle ni la version en acier inoxydable n’ont présenté de fuite. Les parents louent la longévité de la CamelBak et sa résistance aux chutes et autres maltraitances des enfants (commentaire en anglais). Et, tout comme la Thermos Funtainer, elle existe en une variété de couleurs et de joyeux motifs. Les défauts non rédhibitoires de notre premier choix en plastique CRÉDIT VIDÉO : WIRECUTTER/ROZETTE RAGO Les avis des parents sont partagés concernant la valve de la CamelBak Eddy Kids. Certains signalent l’apparition de moisissure à l’intérieur de la valve si on ne la lave pas quotidiennement. Pourtant, nous avons interrogé plusieurs parents qui remplissent la gourde de smoothie et n’ont jamais eu de problème de nettoyage. Un éditeur chez Wirecutter et d’autres usagers qui ont commenté en ligne signalent aussi (en anglais) que leur enfant tend à tirer sur la paille ou à la pousser vers le bas, ce qui la déplace et risque de causer des fuites. Pour fermer la gourde, il faut s’assurer que le bec est abaissé et, même si le levier est en plastique, la plupart des enfants ont tendance à utiliser leurs doigts (potentiellement sales) pour baisser le bec. (La gourde Thermos Funtainer est la seule que nous avons testée dont le mécanisme de fermeture maintient les doigts à distance du bec ou de la paille.) Les enfants adorent par ailleurs mâchouiller le bec en silicone souple, ce qui peut endommager (en anglais) l’étanchéité de la valve et causer des fuites ou la salir plus rapidement. Après environ un an d’utilisation de ce modèle, nous avons constaté qu’il fallait remplacer la valve. Cette pièce est facile à trouver et peu coûteuse. Comment en prendre soin Entretien Le bec et la paille de la gourde d’un enfant accumulent inévitablement des saletés. Nous recommandons de les nettoyer méticuleusement avec une brossette à biberon et du bicarbonate de soude ou du vinaigre (en anglais). Lors de nos recherches préalables pour le guide d’achat des gourdes pour adultes, nous avons établi que le meilleur kit d’entretien pour les bouteilles était l’ensemble OXO Good Grips Water (qui peut être mis au lave-vaisselle). Il comporte une grande brosse à bouteille, une brosse fine comme une paille et une petite brosse incurvée pour un nettoyage précis. Pour nettoyer à fond la valve de la gourde CamelBak, la marque conseille de remplir un pot d’eau avec une goutte de savon doux ou une cuillère de produit nettoyant, de placer les pièces détachées dans le pot et de secouer pendant trente secondes. Laisser reposer une quinzaine de minutes avant de rincer et faire sécher à l’air libre. La concurrence Nous avions précédemment recommandé la Klean Kanteen Kid Classique Sport en acier inoxydable pour les grands enfants et nous l’estimons toujours beaucoup. Elle est plus légère que la Thermos Funtainer et la Takeya Actives Kids, tout en étant solide : elle a survécu à des excursions au parc et a été malmenée sans arborer pour autant la moindre bosse. Notre principal souci, c’est le risque de fuites. Nous avons testé la Klean Kanteen avec le bouchon pour le sport, qui n’est pas garanti antifuite selon la marque. Si on laisse la gourde couchée trop longtemps, un peu d’eau peut s’en échapper. (On peut aussi se procurer un capuchon à bec ou un bouchon classique avec une poignée.) Nos testeurs, âgés de deux et trois ans respectivement, ne sont pas parvenus à fermer correctement le bouchon tout seuls. Au fil du temps, il devient d’ailleurs de plus en plus difficile de presser le bouchon de sport de la Klean Kanteen pour le fermer complètement. En 2018, CamelBak a lancé une version en acier inoxydable isotherme de l’Eddy Kids. Pratique : les couvercles sont interchangeables entre les modèles en plastique et en acier. Au cours de nos essais pour tester l’isolation, la CamelBak en acier inoxydable s’est montrée aussi efficace que la Thermos Funtainer pour conserver la fraîcheur de l’eau. Dans l’ensemble, nous préférons la Thermos Funtainer, mais si vous souhaitez posséder un modèle en plastique et un autre en acier, avec des bouchons interchangeables, alors la CamelBak est à envisager. Nous avons testé la Pura Sport Mini isolée sous vide avec un manchon (27 cl). La Pura est dotée d’un bec en silicone à couvercle qui se retourne, et qui a été le plus facile à nettoyer de toutes les gourdes que nous avons testées : il est peu strié et se déboîte facilement du couvercle en acier. Mais ce bec mou et souple représente un vrai défi pour parvenir à fermer solidement le couvercle sur l’ouverture. Notre testeur de trois ans n’a pas réussi à le verrouiller et même l’un de nos testeurs de neuf ans s’est plaint que le capuchon était difficile à sceller. La Zulu Torque en plastique (47 cl) et la Zulu Chase en acier inoxydable isotherme (40 cl) sont des flacons aux couleurs vives qui ont attiré l’œil de nos petits en maternelle comme des préadolescents. Ces deux modèles comptent parmi les moins chers de ceux que nous avons testés, pour un excellent rapport qualité-prix : la Zulu Torque est vendue avec un manchon en silicone offrant une meilleure prise en main, tandis que la Zulu Chase a conservé la fraîcheur de nos boissons tout aussi efficacement que les modèles isothermes plus onéreux. Les deux ont bien résisté quand elles ont été rudoyées, mais il nous a tout de même fallu remettre en place la charnière du capuchon en plastique à un moment donné. De surcroît, les deux modèles comportent des rainures nécessitant un entretien minutieux, même si la Torque en plastique passe toute entière au lave-vaisselle et que le couvercle de la Chase peut y être mis aussi. Les avis des internautes soulignent en particulier que le bec rectangulaire, long et fin, de la gourde Torque représente un vrai défi à nettoyer (en anglais). Et Zulu ne vend pas de pièces de remplacement. La Hydro Flask Kids à large goulot (35 cl) est très bien notée par le site BabyGearLab (en anglais). D’ailleurs, nous recommandons deux modèles Hydro Flask dans notre guide d’achat dédié aux gourdes pour adultes. Mais elle est la plus chère de tous les modèles pour enfants que nous avons testés, sans pour autant offrir une qualité supérieure. Des commentaires en ligne relèvent aussi qu’elle fuit et qu’elle ne maintient pas l’eau au frais (avis en anglais). Nous avons écarté les versions en plastique comme en acier de la Contigo Gizmo Flip avec un auto-bec à paille. En effet, la paille est difficile à abaisser pour fermer, elle se redresse fréquemment d’un coup, compliquant la tâche même pour nos testeurs âgés de six ans. Ces gourdes Contigo ne sont pas conçues pour être entièrement démontées pour le nettoyage (des vis apparentes joignent les pièces). Elle peut certes être placée dans le panier supérieur du lave-vaisselle, mais elle comporte trop de petites stries difficiles à atteindre même avec une brosse adéquate et cela favorise la moisissure. De fait, il s’agit là du principal reproche fait à ce modèle dans les critiques des utilisateurs (en anglais). Nous n’avons pas testé la Contigo Striker avec un auto-bec à paille, car nombre de commentaires en ligne dénoncent des problèmes de moisissure et de contrôle qualité, ainsi qu’une mauvaise conception qui génère des fuites et le déboîtement de la paille. Les bouteilles Nalgene font depuis longtemps le bonheur des adeptes d’activités en plein air (en anglais) et du camping. Avec seulement deux parties, la Nalgene OTF Kids (35 cl) est l’une des plus faciles à nettoyer. Elle se place aussi dans le panier supérieur du lave-vaisselle. Cependant, nous l’avons trouvée difficile à ouvrir et à fermer : pour plus de sécurité, il faut de la force pour appuyer jusqu’à la fermer avec un clic, et il faut de l’agilité pour mettre en position une fine barre en métal. Comparé aux autres bouteilles, son système de fermeture requiert un trop gros effort. La Simple Modern Summit Kids (40 cl) est peu coûteuse, isotherme et offre toute une gamme de coloris sympathiques. Mais elle a échoué au test antifuite, par deux fois. Nous avons éliminé la Lifefactory en verre (35 cl) parce que les utilisateurs lui reprochent de se fendre, voire se briser, lorsqu’on la laisse tomber. D’aucuns ont aussi constaté que sa paille cessait de fonctionner avec le temps (avis en anglais). Les gourdes SIGG de notre sélection pour adultes se sont cabossées facilement et ne se sont pas montrées efficaces dans l’ensemble. Nous n’avons donc pas pris la peine d’envisager de tester les versions SIGG pour enfants. Sources Récapitulatif D’après notre enquête et nos tests, voici les meilleures gourdes pour enfants : · Notre premier choix en acier inoxydable : Thermos Funtainer en acier inoxydable, avec une paille (35cl) · On recommande aussi : CamelBak Eddy Kids (35cl) · Notre premier choix de gourde en plastique : ·Takeya Actives Kids isotherme, avec un capuchon à paille (40 cl)
Comparatif « Wirecutter ». Que ce soit au terrain de jeu ou à l’école, les enfants doivent rester hydratés. Avec ce guide, adieu les packs de bouteilles jetables et bonjour les gourdes ! En plastique ou en inox, avec ou sans bouton-poussoir, isothermes ou pas, nous avons testé onze modèles de goudes ... Voici nos choix.
https://www.lemonde.fr/guides-d-achat/article/2019/09/27/les-meilleures-gourdes-reutilisables-pour-enfant_6013361_5306571.html
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Le nouveau maire de Madrid, José Luis Martinez-Almeida, élu le 15 juin 2019. OSCAR DEL POZO / AFP Le Parti populaire (PP, droite) a repris, samedi 15 juin, la mairie de Madrid (Espagne), à la faveur d’une alliance avec les élus du parti anti-migrants Vox et des centristes de Ciudadanos. La maire sortante, Manuela Carmena, issue de la gauche mouvementiste, était pourtant arrivée en tête des élections municipales, le 26 mai, obtenant 19 des 57 sièges de conseillers municipaux, un résultat insuffisant cependant pour s’assurer d’une majorité avec l’appoint des élus du Parti socialiste. La liste du PP conduite par José Luis Martinez-Almeida n’avait obtenu, elle, que 15 sièges au conseil municipal. Mais en s’alliant avec Ciudadanos (11 élus) et Vox (4), le candidat de la droite espagnole a été élu maire. Ce vote referme la parenthèse Carmena, qui avait conquis en 2015 la capitale espagnole après plus de vingt ans de domination de la droite. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Espagne, Ciudadanos ouvre la porte à des accords avec l’extrême droite Plusieurs membres de Ciudadanos ont cependant exprimé leur malaise à la suite de la décision de la formation centriste de s’allier avec le PP et Vox. Ada Colau en bonne position à Barcelone A Barcelone, Ada Colau, la maire sortante, devrait être réélue pour un second mandat avec le soutien des huit élus socialistes du conseil municipal et des six élus de la liste que conduisait Manuel Valls aux élections du 26 mai. Les socialistes espagnols et l’ancien premier ministre français veulent faire barrage aux séparatistes catalans. Aux élections du 26 mai, la liste Barcelona en Comu (Barcelone en commun) d’Ada Colau et la Gauche républicaine de Catalogne (ERC) du séparatiste Ernest Maragall ont toutes deux obtenu dix élus au conseil municipal. Il faudra 21 voix pour être élu : si Ada Colau obtient le soutien des huit élus du Parti socialiste de Catalogne et des six élus de la liste Valls, elle sera reconduite pour un second mandat. Si aucun candidat n’obtient 21 voix, la mairie reviendra à Maragall, parce que sa liste a obtenu 5 000 voix de plus que Barcelona en Comu le 26 mai. L’Elysée s’inquiète d’une alliance entre Ciudadanos et l’extrême droite Une alliance en Espagne entre les libéraux de « Ciudadanos et l’extrême droite remettrait en question la coopération politique pour construire un groupe centriste rénové au sein de l’Union européenne », a indiqué samedi l’Elysée à l’AFP, confirmant une information parue dans la presse espagnole. Les libéraux du parti espagnol Ciudadanos doivent siéger aux côtés de la liste Renaissance des partisans du président Emmanuel Macron, qui constitue la principale délégation au sein du groupe centriste « Renew Europe » créé sur les bases de l’ALDE (Alliance des libéraux et démocrates pour l’Europe) au Parlement européen. Dans le même temps, des tractations sont en cours entre partis en Espagne après les élections municipales et régionales du 26 mai et certains soupçonnent Ciudadanos de discuter avec le parti d’extrême droite Vox. « Une plateforme commune entre Ciudadanos et l’extrême droite remettrait en question la coopération politique pour construire un groupe centriste rénové au sein de l’Union européenne », selon la source élyséenne citée par l’AFP. De son côté, Vox a dénoncé une « ingérence française » et a exhorté le gouvernement espagnol à « préserver l’indépendance des Espagnols » et expliquer « les mesures qu’il va prendre ».
La liste du Parti populaire avait obtenu moins de voix que celle de la maire sortante, mais elle a reçu le renfort des formations Ciudadanos et Vox.
https://www.lemonde.fr/international/article/2019/06/15/la-mairie-de-madrid-repasse-a-droite-a-la-faveur-d-une-alliance-avec-l-extreme-droite_5476755_3210.html
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Les points ornant la partie ventrale de la raie manta permettent d’identifier chaque animal au sein d’un groupe. Jerry Arriaga « Zoologie ». Planant dans le grand bleu avec une élégance ineffable, la raie manta a longtemps été considérée comme un animal solitaire. Un nombre croissant d’observations suggérait qu’elle pourrait être un être sociable. Mais pour cet élasmobranche – une sous-classe de poissons cartilagineux comprenant les raies et les requins – la sociologie en restait au stade de l’anecdote. Les raies, qui filtrent le plancton, se regroupent en effet sur les mêmes zones de nourrissage et se réunissent autour de grosses « patates » de corail servant de stations de nettoyage où des petits poissons labres les débarrassent de leurs parasites. On ignorait si ces regroupements étaient uniquement guidés par des contraintes alimentaires et hygiéniques, ou s’ils étaient aussi organisés par des affinités électives. Rassemblements structurés Une étude conduite par une équipe internationale pendant cinq ans sur près de 500 groupes de raies manta des récifs (Mobula alfredi) sur des sites de Papouasie apporte la réponse : ces poissons ne se retrouvent pas par hasard, et des liens de nature sociale structurent leurs rassemblements. Les auteurs de l’étude, publiée dans la revue Behavioral Biology and Sociobiology le 22 août, ont réalisé un patient travail d’identification de chaque individu, grâce aux taches ventrales dont la disposition est unique. Ils ont retracé l’évolution des « réseaux sociaux » pour déterminer si certains individus avaient plus tendance à se retrouver sur un même site, et quand. L’analyse met en évidence deux communautés distinctes, l’une majoritairement constituée de femelles, l’autre mêlant femelles, juvéniles et mâles, ces derniers étant les moins susceptibles de se lier à d’autres congénères d’élection. « Nous comprenons encore très peu de choses sur la façon dont les raies manta vivent leur vie, mais ces interactions sociales semblent importantes dans la structure de leurs populations, souligne Robert Perryman, principal auteur de l’étude, chercheur à la Marine Megafauna Foundation et doctorant à l’université Macquarie (Sydney, Australie). Comprendre leurs relations sociales peut aider à prédire leurs déplacements, leurs stratégies de reproduction et leurs réponses face aux impacts humains. C’est essentiel pour la protection de l’espèce et l’écotourisme. » Rassemblement de raies manta autour d’une « station de nettoyage » où des labres les débarrassent de leurs parasites. Andrea Marshall, Marine Magafauna Foundation « Etudier les comportements sociaux des animaux marins est beaucoup plus difficile que pour la faune terrestre, note Johann Mourier, chercheur (CNRS) au Centre de recherches insulaires et observatoire de l’environnement de Perpignan. Mais on s’aperçoit que, au-delà des cétacés, d’autres espèces chez lesquelles on n’aurait pas soupçonné ces comportements présentent aussi des degrés de socialité. » Lui-même avait mis en évidence en 2012 des liens sociaux chez les requins à pointes noires, avec une méthode similaire à celle employée pour les raies manta. « On parle de fission-fusion, des structures sociales différentes de celles observées chez les mammifères, où les groupes sont plus stables dans le temps », précise le chercheur français. Les liens chez les requins et les raies sont plus labiles, avec des « désagrégations et réagrégations », qui n’empêchent pas sur le long terme des associations préférentielles entre individus. Gros cerveau Même si elle se demande si des facteurs environnementaux, plus que sociaux, ne pourraient pas influencer la composition des regroupements des raies manta, la neurobiologiste Csilla Ari (University of South Florida, Tampa) n’est pas surprise par ces observations. Elle a montré que la raie mata possède le plus gros cerveau de tous les poissons étudiés et que des structures cérébrales vouées à la mémoire, à l’intelligence sociale et à la formation de hiérarchies y sont particulièrement développées : « On pouvait imaginer que les raies avaient probablement des interactions sociales complexes. » De rapides changements de coloration, mis en évidence par la chercheuse, pourraient aussi avoir un rôle de communication sociale, avance-t-elle. En 2016, elle avait publié une étude suggérant que, face à son image réfléchie par un miroir, la raie manta faisait preuve d’un comportement évoquant une forme avancée de conscience de soi. Une hypothèse – récemment proposée aussi pour son comparse, le labre nettoyeur –, qui pour Johann Mourier « reste à confirmer ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi Un petit poisson trouble le test du miroir
L’observation de groupes de ce poisson met en lumière des affinités électives, notamment entre femelles, dont la fonction reste à élucider.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/08/25/la-raie-manta-animal-sociable_5502731_1650684.html